Appel à communication : « Suspendre le temps, continuer l’espace » (Paris, 19-20 décembre 2019)

La séparation des arts opérée par Lessing en 1766 a durablement cantonné l’art littéraire dans l’idée d’un temps séquentiel et l’art plastique dans un temps arrêté. Est-on jamais revenu de cette antithèse aussi puissante que retorse comme l’a formulé Lessing il y a 250 ans ? Ce colloque voudrait revisiter l’opposition entre espace et temps en explorant l’idée que l’œuvre littéraire peut être conçue comme un temps suspendu autant que le tableau comme un espace continué. Une telle conception du littéraire et du plastique vise donc à proposer un nouvel ordre de rapport entre les deux formes d’art, non pas dans le but d’en revenir à un ut pictural poesis prônant la parenté entre les arts mais dans un refus de cantonner l’un et l’autre dans une logique excluante, et d’interroger jusqu’aux effets d’interférences entre les arts verbal et pictural.

L’appréhension du plastique par le temps et du littéraire par l’espace suspensif, peut concerner tant les considérations sur la création de l’œuvre que sur sa réception. Du côté de la création artistique, on constate en effet que l’équilibre interne de l’œuvre plastique est souvent analysée en termes de mouvements ou successions d’instants donnés à lire dans une seule image, tandis que du côté de l’œuvre littéraire, on trouvera une pléthore d’exemples de « non-avancées » de récits littéraires, alors que ceux-ci sont pourtant théorisés jusqu’à aujourd’hui en termes de « progression » d’une intrigue « vers » un dénouement : en fonction d’un temps séquentiel donc.

De même, du côté de la réception critique des œuvres, plusieurs théoriciens de l’image se plaisent à souligner le temps du regard dans l’appréhension de l’œuvre picturale, dont le jugement n’est jamais celui du clin d’œil instantané mais incite à la posture méditative et inscrit l’expérience esthétique dans une continuité temporelle. Du côté de la littérature, très souvent un roman suscite auprès du lecteur un effet d’émotion tel que le souvenir de l’œuvre restera statique dans sa mémoire, survivant sous forme d’une image unifiée – et non comme une séquence décuplée. Images littéraire et picturale se retrouveraient alors dans les sillons émotifs et cognitifs que laisse l’œuvre derrière elle, une fois le tableau quitté et le livre refermé.

Le colloque voudrait rassembler des spécialistes de l’histoire de l’art ainsi que de la littérature, pour un débat sur la question théorique ici évoquée dans un corpus vaste, sans délimitation chronologique particulière.

Les historiens d’art pourront privilégier les axes suivants :

–        Approches thématiques : la présence du littéraire (écritures, livres, signatures, toute forme de trace écrite) dans les tableaux
et les façons dont le tableau « parle » au spectateur.
–        Approches analytiques: le tableau pris dans son espace de représentation et temps de contemplation.
–        Approches historiques : l’étude d’exemples contrastés de tableaux dans ou à travers le temps.

Les spécialistes de littérature pourront proposer des études sur les axes suivants :

–        Approches thématiques : le traitement de tableaux et œuvres d’art dans la littérature fictionnelle,
et les façons dont le texte fait image.
–        Approches narratologiques : le rapport au temps et à l’espace dans le déroulement de l’intrigue.
–        Approches historiques : l’étude d’exemples contrastés d’œuvres littéraires à travers le temps

Les propositions de communication (titre et résumé) sont à envoyer avant le 1er mai 2019 aux deux organisatrices du colloque :

Nathalie KREMER : Nathalie.Kremer@sorbonne-nouvelle.fr
& Susanna CAVIGLIA : Susanna.Caviglia@duke.edu

 

Suspendre le temps, continuer l’espace
Colloque international organisé à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 en partenariat avec Duke University, 19 et 20 décembre 2019

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