Appel à communications : « L’arbre qui cache la forêt – Journées d’études Association Asie-Sorbonne » (Paris, 19-20 novembre 2021)

Appel à communications : « L’arbre qui cache la forêt – Journées d’études Association Asie-Sorbonne » (Paris, 19-20 novembre 2021)

L’association Asie-Sorbonne organise deux journées d’études en vue d’initier une réflexion sur la dynamique de la relation à l’arbre—et, par-delà, à la nature—en Asie, ses déterminants culturels et universels, physiologiques et émotionnels. Nous partons de l’exemple de la pratique japonaise de l’immersion dans une forêt appelée Shinrin-yoku ou « bain de forêt » (ou encore sylvothérapie). Cette pratique est née dans les années 1980, en même temps que l’étude des bienfaits liés à la vision des paysages « verts » se développait aux Etats-Unis (Wilson 1984). Ces études portent sur les mesures physiologiques des effets physiques ou psychologiques et à partir de là induisent des recherches en architecture et urbanisme (Keller 2005). Cependant ces études n’interrogent pas les causes non physiologiques ou psychologiques possibles : causes culturelles (imaginaire de l’arbre), mémorielles et affectives (familiarité) de ces effets, pas plus qu’elles n’ont de perspective comparative. Or au Japon, la pratique pourrait avoir des racines animistes (Knight 2009) voire bouddhistes. On peut également citer le concept chinois et japonais de qi (ki) ou d’énergie vitale partagée entre l’homme et la nature ainsi que la perception spécifique des arbres dans la philosophie chinoise (Bao et al. 2016 ; Escande 2011) et japonaise (Berwick 2004), en soutien de cette dimension culturelle implicite. Won Sop et al. soulignent l’association traditionnelle coréenne de bois, de pierre et d’eau pour expliquer les bienfaits pour la santé des « bains de forêt » en Corée (Won Sop et al. 2010). La représentation des Yaksha et Yakshini témoigne aussi du rôle de l’arbre comme source de vie, parfois ambivalente, dans la tradition indienne, où certaines espèces d’arbres sont encore aujourd’hui considérées comme sacrées. Et la forêt comme lieu de l’illumination est essentielle pour les bouddhistes et les jains. On trouve de telles représentations en Europe avant la révolution de la modernité, et ensuite, en réaction à celle-ci, au 19e siècle dans le romantisme européen (Harrison 1992) ou dans le transcendantalisme américain (Egerton 2011).

Ces journées seront donc l’occasion d’examiner la représentation subjective, « pour soi », de la forêt qui se forme lors de l’expérience. Comment celle-ci interfère-t-elle avec la représentation de la forêt « en soi », comme un objet extérieur et autonome. La question sera abordée dans le contexte de l’Asie en général, ou dans la perspective d’une comparaison  avec l’Occident. On se demandera si la représentation des arbres dans les arts et la culture nous éclaire sur ce qui se produit lors d’une immersion dans la forêt : quel est le rôle des images antérieures, qu’elles soient littéraires ou visuelles, prises dans le monde de l’art ou dans l’univers religieux, qu’il s’agisse de représentations traditionnelles ou contemporaines (jeux vidéo, installations multimédia) ? En effet, la fascination du public pour ces pratiques immersives en forêt s’accompagne de la même soif de pratiques numériques immersives, en témoignent l’installation du collectif japonais Team Lab (Tokyo) dont les installations au musée Mori ou dans des lieux de forêt patrimoniale (A Forest where gods live au Mifuneyama Rakuen Park) seront bientôt exposées à Amsterdam (Huw 2020). Cela laisse penser que ces installations, par certains aspects (interactivité, sens de « flow » ) sont perçues comme “magiques” (Jeon 2019).

Nous postulons en effet que dans une perspective « post-anthropocène », écologique, il est nécessaire de « réenchanter » l’arbre et la forêt (ce que suggère Bruno Latour ; Où suis-je ?, 2021; Face à Gaïa, 2015) ; de nourrir notre relation à la forêt, à l’arbre, au « sol » d’une dimension vivante, poétique qui intègre la dimension pratique, scientifique et mécanique (Descola 2005; Alexander 2004).

