Appel à contribution : « La description »

Le colloque organisé par l’Institut indisciplinaire, situé à Grenoble, portera sur les usages et finalités de la description au sein des sciences humaines. Les outils descriptifs diffèrent parfois d’une discipline à l’autre et révèlent les priorités épistémologiques des unes et des autres. Nous nous interrogerons sur leurs usages, leur possible transfert et les effets que peut avoir l’adoption de telle ou telle méthode descriptive émanant d’une discipline par une autre.

De l’ekphrasis aux observations et modélisations scientifiques les plus récentes, les formes de la description ont varié, au cours des siècles, et ont concerné des objets multiples. Envisagés comme un moyen de circonscrire les phénomènes biologiques de la Nature, les dictionnaires et les encyclopédies manifestèrent la nécessité de décrire les réalités d’un monde où la technique, elle-même objet de descriptions, en bouleversait les contours. Des carnets de Villard de Honnecourt aux comptes-rendus de salons de Denis Diderot, les usages et les formes de l’acte descriptif concernent ainsi de nombreux champs disciplinaires.

Face à cette diversité d’usage, il nous semble opportun de nous interroger sur nos pratiques descriptives. En effet, l’historien de l’art accorde à la description un statut souvent préalable à l’analyse : pourtant, d’un chercheur à l’autre, il semble que la description intervienne non en amont mais dans le cours même de l’analyse, faisant partie intégrante de cette dernière. De même, à cette occasion, il apparaît que notre attention ne retienne pas les mêmes détails, les mêmes observations. L’Historien n’a-t-il pas besoin d’établir des faits à partir de l’étude descriptive de registres, d’archives et de sources documentaires concernant la période ou les événements qu’il étudie ?

De même, le juriste, ou encore le médecin n’ont-ils pas besoin pour établir responsabilité et diagnostic, de passer par une phase de description des « faits » ou des symptômes ? Comment dès lors se fier à cet aspect qui constitue pour certains un moment délicat de l’analyse et qui semble pour le moins soumis à des variations ?  Dans quelle mesure l’interprétation intervient-elle dans les activités descriptives ? Le chercheur est-il certain d’observer de façon neutre les éléments dont il retrace ensuite les caractéristiques ? Décrire, n’est-ce pas déjà sélectionner les informations qui détermineront pourtant l’impact de l’étude ?

En nous attachant aux modalités d’utilisation de la description au sein de chaque pratique scientifique, nous nous intéresserons aux enjeux que connaissent nos différentes disciplines à travers elles et tenterons de mesurer les enjeux méthodologiques et épistémologiques de l’activité descriptive.

« Songez au nombre de choses différentes nommées « description » » écrivait Ludwig Wittgenstein dans ses Investigations philosophiques . Parce que l’action de décrire mérite d’être explicitée, définie, nous accorderons au premier axe de notre colloque, la tache de dégager ce qu’est pour le scientifique la description, ce qu’il entend par là et dès lors les rapports qu’entretient son objet d’étude avec la description qu’il en fournit. Observe-t-il un écart et si oui, quels enseignements en tire-t-il ?

Le deuxième axe nous permettra de nous concentrer sur les outils de la description mais aussi sur l’impact que peut avoir la description dans l’analyse. En effet, les supports divers auxquels nous avons recours et qui permettent de dresser un état de l’objet de notre recherche peuvent avoir des formes variées et deviennent eux-mêmes objet d’analyse : quel intérêt présentent les outils de la description ?

Enfin, le troisième axe permettra de s’interroger sur les éventuels transferts des méthodes descriptives d’une discipline à l’autre. On peut se demander en effet ce que produit l’utilisation d’une méthode descriptive dans un champ de recherche qui l’emprunte à un autre domaine scientifique : l’analyse s’en trouve-t-elle dès lors renouvelée ? Est-elle alors éclairée d’une façon inédite ?

Autant de questions auxquelles nous vous invitons à tenter de répondre lors de ce colloque que nous espérons riche en échanges.

Premier axe – L’écart entre l’objet et sa description

De l’Antiquité à nos jours, la littérature et la critique d’art ont fait intervenir la description de maintes façons. L’approche réaliste est-elle garante d’une observation objective que restituerait la prose ou la peinture d’un artiste ? Le portrait, de sa naissance à l’avènement de la photographie, est-il un outil permettant de décrire la personne représentée ? En observant l’écart qui semble exister entre la description d’un objet et l’objet lui-même, nous tenterons de comprendre ce qui se joue dans cet intervalle. S’y glissent sans doute les choix de l’auteur, la perception et l’interprétation qu’il a des formes, des couleurs ainsi que ce qu’elles font résonner en lui. La description de l’œuvre d’art n’est-elle pas également le prétexte à d’autres discours ne portant pas ou peu, in fine, sur l’objet que l’on est censé décrire ?

