Colloque : « Passage à l’acte. L’agir, de la performance à la psychiatrie »

L’objectif de ce colloque est ainsi de réunir des intervenants de disciplines multiples (issus de l’histoire de l’art comme de la psychiatrie et de la psychanalyse, mais également de la sociologie et de la philosophie), autour de la question de la performance dans la seconde moitié du XXe siècle.  La première hypothèse que nous souhaiterions soulever est celle du moment historique : si comme l’a montré Laurence Bertrand-Dorléac dans son livre L’ordre sauvage : violence, dépense et sacré dans l’art des années 1950-1960 (Gallimard, 2004), la violence et le comportement hors-norme, hors-limite (Hors limites, l’art et la vie, 1952-1994, Paris, Centre Georges Pompidou, 1994) sont répandus depuis les années 1960, dans quelle mesure le paradigme psychiatrique représente-t-il une influence sur ces formes plastiques à cette époque, et peut-il aider à les comprendre ? Il faudra aussi aller chercher les racines d’une description psychiatrique de l’acte hors-norme comme création artistique dans l’avant-guerre et peut-être au-delà.
Il s’agit d’autre part de s’intéresser à la place de ces actions dans le parcours singulier d’artistes : comportements spectaculaires hors-normes, manipulation de matières taboues, pratiques de scarifications et d’auto-mutilation, expérimentation par les drogues, artiste vivant en institution, ou, phénomène plus récent, revendiquant un diagnostic psychiatrique, artiste « brut ». On peut aussi poser la question du suicide de l’artiste. Pourquoi et comment les artistes passent-ils à l’acte ? Quelle est la place de la parole dans ces œuvres ? Plus largement, la question du passage à l’acte pointe vers celle du passage à la performance, de ce moment mystérieux dans de nombreuses carrières d’artistes d’abandon des techniques traditionnelles, abordé récemment entre autre par Sophie Delpeux (Le corps-caméra, le performer et son image, Paris, Textuel, 2010).
La dimension d’inscription dans l’espace public attirera également notre attention, du côté de l’histoire de la psychiatrie dans les années 1960-1970, et au-delà : si l’artiste « fait le fou », extrayant du champ de la folie les comportements prohibées, les sortant d’une inscription biographique pour les exposer sur un champ social, rendant publics des comportements qui ne s’exhibent pas, se taisent et se dissimulent, quel retentissement cela peut-il avoir sur le « fou », sur le regard porté sur la maladie mentale et sur les institutions qui la soignent, voire sur ces institutions elles-mêmes depuis les années 1960 ? Que signifie cette possibilité de se mettre en scène comme fou, de mettre en avant cette folie révélatrice ? En quoi enfin et plus généralement en quoi le champ théorique traditionnel de la perversion peut-il s’en trouver remanié ?
Nous souhaitons que ce colloque permette à différents univers de confronter leurs méthodes, leurs vocabulaires, leurs taxinomies et leur « coup d’œil » : on suggèrera schématiquement que médecins et historiens d’art décrivent, mais comment ? Que dire en commun de ces « cas », de ces artistes étranges qui prennent des symptômes comme matière de leur art ? Les analyses d’œuvres, collaborations et réactions croisées de psychiatres, psychanalystes et historiens d’art, seront, nous l’espérons, stimulantes et fécondes.

PROGRAMME

Vendredi 20 janvier
INHA, salle Vasari

Matinée
9h / accueil – petit déjeuner
9h15 : ouverture : Emilie Bouvard, Isabelle Salmona (organisatrices), Pr. Philippe Dagen (HICSA)
Corpus Mundi
Modération : Isabelle Salmona

9h30 / Karim Fenichel, praticien hospitalier, Hôpital Sainte-Anne,
Quelques aspects psycho-pathologiques des auto-mutilations.
10h00 / Emilie Bouvard, doctorante, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, conservatrice stagiaire, INP, HICSA
La prise de risque et le mimétisme pathologique chez Marina Abramovic, Rythme 2 (1974), étude de cas.
10h30 / Justine Morvan, étudiante en Master 2, EHESS,
Un art d’attitude (1952-1994), l’exposition Hors Limites (1994).
11h / pause-café
11h15 / Bénédicte Maselli, doctorante, Université Rennes II,
Abréaction et langage symbolique dans le Théâtre des Orgies et des Mystères d’Hermann Nitsch.
11h45 / Fanny Dargent, psychologue clinicienne, psychanalyste, maître de conférences à l’Université Paris 7 Denis Diderot,
La pratique des scarifications à l’adolescence : intimité, sens et violence.
12h15 / Barbara Safarova, directrice de programme au Collège International de Philosophie, présidente d’abcd-art brut, maître de conférences en esthétique,
Le body art de Lubos Plny du point de vue de l’art brut.
13h -14h30 / déjeuner

Après-midi
Iconoclastes
Modération : Karim Fénichel, psychiatre, hôpital Sainte-Anne.

