Appel à publication : Animaux d’artiste. Entre figuration, abstraction et hybridation de la seconde moitié du XXe siècle à nos jours. Revue « Elephant & Castle » (n. 27), Università degli Studi di Bergamo
Numéro monographique : Animaux d’artiste. Entre figuration, abstraction et hybridation de la seconde moitié du XXe siècle à nos jours, revue « Elephant & Castle », n. 27.
Sous la direction de Elio Grazioli (Università degli Studi di Bergamo) et Maria Elena Minuto (Université de Liège; KU Leuven)
Date de limite : Vendredi 18 février 2022
« Io son come un serpente, ogni anno cambio pelle. La mia pelle non la butto ma con essa faccio tutto ».
Pino Pascali, extrait de l’introduction à l’exposition Nuove sculture, Galleria L’Attico, Rome 1966
« Le devenir-animal de l’homme est réel, sans que soit réel l’animal qu’il devient ».
Gilles Deleuze, Félix Guattari, Mille plateaux. Capitalisme et schizophrénie, 1980
La relation controversée entre affection artistique et animalité, interrogée par l’art (Allora & Calzadilla 2013 ; Fritsch, 2013 ; Dion, 2011), la philosophie (Despret 2021 ; Nancy 2014 ; Lestel 2010) et la littérature critique contemporaine (Ramos 2016 ; Teixeira Pinto 2015 ; Niermann 2013 ; Baker, 2000), est un thème prégnant et extrêmement varié, riche en perspectives interdisciplinaires et intermédiales. Des photo-peintures d’antilopes de Gerhard Richter aux installations d’oiseaux empaillés de Maurizio Cattelan, des expositions écosystèmes de Pierre Huyghe aux toiles d’araignée de Tomás Saraceno, le rapport complexe entre les arts visuels et l’imagerie animale continue d’alimenter le débat critique international, en se plaçant au cœur de la réflexion théorique et esthétique contemporain.
Le livre Theater, Garden, Bestiary. A Materialist History of Exhibitions (Garcia, Normand 2019), l’exposition Animals. Respect / Harmony / Subjugation (Museum für Kunst und Gewerbe, Hambourg, 2018), la dOCUMENTA (13) de Kassel et le colloque Zoométries. Hedendaagse Kunst in de ban van het dier (Université de Gand, 2003) ne sont que quelques témoignages significatifs du dialogue recherché entre la recherche artistique et le règne animal au XXIe siècle. La relation entre l’art et le concept d’animalité – question séculaire d’ordre éthique, philosophique, politique et social – trouve certaines de ses racines les plus profondes et les plus mémorables dans l’art d’avant-garde. Les complices de cette captivante lecture à rebours sont le Cobra-Centaur (1952) de Hans Arp, le verre à bière à queue d’écureuil de Meret Oppenheim (L’Écureuil, 1960), les bestiaires fantasmagoriques d’Unica Zürn (La Serpenta, 1957) ou encore l’autobiographie Écritures (1970) de Max Ernst, qui écrivait, à propos de la récurrence de l’image de l’oiseau dans ses peintures : « En 1930, […] j’ai eu la visite presque journalière du Supérieur des oiseaux, nommé Loplop, fantôme particulier d’une fidélité modèle, attaché à ma personne. Il me présenta un cœur en cage, la mer en cage, deux pétales, trois feuilles, une fleur et une jeune fille ».
Symptôme des bouleversements historiques, du développement technologique et de la crise écologique du XXe siècle, la question animale a été problématisée quelques décennies plus tard par la néo-avant-garde des années soixante et soixante-dix à la lumière d’une nouvelle perspective critique, esthétique et conceptuelle qui réfléchissait, une fois de plus, au temps naturel et culturel de l’Anthropocène.
Dans les mêmes années où Joseph Beuys expliquait à un lièvre mort la signification de certaines peintures accrochées dans une pièce (Wie man dem toten Hasen die Bilder erklärt, 1965) et Jannis Kounellis exposait un perroquet sur un perchoir fixé à une plaque de métal (Pappagallo, 1967), Carolee Schneemann enveloppait des corps, des restes d’animaux et des objets dans un rituel orgiaque, mettant en scène le lien ancestral entre animalité et érotisme (Meat Joy, 1964).
Mythologique (Matthew Barney), totémique (Jan Fabre), autobiographique (Ana Mendieta), ludique (Jeff Koons), hybride (Vettor Pisani), sonore (Bruce Nauman), légendaire (James Lee Byars), mathématique (Mario Merz), politique (Regina José Galindo), sacrificiel (Hermann Nitsch) et psychanalytique (Louise Bourgeois), l’animal a anticipé et traversé les regards pluriels de l’art, trouvant dans les écrits de Donna J. Haraway (When Species Meet, 2007 ; The Companion Species Manifesto, 2003), dans L’animal que donc je suis (2006) de Jacques Derrida et dans L’Aperto. L’homme et l’animal de Giorgio Agamben (2002) certaines des expressions les plus fertiles et les plus radicales de la pensée critique contemporaine.
Comment relire aujourd’hui la relation séculaire entre l’artiste et l’animal? Dans quelle mesure cette relation a-t-elle défini et continue-t-elle de redéfinir les frontières hybrides de l’art, de Rosmarie Trockel à Mircea Cantor, de Tania Bruguera à John Akomfrah? Et comment pouvons-nous questionner le monde animal en interrogeant ses intentions, ses expressions et ses figurations?
