Appel à communication : « Le Dadaïsme et les arts du spectacle » (Cluj-Napoca, Roumanie, mai 2016)

Dada-ParisLe 5 février 1916, Hugo Ball et Emmy Hennings, avec leurs amis peintres Marcel Janco, Hans Arp et les poètes Tristan Tzara et Richard Huelsenbeck, inaugurent le Cabaret Voltaire à Zurich. Implicitement, s’ouvre la scène où s’articulera le nouveau mouvement artistique qui ébranlera les fondations de l’art traditionnel tout en donnant une fabuleuse impulsion créatrice aux tendances modernistes du jeune XXe siècle.

DADA, fruit d’un hasard bien recherché, est dès ses débuts intimement lié au monde du spectacle, à l’improvisation, à la mise en scène ostentatoire de soi et à l’art de choquer les esprits bien posés. N’est-ce pas Monsieur Antipyrine, le personnage principal de la première pièce de théâtre de Tristan Tzara qui prit sur lui le devoir de patronner le premier manifeste dadaïste, lu par ce même Tzara le 14 juillet 1916 ? Il est facile de remarquer que la courte mais très intense vie du dadaïsme est soutenue par une théâtralisation constante de la vie et des œuvres des membres du groupe. Au-delà de la passion que Tristan Tzara avait pour Hamlet et pour son esprit bouffon avant même de quitter sa Roumanie natale, le théâtre, sous forme « dramatique » ou scénique, n’a jamais cessé de le hanter : La Première et La Deuxième aventure céleste de Monsieur AntipyrineLe cœur à gazMouchoir de nuages sont les quelques pièces que Tzara prit le soin de composer. Les masques de Marcel Janco accompagnaient les soirées Dada, de même que des costumes étranges qui incitaient au dépaysement. Et, de plus, comme le rappelle Henri Béhar, l’œuvre poétique aussi, dans les véritables manifestations dada, « se réduisait aux actes instantanés », « les dadaïstes se devaient d’être présents sur la scène », ils se transformaient en « acteurs-manifestes, ne prêchant pas, mais vivant leurs idées, objet et sujet de leur démonstration ».

Après la deuxième guerre mondiale, les courants néo-dada révolutionnèrent à nouveau l’art au-delà et en deçà de l’Océan. Les nouvelles avant-gardes s’en nourrirent pleinement, les happenings des années ’50-’60, de même que les performances infra ou post-dramatiques leur doivent beaucoup. Prenons par exemple l’affirmation de Tristan Tzara : « Il s’agissait de fournir la preuve que la poésie était une forme vivante sous tous ses aspects, même antipoétiques, l’écriture n’en étant qu’un véhicule occasionnel, nullement indispensable, et l’expression de cette spontanéité que faute d’un qualificatif approprié nous appelions dadaïste ». Il suffit d’y remplacer « poésie » par poésie dramatique, drame, théâtre, cinéma, arts visuels et nous avons ici toutes les prémisses des terribles et fascinants bouleversements que le champ artistique connaît encore de nos jours : la provocation, la communication collective, la joie du corps livré à sa violence naturelle, la libération de toute convention, la libération du langage, le spectateur concerné, qui participe, intervient même dans le spectacle, la dangereuse superposition entre vie et théâtre (art).

En partant de cette forte et intime liaison entre Dada et les arts du spectacle, nous nous proposons d’investiguer au printemps 2016, cent ans après, l’héritage dadaïste, de le réévaluer et de comprendre quel est l’intérêt et l’actualité des théories et surtout des pratiques dadaïstes aujourd’hui.

Ainsi proposons-nous les axes d’étude suivants (auxquels on pourrait ajouter bien d’autres) :

Qu’est ce qui est issu de Dada dans les arts du spectacle, le cinéma et les arts visuels ? Héritages, filiations et rebondissements.  Conventionalisation de l’esprit avant-gardiste : les origines avant-gardistes de la « performance » infra ou post-dramatique. Hybridation des discours artistiques : cinématographicité, cinéfication, théâtralisation cinématographique et cinétique, objectivation théâtrale, robotisation, mécanisation… Les arts du spectacle, le cinéma et les arts visuels dans la poésie et les manifestes Dada et avant-gardistes (de la mise en scène poétique aux ciné-poèmes). Mise en scène radicale de soi – l’être extrême, « l’homme approximatif » contemporain. Avant-garde et pathologie : brouillages, dérapages, violences, chocs… Mise à l’épreuve du réel – jeux des fictions et mises en scènes, fictionalisations et théâtralisations. L’humour, la farce, la provocation : l’esprit Dada et au-delà. Critique sous-jacente de la société à travers la mise en spectacle ou l’intrusion spectaculaire (les happenings des futuristes, les soirées Dada, etc.) Le monde sonore dadaïste : mise en scène du son, de la voix, de la parole, l’homme-instrument de musique.

 

Veuillez envoyer votre proposition de communication (300 mots environ), accompagné d’un CV (de 5 lignes tout au plus, précisant votre statut et votre institution universitaire ou de recherche), en français ou anglais, par courrier électronique à colocviu.fttcluj@yahoo.com avant le 20 décembre 2015.

Les résultats de la sélection seront communiqués le 5 janvier 2016.

La taxe de participation est de 100 € (50 € pour les doctorants) et sera payée en espèces à l’enregistrement au colloque.

Les travaux choisis par le comité scientifique seront publiés dans un numéro spécial de la revue académique Studia Universitatis Babeş-Bolyai. Series Dramatica (http://studia.ubbcluj.ro/serii/dramatica/index_en.html ).

Responsables : Ştefana Pop-Curşeu, Ioan Pop-Curşeu, Anca Măniuţiu, Horea Avram (Faculté de Théâtre et Télévision, Université Babeş-Bolyai, Cluj-Napoca Roumanie).

 

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