Appel à communication : « Le surréalisme et l’objet-livre : héritage, perspectives et enjeux actuels » (Académie Albertina des beaux-arts de Turin – Université Jean Monnet Saint-Étienne, 14-15 mai 2025)

André Breton, Second manifeste du Surréalisme. Frontispice de Salvador Dali, Paris, Editions Kra, 1930, reliure photographique de Paul Bonnet. © Christie’s Images Ltd, 2019.

 

Colloque international

Le surréalisme et l’objet-livre : héritage, perspectives et enjeux actuels

Académie Albertina des beaux-arts de Turin – Université Jean Monnet Saint-Étienne

Mercredi 14 et jeudi 15 mai 2025

 

Le projet Italian Network of Artistic Research (INAR), financé par les fonds du PNRR, vise à explorer et à promouvoir les spécificités du patrimoine de recherche développé au sein des Institutions d’haute formation et de spécialisation artistique et musicale (AFAM), focalisant son attention sur les méthodologies axées sur la pratique, sur les connaissances expérimentales et sur les approches interdisciplinaires de la recherche artistique. Le projet est composé de 5 Work Packages (WP) et la première phase (WP1) comporte la réalisation d’une cartographie de la « recherche artistique » dans le secteur AFAM à travers la création d’un Glossaire qui deviendra une référence pour la consultation. Le glossaire est imaginé comme un outil dynamique, ses entrées proviendront des paroles mêmes employées par les artistes-chercheurs qui, à travers un Entretien/Enquête, révéleront les étapes de leur processus créatif. Comment sa publication pourrait-elle être imaginée de manière créative ? Le livre contenant un Glossaire de la Recherche-Création pourrait-il devenir une œuvre d’art à lui tout seul ?

Conçue en collaboration avec l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, dans le cadre du prestigieux Salon du livre de Turin, le Colloque International relie les thématiques du PNRR et l’histoire de la recherche-création dans l’univers du livre. Événement du programme hors les murs du Salon du livre, en croisant histoire de l’art et de la littérature, le Colloque international retracera le regard révolutionnaire que le mouvement surréaliste a su porter sur l’acte d’écrire comme sur celui de la lecture et de la création artistique du support-livre, que les surréalistes ont réinventé comme un véritable livre-objet d’art. Avec un hommage au surréalisme le Colloque international s’inscrit dans le cadre du centenaire du Manifeste du Surréalisme rédigé par André Breton en octobre 1924, qui continue de résonner avec des initiatives internationales au cours de l’année 2025.

Deux ateliers seront consacrés à la thématique du livre et de la recherche-création. Entre tradition et innovation, ils impliqueront les étudiants de l’Accademia Albertina di Belle Arti de Turin et ceux de l’Université de Saint-Étienne. Le premier workshop sera consacré à la fabrication d’un livre traditionnel. Le deuxième sera focalisé sur l’interaction entre le livre et les nouvelles technologies. Le sujet des deux workshops sera la création d’un wunderbuch, un livre-objet surréaliste, imaginé comme un véritable Glossaire du merveilleux.

Les résultats des deux workshops réalisés par les étudiants seront présentés pendant l’Art Education World Expo (AEWE – WP4 del progetto INAR) prévu en mars 2026.

 

Argumentaire :

« Qu’est-ce qu’un livre ? », une question que nous pourrions demander aux lecteurs d’aujourd’hui, pour ajouter ensuite « Qu’est-ce que pourrait être livre surréaliste ? ». Clin d’œil historique au surréalisme qui avait saisi en son temps le mode de « l’enquête » comme moyen d’investigation et comme véhicule de provocation et de perturbation. L’enquête s’établissait en dehors des préceptes de la bienséance comme, par exemple, celle célèbre où on demandait aux écrivains, poètes et scientifiques « Que faites-vous lorsque vous êtes seul ? ». On doit se souvenir qu’André Breton avait commencé l’aventure littéraire et artistique du futur surréalisme, en proposant dès 1919 d’impliquer les écrivains dans une enquête. Publiée dans la revue Littérature n°9, l’enquête est sous la forme de cette simple question: « Pourquoi écrivez-vous ? ». A cette époque Dada va laisser place au surréalisme et la parution du manifeste en 1924. Que celles-ci soient quotidiennes ou exceptionnelles, automatiques et/ou projetées, inconscientes ou prédestinées, ces enquêtes élaborées par les surréalistes partaient de l’individuel en direction du collectif. Célébrant son centième anniversaire cet automne, sans jamais vieillir, le surréalisme est à la source de bien des formes de l’art moderne et contemporain. Dans cette perspective, il se doit d’être à nouveau interrogé. Pour quelle raison ne pas remettre au centre du jeu le mode de l’enquête auprès des artistes et des écrivains, des membres du groupe, des amis et des gens ordinaires, pour extrapoler des concepts et des réponses comme de véritables formes poétiques ? Pourquoi ne pas tenter de créer à nouveau un glossaire souterrain de la pensée surréaliste ou non. En tout cas, un langage qui nécessitera un support à la hauteur des enjeux que le colloque se propose de questionner.

