Appel à publication : « Lits historiques. À la recherche des lits européens du XVe au XXe siècle. Usages, formes et décors » (In Situ, Revue des patrimoines)
Les lits trônent dans les chambres ; ils en sont la définition ultime. Aux yeux du public, pas de chambre sans lit – et sans chambre, pas de maison. La multiplication au XIXe siècle des chambres de François Ier ou de Henri IV – et d’autant de lits supposés – dans les châteaux de province relève de la même curiosité pour un meuble qui évoque la « grande histoire » et l’intimité des puissants. Il concentre l’idée de la maison et du pouvoir. Le remeublement des palais et des châteaux royaux sous la Monarchie de Juillet entraîne la création de chambres à coucher pour lesquelles il faut restaurer, retrouver ou fabriquer des lits mémoriels. Enfin, au XXe siècle, l’image des lits entretient et diffuse les mythologies des grands hommes.
Mais, clos de rideaux, le lit de l’époque moderne était lui-même une chambre selon la définition de Michèle Perrot : une boîte dans la boîte, l’espace intime par excellence. Ce microcosme protecteur est le support privilégié du rêve et le moyen de voyager sans entraves dans le temps et l’espace comme chez Proust. Il devient alors plus qu’un simple meuble.
L’Europe de l’époque moderne a été le cadre idéal de l’expression de cette dichotomie entre intériorité et universalité. Les lits stigmatisent sans doute le mieux ce conflit emblématique du temps. C’est probablement pour ces raisons qu’ils sont souvent les meubles les mieux documentés. Leur importance physique et symbolique leur a généralement réservé l’attention des notaires, des chargés d’inventaire, des dessinateurs, etc.
Fondamentalement double, le lit est une œuvre de bois (ou de métal) et de tissus. Si les premiers se conservent, les seconds – qui en faisaient toute la valeur – ont généralement disparu. Force est de constater qu’en France, aucun lit complet dans son état d’origine n’est identifié avec certitude avant le XVIIIe siècle… Toutefois, en Angleterre ou en Suède de nombreux lits anciens ont été préservés. Les conditions de conservation ne sont donc pas les seules responsables de cette disparition. Elle reflète aussi une volonté de changements, aussi bien en termes de mode que d’histoire.
Dès le début du XIXe siècle, de nouvelles formes apparaissent, comme le lit bateau parallèle au mur. Les lits d’apparat, de l’Empire à la IIIe République, se dotent de complexes décors textiles qui se déploient sous des dais majestueux. Si le bois richement sculpté reste en usage et apparente ces lits de pouvoir à ceux du siècle précédent, des matériaux industriels comme la fonte de fer ou le bronze doré renouvellent ces meubles pour lesquels triomphent l’alliance de l’art et de l’industrie.
Le spectacle du lit, par son statut de plus grand meuble de la pièce et par sa grande qualité textile ou sculpturale, le rend indispensable à toute chambre muséale. Il est le support idéal à la fois d’une histoire des styles et d’une histoire des hommes. Les ambitions des conservateurs et des propriétaires sont donc importantes sur ce sujet.
À la suite des journées d’étude des 20 et 21 février 2018 consacrées aux lits des XVe au XVIIIe siècles, ce numéro spécial d’In Situ a pour objectif d’éclairer les projets actuels et futurs des institutions culturelles ou des demeures privées. Il ambitionne de faire à la fois le point sur les connaissances de ces meubles et d’explorer les pratiques de conservation et de restauration des grands lits européens. Enfin, il souhaite embrasser une histoire au long cours et enrichir les premiers propos d’études sur les lits contemporains.
Les propositions attendues sont susceptibles de concerner tous les champs de l’histoire, de l’histoire de l’art, de l’histoire sociale et de l’histoire des techniques. Elles seront regroupées autour de trois axes de réflexion : études des sources, études de cas particuliers et réflexions sur la place du lit – physique et symbolique.
Dans le premier domaine, sont particulièrement attendus des travaux sur les questions de vocabulaire, sur l’identification des sources archivistiques et sur les modèles. Dans l’objectif d’un inventaire documentaire des lits conservés – dans les collections particulières ou publiques –, seront bienvenues les études de cas faisant état des recherches documentaires et scientifiques sur l’existant et exposant la démarche de restauration / restitution en vue de l’exposition au public. Ces études peuvent concerner un lit en entier (bois, couché et garniture) ou une partie de
celui-ci (étude spécifique des étoffes, de la sculpture, etc.).
Enfin, ce numéro vise à proposer de nouvelles contributions sur les usages de ce meuble dans la chambre. Sous ce thème, on retiendra également la place symbolique du lit, aussi bien dans la société que comme sujet de créations artistiques.
Propositions de contribution :
Les articles attendus doivent contenir une part inédite de recherche, d’hypothèse ou de mise à jour ; ils ne peuvent reprendre la totalité d’un article déjà paru.
Si vous souhaitez contribuer à ce numéro, nous vous remercions d’envoyer avant le 30 juin 2018 votre proposition, accompagnée d’un résumé de 1 500 signes au maximum, ainsi que d’un court CV, par voie postale :
In Situ. Revue des patrimoines / Ministère de la Culture – Direction générale des patrimoines –
Département du pilotage de la recherche et de la politique scientifique
6, rue des Pyramides – 75001 Paris
à l’attention de Françoise Cosler
ou par courriel : francoise.cosler@culture.gouv.fr
Envoyer une copie de votre proposition à :
nicolas.courtin@paris.fr
ou muriel.barbier@culture.gouv.fr
ou Audrey.Gay-Mazuel@madparis.fr
Les textes eux-mêmes seront attendus en novembre 2018 pour une publication prévue courant 2019. La taille des articles sera comprise entre 15 000 et 35 000 signes.
Pour toutes les recommandations faites aux auteurs concernant le nombre de pages ou d’images, les droits de l’iconographie, l’insertion de notes et de liens, etc., voir le site de la revue : http://journals.openedition.org/insitu/401
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