Revue Histoire de l’art, n° 81. Vincenzo Paudice : « Du ‘Bertuccione‘ de Giorgio Vasari au ‘Gatto Mammone‘ de Giovanni Battista Passeri : l’évolution du topos du singe-peintre dans la littérature artistique italienne de la première modernité »

Vincenzo Paudice

Du ‘Bertuccione‘ de Giorgio Vasari
au ‘Gatto Mammone‘ de Giovanni Battista Passeri :
l’évolution du topos du singe-peintre dans la littérature artistique italienne de la première modernité

Histoire de l’art, numéro 81 (2017/2)

ETUDE

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Figura Diaboli, allégorie du péché, de la vanité, de la passion érotique, de l’indécence sexuelle, des pouvoirs de l’homme et d’autres encore ; l’image du singe a incarné, du Moyen Âge au XVIIIe siècle, une gamme si vaste de symboles et de concepts, qu’il est quasiment impossible de tous les mentionner1. Dans la longue tradition littéraire et artistique européenne, le singe a notamment été attaché au concept d’imitation, tant dans une acception positive (imitatio sapiens) que négative (imitatio insipiens)2, au point qu’il a souvent accompagné l’iconographie de celle-ci3. Durant la première modernité, cette association a d’ailleurs engendré la notion d’ars simia naturae – l’art « singe » de la nature – pour exprimer l’idée selon laquelle l’art n’est qu’imitation de la nature. À partir de cette formule, la théorie de l’art a alors émis la célèbre exhortation, souvent adressée aux peintres, à être des « singe[s] de la nature4 », ce qui est reconnu comme le seul moyen d’atteindre, dans leurs œuvres d’art, l’imitation parfaite de la nature visible. Et c’est probablement encore en référence à l’idée de l’artiste en tant que singe que s’explique, comme l’a remarqué Anne-Marie Lecoq, la naissance, au cours des XVIe et XVIIe siècles, de toute une série de peintures et gravures satiriques provenant de l’Europe du Nord, représentant des singes en train de peindre ou de sculpter5.

Or, c’est également sur cette association entre le peintre et cet animal que semble reposer l’anecdote insolite et amusante de Giorgio Vasari consacrée au bertuccione (singe correspondant au macaque) de Rosso Fiorentino6. Apparue dans la version de 1568 des Vies, l’histoire raconte un vol de raisins commis par l’animal dans le vignoble du couvent des Franciscains près de l’église de Santa Croce. Découverts par l’un des frères franciscains, le singe et son maître sont dénoncés auprès de l’Office des Huit. Les magistrats décident de ne pas condamner le peintre, mais obligent par contre l’animal à porter des contrepoids pour l’empêcher de commettre d’autres méfaits. Il faut toutefois peu de temps au singe pour se venger de celui qui l’a dénoncé. Ayant reconnu le frère, il attend le bon moment pour prendre sa revanche : alors que le celui-ci est occupé à chanter les vêpres dans l’église, le singe monte sur le toit de sa chambre et y exécute une danse frénétique, ne laissant « rien d’intact, ni tuile, ni contre-joint7 ».

Sur la signification profonde de cette anecdote, il n’existe encore aucune interprétation qui fasse l’unanimité dans l’historiographie artistique. Les hypothèses émises sont en effet assez diverses, vu le nombre de symboles attachés à cet animal. S’appuyant sur l’association singe-peintre, d’aucuns, tel Antonio Natali, ont pourtant proposé de voir dans l’animal une référence directe à Rosso. Dans sa monographie consacrée au peintre florentin, Natali a en effet souligné que le caractère excentrique et bizarre du singe présente des analogies tant avec la vie qu’avec le style « stravagante » de Rosso8. Dans la lignée de l’étude de Natali s’inscrit un article récent de Nicolas Cordon, justement consacré à l’anecdote de Vasari9, dans lequel l’auteur reconnaît l’existence d’une analogie supplémentaire entre l’animal et l’artiste : la relation conflictuelle avec les institutions ecclésiastiques. Dans la biographie vasarienne de Rosso, il remarque en effet la présence d’au moins quatre épisodes au cours desquels le peintre entre en conflit avec les autorités religieuses, notamment parce que celles-ci ont critiqué ses tableaux10. En envisageant l’hypothèse selon laquelle les conflits entre l’animal et les frères franciscains pourraient renvoyer aux récurrentes tensions entre le Rosso et le clergé, Cordon se demande si le singe ne personnifierait pas en réalité une doublure du peintre.

