Appel à communication : 
« Représentations de luttes, luttes de représentations » (Paris, 2017-2018)


Depuis 2014, le séminaire des doctorants de l’équipe Images, Sociétés, Représentations (ISOR) du Centre de Recherche en Histoire du XIXᵉ siècle (CRH – Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) se réunit une fois par mois pendant le deuxième semestre universitaire pour encourager les échanges entre jeunes chercheurs travaillant sur des sources audiovisuelles.

Ce séminaire permet de tisser des liens entre jeunes chercheurs à des stades variés de leur recherche (master, début ou fin de thèse) et venant d’universités françaises ou étrangères – Doct’ISOR a ainsi pu accueillir des doctorants de Paris 1, Paris IV, Sciences Po, l’INALCO, Lyon 2 ou encore de l’Université de Genève.

Pour la première fois cette année, le séminaire se concentrera sur une thématique unique : « Représentations de luttes, luttes de représentations ». S’inscrivant dans la continuité des trois axes de réflexion privilégiés lors des précédents séminaires (représentations et imaginaires ; histoire sociale et histoire des médias ; récit, fiction et histoire), ce thème permet toutefois d’amorcer de nouveaux questionnements, plus spécifiques, et clairement ancrés dans une perspective d’histoire sociale. Comment les luttes sociales (mouvements sociaux, controverses, conflits armés ou non, y compris les luttes “moralement inacceptables”) ont-elles été représentées ? Et, à l’inverse, comment les représentations ont-elles fait l’objet de luttes ? Enfin, de quelle manière certains problèmes publics considérés comme le fruit de luttes sociales ont-ils été construits et représentés ?

L’actualité historiographique indique que les luttes suscitent un intérêt renouvelé de la part des historiens[1], tandis que l’étude des représentations continue d’occuper une place importante en histoire sociale et en histoire culturelle. « Par définition politiques et conflictuelles », les représentations sont d’ailleurs étroitement liées au concept de lutte puisqu’elles permettent une « domination symbolique » d’un groupe social sur un autre[2]. Ces deux concepts, luttes et représentations, sont donc à mettre en relation et à étudier l’un avec l’autre afin de voir comment ils peuvent s’influencer. Le séminaire cherchera à encourager une réflexion transnationale et à faciliter un débat inter-périodes et interdisciplinaire.

Plusieurs axes d’études pourront ainsi être envisagés, sans être exhaustifs :

  • La représentation des luttes dans les productions littéraires, artistiques et audiovisuelles[3]. Il pourrait ainsi être intéressant d’ancrer le séminaire dans l’actualité commémorative de l’année 2018 en étudiant les représentations du « Printemps des peuples » de 1848 ou des révoltes de 1968 ;
  • Il s’agira également de considérer ces productions comme des “écritures de l’histoire”, c’est à dire de les étudier dans leur rapport aux sources mais aussi dans leur rhétorique et dans la construction de la forme adoptée pour rendre compte des luttes passées. On pourra ainsi poser les questions suivantes : Quelles sont les sources utilisées ? Quels sont les énoncés produits autour de ces luttes ? Quelles sont les marques de l’énonciation des artistes-historiens ? Quelles sont les formes convoquées pour écrire l’histoire des luttes ? Comment ces œuvres s’inscrivent-elles dans des mémoires mais aussi dans les débats historiographiques ? Quelles conceptions du temps historique sont attachées aux formes et aux mises en intrigues des faits vécus par les témoins[4] puis construits par les artistes-historiens ? Il s’agira de saisir la pluralité des modalités formelles rendant compte des luttes. À quel passé les luttes représentées appartiennent-elles ? À un « passé historique » où les faits ne sont étudiés que pour eux-mêmes et en eux-mêmes ? Ou bien à un « passé utilisable »[5] qui les convoque comme « un espace d’expérience »[6] pour répondre aux questions des luttes d’aujourd’hui : « Que faire ? ». Pensées sous cet angle, les fictions audiovisuelles à thématiques historiques, régulièrement critiquées pour leur présentisme vain, permettraient au contraire, comme invite à y réfléchir Hayden White[7], de donner vie aux fantômes d’un présent encore riche de passé (et peut-être mieux que ne pourrait le faire l’historiographie classique). Cet appel incite les propositions de communications à penser l’écriture de l’histoire des luttes par des images comme un enjeu de luttes[8] ;
  • Les figures de luttes : comment certaines figures incarnent-elles des luttes et comment sont-elles représentées ? On pourra ainsi penser à des figures collectives comme le syndicaliste, l’hygiéniste, l’ouvrier en lutte ou encore à des individus bien précis, connus ou non, et ayant, à un moment donné, symbolisé les enjeux de la lutte à laquelle ils prenaient part ;
  • La représentation des problèmes sociaux et les luttes de représentations auxquels ils donnent lieu[9]. Il pourrait également être intéressant de s’intéresser aux différences de représentations de certaines luttes ou problèmes sociaux d’un pays à l’autre[10].

Le séminaire aura lieu un mercredi par mois, de 17h à 19h au centre Panthéon. Les communications pourront ensuite faire l’objet d’un article pour la revue de l’équipe ISOR, Sociétés & Représentations ainsi que d’une publication dans le carnet de recherches du séminaire sur Hypothèses et aux Archives ouvertes (HAL-SHS).

