Appel à communication : « Les lieux de délibérations. Espaces, décors, dispositifs en Europe du Moyen Âge au temps présent » (université de Franche-Comté, Besançon, 14-16 mai 2020)

Appel à communication : « Les lieux de délibérations. Espaces, décors, dispositifs en Europe du Moyen Âge au temps présent » (université de Franche-Comté, Besançon, 14-16 mai 2020)

Le projet sur les délibérations en leurs lieux rassemble historiens, historiens de l’art et politistes dans la longue durée, des assemblées communales aux ronds-points. Il s’agit d’étudier les interactions entre les délibérations politiques sur le bien commun et les lieux qui les accueillent ou structurent, du Moyen Âge au temps présent.

Poser la question des lieux de la délibération politique revient à postuler qu’ils ne sont pas des décors neutres, sans effet de performativité ou sans incidence sur le climat d’une communauté délibérative. À l’inverse, les lieux participent à fabriquer le débat. Ce projet invite ainsi à se demander comment ces lieux deviennent eux-mêmes objets de décisions et portent à leur tour une représentation du politique.

 

Appropriation

L’espace délibératif reste souvent un « espace approprié » (Michel Hébert, 2014). La réflexion s’attache aux lieux investis : palais princier ou communal, église ou couvent, salle du conseil ou du chapitre, mais aussi théâtre, salle de jeu de paume et gymnase, fabrique ou usine. L’analyse s’interroge sur les modalités de cette appropriation parlementaire : aménagement des salles, construction d’estrade et de tribunes, disposition de bancs, décors temporaires. L’étude des tapisseries, supports mobiles et isolants d’une riche iconographie, apporterait une précieuse contribution à la réflexion. Quels conflits d’usage risquent-ils de survenir en ces lieux appropriés ? Dans quelle mesure les délibérations ont-elles porté sur les lieux mêmes ? Les travaux, destructions et réaménagements sont débattus, décidés et financés, réalisés ou non. Comment les pouvoirs agissent-ils sur l’architecture et le mobilier pour garantir des conditions optimales de délibérations (acoustique, chauffage) ou, au contraire, tenter d’écourter les débats ? Dans quelle mesure ces aménagements contribuent-ils à mettre en scène la parole politique ?

 

Construction

L’espace délibératif a pu guider un projet architectural propre. Des édifices dédiés sont construits : le palazzo comunale expérimenté dans des cités italiennes dès le XIIIe siècle, puis des bâtiments parlementaires à partir de la Parliament House d’Écosse à Edimbourg dans la première moitié du XVIIe siècle. Peut-on identifier des caractéristiques propres à l’architecture parlementaire ? Comment la salle des débats se place-t-elle dans l’économie de l’édifice ? Comment est-elle articulée aux espaces restreints des décisions politiques : salles privées, cabinets dérobés et escaliers. Une attention est portée aux décors sculptés et peints, ainsi qu’au mobilier dont les salles des conseils s’ornent, à l’instar de la fresque du Bon et mauvais gouvernement qu’Ambrogio Lorenzetti peignit sur les murs de la salle où siégeaient les Neuf dans le palais communal de Sienne à partir de 1338. Ces « murs qui nous parlent » (Patrick Boucheron, 2013), quel dialogue nouent-ils avec les délibérations qu’ils séparent de la rue en les solennisant ?

 

Intérieur/extérieur

Le questionnement s’intéresse également à l’articulation entre espaces intérieurs et extérieurs. Comment les rituels politiques mobilisent-ils les lieux liminaires – seuils, perrons, loggia et autres balcons. Quelle pression la foule réunie sur la place publique exerce-t-elle sur les délibérations intérieures ? Comment l’irruption de la foule peut-elle élargir la sphère publique des délibérations ? Cette question invite tout particulièrement à interroger l’ouverture instituée ou forcée du lieu de délibération, ainsi que sa sacralisation aux yeux des acteurs qui l’investissent, le protègent, s’y réfugient ou le profanent.

L’analyse envisage aussi les rassemblements contestataires, non institués ni présidés, pour réfléchir au choix des lieux et à la manière de les investir : places et marchés, jardins et tavernes, portes des villes ou carrefours. En quoi le lieu investi par les corps assemblés « signifie[-t-il] en excès de ce qui est dit » (Judith Butler, 2015) ? En quoi l’acte même de se réunir réinvestit-il d’une charge politique des espaces publics désactivés, ambigus ou en cours de privatisation (place Tahrir, barrières de péages) ? Comment ces lieux informels permettent-ils de faire de la politique « sans en avoir l’air » (Laurent Le Gall, Michel Offerlé et François Ploux, 2012) ? Comment les acteurs s’approprient-ils l’espace public ? Par quels destructions et aménagements temporaires (barricades, tentes, feux) remodèlent-ils les lieux ?

Le projet donnera lieu à un colloque qui se tiendra à Besançon les 14, 15 et 16 mai 2020 pour préparer la publication d’un ouvrage collectif. Porté par le Centre Lucien Febvre de l’université de Franche-Comté, il est soutenu par le Centre Georges Chevrier de l’université de Bourgogne, ainsi que la chaire Histoire des pouvoirs en Europe occidentale (XIIIe-XVIe siècles) de Patrick Boucheron au Collège de France.

Les propositions de communication pourront s’inspirer du questionnement développé. Un résumé d’une demi-page est à adresser aux membres du comité d’organisation avant le 15 septembre 2019.

Comité d’organisation :

Thomas Flum, professeur d’histoire de l’art du Moyen Âge

thomas.flum@univ-fcomte.fr

Maxime Kaci, maître de conférences en histoire contemporaine

maxime.kaci@univ-fcomte.fr

Jérôme Loiseau, maître de conférences en histoire moderne

jerome.loiseau@univ-fcomte.fr

Émilie Rosenblieh, maîtresse de conférences en histoire du Moyen Âge

emilie.rosenblieh@univ-fcomte.fr

Université de Franche-Comté, Centre Lucien Febvre (EA 22 73)

 

Comité scientifique :

Pascal Bertrand, professeur d’histoire de l’art moderne, université de Bordeaux-Montaigne, Centre de recherches François-Georges Pariset (EA 538)

Patrick Boucheron, professeur au Collège de France, chaire Histoire des pouvoirs en Europe occidentale (XIIIe-XVIe siècle)

James B. Collins, professeur d’histoire moderne, Georgetown University (Washington, DC)

Magali della Sudda, chargée de recherche en sciences politiques, CNRS, Centre Émile-Durkheim (UMR 51 16)

Michel Hébert, professeur émérite d’histoire du Moyen Âge, université du Québec à Montréal

Hélène Rousteau-Chambon, professeure en histoire de l’art moderne, université de Nantes, LARA-CReAAH (UMR 65 66)

Alain Salamagne, professeur d’histoire de l’art médiéval, université François-Rabelais de Tours, Centre d’études supérieures de la Renaissance (UMR 73 23)

Jean Vigreux, professeur d’histoire contemporaine, université de Bourgogne, Centre Georges Chevrier (UMR 73 66)

Contact: Thomas Flum, professeur d’histoire de l’art du Moyen Âge: thomas.flum@univ-fcomte.fr

Source: http://centre-lucien-febvre.univ-fcomte.fr/

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