14h30 / Renaud Bouchet, docteur en Histoire de l’Art, ATER à l’Université du Maine, chercheur associé à l’Université de Clermont-Ferrand II,
Modalités et justifications de la destruction d’objet dans l’oeuvre d’Arman, des Allures-Colères aux Combustions.
15h00 / Eric Corbobesse et Mario Blaise, psychiatres iconoblastes, praticien hospitalier à l’ASM13 et praticien hospitalier à l’hôpital Marmottan,
Passage à l’acte sur oeuvre d’art, psychopathologie de l’iconoclasme.
15h30 / pause
15h45 / Camille Paulhan, doctorante, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et Philippe Agostini, peintre, enseignant en arts visuels à l’université de Reims, doctorant, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, HICSA
I would prefer not to – la zone brune : usage de l’excrément dans l’art contemporain ; le cas Gasiorowski.
16h15 / Jean-Philippe Rondier, psychiatre, hôpital Percy, Clamart,
Suicide d’Edouard Levé, la mise en scène d’une sortie de scène, le paradoxe d’une oeuvre.
16h45 / Isabelle Salmona, psychiatre, ASM13
La performance : panorama de la réception psychanalytique.
17h45 / conclusion de la journée, Isabelle Salmona

Samedi 21 janvier
Hôpital Sainte-Anne, Amphithéâtre Morel

Matinée
9h30 / accueil ‒ petit déjeuner
Trauma et société
Modération / Emilie Bouvard
10h00 / Maxime Morel, doctorant, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, HICSA
Passer de l’art à la vie : le scandale situationniste.
10h30 / Constanze Fritzsch, doctorante, Katholische Universität Eichstätt-Igolstadt,
Beuys, thérapeute du trauma collectif allemand.
11h00 / Bruno Fernandes, chercheur indépendant,
Passage de l’acte à l’action – Anarchisme du corps et stratégie de l’obscène dans le Japon de la croissance : le groupe Zero Jigen (Dimension Zéro) et les mouvements contre-culturels du happening interventionniste, Tôkyô 1962-1972.
11h30 / pause-café
11h45 / Mildred Duran Gamba, docteure en histoire de l’art, commissaire d’exposition indépendante,
Urgences métaphysiques, gestes et troubles des corps exacerbés de deux artistes de l’Amérique Latine : Rosemberg Sandoval et Regina José Galindo.
12h15 / Boris Ryczeck, journaliste musical et professionnel du web, Aurélien Angel, enseignant en mathématiques et sciences physiques, étudiant en psychologie-psychanalyse,
It’s better to burn out than to fade away : problèmes de l’autodestruction dans le rock’n roll.
12h45-14h / déjeuner

Après-midi
De l’acte à la parole : propositions artistiques en milieu psychiatrique
Modération : Didier Semin, ENSBA

14h / Prof. Philippe Dagen, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, HICSA
Être fou en 1924.
14h30 / Anne-Marie Dubois, psychiatre, C.M.M.E., Centre d’Etude de l’Expression, Hôpital Sainte-Anne,
Guillaume Pujol et son atelier.
15h / pause-café
15h15 / Hugo Daniel, doctorant, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, HICSA
Approcher le secret : Arnulf Rainer et le modèle psycho-pathologique de l’expression.
15h45 / Yan Tomaszewski, doctorant, EHESS,
Faire le psy et faire le fou ‒ du « neutre actif » chez Zbigniew Libera.
16h15 / pause-café
16h30 / Anne-Marie Dubois et alius,
Les thérapies à médiation plastique.
17h00 / Fanny Drugeon, docteure en histoire de l’art, membre du laboratoire de recherche InTRu, Université François-Rabelais, Tours, et Frédéric Forest, chercheur associé au Centre de Recherche « Psychanalyse, Médecine et Société », Université Paris VII Diderot,
Art et psychiatrie : prescription du rituel et rituel de prescription depuis les années 1960.
17h30 / Mickaël Pierson, chargé de cours à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, critique d’art et de cinéma,
Javier Téllez, To cure the sane of their lucidity.
18h / clôture, Emilie Bouvard, Isabelle Salmona.

Cocktail de clôture

Vendredi 20 janvier 2012
INHA, salle Vasari
2 rue Vivienne, 75002 Paris ou 6 rue des Petits champs, 75002 Paris

Samedi 21 janvier 2012
Amphithéâtre Morel, pavillon Morel, allée Paul Verlaine
Hôpital Sainte-Anne
1 rue Cabanis, 75014 Paris

Colloque international organisé par l’HiCSA / Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, en collaboration avec l’Hôpital Sainte-Anne.

Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Réservations et informations : reservationpaa@gmail.com

SOURCE :  http://hicsa.univ-paris1.fr/page.php?r=3&id=489&lang=fr

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