Après le colloque des 14 et 15 juin 2013 à Strasbourg et à la Bibliothèque humaniste de Sélestat sur « Interactions religieuses de la Réforme aux Lumières », « L’Angleterre et le Grand-Est de la France : le Grand Tour » constitue le deuxième volet de la problématique des « Regards croisés entre l’Angleterre et le Grand-Est de la France ». Le colloque se tiendra les 27 et 28 septembre 2013 au château de Pange (Lorraine, département de la Moselle).
Si le Grand Tour italien qu’entreprirent les Anglais cultivés à partir de l’époque élisabéthaine a fait l’objet de nombreuses études, les pérégrinations des voyageurs anglais en Alsace, en Lorraine et le long de la vallée du Rhin sont beaucoup moins connues, malgré l’abondance d’une documentation jusqu’ici peu explorée. On travaillera entre autres les récits de voyages parus dans l’Angleterre des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, les Crudities de Thomas Coryat (1611), les Letters from the Right Honorable Lady Craven … during her Travels through France, Germany, and Russia in 1785 and 1786, ou encore les Travels in France d’Arthur Young de 1792, les diaries, journaux intimes et correspondances. La numérisation en cours de « Récits de voyage en Alsace, 1701-1918 » pourra fournir des sources, ainsi que la liste disponible surhttp://search.unistra.fr (Rubrique Colloques).
Ces récits nous permettront de comprendre l’attrait que l’Alsace et la Lorraine exercèrent sur les voyageurs éclairés et influents et de mesurer l’impact qu’ont eu ces écrits sur l’évolution des mentalités et de l’art anglais du XVIe au long XVIIIe siècle : importance de la Réforme, présence à Strasbourg et surtout à Bâle d’imprimeurs renommés, richesse patrimoniale des grands centres intellectuels, Nancy, Strasbourg, Bâle.
On s’interrogera sur les finalités d’un Grand Tour passant par l’Alsace et la Lorraine : sont-elles religieuses, politiques, culturelles, économiques, didactiques, sentimentales, commerciales ? Si l’étude de voyages individuels sera la bienvenue, on s’efforcera aussi de déterminer, d’une manière plus générale, qui passait par l’Alsace et la Lorraine et dans quel but. On pourra questionner également la notion d’identité régionale et sa perception par les différents voyageurs.
Une approche diachronique sera envisagée : Le Grand Tour au XVIIe siècle répond-il aux mêmes intérêts ou exigences qu’au XVIIIe siècle ? Les mêmes types de voyageurs effectuaient-ils cette sorte de voyage ? Quelles sont les causes des différences éventuelles ? Que reflètent-elles de l’évolution quant à la perception du Grand Est par les Anglais ? A partir de quand les « mécanismes du tourisme » (Jeremy Black, Italy and The Grand Tour, p.12) se mettent-ils en place ? Le colloque pourra être l’occasion de se demander de quelle manière la signature du traité de Westphalie en 1648, qui marqua le rattachement de l’Alsace à la France, ou bien le rattachement du duché de Lorraine au royaume de France en 1766, auront pu changer le regard des voyageurs sur les régions qu’ils traversaient et sur leur appartenance nationale.
On pourra s’interroger ainsi sur la notion de « passage ». Quelles étaient les raisons des choix de parcours des voyageurs anglais rentrant de Venise à Paris, soit par Strasbourg soit par l’axe Stuttgart/Metz et que retenaient-ils de ces étapes obligées, souvent fort courtes ? En retraçant les itinéraires, il sera possible d’examiner les raisons qui justifiaient le choix des étapes en Lorraine et en Alsace (logistiques, linguistiques, politiques, religieuses, culturelles, pittoresques …) et par là sans doute de discerner, à défaut de cerner, les raisons de ce Grand Tour moins conventionnel.
Passait-on par les deux régions ou favorisait-on l’une d’elle ? Favorisait-on les villes ou la nature ? Un lieu exerçait-il un attrait plus particulier ? Nancy et la cour de Stanislas ? La cour de Lunéville ? Strasbourg ? Les villes de la Décapole ? Bâle ? La vallée du Rhin ? Les paysages des Vosges et des Ardennes ? De plus, la dimension géographique pourra intégrer les apports méthodologiques récents de la psychogéographie et de la géocritique qui s’attachent à l’impact émotionnel et psychologique des lieux, aux perceptions et aux émotions des scripteurs (travaux de Guy Debord, Bertrand Westphal, Merlin Coverley).
On s’attachera aussi à la culture matérielle (« material culture »), aux objets que l’on rapportait ou que l’on envoyait, aux livres et imprimés acquis sur place, aux dessins, esquisses, tableaux réalisés ou achetés. L’exposition récente de l’Ashmolean Museum d’Oxford, « The Capture of the Westmorland : An Episode of the Grand Tour » a montré tout l’intérêt que présentait la reconstitution d’une telle collection d’objets resurgis du passé.
Ce colloque devrait ainsi permettre d’évaluer de quelle manière les souvenirs marquants des voyageurs auront contribué à la construction de l’image de l’Alsace et de la Lorraine, et comment cette vision aura pu être propagée par les traces écrites des voyageurs passés par le Grand Est.
Nous accueillerons des communications en français et en anglais. Une publication sera assurée.
Date de remise des propositions: 28 février 2013. Les auteurs seront avertis de la décision du Comité Scientifique du colloque fin mars 2013.
Les propositions de communications sont à adresser à Anne Bandry-Scubbi (bandry@unistra.fr), Jean-Jacques Chardin (chardin@unistra.fr) et Pierre Degott (pierre.degott@univ-lorraine.fr).
http://search.unistra.fr/index.php/fr/colloques/colloques/
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