Cette dernière théorie est, à notre avis, très intéressante, notamment parce qu’elle pourrait fournir une excellente clé de lecture pour une autre anecdote de Vasari, comptant parmi ses protagonistes l’artiste Buonamico Buffalmacco et le singe de l’évêque d’Arezzo. En partant de cette interprétation, l’objectif de notre travail est de montrer que l’anecdote du singe-peintre sous-entend également une critique contre l’attitude de certains artistes consistant à se soumettre aux exigences des commanditaires dans l’exécution de leurs œuvres. Afin de démontrer notre hypothèse, nous attirerons l’attention sur la diffusion que cette anecdote a connue au cours du XVIIe siècle, et notamment dans deux écrits sur l’art parus durant cette période : la satire sur la peinture de Salvator Rosa (c. 1650)11 et les Vite de’ pittori, scultori ed architetti che hanno lavorato in Roma de Giovanni Battista Passeri(1673)12.

Le bertuccione de Sacchetti-Vasari

L’anecdote de l’artiste Buonamico Buffalmacco et du singe de l’évêque d’Arezzo n’est pas moins plaisante ni moins insolite que celle de Rosso. Buffalmacco est appelé, pour participer à la décoration de la cathédrale d’Arezzo, par l’évêque de la ville, qui possède un bertuccione, c’est-à-dire un gros singe appartenant à la famille des macaques. Doté d’une intelligence aiguë, le singe est capable de mémoriser tous les gestes réalisés par le peintre, et de les répéter dès que l’occasion se présente. Au crépuscule, le singe fait preuve de ses capacités mimétiques : alors que le peintre dort, il retouche en cachette les peintures de la chapelle, ne s’arrêtant qu’« après avoir tout repeint de sa main13 ».Voyant son travail détérioré, Buffalmacco s’adresse alors à l’évêque pour lui demander de placer des soldats dans l’église, afin d’identifier le coupable. Le peintre est en effet persuadé que le malfaiteur est un peintre local, jaloux qu’on ait confié la décoration de la chapelle à un artiste d’une ville rivale, telle que Florence. Mais celui que les soldats arrêtent la nuit suivante est loin d’être un peintre jaloux. À la fois étonné et amusé de voir qu’il s’agissait du singe, Buffalmacco informe personnellement l’évêque des faits, en lui annonçant également sa décision de renoncer à la commande :

‘Monsieur, vous voulez que l’on peigne d’une manière et votre singe d’une autre’. Il lui conta l’aventure et ajouta : ‘Il n’était pas nécessaire d’envoyer chercher des peintres ailleurs, vous avez un maître dans votre propre maison ; peut-être ne savait-il pas bien faire les mélanges. Maintenant qu’il sait, je ne suis plus d’aucune utilité ici et, puisqu’on connaît sa valeur, je ne demanderai comme gages pour mon travail que la permission de retourner à Florence’.14

Contrarié par la requête du peintre de se décharger de la tâche, l’évêque exige que le singe soit enfermé dans une cage placée devant la chapelle, et que Buffalmacco reprenne son travail. Le peintre parvient ainsi à achever ses peintures, tandis que le singe, sans trahir sa nature d’animal « le plus sollazzevole et le plus cattivo qu’on ait jamais vu15 », manifeste toute sa désapprobation en s’agitant dans la cage et en lui faisant des grimaces.

Rappelons tout d’abord que l’anecdote du bertuccione et de Buffalmacco a en réalité été empruntée au Trecentonovelle de Francesco Sacchetti, et surtout qu’elle ne constitue que la première partie de la nouvelle cent soixante et une de cet ouvrage16. L’épisode du bertuccione est en effet suivi d’un deuxième récit, repris également par Vasari, dont les protagonistes sont encore Buffalmacco et l’évêque d’Arezzo :

Le travail de la chapelle achevé, l’évêque, soit par plaisanterie, soit pour toute autre raison connue de lui seul, ordonna ensuite à Buffalmacco de peindre, sur la façade de son palais, l’aigle d’Arezzo terrassant un lion ; le peintre promit de faire tout ce qu’il voulait. Il fit dresser une palissade car il ne fallait pas qu’on le vît faire un tel travail. On le laissa donc seul, mais au lieu d’obéir à l’évêque, il peignit un lion terrassant un aigle17.

Outre les similitudes évidentes, telles que le registre comique, les protagonistes, la commande d’un édifice ou encore le caractère burlesque du peintre, les deux récits semblent partager un autre point commun, à savoir une divergence d’opinion entre deux protagonistes de l’histoire à propos de l’exécution d’une peinture.

En ce qui concerne la commande de la peinture de l’aigle et du lion, il est tout à fait évident qu’une opposition s’est établie entre l’artiste et l’évêque. En bon Florentin, Buffalmacco se refuse à dépeindre une scène dans laquelle la ville d’Arezzo (dont l’aigle est le symbole) soumettrait celle de Florence (évoquée par le lion). En inversant la scène, le peintre renverse la signification symbolique, ce qui déchaîne la colère de l’évêque.

Mais enfin, considérant qu’il avait voulu jouer autrui et qu’il avait bien mérité de l’être en retour, il [l’évêque] pardonna l’injure et marqua sa reconnaissance à Buonamico pour son travail avec très grande libéralité18.

