colloque international : Faire l’histoire de la mode dans le monde occidental
Paris, Musée des Arts Décoratifs, 11-12-13 mai 2015
À l’initiative du Groupement d’Intérêt Scientifique « Apparences, corps et sociétés »
Organisé par le CERHIO – UMR 6258 et le Musée des Arts Décoratifs
Le colloque organisé par le Groupement d’Intérêt Scientifique « Apparences, corps et sociétés » est ouvert aux chercheurs qui œuvrent sur l’histoire de la mode et des apparences, en Europe ou ailleurs, de la fin du Moyen Âge à nos jours. Il propose une réflexion pluridisciplinaire et internationale sur les expériences, les concepts et les discours des musées ou des universités, sur leurs origines intellectuelles et les cadres institutionnels qui permettent de les produire, dans la diversité des contextes locaux ou nationaux. L’objectif est de mieux comprendre les différentes logiques scientifiques pour faire apparaître de nouvelles convergences dans le domaine de la recherche, ouvrir sur une coopération internationale renouvelée.
Depuis quelques décennies, la mode a cessé d’être conçue comme un répertoire de formes en perpétuelle évolution, que le chercheur s’épuiserait à observer pour en faire l’inventaire, aussi illusoire qu’inutile. A la suite des travaux de Georg Simmel, Norbert Elias, Roland Barthes, etc, les manières de vêtir et de parer le corps ont été abordées à partir de concepts qui ont inscrit l’individu dans un réseau de normes sociales. Les recherches menées en histoire du corps ont ajouté de nouvelles dimensions (beauté, hygiène, etc.) à ce domaine de recherche. Sur ces bases, et par référence aux processus contemporains qui promeuvent les modes de masse ou uniformisent la gestion des attitudes et des postures, les quelque soixante dernières années auraient pu voir naître des coopérations internationales plus nombreuses, plus ouvertes. Tel n’a pas été le cas et bien des cloisonnements demeurent : la recherche récente n’échappe pas aux déséquilibres, en particulier entre les mondes anglo-saxon et scandinave d’une part et le reste de l’Europe continentale d’autre part.
De manière globale, il s’agit d’abord de considérer l’ensemble des approches scientifiques de la mode pour interroger leur rôle et leur place dans la construction et l’organisation du savoir, en général, d’un pays à un autre. Quelques réflexions complémentaires peuvent guider l’approche des problèmes spécifiques, actuels, de la recherche sur l’histoire de la mode :
Concepts. Alors que le concept d’« apparences » a surtout conduit à analyser les normes politiques et sociales qui régissent le vêtir, celui de « clothing », par exemple, a donné une place plus importante au jeu des pratiques consuméristes, à la construction identitaire, au rapport au corps. Cette divergence est redoublée par celle qui concerne les concepts de « mode » et de « fashion ». En France, les formes de la mode, éphémères ou jugées telles, n’auraient pas d’intérêt par elles-mêmes : c’est la tension sociale qu’elles créent entre centres prescripteurs et périphéries qui devrait retenir l’attention. Cette position a conduit à minorer l’intérêt des formes du vêtement et de leur évolution alors que d’autres expériences conduisent au contraire les chercheurs aux reconstitutions vestimentaires. Au nord et à l’est de l’Europe, les apparences ont souvent été saisies à travers les questions de la construction de l’État, de la nation, ou des deux ; ce qu’on retrouve à l’Ouest, à une échelle plus réduite, dans l’examen des modes régionales.
Rapport aux collections et temporalités. Dans les manières d’appréhender la « mode/fashion », les rapports entretenus avec les objets par les chercheurs varient d’un lieu à un autre, qu’il s’agisse des attitudes face aux pièces existantes, à l’archéologie expérimentale et aux reconstitutions de costume, ou des manières d’aborder l’épineux problème du vocabulaire par lequel on nomme les objets. Peut-on construire des bilans de ces inégalités, par exemple à partir d’expériences menées dans le domaine de l’archéologie expérimentale ? Comment aborde-t-on les sources de l’histoire des apparences lorsque les collections font défaut, notamment pour les périodes anciennes ?
Dans ces cadres naissent des histoires de la mode différentes. Elles se signalent notamment par la mise en œuvre de temporalités propres, dépendantes des critères et des méthodes que les concepts retenus ont privilégiés. Depuis le XIXe siècle, les évolutions intellectuelles permettent d’ailleurs d’envisager une histoire de ces temporalités, d’autant qu’elles affectent aussi, au-delà des histoires de la mode, les collections d’objets, leur classement ou leurs présentations.
Dispositifs institutionnels et réseaux. Des dispositifs institutionnels et des réseaux spécifiques relaient et pérennisent trop souvent les différences : place faite dans l’enseignement et la recherche universitaires à l’étude des modes et des textiles ; poids respectif des disciplines qui la prennent en charge (histoire, sociologie, anthropologie, etc.) ; manières d’articuler le travail des universités, des centres de recherche, et celui des institutions muséales ou des collectionneurs, etc. L’accès inégal des uns et des autres aux différents outils de la coopération internationale et les stratégies éditoriales ajoutent encore à la diversité.
Les contributions pourront s’orienter autour des thèmes suivants :
1 Histoire de l’histoire de la mode. Etat de la question
Auteurs, synthèses et expositions qui ont marqué l’histoire de la mode. Quelles publications pour l’histoire de la mode hier et aujourd’hui ? Nature et objectifs de celles-ci dans le monde occidental.
Concepts, temporalités et méthodes mis en œuvre par ces recherches.
2. Ecrire l’histoire de la mode, enjeux et problématiques
Comment penser une histoire de la mode contemporaine ? Comment faire une histoire de la mode sans objets (pour les périodes anciennes) ? Quelle est la part du contexte technique et économique dans les histoires de la mode ? Quelle place accorde-t-on à la matérialité du corps ? aux cultures visuelles ?
3 Enseignement et médiation de l’histoire de la mode
Quelle est la place de l’enseignement des modes dans les systèmes scolaires et universitaires ? Quelles sont les disciplines en charge de l’histoire de la mode ? Quels liens entre universités et musées ? Le rôle de l’exposition dans la médiation et la diffusion de l’histoire de la mode
4 Coopération internationale
Quelles coopérations internationales possibles sur le plan de la recherche ? Engagement, organisation, financement. Problèmes et difficultés rencontrés.
Quels sont les problèmes de l’engagement dans les structures de coopération internationales ?
Les propositions de communication (un titre, un résumé de 2000 signes environ en français ou en anglais, une bibliographie donnant les principales publications de l’auteur) devront parvenir avant le 1er décembre 2014 à l’adresse suivante : jean-pierre.lethuillier@uhb.fr
Comité scientifique : Denis Bruna (Musée des Arts décoratifs), Pascale Gorguet-Ballesteros (Palais Galliera), Aziza Gril-Mariotte (Université de Haute-Alsace, CRESAT), Sophie Kurkdjian (IHTP, Séminaire de la mode), Catherine Lanoë (Université d’Orléans, POLEN), Jean-Pierre Lethuillier (Université Rennes 2, CERHIO), Gabriele Mentges (Université de Dortmund), Anne Monjaret (LAHIC-IIAC – EHESS), Isabelle Paresys (Université Lille 3, IRHiS), Olivier Renaudeau (Musée de l’Armée).
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