Séminaire : « Notre-Dame de Paris, la cathédrale des savoirs. Entre matérialité et interdisciplinarité » (Paris, Collège de France, 24 sept., 22 oct., 5 et 26 nov., 17 déc. 2024)
Séminaire organisé avec le concours du musée de Cluny-Musée national du Moyen Âge. Avec Étienne Anheim (directeur d’études à l’EHESS), Damien Berné (conservateur en chef au musée de Cluny) et Séverine Lepape (conservatrice générale, directrice du musée de Cluny).
Débuté immédiatement après l’incendie du 15 avril 2019, le chantier de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris a été l’occasion de découvertes majeures, d’autant plus importantes que la cathédrale demeurait paradoxalement mal connue.
Accompagnant la progressive réouverture au public de la cathédrale, le musée de Cluny lui consacrera deux expositions à partir du 19 novembre 2024, l’une sur la sculpture médiévale, l’autre sur la bibliothèque. Dans ce contexte d’émotion patrimoniale qui rappelle la place centrale de la cathédrale non seulement dans l’architecture urbaine, mais aussi dans l’organisation sociale, religieuse et politique des villes médiévales, ce séminaire voudrait replacer Notre-Dame dans son histoire et montrer l’ampleur des nouvelles recherches conduites au cours des dernières années.
En effet, le chantier de restauration a été l’occasion d’un intense travail interdisciplinaire, associant une grande diversité d’acteurs scientifiques issus des institutions patrimoniales, mais aussi de l’université et de la recherche. Entre matérialité et interdisciplinarité, cette nouvelle cathédrale de savoirs sera au cœur de ce séminaire.
Programme :
24 septembre 2024 de 16h à 19h
Introduction générale
Au Collège de France : Salle 5, Site Marcelin Berthelot, 11, place Marcelin-Berthelot (Paris 5)
Par Patrick Boucheron (Professeur au Collège de France) et Étienne Anheim (directeur d’études, EHESS)
Deux cathédrales ont brûlé en même temps le 15 avril 2019 : celle qui fut fondée en 1163 par l’évêque Maurice de Sully, et celle qu’on ne cesse de reconstruire par l’imaginaire depuis le 18e siècle. Par un paradoxe archéologique bien connu, la destruction peut être le préalable à la connaissance : le chantier scientifique qui accompagne la restauration de l’édifice produit donc un effet de révélation sur des structures médiévales mal connues – on comprend bien de ce point de vue l’inanité du concept même de « restauration à l’identique ».
Ces structures sont archéologiques, mais elles sont aussi culturelles, politiques et sociales. Voici pourquoi la « cathédrale des savoirs » ainsi mise à jour est aussi celle que construisent et reconstruisent nos imaginaires contemporains. En sauvant le passé, on en mesure l’épaisseur – c’est-à-dire tout ce qui s’est passé entre le Moyen Âge et nous.
22 octobre 2024 de 16h à 19h
De l’étude scientifique à la restauration: les dimensions d’un chantier unique
Au Collège de France : Salle 5, Site Marcelin Berthelot, 11, place Marcelin-Berthelot (Paris 5)
Par Philippe Dillmann (Directeur de recherches au CNRS), Pascal Liévaux (Chef du département de la recherche, de la valorisation et du patrimoine culturel immatériel, Direction générale des patrimoines et de l’architecture, Ministère de la culture), Aline Magnien (Directrice honoraire du Laboratoire de recherche des monuments historiques), Martine Regert (Directrice de recherches au CNRS).
Avec la participation de Dorothée Chaoui-Derieux (Archéologue au service régional d’archéologie de la Drac Ile-de-France), de Jonathan Truillet (Adjoint « Science et patrimoine » à la directrice générale déléguée, Établissement public « Rebâtir Notre-Dame de Paris ») et d’un des Architectes en Chef des Monuments Historiques intervenant sur la restauration de la cathédrale.
Le chantier de Notre-Dame de Paris, tel qu’il a été mené depuis cinq ans, a constitué une entreprise matérielle et intellectuelle inédite, au sein duquel la recherche scientifique a tenu une place essentielle.
En prenant pour point de départ l’ouvrage « Notre-Dame. La science à l’œuvre » (dir. Ph. Dillmann, P. Liévaux, A. Magnien et M. Regert, Paris, 2022), cette séance présentera ce chantier scientifique, souvent moins connu que le chantier de restauration lui-même, les modalités de sa mise en place et de son fonctionnement et les résultats obtenus, notamment concernant la matérialité du monument, qui était encore relativement méconnu, mais aussi des domaines aussi différents que l’acoustique ou l’anthropologie de l’émotion patrimoniale. Elle éclairera également la dimension fortement collaborative du projet, mêlant les corps de métiers, les institutions et les disciplines scientifiques au service d’une saisie globale de l’objet patrimonial.