Bibliographie

–        Alexander, Christopher (2004), The nature of Order, book 4: The luminous ground, Berkeley (CA), The Center for Environmental structure.

–        Alban N., Berwick C. (2004), Forêt et religion au Japon, Environnement Culture et Société (6). OA.

–        Bao Y., Yang T., Lin X. and al. (2016), Aesthetic Preferences for Eastern and Western Traditional Visual Art: Identity Matters, Frontiers in Psychology, Doi: 10.3389/fpsyg.2016.01596. OA

–        Descola P. (2005) ; Par-delà nature et culture, Paris, Gallimard.

–        Egerton F. (2011), History of Ecological Sciences, Part 39: Henry David Thoreau, Ecologist, Bulletin of ecological society of America. https://doi.org/10.1890/0012-9623-92.3.251

–        Escande Y. (2011), L’arbre en Chine, in J. Pigeaud, L’arbre ou la raison des arbres, PUR.

–        Harrison R. (1992). Forest: Shadow of civilization, Chicago, The University Of Chicago Press.

–        Filliozat P.-S. et Zink M. éd., L’arbre en Asie, Actes du colloque international organisé par l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, la Société asiatique et l’Institut national des Langues et Civilisations orientales (INALCO) à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres et à l’INALCO, les 8 et 9 décembre 2016, Peeters Publishers, Leuven, 2018.

–        Huw O. (2020, sept.), Europe is getting a teamLab art space, and it’s going to be mindblowing, Time Out. Online: https://www.timeout.com/news/europe-is-getting-a-teamlab-art-space-and-its-going-to-be-mindblowing-082620

–        Knight C. (2009, dec.), “Between the profane and the spirit worlds: the conceptualisation of uplands and mountains in Japanese and Maori folklore”. New Zealand Journal of Asian Studies, vol. 11, n°2.

–        Knight C. (2010), The concept of satoyama and its role in the contemporary discourse on nature conservation in Japan, Asian Studies Review, 34(4), 421 (December 2010)

–        Indrawan M., Yabe M., Nomura H., Harrison R. (2014, March). Deconstructing satoyama – The socio-ecological landscape in Japan (science direct) show that satoyama is cultural social construct, Ecological Engineering, vol. 64, pp. 77-84.

–        Jeon M., Fiebrink R., Edmond E., Herath D. (2019, Nov.). From rituals to magic: Interactive art and HCI of the past, present, and future, International Journal of Human-Computer Studies (131):108-119.

–        Kellert S. (2005). Building for Life: Designing and understanding the human-nature connection, Washington (DC), Island Press.

–        Kono T. (2011). Ecological Self: Body and Affordances, Kyoto, Nakanishiya publisher (in Japanese).

–        Rots A. (2014). Does Shinto offer a viable model for environmental sustainability? Excerpts from author’s PhD. Online Academia.

–        Wilson E. (1984). Biophilia. Cambridge, MA, Harvard University Press.

–        Won Sop S., Poung Sik Y., Rhi Wha Y., and Chang Seob S. (2010, Jan.). Forest experience and psychological health benefits: the state of the art and future prospect in Korea, Environ Health Prev Med; 15(1): 38–47. Doi: 10.1007/s12199-009-0114-9

Modalités pratiques

Les journées se dérouleront du 19 au 20 novembre 2021 en présentiel et en visioconférence à l’INHA, sauf si la pandémie interdit encore toute réunion. Les communications de 20 minutes pourront être en français et en anglais.

Les propositions sous forme d’un résumé de 300 à 500 mots doivent parvenir au plus tard le 30 avril à asie-sorbonne@orange.fr Les participants retenus seront avertis le 30 mai.

Une publication d’une sélection des contributions est prévue.

What do you want to do ?

New mail

Leave a Reply