Dans l’anecdote du bertuccione, un désaccord sur la manière dont la commande devrait être réalisée semble en revanche opposer l’animal et l’évêque. Buffalmacco évoque dans le texte cette relation conflictuelle entre les deux, lorsqu’il annonce à l’évêque l’identité du malfaiteur qui a abîmé ses peintures : « Monsieur, vous voulez que l’on peigne d’une manière et votre singe d’une autre ». Si l’opposition entre le peintre et l’évêque est facile à comprendre, comment expliquer ce désaccord entre le singe et l’évêque ?

À ce propos, il faut rappeler que le singe joue, dans le schéma narratif du récit, le rôle d’élément perturbateur. Sa présence, et surtout ses actions, renversent en effet le calme de la situation initiale, en entraînant les péripéties auxquelles les protagonistes sont confrontés. Or, son intervention est également censée déclencher une prise de conscience d’au moins l’un des protagonistes. Compte tenu de la confrontation entre le singe et l’évêque évoquée par Buffalmacco, la retouche en cachette pourrait alors constituer une exhortation, adressée à l’artiste, à ne pas suivre les exigences de l’évêque. Autrement dit, le singe accomplirait un geste de rébellion contre toutes les prétentions du commanditaire afin d’encourager le peintre à faire de même.

Nous pouvons pousser plus loin le raisonnement : Sachetti et Vasari pourraient avoir mis en scène une sorte de conflit intérieur de l’artiste, dans lequel l’une des deux parties, en prenant l’apparence du singe – à savoir l’animal qui s’approche le plus du concept même de l’art –, exhorte l’autre, c’est-à-dire l’artiste, à revendiquer sa liberté par rapport au sujet à peindre. Par ailleurs, la théorie selon laquelle l’animal représenterait un double de l’artiste pourrait également s’appliquer à cette anecdote. C’est notamment le recours, par Vasari, aux adjectifs sollazzevole et cattivo pour esquisser le caractère du singe, qui permet de soutenir une telle hypothèse. Déjà employés comme synonymes dans les ouvrages des grands nouvellistes toscans du XIVe siècle, ces deux adjectifs semblent en effet fortement renvoyer à la personnalité de Buffalmacco, qualifié par l’auteur arétin de « plus grand plaisantin du monde19 ».

L’emploi que Boccace a fait de ces deux adjectifs dans son Décaméron semble renforcer cette théorie. Le terme de sollazzevole apparaît dans la troisième nouvelle de la huitième journée, qui voit le peintre Buffalmacco et son compagnon Bruno faire croire à Calandrino qu’ils ont trouvé l’héliotrope – la pierre ayant le pouvoir de rendre invisible celui qui la possède20 – afin de mettre en exergue le caractère amical et amusant du peintre et de son compagnon. L’adjectif cattivello21 apparaît en revanche dans la septième nouvelle de la huitième journée, relatant encore une beffa faite par Buffalmacco et Bruno à Calandrino. Employé comme substantif, ce terme désigne la situation particulière vécue par Calandrino : il fait l’objet d’une plaisanterie de Bruno et Buffalmacco, tandis que ceux-ci lui laissent croire que c’est à lui de se moquer d’eux. Or, si au cours du XIVe siècle (et surtout dans le Décaméron de Boccace) le terme cattivo assume, comme l’a bien mis en évidence Vittore Branca22, de nombreuses significations selon le contexte d’apparition, il est évident que cet adjectif peut également s’employer afin d’indiquer une personne perspicace, qui ne se laisse pas tromper23.

L’action perturbatrice du singe ne produit pourtant ses résultats que dans le deuxième récit, c’est-à-dire celui concernant la commande du lion et de l’aigle. Dans la conclusion de la première anecdote, l’artiste florentin accepte en effet que le singe soit enfermé dans une cage ; une possible métaphore de l’artiste qui réprime sa nature la plus instinctive, celle qui ne se soumet pas au commanditaire, mais également celle qui, selon la notion de l’ars simia naturae, se rapproche davantage du concept même de l’art. C’est alors face aux prétentions croissantes de l’évêque, qui n’hésite pas à confier à l’artiste florentin la réalisation d’une scène symbolisant la domination d’Arezzo sur Florence, que la prise de conscience de l’artiste a lieu, comme semblerait en témoigner le renversement de la scène commandée.

La diffusion du topos au cours du XVIIe siècle

Si un grand nombre de travaux ont souligné que l’image du singe-peintre est devenue un véritable topos littéraire et figuratif (les singeries) au cours de la première modernité, très peu d’études se sont penchées sur la question particulière de sa diffusion au sein de la littérature artistique italienne du XVIIe siècle. Durant cette période, des anecdotes qui mettent en scène un singe qui s’exerce à la peinture ont été intégrées dans au moins deux écrits sur l’art : la satire sur la peinture écrite par Salvator Rosa et les Vite de’ pittori, scultori ed architetti che hanno lavorato in Roma de Giovanni Battista Passeri.