Deuxième axe – La description : procédures et finalités

Les sciences humaines et les sciences dites “exactes” font appel à des outils divers pour procéder à la description de phénomènes : schémas, diagrammes,  graphiques, statistiques ou relevés permettent à l’archéologue, au géographe et à l’économiste de prélever et d’organiser des éléments observés dont il a besoin pour restituer certains aspects de la réalité. De même, la description est nécessaire à tout inventaire ou classement patrimonial. Comment est-elle alors mise en œuvre et quelles évolutions et transformations cet instrument du recensement a-il subi au cours du temps ?  Quels rôles jouent ces différents moyens de description des objets, symptômes et manifestations ? À quel moment de l’analyse ces outils interviennent-ils ? Quel impact ont-ils sur les résultats même de l’analyse et au-delà sur les finalités pratiques de ces dernières ? Autrement dit, dans quelle mesure et quand interfèrent-ils avec cette analyse ? Les outils de la description ont-ils tous la même pertinence et la même fiabilité ? Les nouvelles technologies introduisent-elles en sciences humaines une nouvelle manière d’envisager la description et quelles perspectives ouvrent-elles ?

Troisième axe – D’une méthode à l’autre

Parce que les outils et les méthodes de la description diffèrent souvent d’une discipline à l’autre, il paraît nécessaire d’interroger leur propension à gagner de nouveaux territoires. Ainsi peut-on se demander si les outils propres au domaine d’un chercheur sont aussi opératoires dans d’autres champs de recherche ? Le recours aux statistiques et aux bases de données, longtemps dévolu aux sciences des chiffres (économie, sociologie….) semble devenir un instrument de quantification et d’étude des répartitions et de détection de séries iconographiques en histoire de l’art. De même, la cartographie, outil privilégié du géographe s’avère un mode descriptif pertinent dès lors qu’il s’agit de proposer une vision synoptique de l’occupation de territoires, ou de déplacements d’Écoles ou d’artistes, en Histoire de l’Art ou encore d’études phénoménologiques (par exemple en littérature). Par ailleurs, la sélection d’informations, préalable à l’élaboration de tout outil informatique (définition des critères, catégories, etc.) suppose une approche descriptive des éléments qui fonderont les usages de ces nouveaux dispositifs. Le recours aux reconstitutions que permettent les animations en 3D modifient-elles l’appréhension que nous avons de l’état de l’objet ainsi décrit ? Dès lors, quelles modifications observe-t-on dans les disciplines qui adoptent les outils de la description propres à d’autres champs de recherche ? L’emprunt de dispositifs provenant d’autres sciences a-t-il une incidence sur les travaux que mènent les chercheurs dans un domaine a priori peu familier avec de tels usages ?

Soumission des propositions

Les propositions de contribution doivent indiquer :

  • NOM
  • PRÉNOM
  • Champ de recherche, Université/Laboratoire de rattachement ou autre structure
  • Axe choisi
  • Titre de votre communication (même provisoire)
  • Résumé (5-10 lignes)
  • Éventuellement, indications bibliographiques
  • Adresse postale
  • Adresse électronique
  • Téléphone et/ou Mobil

Merci de nous adresser votre proposition de communication au plus tard le 15 mai 2011 à l’adresse : institut.indisciplinaire@gmail.com

Modalités de sélection

Le comité de sélection est composé du bureau de l’association : Estelle Diksa, Clémentine Denele, Julie Mercieca et Viviane Huys, ainsi que de son conseil de perfectionnement :

  • Frédérique Fiechter-Boulvard, Faculté de Droit, Université Pierre-Mendès-France, Grenoble
  • Martine Jullian, UFR Sciences Humaines, Histoire de l’Art, Université Pierre-Mendès-France, Grenoble
  • Jacqueline Leclercq-Marx, Université Libre de Bruxelles, Belgique
  • Guy Lobrichon, Histoire, Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse, Avignon
  • Eliana Magnani, (CNRS), Centre d’Études Μédiévales d’Auxerre
  • Marie-Dominique Popelard, UFR Communication, Université de la Sorbonne Nouvelle/Paris 3
  • Daniel Russo, Histoire de l’Art médiéval, Université de Bourgogne, Dijon
  • Catherine Saouter, Faculté des Arts, UQÀM, Montréal, Canada

Pour toute demande de renseignements supplémentaires vous pouvez également joindre :

  • Viviane Huys au 06 14 59 44 72, vivianehuys@gmail.com
  • Estelle Diksa au 06 08 27 02 42, estellediksa@aol.com

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Source : http://calenda.revues.org/nouvelle19007.html

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