Dans le cadre du Salon du Livre off et dans le sillage du centenaire du Manifeste du Surréalisme qui vient de s’écouler et qui continue de résonner tout au long de l’année en cours par des événements internationaux, le Colloque international investiguera le thème de la recherche-création dans l’univers du livre, dans une dimension élargie, à travers le regard révolutionnaire qui fut porté sur la lecture, les textes et les images et son médium par le surréalisme

Le surréalisme montre à l’évidence qu’il aura été une formidable fabrique d’objets, de peintures et d’artefacts. Le livre comme éminent support de textes, poèmes ou essais a été très largement questionné et travaillé par les surréalistes. Leur désir de donner à voir avait trouvé dans le domaine de l’édition un univers privilégié. Dans la littérature surréaliste l’irruption de l’image, qu’elle soit à deux ou à trois dimensions, semblerait avoir été nécessaire à la lecture multiple demandée par leurs textes. Qu’on pense à leurs revues, catalogues d’exposition, fascicules, ouvrages, tirages de luxe, poèmes-objet, les surréalistes ont tenté de réinventer l’acte de lire tout autant que les objets eux-mêmes. Les livres produits par les artistes et les poètes sont aussi des objets dont la matérialité, le format ou son usage doit être envisagé. Dans leur quête du merveilleux, les surréalistes avaient imaginé que l’écrit puisse être lui aussi renouvelé par son support, à l’aune de son contexte d’émergence. Aujourd’hui, dans un moment historique qui voit la fiction se substituer à la réalité, le livre surréaliste se révèle à nos yeux comme un objet prophétique, car il a été le précurseur d’une idée de lecture-augmentée et interactive, guidée par l’incursion d’images, d’éléments appliqués ou d’insolites textures, capables de provoquer les associations et les sensations les plus troublantes chez les lecteurs et lectrices. Les collaborations entre les écrivains, écrivaines et les artistes du mouvement, ainsi que les relations entre les auteurs, autrices et leurs éditeurs, seront aussi attentionnées. Un focus sera consacré au lien des surréalistes avec la création des livres pour l’enfance et la jeunesse. On pourrait s’attarder sur la façon dont à travers l’écriture et l’illustration les surréalistes glorifièrent l’âge tendre conférant à la jeunesse une innocence teinté de révolte. La réception d’Alice de Lewis Carroll en est sans doute le parangon, également la production de livres pour l’enfance/jeunesse avec textes et illustrations de différents artistes du groupe, entre autres Desnos, Prévert, Carrington, Cahun, Dali, nous fait comprendre que c’est peut-être dans l’imagination enfantine que subsiste, pour les surréalistes, l’esprit de liberté et de subversion.

Ce colloque international a pour ambition de revenir sur le demi-siècle de création des surréalistes en interrogeant la place du livre, au sens élargi, dans leurs perspectives de renouveler le rapport au savoir, mais aussi aux normes et aux injonctions portées par le pouvoir de l’écrit dans nos sociétés. On pourra discuter du rôle de la reliure tout autant que celui du tirage de tête ou de luxe dans un mouvement qui prônait la révolution ou encore du statut des revues dans une économie de la diffusion. Quels formats, matières, techniques, sont à l’œuvre dans le foisonnement d’inventions éditoriales des surréalistes ? Quelles sont les temporalités des textes sur les supports les plus inattendus ? Comment envisager l’héritage de ces expérimentations et dans quels buts ? Le livre-objet ou l’objet livre sont-ils à même de porter le dérèglement des sens ? Le texte n’est-il pas transformé par le support qui le déploie ? Dans quelle mesure le livre ou tout autre support matériel invente-il le texte qu’il héberge ? Enfin, le texte ne s’est-il pas « artifié » lorsqu’il fut si souvent décliné sur des matériaux et dans des compositions qui lui donnait une autre fonction que celle d’être simplement lu ? En d’autres termes qu’est-ce que le médium a insufflé de nouveau, de pervers, de merveilleux, d’insolite, de réalité augmentée, etc. aux textes à portées poétiques ? Que penser du fétichisme que suscitent les éditions rares et les tirages luxueux ? Il importe, bien évidemment, de situer ce collectionnisme dans le contexte dont il dépend et bénéficie directement. Quels réseaux permettaient l’arrivée de ces objets jusqu’aux collectionneurs ? Quelles contradictions cela soulève-t-il au regard de la posture résolument anti-bourgeoise des surréalistes ? Considérant l’importance des illustrations, des collages, des insertions et des applications de différents éléments à l’intérieur de leurs ouvrages, pourrions-nous parler de méta-littérature ou d’écriture-augmentée pour les livres surréalistes ? De plus en plus rarement aujourd’hui les écrivains font appel aux artistes pour illustrer leurs ouvrages, sous-estimant l’importance de l’interaction entre écriture et image. Comment renouveler ce partenariat créatif ? Quelles étaient les relations entre les écrivains, les illustrateurs et les éditeurs des ouvrages surréalistes ? À quel point ont-elles influencé leur création littéraire et artistique et sa diffusion? Quel été le rapport entre les surréalistes et la création soit littéraire soit graphique dans le secteur des livres pour l’enfance et pour la jeunesse ? En conclusion un regard sur l’actualité nous permettra de réfléchir sur le statut de l’objet-livre aujourd’hui. À l’époque du digital quel-est l’advenir qu’attend l’objet-livre ? Quelles possibilités les nouvelles technologies peuvent-elles permettre à la production des livres et surtout des livres d’artiste ? Comment conjuguer l’acte de lire à celui du voir ou du touché à la façon des surréalistes, dans la littérature et dans l’art contemporains ?