La satire (en tercets) de Rosa est une critique acerbe envers les artistes qui ont, selon l’auteur, trahi le véritable but de l’art, tels que les peintres bambochards, représentant dans leurs tableaux des sujets lâches, ou encore ceux qui ont, par avidité, accepté toutes les requêtes de leurs commanditaires. Pour énoncer la plupart de ses critiques, Rosa se sert de la figure d’un singe, en s’appuyant sur la connexion symbolique entre cet animal et le concept d’imitation. Plus particulièrement, il met en scène l’histoire d’un bertuccione, capable de s’exprimer par le langage qui est propre aux hommes, qui rejoint la maison d’un artiste afin d’apprendre la peinture.

[Le singe dit :] Salut […] apprendre la peinture auprès de vous est mon désir / et, bien que je sois une bête, j’ai tant d’ingéniosité / dont peu de peintres sont dotés. / L’art de la couleur et du dessin / n’est qu’imitation, et vous savez / que de l’imitation le singe est le symbole24.

Au bout de dix années, le singe manifeste pourtant son mécontentement, au point de se rebeller contre son maître. Il abandonne l’apprentissage, exaspéré de ne rien apprendre, mais aussi par la manière de vivre « comme une bête25 » du peintre. Avant de quitter définitivement la maison du peintre, le singe n’hésite pas à lui adresser une série de reproches, qui peuvent se diviser en deux grandes typologies : celles concernant son style de vie et celles relatives à son approche de la peinture.

Tout en présentant des différences par rapport à l’histoire du singe et de Buffalmacco, surtout d’un point de vue narratif, le récit de Rosa trahit une dépendance directe vis-à-vis de l’anecdote de Sacchetti-Vasari. Dans la satire du peintre napolitain, le singe affirme en effet être un descendant direct du bertuccione de l’évêque d’Arezzo, et témoigne dès lors de l’existence d’un rapport intertextuel entre les deux textes26. Pourtant, Salvator Rosa a davantage humanisé cet animal par rapport à Vasari. En effet, le singe de Rosa est capable non seulement de mémoriser et de répéter les gestes et les actions de l’homme, mais aussi de parler comme les hommes, ce qui lui permet de se livrer à toute une série de reproches envers son maître.

À ce propos, une analyse détaillée de l’utilisation des figures de rhétorique par l’auteur napolitain dans son texte laisse transparaître l’existence d’une échelle de valeurs entre les deux groupes de reproches adressés au maître. En ce qui concerne les critiques du style de vie du peintre, Rosa a recours à la figure de la prétérition, qui consiste à parler de quelque chose en commençant par annoncer qu’on ne va pas en parler27, comme dans les passages suivants :

Trapasso che da lungi e che da presso/ la casa tua con il fetore annoia […] Passo sotto silenzio i mesi interi / che consumai d’estate intorno a i forni / a compor olii per trovare i neri.

Que ce soit de près ou de loin, je ne dirai pas / que la puanteur de ta maison dérange / […] / Je passe sous silence les mois entiers / que j’ai passé durant l’été autour des fours / à mélanger les huiles afin de trouver les tons noirs28.

Alors que le but de cette figure est de mettre davantage en évidence ce dont on ne voulait pas parler, Rosa semble en inverser la fonction principale, en recourant à la litote pour le deuxième groupe de critiques. Cette figure consiste en effet à dire moins pour laisser entendre davantage, ce qui se produit notamment par la négation d’un contraire29, comme dans l’extrait suivant :

Ma l’altre cose infami / non mi permetton, no, che stia più immobile.

Mais, d’autres choses infâmes / ne me permettent point de rester tranquille30.

Rosa accorde ainsi plus d’importance aux critiques à l’égard de l’approche de la peinture du maître, parmi lesquelles la plupart font référence au fait que l’artiste s’est désormais conformé aux exigences des commanditaires. Il est en effet évident qu’une critique qui ne peut pas être tue est de fait plus importante que celle qui peut être passée sous silence. Dans cette perspective, on pourrait alors imaginer que c’est notamment l’approche de la peinture du maître qui a amené le singe à se rebeller, mais surtout que l’image du singe-peintre relève, là encore, d’une condamnation envers l’attitude de nombreux artistes consistant à se soumettre aux prétentions des commanditaires.