Dans le sillage des théories et des mouvements de la néo-avant-garde des années 1960 et 1970 (de l’Arte Povera à l’art performatif, de Fluxus à l’art public), en passant par les recherches des années 1980 et 1990, jusqu’aux manifestations les plus récentes, ce numéro de la revue Elephant & Castle. Laboratorio dell’immaginario invite universitaires, critiques et chercheurs à proposer des contributions inédites et originales qui analysent – dans une perspective interdisciplinaire et comparative – le thème de l’animal dans l’art contemporain: caisse de résonance de notre actualité historique.
https://elephantandcastle.unibg.it/web/it_IT/call_for_papers
Mots-clés : Histoire de l’art contemporain ; critique d’art contemporain ; avant-garde ; néo-avant-garde ; animaux ; interdisciplinarieté ; intermédialité.
Axes de recherche possibles, mais non exclusifs :
– L’artiste et la représentation de l’animal dans les avant-gardes historiques
– Les bestiaires surréalistes (1924-1947)
– « Futurs anticipés et passés reconstruits » : la question animale dans l’art de la néo-avant-garde des années 1960 et 1970 et son évolution historique
– Fluxus et l’animal : développements d’une poétique intermédiale
– L’animal politique et l’art de la performance
– La relation entre l’affection artistique et l’animalité dans la critique d’art contemporaine
– L’Arte Povera et l’imagerie animale
– L’animal postcolonial dans l’art contemporain
– Animalité, performativité et érotisme
– La question animale dans ses différentes formes, manifestations et expressions (photographie, art public, installation, art vidéo, sculpture, cinéma d’artiste)
– L’animal d’artiste comme forme allégorique de la contemporanéité
– Les arts visuels et le règne animal au XXIe siècle
Les propositions de contributions, en italien, français ou en anglais, sont à envoyer à elio.grazioli@unibg.it et mariaelena.minuto@kuleuven.be avant le 18 février 2022 et doivent contenir un résumé de la contribution (maximum 5000 caractères, espaces comprises), cinq mots clés, la bibliographie de référence et une brève biographie du proposant (maximum 700 caractères).
Communication des propositions retenues : 28 février 2022. Le texte de l’article pourra être rédigé en italien, en français ou en anglais et ne devra pas dépasser 15-20 pages (30 000-40 000 caractères, notes et espaces comprises). Les contributions, accompagnées d’images et conformes aux règles éditoriales de la revue, devront être envoyées aux adresses électroniques susmentionnées avant le 31 mai 2022, en prenant soin de préciser dans le corps du courriel d’accompagnement le titre du texte et les nom et prénom du contributeur. Chaque contribution sera soumise à une double évaluation externe et anonyme par les pairs et la publication du numéro est prévue pour le mois de juillet 2022.
Références bibliographiques
Agamben Giorgio, L’Aperto. L’uomo e l’animale, Bollati Boringhieri, Turin, 2002.
Baker Steve, Postmodern Animal, The University of Chicago Press, 2000.
Chelbi Saïd, Figures de l’animalité dans l’œuvre de Michel Foucault, L’Harmattan, Paris, 1999.
Deleuze Gilles, Guattari Félix, Mille plateaux. Capitalisme et schizophrénie, Éditions de Minuit, Paris, 1980.
Derrida Jacques, L’animal que donc je suis, Paris, Galilée, coll. « La philosophie en effet », 2006.
Despret Vinciane, Autobiographie d’un poulpe et autres récits d’anticipation, Actes Sud, Arles, 2021.
Despret Vinciane, Porcher Jocelyne, Être bête, Actes Sud, Arles, 2007.
Fonfroide Raphaël, « Gloria Friedmann et Alain Rivière-Lecoeur. Hommes et animaux dans l’art contemporain : la question de la métaphore trouble », Sociétés et representations, n° 27, Éditions de la Sorbonne, 2009.
Forbes Duncan, Jansen Daniela (sous la direction de), Beastly / Tierisch, catalogue de l’exposition, Fotomuseum Winterthur, 30.05 – 11.10.2015, Spector Books, Leipzig, 2015.
Garcia Tristan, Normand Vincent, Theater, Garden, Bestiary. A Materialist History of Exhibitions, Sternberg Press, Berlin, 2019.
Haraway Donna J., When Species Meet, University of Minnesota Press, 2007.
Haraway Donna J., The Companion Species Manifesto, The University of Chicago Press, 2003.
Jeangène Vilmer Jean-Baptiste, « Animaux dans l’art contemporain, la question éthique », Jeu. Revue de théâtre, n. 130, mars 2009, pp. 40-47.
Lestel Dominique, L’animal est l’avenir de l’homme, Éditions Fayard, Paris, 2010.
Maillet Marie-Louise, L’Animal autobiographique. Autour de Jacques Derrida, Éditions Galilée, Paris, 1999.
Nancy Jean-Luc, « Oh the Animals of Language » (2014), e-flux Journal, Issue #65, mai 2015.
Ramos Filipa, Animals, MIT Press, Cambridge, 2016.
Subrizi Carla, « Carol Rama e l’animale: divenire donna e femminismo negli anni novanta », Boletín de Arte, n. 40, Departamento de Historia del Arte, Universidad de Malaga, 2019, pp. 61-67.
Texteira Pinto Ana, « The Post-Human Animal » (2015), in Filipa Ramos (ed.), Animals, MIT Press, Cambridge, 2016, pp. 106-109.
Van Damme Claire, Van Rossem Patrick, Marchand Christine, Zoométries: Hedendaagse Kunst in De Ban Van Het Dier, LKG Publication, (UGent Leerstoel Karel Geirlandt), Gent Academia Press, 2005.
Paul Virilio, « Métempsycose du passager », Les Bêtes. Traverses, n° 8, 2e trim. 1977.
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