Les propositions de communications sont à envoyer avant le vendredi 8 décembre 2017 à l’adresse suivante : etudiantsisor@gmail.com. Elles comporteront un intitulé provisoire, un résumé du projet d’intervention (400 mots maximum) et quelques informations relatives à l’auteur permettant aux organisateurs d’échanger avec lui en vue d’une préparation commune de la séance (nom du directeur de recherche, université de rattachement, adresse mail et numéro de téléphone). Pour plus d’informations, rendez-vous sur le carnet de recherche des doctorants d’ISOR (https://isor.hypotheses.org/).

Bibliographie indicative

BANTIGNY Ludivine, « Le temps politisé. Quelques enjeux politiques de la conscience historique en Mai-Juin 68 », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2013 / 1, n° 117

DELUERMOZ Quentin, SINGARAVÉLOU Pierre, Pour une histoire des possibles, analyses contrefactuelles et futurs non advenus, Paris, Seuil, 2016, 448 p.

GUSFIELD Joseph, La Culture des problèmes publics : l’alcool au volant : la production d’un ordre symbolique [traduction et postface par Daniel Cefaï], Paris, Economica, 2009, 354 p.

KOSELLECK Reinhart, Le Futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1990, 334 p.

MILLS-AFFIF Édouard, Filmer les immigrés. Les représentations audiovisuelles de l’immigration à la télévision française (1960-1986), Paris / Bruxelles, INA / De Boeck, 2004, 300 p.

MONNET Pierre, “Représentation(s)” in GAUVARD Claude, Dictionnaire de l’historien, Paris, PUF, 2015, pp. 596-601

NOIRIEL Gérard, Une histoire populaire de la France du XVI siècle à nos jours, Marseille, Agone, 2017, 800 p.

PAVARD Bibia, ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Luttes de femmes. 100 ans d’affiches féministes, Paris, Les Echappés, 2013, 136 p.

SCHRAD Mark Lawrence, The Political Power of Bad Ideas : Networks, Institutions, and the Global Prohibition Wave, Oxford, Oxford University Press, 2010, 302 p.

ST-AMAND Isabelle, La crise d’Oka en récits : territoire, cinéma et littérature, Québec, Presses de l’Université Laval, Coll. « InterCultures », 2015, 296 p.

VIGNA Xavier, L’Espoir et l’effroi. Luttes d’écritures et luttes de classes en France au XX siècle, Paris, La Découverte, 2016, 250 p.

WHITE Hayden, “The Practical Past” (“Le passé utilisable”), in WHITE Hayden, L’Histoire s’écrit, Essais, Recensions, Interviews, textes traduits et présentés par Philippe Carrard, Paris, Editions de la Sorbonne, 2017, pp. 217-239.

ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Les Luttes et les rêves. Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours, Paris, La Découverte, 2016, 1008 p.

 

 

[1] NOIRIEL Gérard, Une histoire populaire de la France du XVI siècle à nos jours, Marseille, Agone, 2017, 800 p. [à paraître] ;

VIGNA Xavier, L’Espoir et l’effroi. Luttes d’écritures et luttes de classes en France au XX siècle, Paris, La Découverte, 2016, 250 p. ;

ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Les Luttes et les rêves. Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours, Paris, La Découverte, 2016, 1008 p.

[2] MONNET Pierre, “Représentation(s)” in GAUVARD Claude, Dictionnaire de l’historien, Paris, PUF, 2015, pp. 596-601.

[3] PAVARD Bibia, ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Luttes de femmes. 100 ans d’affiches féministes, Paris, Les Echappés, 2013, 136 p.

[4] BANTIGNY Ludivine, « Le temps politisé. Quelques enjeux politiques de la conscience historique en Mai-Juin 68 », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2013 / 1, n° 117 ;

ST-AMAND Isabelle, La crise d’Oka en récits : territoire, cinéma et littérature, Québec, Presses de l’Université Laval, Coll. « InterCultures », 2015, 296 p.

[5] WHITE Hayden, “The Practical Past” (“Le passé utilisable”), in WHITE Hayden, L’Histoire s’écrit, Essais, Recensions, Interviews, textes traduits et présentés par Philippe Carrard, Paris, Editions de la Sorbonne, 2017, pp. 217-239.

[6] KOSELLECK Reinhart, Le Futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1990, 334 p.

[7] WHITE Hayden, “The Practical Past” (“Le passé utilisable”), op.cit.

[8] ST-AMAND Isabelle, La crise d’Oka en récits : territoire, cinéma et littérature, Québec, Presses de l’Université Laval, Coll. « InterCultures », 2015, 296 p.

[9] GUSFIELD Joseph, La Culture des problèmes publics : l’alcool au volant : la production d’un ordre symbolique [traduction et postface par Daniel Cefaï], Paris, Economica, 2009, 354 p.

MILLS-AFFIF Édouard, Filmer les immigrés. Les représentations audiovisuelles de l’immigration à la télévision française (1960-1986), Paris / Bruxelles, INA / De Boeck, 2004, 300 p.

[10] SCHRAD Mark Lawrence, The Political Power of Bad Ideas : Networks, Institutions, and the Global Prohibition Wave, Oxford, Oxford University Press, 2010, 302 p.

 

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