L’histoire intégrée dans la biographie de Francesco Barbieri, dit le Guerchin, par Giovanni Passeri semble également soutenir cette hypothèse. L’auteur relate en effet que le peintre de Cento possède un animal domestique, nommé le gatto mammone, qui l’accompagne au quotidien, surtout lorsqu’il peint dans son atelier. À l’instar du bertuccione de Vasari, l’animal repeint une toile inachevée de son maître, alors que celui-ci s’absente de son atelier pour raccompagner des visiteurs31. Dans la conclusion, le registre comique du récit prend pourtant une tournure tragique. L’animal est en effet victime d’un empoisonnement par des inconnus, suscitant la tristesse du peintre (et du lecteur) : « le Guerchin eut pitié de cet animal, dont la perte le chagrina vraiment32. »

Rappelons que l’historiographie artistique n’a jamais associé directement l’histoire de Passeri à l’anecdote de Buffalmacco. Induits vraisemblablement en erreur par le fait que l’animal s’appelle gatto mammone, les historiens qui se sont intéressés à cette anecdote, telle qu’Ismène Cotensin, ont en effet présumé qu’il s’agissait d’un véritable chat33. De nombreuses sources apparues entre le XVIe et le XVIIe siècle montrent pourtant que le terme gatto mammone désigne en réalité un singe, appartenant plus particulièrement à la famille des cercopithèques. Au cours du XVIe siècle, c’est ce qui transparaît du Nuovo Spicilegio de Filippo Venuti : le terme vulgaire de gatto mammone trouve en effet un équivalent dans l’entrée latine de cercopithecus34. La signification reste inchangée au cours du XVIIe siècle, comme en témoigne l’ouvrage d’Eugenio Raimondi (Delle Caccie, 1675) qui, dans le chapitre consacré à la chasse aux singes, désigne le gatto mammone comme l’un des singes les plus libidineux35.

Or, les similitudes entre l’anecdote de Sacchetti-Vasari et la satire de Rosa ne semblent pas s’arrêter à la présence de cet animal dans l’histoire. L’action du singe du Guerchin paraît également sous-entendre une critique envers le rapport du peintre avec ses commanditaires. Dans le passage qui précède l’histoire du gatto mammone, Passeri accuse en effet le Guerchin d’avoir altéré son style, à la suite de la mort de Guido Reni, pour mieux satisfaire les exigences des commanditaires bolonais :

Ayant décidé de rester dans sa patrie suite à la mort de Guido, il changea sa manière de peindre […] il adopta ainsi un style délicat et suave, en estimant que de cette façon il contenterait le goût universel. Et il se trompa avec cette nouveauté, car il peignit d’une manière peu appréciée (comme les Professeurs de grande qualité disaient) et d’une manière faible et sans vigueur. Et c’est ce qui arrive à celui qui veut innover dans ce qui a déjà été fait à la satisfaction de tous.36

S’ensuit alors l’anecdote du singe dans laquelle le lien avec la critique précédente semble ressortir du fait que l’animal repeint la toile du Guerchin, en se moquant par ailleurs de son maître, exactement au moment où l’artiste est occupé à s’entretenir avec sa clientèle : « étant resté seul dans la pièce, le singe prit les pinceaux et la palette pour travailler, en imitant son maître37. »

Remarquons d’ailleurs que, à l’instar du bertuccione de Sacchetti-Vasari, le singe du Guerchin semble également renvoyer à l’artiste, comme en témoigne le passage décrivant le moment où le peintre découvre le singe en train de peindre :

Après avoir raccompagné ses visiteurs, en ouvrant la porte de l’atelier, il [le Guerchin] vit le petit animal qui travaillait avec tant de grâce. Or, il s’arrêta et, en invitant ses gens à rentrer dans la maison, il assista avec eux à la scène38.

Cette scène rappelle en effet un autre épisode de la vie du peintre, évoqué par Passeri dans la toute première partie de la biographie, concernant la découverte du talent de Guerchin par Augustin Carrache.

Quand il [Augustin] le vit, étonné de l’esprit du jeune homme [le Guerchin], il le montra à Annibal et à Ludovic, et tous les trois, l’un après l’autre, lui donnèrent des exemples pour qu’il les étudie39.

La réaction du Guerchin face à la capacité du singe présente de fortes analogies avec celle que les trois Carrache ont manifestée à la découverte du talent du peintre de Cento. Dans les deux cas, l’étonnement (fermatosi ; sorpreso) du spectateur face à ce qu’il voit est si fort que cela l’amène à le partager avec quelqu’un d’autre. L’action du singe exerce ainsi une sorte de pouvoir évocateur sur le lecteur. Cela lui rappelle le moment où le Guerchin, encore jeune, poursuivait le véritable but de l’art par l’imitation de la nature, qu’il a par contre abandonné, selon Passeri, lorsqu’il a choisi de changer de style afin de satisfaire une nouvelle clientèle. Autrement dit, ce passage produit sur le lecteur une impression de déjà vu narratif, ce qui engendre dans son imaginaire, une juxtaposition entre l’artiste et le singe, en présentant celui-ci comme une sorte de double du premier.