Toutes ces questions, non exhaustives, doivent permettre d’envisager et de mieux saisir la complexité du rapport qu’avaient le mouvement surréaliste et ses protagonistes au livre.

En réunissant des spécialistes internationaux du surréalisme, et du livre, des conservateurs de musée, des universitaires, des artistes et des écrivains ces deux journées aspirent à replacer le livre surréaliste dans le contexte où il a émergé pour mieux en déterminer les enjeux et en renouveler les démarches dans le cadre de l’édition contemporaine.

 

Les communications seront de 30 minutes par participant.

Les langues de la conférence seront le français, l’italien et l’anglais.

 

COMITÉ ORGANISATEUR :

Alba Romano Pace, Académie Albertina des beaux-arts de Turin

Fabrice Flahutez, Université Jean Monnet Saint-Etienne, Institut universitaire de France (IUF)

 

COMITÉ SCIENTIFIQUE :

Alessandro Botta, Accademia Albertina di belle arti di Torino

Valérie Da Costa, Université de Paris 8 Saint-Denis

Alice Ensabella, Université Grenoble-Alpes

Anne Foucault, Centre Pompidou – Musée national d’art moderne

Jacopo Galimberti, IUAV Università di Venezia

Marianne Jakobi, Université Clermont-Auvergne

Alyce Mahon, University of Cambridge (UK)

Abigail Susik, Willamette University (USA)

Olivier Penot-Lacassagne, Université Sorbonne Nouvelle, Paris

Effie Rentzou, Princeton University, (USA)

Iveta Slavkova, American University of Paris

 

Mercredi 14 et jeudi 15 mai 2025

Accademia Albertina di Belle Arti di Torino

Via Accademia Albertina 6 10123 Torino

 

Le Colloque International est réalisé grâce à la contribution de l’Université de Saint-Étienne, France, L’institut Universitaire de France et du PIANO NAZIONALE DI RIPRESA E RESILIENZA (PNRR) – MISSIONE 4 COMPONENTE 1 INVESTIMENTO 3.4, SOTTO-INVESTIMENTO T5 “PARTENARIATI STRATEGICI / INIZIATIVE PER INNOVARE LA DIMENSIONE INTERNAZIONALE DEL SISTEMA AFAM”PROGETTO Codice INTAFAM-00043 Titre “INAR Italian Network of Artistic Research and Art Education World Expo 2026”, financé par l’Unione européene – NextGenerationEU, à l’Accademia Albertina di Belle Arti di Torino, a valere sul PNRR Missione 4 Componente 1 “Potenziamento dell’offerta dei servizi all’istruzione: dagli asili nido all’università” Investimento 3.4 “Didattica e competenze universitarie avanzate”, Sub Investimento T5 “Partenariati strategici/Iniziative per innovare la dimensione internazionale del sistema AFAM” : WP1 – Mapping Artistic Research in Italian AFAM Institutions: practices, methodologies and approaches CUP: I11I23000340006

Les abstracts de 500 mots + une courte bio-biblio seront à envoyer à :

fabrice.flahutez@univ-st-etienne.fr   &   alba.romanopace@albertina.academy

Avant le 1er mars 2025
Les participants retenus seront avertis début avril 2025

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