Si l’historiographie de l’art italien des années 1960-1970 a longtemps mis l’accent sur les figures de l’Arte Povera, une dynamique académique, qui s’est développée ces dernières années, tend à reconsidérer ce récit canonique. Loin du récit officiel pour une grande part fabriqué par Germano Celant, ces décennies sont marquées par une effervescence ne pouvant pas être réduite à l’histoire d’un label. Dans cette perspective, de nouvelles recherches en histoire de l’art ont révélé cette diversité dans le champ artistique en s’intéressant à des figures, des thématiques ou des pratiques plus marginales et impensées. Elles mettent ainsi en lumière le travail pionnier et résolument expérimental des artistes femmes ; elles documentent le rôle crucial d’acteurs et d’artisans, collaborateurs essentiels mais longtemps restés dans l’ombre ; elles analysent enfin le dynamisme culturel né de relations inédites et de dialogues interdisciplinaires entre les artistes et les critiques d’art. Les travaux sur cette période laissent comprendre comment la question de l’art se trouve reconsidérée dans un cadre résolument pluridisciplinaire. Sur le plan politique, avec l’émergence de mouvements d’artistes femmes qui, en s’unissant, ont formé des collectifs engagés pour revendiquer leur place dans le récit de l’art et questionner les structures de pouvoir. Dans le domaine de la critique littéraire et artistique, où théoriciens et critiques d’art ont activement accompagné les artistes, non plus simplement en commentant les œuvres, mais en participant à la reformulation des problématiques esthétiques pour fonder de nouvelles dynamiques. Enfin, dans le rapport à l’artisanat et aux techniques, où la collaboration étroite et novatrice entre artistes italiens, étrangers, techniciens et artisans a permis la création d’œuvres hybrides.
Cette journée d’études se propose d’approfondir et d’élargir notre compréhension de ces deux décennies artistiques en mettant en lumière les acteur(rice)s, les médiums et les dynamiques de travail restés méconnus.
Cette rencontre scientifique vise à rassembler des chercheuses et chercheurs travaillant sur l’art italien et sur les artistes ayant créé sur le sol italien durant les années 1960-1970. Nous encourageons particulièrement les contributions qui abordent les thèmes suivants, sans que cette liste soit exhaustive :
– genre et création : l’œuvre des artistes femmes qui ont participé aux dynamiques créatives de cette période
– techniques et médiums décentrés : l’étude de pratiques artistiques dont le statut était dévalorisé à l’époque de la création
– figures de l’ombre de la production artistique : l’analyse du rôle des assistants, des techniciens, des collaborateurs et des entreprises, acteurs dans la création des œuvres
– interdisciplinarité et hybridité des pratiques : l’étude des interactions entre les différentes disciplines artistiques et extra-artistiques
– expositions et manifestations alternatives : la présentation des œuvres dans des lieux non dédiés
– économie et condition des artistes : l’étude des conditions matérielles et financières des artistes
– historiographie(s) de la période : l’analyse des séquences historiques de cette période, la recherche à l’international
– artistes étrangers en Italie : l’étude des circulations artistiques durant la période 1960-1970, à partir du travail d’artistes étrangers qui ont séjourné et travaillé dans la péninsule
Cette relecture des années 1960-1970 en Italie s’inscrit dans un effort collectif et vise à prolonger les recherches récentes ayant ouvert des pistes solides sur cette période artistique. Se distinguent déjà plusieurs recherches préalables, notamment autour de la corporalité, de la performance et du genre (Lara Conte, 2010), de la photographie et du féminisme (Raffaela Perna, 2013), de la photographie documentaire (Giuliano Sergio, 2015), du rapport à la nature (Valérie Da Costa, 2015), de la théorie féministe (Laura Iamurri, 2016), de la critique d’art (Giovanna Zapperi, 2018) ou encore de la relation avec l’histoire politique (Raffaella Perna, Marco Scotini, 2019 ; Romy Golan, 2021).