5 novembre 2024 de 16h à 19h
Les livres à Notre-Dame de Paris au Moyen Âge: bibliothèque, trésor et archives
Au Collège de France : Salle 5, Site Marcelin Berthelot, 11, place Marcelin-Berthelot (Paris 5)
Par Émilie Cottereau-Gabillet (Maîtresse de conférence à l’Université Panthéon-Sorbonne Paris I), Fabrice Delivré (Maître de conférences à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne), Charlotte Denoël (Conservatrice en chef au département des Manuscrits de la BnF), Maxence Hermant (Conservateur en chef au département des Manuscrits de la BnF), Éric Landgraf (Chef de la documentation au musée de Cluny), Darwin Smith (Directeur de recherche, Lamop, Université Paris I Panthéon-Sorbonne)
À l’occasion de l’exposition « Feuilleter Notre-Dame : chefs d’œuvre de la bibliothèque médiévale », organisée au musée de Cluny par la BnF, la séance réunira les spécialistes des manuscrits et des archives de Notre-Dame.
Elle reviendra sur les apports nouveaux que le projet ANR « e-NDP Notre-Dame de Paris et son cloître » a suscités grâce à la numérisation et à la transcription de vingt-six registres du chapitre de Notre-Dame (1326-1504) conservés aux Archives nationales, qui représentent une exceptionnelle source d’information sur les usagers des ouvrages et leurs centres d’intérêt, ainsi que sur les conditions matérielles de la conservation des livres au sein de l’enclos canonial. Des études de cas croisant les différentes sources documentaires disponibles sur les livres à Notre-Dame permettront aux intervenants de mettre en lumière les spécificités des différents ensembles de livres et le rôle moteur joué par la cathédrale et ses chanoines dans la transmission des savoirs et la diffusion des usages liturgiques parisiens au cours du Moyen Âge. En fin de séance sera abordée la question de la préservation des biens de Notre-Dame, objets mobiliers et livres, entre la fin du 18e et la fin du 19e siècle, d’après les archives, afin de poser les jalons du long réveil de la conscience patrimoniale qui s’est forgée autour de la cathédrale.
26 novembre 2024 de 16h à 19h
Images de pierre, images de parchemin: relecture du jubé et de la clôture de chœur de Notre-Dame à la lumière d’un manuscrit démembré
Au Collège de France : Salle 5, Site Marcelin Berthelot, 11, place Marcelin-Berthelot (Paris 5)
Par Damien Berné (Conservateur en chef au musée de Cluny), Françoise Viellard (Professeur émérite de philologie romane à l’École nationale des chartes), Darwin Smith (Directeur de recherche, Lamop, Université Paris I Panthéon-Sorbonne)
La séance étudiera le dialogue singulier entre un recueil d’images de pierre, le jubé et la clôture du chœur de Notre-Dame, et un recueil d’images d’encre, une « Bible historiée toute figurée » peinte vers 1340 qui s’inspire de ces deux cycles sculptés.
Ce manuscrit démembré et éparpillé aux quatre coins du monde a fait l’objet de nouvelles découvertes à l’occasion de l’exposition au musée de Cluny. Il sera interrogé sous l’angle de la langue, de sa typologie littéraire et dévotionnelle et du style de ses enluminures, mais aussi de ce qu’il révèle du jubé et de la clôture, détruits à partir de 1699 pour faire place au vœu de Louis XIII. Les intervenants reviendront sur les hypothèses du contexte de commande de ce manuscrit mystérieux en relation avec le chapitre cathédral.
17 décembre 2024 de 16h à 19h
Les fragments du jubé médiéval de Notre-Dame récemment mis au jour et les nouvelles connaissances matérielles sur les fragments sculptés du musée de Cluny
Au Collège de France : Salle 5, Site Marcelin Berthelot, 11, place Marcelin-Berthelot (Paris 5)
Par Christophe Besnier (Archéologue à l’Inrap), Hélène Civalleri (Archéologue à l’Inrap), Dorothée Chaoui-Derieux (Archéologue au service régional d’archéologie de la Drac Île-de-France), Damien Berné (Conservateur en chef au musée de Cluny), Lise Leroux (Ingénieure de recherches au LRHM), Stéphanie Duchêne (Ingénieure d’études au LRHM), Jennifer Vatelot (Conservatrice-restauratrice de sculptures).
La retentissante découverte d’une partie du jubé médiéval de Notre-Dame mis au jour dans le cadre de fouilles préventives conduites par l’INRAP en 2022 à la croisée du transept de Notre-Dame, le travail conjoint de restaurateurs et d’ingénieurs de recherches sur les vestiges de la cathédrale après l’incendie et le programme de restauration et d’analyses des éléments sculptés de l’édifice conservés au musée de Cluny constituent un remarquable vivier de nouvelles découvertes. Les compétences de chaque intervenant au profil varié (géologie, polychromie, restauration, archéologie, histoire de l’art) ont ainsi renouvelé la connaissance sur le contexte matériel de la création de ces sculptures.
Qu’il s’agisse de la fourniture des pierres, de la polychromie des sculptures ou des possibilités de datation qu’offrent les analyses au Carbone-14 du blanc de plomb, ce véritable laboratoire interdisciplinaire réuni autour de la cathédrale et de l’exposition offre, grâce à l’interdisciplinarité de son approche, de nouvelles informations et de riches perspectives en matière de recherches futures.
Source : Collège de France et Musée de Cluny
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