Les vendredi 16 & samedi 17 mai 2014 à l’École Normale Supérieure – 45, rue d’Ulm – 75005 Paris
Colloque international
organisé par le groupe THETA du CNRS (UPR 76 – Direction : Pierre Caye)
avec le soutien de l’École Normale Supérieure (ENS) et de l’Université Nice Sophia Antipolis (UNS)
Contacts Daniel Dauvois Serge Trottein
C’est en 1750, dans l’Æsthetica d’A. G. Baumgarten, que le terme d’esthétique apparaît pour la première fois dans le titre d’un ouvrage philosophique. S’il est légitime de soutenir que Baumgarten est le premier philosophe à avoir intégré de manière explicite la nouvelle théorie esthétique dans les exigences architectoniques de la philosophie, on est néanmoins autorisé à se demander si, dans cette histoire du devenir-philosophique du questionnement sur l’art, sur la poésie, et sur l’expérience de la nature, la chose n’a pas précédé – et, d’une certaine façon, excédé – le mot. Qu’en est-il du commencement – ou des commencements ? – historique de l’esthétique ? À quelles conditions peut-on parler d’un « régime esthétique » des arts, de la littérature ou du moins des théories qui les réfléchissent, et comment peut-on en repérer les seuils historiques ? Quelle place accorder à ceux qui, selon les critères que l’on choisit de retenir, en apparaissent ou non comme les précurseurs : Shaftesbury, Addison, Du Bos, Hutcheson, Batteux, etc.? Comment penser les rapports entre la théorie de la peinture – celle des Félibien, Le Brun, de Piles, etc. –, la poétique, la théorie de la musique et la mise en place de la perspective esthétique ? Convient-il, comme on l’a fait parfois, de concevoir l’émergence de l’esthétique sur les ruines de la rhétorique ? Comment rendre compte de la persistance des réflexions métaphysiques sur la beauté, parallèlement à l’émergence de l’esthétique ? Et quelles conceptions des plaisirs faut-il poser afin que cette émergence devienne possible ? On remarquera que l’esthétique semble, un peu à la manière dont l’économie politique, dans le même temps, surgit à partir de réflexions morales dont elle procède et s’émancipe à la fois, devoir se détacher des questions de moralité des arts, voire de leur déontologie : il faut sans doute que cesse la subordination au Bien comme au Vrai, et peut-être même au Beau, pour que pointe l’interrogation proprement esthétique. En ce sens, les figures d’Addison et de Du Bos semblent pouvoir exprimer de manière essentielle et charnière ce moment où les poétiques, traditionnellement appliquées sur la fabrique des œuvres d’art, laissent place aux réflexions esthétiques qui se portent vers la réceptivité des spectateurs comme vers leur lieu naturel d’étude. La communication sur les arts, effectuée par de simples amateurs, devient par soi un but approprié, au lieu de tendre vers quelque idéal normatif.
Et si le mot d’esthétique n’a pas vraiment précédé la chose, comme on le voit à l’exemple de la pensée de Hume, de Burke, ou de Diderot, est-il vraiment possible de voir à l’œuvre un questionnement unifié derrière la multitude des approches philosophiques et sous la variété des expressions littéraires qui se développent au siècle des Lumières pour rendre compte à nouveaux frais du goût, du génie, du système des arts, des catégories esthétiques, des paradoxes de la fiction, des rapports entre l’art et la morale ou la beauté ? Ne peut-on déjà saisir chez plusieurs prédécesseurs du XVIIe siècle, voire plus anciens, des prodromes de la manière esthétique de penser, de sorte que la naissance de l’esthétique serait plutôt une lente émergence dans la durée qu’un événement historiquement assignable ? Ce sont toutes ces questions, et certainement d’autres encore, que nous proposons comme objets de réflexions aux participants à ce colloque.
———
PROGRAMME
Vendredi 16 mai / ENS – Salle Dussane Matin / Présidence : Daniel Dauvois
9h
Ouverture des travaux
Daniel Dauvois
9h15
Frédéric Lelong
Université de Neuchâtel (Suisse)
La civilité et la naissance de l’esthétique
10h15
Catherine Fricheau
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Ce que l’esthétique doit à la rhétorique. Les merveilles de nature selon les Pères Binet et Bouhours
11h15
Pause
11h30
Gérard Bras
Collège international de philosophie
La figure de Poussin dans les conférences de l’Académie Royale (1667-1670)
*
Après-Midi / Présidence : Serge Trottein
14h30
Denis Kambouchner
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Les dimensions cartésiennes de la figure du génie
15h30
Daniel Dauvois
Lycée Lakanal (Sceaux) / THETA (CNRS – UPR 76)
Agitation de l’âme et sentiment esthétique. Les Pensées sur les _ spectacles de l’Abbé Duguet
15h30 Pause
15h45
Florence Malhomme
Université Paris-Sorbonne (Paris IV)
Dubos et la musique du corps : de la recherche des sources antiques à la naissance de l’esthétique
* *
Samedi 17 mai / ENS – Salle Weil
Matin / Présidence : Jacqueline Lichtenstein
9h
Daniel Dumouchel
Université de Montréal (Canada)
Une esthétique du spectateur : Addison et les plaisirs de l’imagination
10h
Laurent Jaffro
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Hume et l’analogie entre le goût et la perception des couleurs
11h Pause
11h15
Carole Talon-Hugon
Université Nice Sophia Antipolis
Fausses attributions et véritables répercussions : le moment Baumgarten
12h15
Serge Trottein
THETA (CNRS – UPR 76)
Naissance ou renaissances de l’esthétique ?
*
Après-Midi / Présidence : Daniel Dumouchel
15h00
Nicolas Rialland
Université Paris-Sorbonne (Paris IV)
Du Bos et Batteux en Allemagne : sur la postérité mendelssohnienne de l’esthétique française
16h
Jacqueline Lichtenstein
Université Paris-Sorbonne (Paris IV) Résistances à l’esthétique en France et en Allemagne
17h Pause
17h15
Leonore Bazinek
Université de Rouen
Herbart et l’autonomie de l’esthétique
18h30 Clôture des travaux
* * *
URL de référence : http://upr76.vjf.cnrs.fr/spip.php?article142
Leave a Reply
You must be logged in to post a comment.