En s’attardant sur la diffusion du topos du singe-peintre au sein de la littérature artistique italienne du XVIIe siècle, cette étude a mis en évidence l’existence d’une dépendance directe des récits de Rosa et Passeri vis-à-vis de l’anecdote de Vasari-Sacchetti au sujet de Buffalmacco et du bertuccione de l’évêque d’Arezzo. Si cette connexion est assez sensible d’un point de vue narratif, elle semble également se confirmer sur le plan interprétatif. Comme l’a remarqué Anne-Marie Lecoq à propos des œuvres septentrionales du XVIe et du XVIIe siècle mettant en scène des primates dans l’action de peindre ou de sculpter, l’image du singe-peintre ressortant de ces trois récits semblerait également sous-entendre une condamnation tant envers certains commanditaires, qui imposent leurs exigences aux artistes auxquels ils ont confié la réalisation d’une œuvre, qu’envers les artistes qui, souvent par cupidité, se soumettent à ces prétentions.

Cette étude a également cherché à démontrer que dans les anecdotes de Buffalmacco et du Guerchin, les deux auteurs ont recours à des stratagèmes narratifs afin de juxtaposer la figure du singe et celle de l’artiste. En s’appuyant sur la formule selon laquelle le peintre est un singe de la nature, elle-même issue de la théorie de l’ars simia naturae, nous avons envisagé l’hypothèse selon laquelle la figure du singe joue, dans ces histoires, le rôle de doublure de l’artiste.

Pourtant, une légère mais significative évolution par rapport à l’anecdote de Sacchetti-Vasari s’est révélée dans les deux récits du XVIIe siècle. Si dans l’anecdote de Buffalmacco, le singe s’oppose au commanditaire, le primate de Passeri et Rosa semble plutôt se révolter contre l’artiste lui-même. Cela étant, les deux auteurs du XVIIe siècle pourraient avoir mis en scène un véritable conflit intérieur, dans lequel l’une des deux parties, en prenant l’apparence du singe, accuse l’autre d’avoir trahi le concept même de l’art.

Dans les anecdotes de Vasari et de Passeri, le singe avance ses critiques au travers d’un geste : il prend le pinceau du maître et modifie tout ce que l’artiste avait déjà fait. Accomplie afin de défendre la liberté du peintre contre toute forme d’attaque, cette action du singe constitue l’élément perturbateur de deux des trois récits. Son intervention renverse en effet la situation initiale, en déclenchant de fait une prise de conscience de l’artiste, qui se manifeste par la vengeance contre le commanditaire, dans le cas de Buffalmacco, ou par un sentiment de tristesse, dans le cas du Guerchin. Cette action perturbatrice ne se produit pas dans la satire de Rosa. Cette différence pourrait facilement être attribuée au genre littéraire adopté par le peintre napolitain. La satire, dans laquelle se mélangent souvent différents genres littéraires dont la fable, lui permet en effet d’anthropomorphiser davantage l’animal, au point de lui donner la parole. Rosa n’a dès lors pas besoin de faire appel à un acte symbolique ou évocateur. Le singe peut en effet exprimer tous ses ressentiments par la parole, en montrant d’ailleurs une grande capacité à manier les figures de rhétorique. Et c’est également à travers la parole que le singe de Rosa nous laisse entrevoir que ce topos ne peut se présenter uniquement comme un simple divertissement. En plus de revendiquer sa descendance directe du bertuccione de Sacchetti-Vasari, le singe de Rosa qualifie en effet l’action de son ancêtre de « noble et sage40 », ce qui témoigne d’une fonction moralisante de ce topos littéraire, tout en lui conservant son registre comique.

Né à Naples en 1985, Vincenzo Paudice est doctorant en histoire de l’art à l’université catholique de Louvain. Depuis 2013, il est membre du GEMCA (Group for Early Modern Cultural Analysis). Son projet de thèse porte sur la réception de la peinture « d’Oltralpe » dans la théorie de l’art italienne au cours du XVIIe siècle.

notes

1. Sur le symbolisme du singe au Moyen Âge et à la Renaissance, voir : H. W. Janson, Apes and Ape-Lore in the Middle Ages and the Renaissance, Londres, The Warburg Institute University of London, 1952 ; A.-M. Lecoq, « Le Singe de la nature », dans P. Georgel, A.-M. Lecoq (éd.), La Peinture dans lapeinture, Paris, Adam Biro, 1987 (Dijon, 1983), p. 56-59.

2. Ibid., 1987, p. 56.

3. C. Ripa, Iconologia, éd. dirigée par P. Buscaroli, préface de Mario Praz, Milan, TEA, 1992, p. 181-182.

4. Cf. Janson, Apes and Ape-Lore, p. 287-326.

5. À ce propos, il faut signaler que Lecoq met en évidence que ces œuvres ont également une forte portée morale : « la satire vise autant la sotte vanité de la clientèle que la vicieuse malignité de celui qui, par intérêt, flatte ce travers. » Cf. Lecoq, « Le singe de la nature », p. 56.