Le cadre chronologique est limité aux années 1960-1970 et se concentre sur l’Italie. Les contributions peuvent porter sur des œuvres créées sur place par des artistes, qu’ils soient de nationalités italiennes ou non. Les propositions portant sur des œuvres produites à l’étranger par des artistes italien(ne)s sont également acceptées si elles ont eu une résonance significative sur la scène artistique italienne au cours de cette période.
Les recherches devront se concentrer sur les processus de création des œuvres, excluant les acteurs des expositions (commissaires, galeristes et critiques d’art).
Modalités de soumission :
Cette journée d’études est ouverte aux doctorant(e)s, docteur(e)s et chercheur(e)s.
Cette journée d’études entend opérer un déplacement du regard sur les recherches menées sur l’art italien des années 1960-1970. Les candidat(e)s devront témoigner d’un rattachement institutionnel à une université francophone (doctorat passé ou en cours, cotutelle, post-doctorat).
Les personnes intéressées doivent envoyer leur bio-bibliographie (entre 600 et 800 signes espaces compris) et leur proposition de communication (entre 2000 et 3000 signes espaces compris) à comitescientifique.artitalien@gmail.com au plus tard le 20 février 2026.
Les communications devront se faire en français.
À l’issue de la journée d’étude, les participants pourront être sollicités par le comité scientifique pour reprendre leur communication en article pour un numéro thématique.
Bibliographie de référence :
– Lara Conte, Materia, corpo, azione. Ricerche artistiche processuali tra Europa e Stati Uniti. 1966- 1970, Milan, Electa, 2010.
– Raffaela Perna, Arte, fotografia e femminismo in Italia negli anni Settanta, Milan, Postmedia books, 2013.
– Giuliano Sergio, Information, document, œuvre : parcours de la photographie en Italie dans les années soixante et soixante-dix, Nanterre, Presses universitaires de Paris Ouest, 2015.
– Valérie Da Costa (dir.), Pino Pascali, retour à la Méditerranée, Dijon, Les Presses du réel, 2015.
– Laura Iamurri, Un margine che sfugge. Carla Lonzi e l’arte in Italia, 1955-1970, Macerata, Quodlibet, 2016.
– Giovanna Zapperi, Carla Lonzi : un art de la vie. Critique d’art et féminisme en Italie, Paris, Les presses du réel, 2018.
– Raffaella Perna et Marco Scotini (dir.), The unexpected subject : 1978 art and feminism in Italy, Milan, Flash Art, 2019.
– Romy Golan, Flashback, Eclipse: The Political Imaginary of Italian Art in the 1960s, New York, Zone Books, 2021.
– Lara Conte et Francesca Gallo (dir.), Artiste italiane e immagini in movimento, Identità, sguardi, sperimentazioni, Milan, Mimesis / Aurora, Cinema, cultura visuale e pensiero contemporanea n° 2, 2021.
– Vita Nuova. Nouveaux enjeux de l’art en Italie. 1960-1975, cat. expo., Gand, Éditions Snoeck, 2022 (14 mai-2 octobre 2022, MAMAC, Nice sous le commissariat de Valérie Da Costa).
Comité d’organisation :
Ségolène Liautaud (École du Louvre, Sorbonne Université)
François-René Martin (École du Louvre, École des Beaux-Arts de Paris)
Carolina Sprovieri (École du Louvre, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, École Française de Rome)
Comité scientifique :
Jean-Pierre Criqui (Musée national d’art moderne, Centre Georges Pompidou)
Valérie Da Costa (Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis)
Alessandro Gallicchio (Villa Médicis, Sorbonne Université, Centre André Chastel)
Ségolène Liautaud (École du Louvre, Sorbonne Université, Centre André Chastel)
François-René Martin (École du Louvre, École des Beaux-Arts de Paris)
Carolina Sprovieri (École du Louvre, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, École Française de Rome)
Riccardo Venturi (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Date et lieu de la journée d’études :
24 septembre 2026
École du Louvre
Palais du Louvre
Porte Jaujard
75038 Paris cedex 01
Lien de l’appel : https://www.ecoledulouvre.fr/fr/actualites/appel-communications-le-champ-de-lart-italien-dans-les-annees-1960-1970-au-dela-de-larte-povera

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