Cette seconde journée du séminaire doctoral d’histoire de l’architecture sera consacrée aux rapports de l’histoire de l’architecture et de la ville avec la théorie des transferts culturels et avec l’histoire croisée.
Inaugurée notamment par Michael Werner et Michel Espagne dès les années 1980, la théorie des transferts culturels a essaimé dans les sciences humaines et sociales. Ce modèle interprétatif visait initialement à dépasser le fixisme jugé parfois artificiel de l’histoire comparée et les cloisonnements nationaux des catégories et méthodes de celle-ci. « Les études de transfert, écrit Michael Werner, visent à étudier les interactions entre cultures et sociétés – ou fractions et groupes à l’intérieur d’une société – dans leur dynamique historique, à rendre compte des conditions qui ont marqué leur déclenchement et leur déroulement, à analyser les phénomènes d’émission, de diffusion, de réception et de réinterprétation qui les constituent, enfin à décortiquer les mécanismes symboliques à travers lesquels se recomposent les groupes sociaux et les structures qui les sous-tendent ». Si cette approche a eu un succès immédiat en histoire de l’art, peu de travaux d’histoire de l’architecture se sont explicitement situés dans son sillage .
« 1989 et la fin de la guerre froide, écrit Bénédicte Zimmermann, ont marqué un nouveau tournant. Alors que la comparaison occupait une place dominante, en tant que méthode de recherche et de construction d’objets dans une conjoncture politique marquée par une logique d’oppositions de blocs, la nouvelle donne politique a contribué à la valorisation d’approches dédiées à l’étude des relations, des circulations et des interdépendances entre les différentes parties du monde. L’histoire croisée appartient à cette famille des approches relationnelles, au même titre que l’histoire du métissage et des circulations pour l’espace francophone, les entangled, shared et connected histories pour l’espace anglo-saxon. »
Fondamentalement transnationale et multidimensionnelle, l’histoire croisée dépasse les oppositions entre échelles micro et macro. Elle invite l’historien à inscrire les faits non seulement dans les temps particuliers à son enquête, mais aussi à ceux de ses méthodes.
L’historien n’échappe jamais totalement aux téléologies de son époque, ni à celles du passé de sa discipline, aussi les faits qu’il observe et qu’il décrit entretiennent-ils avec lui, et entre eux, des relations fluctuantes. La méthode de l’histoire croisée est tramée d’ajustements et animée d’une incessante réflexion sur les conséquences et biais éventuels des méthodologies choisies.
Qu’ont apporté et qu’apportent à l’histoire de l’architecture et de la ville la théorie des transferts culturels et l’histoire croisée ?
Quelles sont en retour les inflexions que l’histoire de l’architecture et de la ville pourrait leur apporter ? Quelles sont les précautions à prendre pour lier correctement ces théories avec les objets et temporalités propres à l’histoire de l’architecture et de la ville ?
S’il existe maints auteurs qui ont étudié les échanges transnationaux et des doctorants qui s’intéressent spécifiquement aux transferts culturels et à l’histoire croisée, seront présentés, durant cette journée, plutôt des démarches liées à des terrains particuliers, ainsi que des volets de recherches plus larges en histoire de l’architecture. L’objectif de la journée est de confronter ces théories et méthodes à des cas concrets.
Créé à l’initiative de Jean-Baptiste Minnaert (InTRu, université François-Rabelais, Tours) et d’Anne-Marie Châtelet (École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg / équipe d’accueil Arche, Université de Strasbourg), ce séminaire doctoral libre est organisé en partenariat avec l’EAHN (European Architectural Historians Network) et avec l’INHA.
Ces journées sont ouvertes à tous les historiens de l’architecture et de la ville, doctorants, post-docs et chercheurs, des universités, des écoles d’architecture, des musées ou des services régionaux d’inventaire, et plus largement à tous les historiens d’art et aux chercheurs et doctorants de toutes disciplines, intéressés aux problématiques architecturales, urbaines et spatiales.
PROGRAMME DE LA JOURNÉE
9h30 Accueil et café
10h Introduction d’Anne-Marie Châtelet (professeur, ENSA Strasbourg, Arche) et de Jean-Baptiste Minnaert (professeur, université
François-Rabelais, Tours, InTRu).
10h15 France Nerlich (maître de conférences, université François-Rabelais, Tours, InTRu) :
Transferts culturels, histoire croisée, quelles possibilités pour l’histoire de l’art ?
10h40 Discussion
11h Pause
11h15 Myriam Bacha (chercheur, InTRu) :
Patrimoine, tradition et création architecturale au Maghreb, XIXe-XXe siècle, ou la recomposition des modèles locaux à des fins idéologiques, sociales et touristiques.
11h40 Discussion
12h Christel Frapier (post-doctorante, Centre d’histoire sociale du XXe siècle, CNRS/université Paris I) :
De l’étude des réseaux socioprofessionnels au logement en Europe de l’est et de l’ouest pendant la guerre froide : vers un renouvellement méthodologique de l’histoire de l’architecture ?
12h25 Discussion
12h45 Déjeuner
14h15 Shahram Hosseinabadi (doctorant ENSA Strasbourg) :
Auguste Bluysen (1868-1952) et les anglophones.
Gauthier Bolle (doctorant ENSA Strasbourg) :
Gustave Stoskopf (1907-2004) entre École des beaux-arts et culture alsacienne.
Adrienne Jacob (doctorante ENSA Strasbourg) :
Théâtres allemand et français à Strasbourg au début du XIXe siècle.
15h10 Discussion
15h30 Pause
15h 45 Wei Xiaoli (doctorante Paris 4) :
L’esprit de l’art du jardin traditionnel dans l’architecture contemporaine en Chine.
16h10 Discussion
16h30 Florence Journot (maître de conférences HDR, université Paris 1) :
La Renaissance comme transfert culturel, ou « échange d’art », et la fin du pan de bois figuratif dans les demeures urbaines aux XVe-XVIe siècles.
17h Discussion
17h15 Fin de la journée
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