6. G. Vasari, Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, trad. et éd. commentée sous la direction d’André Chastel, Paris, Actes Sud, collection « Thesaurus », vol. II, 2005, p. 182-183.

7. « [Le singe] sembla deviner que le moine en était responsable ; tous les jours, il s’entraînait à sautiller en tenant son poids dans les mains et ainsi, par petites étapes, en le déposant souvent, il parvint à ses fins. Un jour où il était resté seul à la maison, il sauta avec précaution de toit en toit à l’heure où le portier chantait les vêpres et arriva jusqu’à celui de sa chambre. Là il lâcha le poids et se livra pendant une demi-heure à un tel ballet amoureux qu’il ne resta rien d’intact, ni tuile, ni contre-joint. » « [Il bertuccione] s’indovinasse il frate essere stato di ciò cagione: onde ogni dì s’essercitava saltando di passo in passo con le gambe e tenendo con le mani il contrapeso, e così posandosi spesso, al suo disegno pervenne. Perché sendo un dì sciolto per casa, saltò a poco a poco di tetto in tetto su l’ora che il guardiano era a cantare il vespro, e pervenne sopra il tetto della camera sua; e quivi lasciato andare il contrapeso, vi fece per mezza ora un sì amorevole ballo, che né tegolo né coppo vi restò che non rompesse. » Ibid., vol. II, p. 183.

8. A. Natali, Rosso Fiorentino, leggiadra maniera e terribilità di cose stravaganti, Milan, Silvana Editoriale, 2006, p. 141.

9. L’article de Cordon, à paraître dans l’ouvrage collectif Singes et singeries à la Renaissance, est accessible en ligne : N. Cordon, « De l’usage du singe chez Giorgio Vasari : quelques réflexions à propos du Bertuccione de Rosso », URL : https://www.academia.edu/17729195/_De_l_usage_du_singe_chez_Giorgio_Vasari_quelques_réflexions_à_propos_du_bertuccione_de_Rosso_, consulté le 03/03/2016.

10. Plus particulièrement, Vasari relate les conflits entre Rosso et le clergé de l’hôpital Santa Maria Nuova à Florence (Vasari, Les Vies, vol. II, p. 181), de l’église augustinienne de Santo Spirito (ibid., vol. II, p. 181-182), et de la Città di Castello (ibid., vol. II, p. 185). Le quatrième épisode concerne en revanche une dispute ayant mal tourné entre le peintre et un prêtre, après que celui-ci a maltraité un élève dans une église pour avoir perturbé la messe du Jeudi saint (ibid., vol. II, p. 185-186).

11. S. Rosa, Satire, odi e lettere di Salvador Rosa, illustrées par G. Carducci, Florence, Barbera, 1860, p. 117-153.

12. G. Passeri, Vite de’ pittori, scultori ed architetti che hanno lavorato in Roma, morti dal 1641 fino al 1673, fac-similé de l’édition de 1772, Bologne, Arnaldo Forni Editore, 1976, p. 380-381.

13. « Non restò se non quando ebbe ogni cosa ridipinto di sua mano. » Vasari, Les Vies, vol. I, p. 183.

14. « ‘Monsignor, voi volete che si dipinga a un modo et il vostro bertuccione vuole a un altro’. Poi, contando la cosa, soggiunse: ‘Non iscadeva che voi man daste per pittori altrove, se avevate il maestro in casa: ma egli forse non sapeva così ben fare le mestiche. Orsù, ora che sa, faccia da sé, che io non ci son più buono, e, conosciuta la sua virtù, son contento che per l’opera mia non mi sia alcuna cosa data se non licenza di tornarmene a Firenze’. » Nous estimons que la première phrase que Buffalmacco adresse à l’évêque a fait l’objet d’une traduction erronée dans les deux versions en français réalisées sous la direction d’André Chastel (« Monseigneur, vous aimez ma manière de peindre, mais votre singe en préfère une autre »). Du texte original ressort uniquement qu’il existe une opposition entre l’évêque et le bertuccione, mais aucun élément ne nous permet d’affirmer que cette opposition se produise également entre l’artiste et le singe. Dès lors, nous avons préféré traduire personnellement cette phrase. Pour la suite du texte : ibid., vol. I, p. 183-184.

15. « Il più sollazzevole et il più cattivo che altro che fusse mai. » Ibid., vol. I, p. 183.

16. Il s’agit d’un recueil de courtes nouvelles portant sur des sujets de la vie quotidienne florentine de l’époque. Des trois cents nouvelles composant l’ouvrage de Sacchetti, seules deux cent vingt-trois nous sont parvenues. Cf. F. Sacchetti, Le Trecento novelle, éd. sous la direction de M. Zaccarello, Florence, Edizioni del Galluzzo per la Fondazione Ezio Franceschini, 2014.

