Deuxième séance du séminaire « Qu’est-ce que les études de genre font à l’histoire de l’art? »
Sara Matthews-Grieco : Artistes-femmes italiennes et construction de l’identité de la pittora : Sofonisba Anguissola, Lavinia Fontana, Artemisia Gentileschi
Tandis que dans les couvents médiévaux travaillaient depuis longtemps des artistes compétents dans les media figuratifs – depuis l’enluminure jusqu’à la tapisserie –, la figure de la femme peintre professionnel n’a émergée en Italie qu’au XVIe siècle. Dans cette communication, j’examinerai comment quelques unes de ces artistes femmes se sont servies de leur genre comme d’un atout pour se créer une position dans le monde de l’art contemporain. Une attention particulière sera accordée à l’aristocrate désargentée de Crémone Sofonisba Anguissola, à la dominicaine florentine Plautilla Nelli, à la lauréate bolognaise Lavinia Fontana ainsi qu’au personnage polémique d’Artemesia Gentileschi, qui ont toutes usé de leur genre comme d’une ressource afin de négocier leur carrière artistique respective. Dans le catalogue des sujets considérés comme appropriés au pinceau féminin, l’autoportrait s’être révélé un instrument important de construction de soi : l’autoportrait était alors un sujet pictural entièrement nouveau, grâce auquel les femmes pouvaient définir leur identité sociale, professionnelle et sexuée. En même temps, il offrait un modèle de composition sur lequel pouvait s’appuyer une succession des femmes peintres en combinant détails iconographiques et références symboliques pour prendre position sur le sujet du portrait (en tant qu’individu) et sur celui de l’artiste (en tant que femme).
Professeure d’histoire et coordinatrice du groupe de recherche sur le genre et la sexualité à l’Université de Syracuse à Florence, Sara Matthews-Greco est également membre du centre d’études européenne de la Maxwell School à Syracuse University, New York. Elle a contribué à Erotic Cultures of Renaissance Italy (Aldershot UK, Ashgate 2010), At Home in Renaissance Italy (London, V&A, 2006), Histoire du Corps, vol. 1 (Paris, Seuil, 2005), Le désir et le goût, une autre histoire (Paris, Presses de l’Université de Vincennes, 2005) ; Women in Italian Renaissance Culture and Society (Oxford UK, European Humanities Research Centre, 2000). Elle est co-éditrice de Représentation et identité en Italie et en Europe XVe-XIXe siècle (Rome, MEFR, 2003), The Art Market in Italy, 15th-17th centuries (Modena, Panini, 2003), Monaca, moglie, serva, cortigiana. Vita e immagine della donna tra rinascimento e controriforma (Florence, Morgana, 2001). Elle a reçu de nombreux prix et bourses, notamment de l’American Philosophical Society, de la John Simon Guggenheim Foundation, du Harvard Center for Italian Renaissance Studies (Villa I Tatti) et de l’European University Institute. Ses recherches actuelles portent sur les femmes, la famille et la sexualité à la Renaissance et au début des temps modernes en France et en Italie, ainsi que sur la littérature visuelle et la codification d’un idiome iconographique en Europe entre 1450 et 1650.
Bettina Uppenkamp : Qui souhaitait des héroïnes ? Les femmes artistes italiennes et leurs commanditaires
Beaucoup des femmes artistes dont l’activité en Italie est connue à la fin du XVIe et au XVIIe siècles ne se limitaient pas à des genres réputés féminins, tels que la nature morte ou le portrait. Certes, le portrait est dominant dans l’œuvre de Sofonisba Anguissola et en tant que peintre de natures mortes, Fede Galizia a contribué de manière significative à la mise en place de ce genre en Italie. Cependant, la peinture d’histoire et les sujets religieux ou mythologiques jouent un rôle important dans le travail d’autres artistes, telles que Lavinia Fontana, Artemisia Gentileschi et Elisabetta Sirani, par ailleurs célèbres pour leurs images de femmes fortes exemplaires. Cette conférence porte sur les commanditaires de ces représentations d’héroïsme féminin. Est-ce que pour celles-ci non seulement le sujet, mais aussi le genre des artistes a joué un rôle ? Ces artistes avaient-elles reçues des commandes de tableaux représentant des femmes fortes non malgré qu’elles aient été des femmes, mais au contraire parce qu’elles l’étaient ?
Bettina Uppenkamp a soutenu sa thèse de doctorat en 1997 à l’Université de Hambourg, qu’elle a publiée sous le titre : Judith und Holofernes in der italienischen Malerei des Barock. Elle a ensuite été postdoctoral fellow au sein du groupe de recherche Die Renaissance in Italien und ihre europäische Rezeption de l’université de Bonn, puis chargée de recherche à l’Université Humboldt à Berlin de 1999 à 2005. Sa thèse d’habilitation soutenue en 2009 était consacrée aux cassoni italiens du XVe siècle. Elle a été maître de conférences à l’Université des arts appliqués de Vienne, professeure invitée à l’Institut d’histoire de l’art et à l’Académie des beaux-arts de Hambourg, ainsi qu’à l’Institut d’art et d’histoire visuelle de l’Université Humboldt. Depuis 2013, elle est professeure d’histoire de l’art à l’Académie des beaux-arts de Dresde et membre du réseau d’excellence Image, Knowledge Gestaltung. An Interdisciplinary Laboratory de l’Université Humboldt. Ses travaux portent sur l’art du début de la période moderne, le genre et l’art contemporain.
Jeudi 13 février 2014
15h-17h
Salle Giorgio Vasari
2, rue Vivienne
75002 Paris
Accès : 6 rue des Petits-Champs
Entrée libre
Prochaines séances :
– 20 mars 2014 : Académiciennes au miroir
– 10 avril 2014 : Carte blanche à Susan Siegfried
– 22 mai 2014 : Autoportraits et filiations
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