Appel à contributions | L’art à l’heure archéologique, Histoire de l’art, n° 90

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L’art à l’heure archéologique

L’approche archéologique inspire aujourd’hui aussi bien les historiens de l’art que les artistes. La patiente reconstitution du passé à laquelle se livrent les archéologues à partir de vestiges fragmentaires dont le contexte est minutieusement analysé ouvre des voies nouvelles à l’analyse des œuvres mais aussi à la création artistique. Au-delà du seul « goût des ruines », ce sont en effet les principes et les méthodes de l’archéologie qui nourrissent la réflexion sur l’art. Ce numéro d’Histoire de l’art propose d’explorer les différents aspects du dialogue entre art et archéologie, dans une perspective résolument large. Il invite également à s’interroger sur les rapports complexes, aussi bien sur le plan académique que scientifique, des deux disciplines sœurs que sont l’histoire de l’art et l’archéologie. Cet appel à contributions s’adresse ainsi aux jeunes chercheurs en histoire de l’art, en archéologie, en histoire ou encore en anthropologie intéressés par les pistes de recherche esquissées ci-dessous, quelle que soit leur période de prédilection.

Restitution

En s’intéressant aux vestiges parfois modestes d’un passé plus ou moins lointain, les archéologues attirent l’attention sur des objets qu’un œil rapide jugerait désespérés, tant leur dégradation les rend énigmatiques. Leur mise en série et les analyses archéométriques permettent de reconstituer des pans entiers du passé et de donner une valeur inattendue à des collections ou des monuments autrefois délaissés. Ce type d’enquête a donné un nouveau souffle à l’histoire de l’art – on pense aux travaux pionniers de Jean Marcadé – et inspire les artistes jusqu’à aujourd’hui, comme l’ont montré les expositions « The Way of the Shovel » au Museum of Contemporary Art de Chicago en 2013 et « Anarchéologie » au Centre Pompidou de Paris en 2017. La capacité qu’ont les archéologues à restituer un monde disparu est aussi un puissant moteur pour l’imagination et les artistes se sont saisis des outils informatiques de visualisation créés pour l’archéologie.

Contextualisation

L’archéologie est aussi une discipline de terrain, attentive à l’inscription spatiale des vestiges et à leur rapport à l’environnement. La collaboration avec les archéologues pousse les historiens de l’art à sortir des musées et à replacer les œuvres dans leur contexte architectural ou naturel, comme l’a fait par exemple Jane Fejfer pour les portraits romains. Cet intérêt pour le site, son évolution puis sa destruction a suscité également de nombreuses collaborations entre archéologues et artistes, que l’on pense au travail pionnier d’Anne et de Patrick Poirier, au processus collaboratif de « réapparition » du palais Nord-Ouest de Nimrud par Michael Rakowitz, ou encore aux technologies sonores employées par Forensic Architecture ou Umashankar and the Earchaeologists.

Interprétation

Science humaine, l’archéologie est une discipline critique, qui propose une interprétation du passé à partir d’éléments nouveaux, tirés de l’oubli par la fouille. Si cette capacité de l’archéologie à écrire l’histoire a parfois été instrumentalisée, elle apporte souvent à l’inverse un démenti à des lectures gauchies du passé. Les œuvres d’art, objets archéologiques à part entière, contribuent à ce réexamen et permettent d’affiner nos connaissances historiques, comme en témoignent par exemple les travaux de John Ma sur la statuaire honorifique. Les artistes se sont eux aussi saisis de cette capacité des vestiges à porter un discours analytique nouveau, révélant des enjeux politiques, sociaux, voire environnementaux. Les actions de prélèvement (Yuji Agematsu), d’excavation (Simon Callery), de délocalisation (Danh Vo) et de muséification (Mark Dion, Ali Cherri, Rayyane Tabet) sont autant de moyens pour les artistes de remettre en question des récits et de révéler la polysémie du discours lié à un artefact.

Le numéro sera coordonné par Guillaume Biard (Aix-Marseille Université), Jean-Baptiste Delorme (Centre national des arts plastiques) et Arianna Esposito (université de Bourgogne).

La revue a pour rédactrice en chef Dominique de Font-Réaulx.

Les synopsis, comprenant une présentation du sujet problématisé (1 page), une bibliographie sommaire sur le sujet et une biographie de l’auteur (500 signes), sont à adresser sous forme de fichier PDF unique par courriel à revueredachistoiredelart@gmail.com pour le 15 janvier 2022 au plus tard. Le comité de rédaction étudiera les propositions envoyées. Les projets retenus feront l’objet d’articles à remettre pour le 1er mai 2022.

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