17. « Finita l’opera di questa capella, ordinò il vescovo, o per burla o per altra cagione che egli se lo facessi, che Buffalmacco gli dipignesse in una facciata del suo palazzo un’aquila addosso a un leone, il quale ella avesse morto. L’accorto dipintore, avendo promesso di fare tutto quello che il vescovo voleva, fece fare un buono assito di tavole, con dire non volere esser veduto dipignere una sì fatta cosa. E ciò fatto, rinchiuso che si fu tutto solo là dentro, dipinse, per contrario di quello che il vescovo voleva, un leone che sbranava un’aquila. » Vasari, Les Vies, vol. I, p. 184.

18. « Considerando chi egli si era messo a volere burlare e che bene gli stava rimanere burlato, perdonò a Buonamico l’ingiuria e lo riconobbe delle sue fatiche liberalissimamente. » Ibid., vol. I, p. 184.

19.  Vasari, Les Vies, vol. I, p. 184.

20. G. Boccaccio, Decameron, éd. commentée par Vittore Branca, 2 vol., Turin, Einaudi, 1992, p. 905-919.

21. Ibid., 1992, p. 944.

22. Ibid., 1992, p. 934-943.

23. La première édition du Vocabolario degli accademici della Crusca (1612) a aussi défini ce terme comme synonyme d’« ingénieux et sagace ». Cf. Vocabolario degli Accademici della Crusca, reproduction anastatique de la première édition [Venise, 1612], Florence-Varese, ERA Edizioni, 2008 (Florence, 1987), s.v. Cattivo.

24. « Olà, – soggiunse,- / sbandeggiate, maestro, ogni spavento. / L’amor de la vostr’arte il cuor mi punse / e col di lei color l’affetto mio / un genio ereditario in un congiunse. / La pittura imparar da voi desío / e, se ben io son bestia, ho tanto ingegno / che n’han pochi pittor quanto n’ho io. / L’arte del colorito e del disegno / è pura immitazion, e voi sapete / che dell’immitazion la scimia è segno. » S. Rosa, Satire, odi e lettere, 1860, p. 136-137, trad. de l’auteur.

25. « Il tuo vivere senza governo. » Ibid., p. 140.

26. « Il fut mon ancêtre cet ancien magot / qui de façon si noble et si sage / a retouché cette œuvre de Buonamico » (trad. de l’auteur), « Fu mio bisavo quel scimmione antico / Che con modo sì nobile e sì saggio / Quell’opra ritocco di Buonamico », ibid., p. 138.

27. B. M. Garavelli, Manuale di retorica, Milano, Bompiani, 1992, p. 253.

28. Rosa, Satire, odi e lettere, p. 140-141, trad. de l’auteur.

29. Garavelli, Manuale di retorica, p. 176-178.

30. « Ma l’altre cose infami / non mi permetton, no, che stia più immobile. » Rosa, Satire, odi e lettere, 1860, p. 141, trad. de l’auteur.

31. Passeri, Vite, p. 380-381.

32. « Il Guercino se ne prese tal compassione, che se ne dolse amaramente. » Ibid., p. 381.

33. Cf. I. Cotensin, « Animaux et animalité dans les Vite de Vasari et de ses successeurs », Italies, Revue d’études italiennes, 2008, 12, p. 293.

34. F. Venuti, Nuovo Spicilegio Volgare et Latino, Venise, Valvassori, p. 368.

35. E. Raimondi, Delle Caccie, Venise, Catani, 1675, p. 9.

36. « Avendo mutato parere nella morte di Guido di stanziare in patria, mutò anche maniera nel suo dipingere, ed avendo lasciata quella forza, ed ardimento di scuro fin a quel tempo maneggiata, diedesi aduno stile delicato, e soave parendogli così di secondare il gusto dell’ universale. S’ingannò con questa novità, perche diede in una debolezza poco gradita (così dicevano i buoni Professori), ed in una maniera languida, e di poco vigore, e così interviene a chi vuole innovare le cose già praticate colla commune sodisfazzione. » Passeri, Vite, p. 379-380, trad. de l’auteur.

37. « Restato il Gattino solo nella stanza diede di mano ai pennelli. » Ibid., p. 380.

38. « Egli tornato dall’accompagnamento, nell’aprire della porta della Stanza vidde l’Animaluccio, che con tanta grazia attendeva ad operare. Fermatosi, e chiamando tutti di casa si trattennero un poco spettatori di quella curiosità. » Ibid., p. 381, trad. de l’auteur.

39. « Quando egli lo vide, sorpreso dallo spirito del giovinetto. Lo portò ad Annibale e a Lodovico, e andarono tutti tre ugualmente quando l’uno, e quando l’altro seguitando a dargli dell’esempi acciocché studiasse. » Ibid., p. 370, trad. de l’auteur.

40. Rosa, Satire, odi e lettere, p. 138.

 

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