Suzanne Pourchier-Plasseraud, Les arts de la Nation. Construction nationale et arts visuels en Lettonie, 1905-1934. Rennes : PUR, 2013.
Traitant de la construction identitaire nationale, l’auteur a choisi d’illustrer son propos par le cas d’un pays sans histoire étatique ancienne, la Lettonie. Cet ouvrage se focalise sur le rôle des arts visuels qui ont contribué à transformer ce qui n’était au départ qu’une idée nationale culturelle, prônée par une intelligentsia restreinte, en une revendication populaire d’indépendance.
Dans les provinces de la future Lettonie, entre les deux grandes puissances qui les dominaient à la fin du XIXe siècle – la Russie et l’Allemagne – les « éveilleurs » lettons ne pouvaient avoir recours à un passé historique ou à une unité territoriale inexistants pour revendiquer leur autonomie, puis leur indépendance. Ils se tournèrent alors vers la culture, la langue et le folklore pour construire leur identité nationale. Ils cherchèrent notamment à s’inspirer d’un âge d’or dont témoignent leurs chants populaires, les dainas, pour se relier à un temps mythologique d’avant la conquête germanique du XIIIe siècle. Ainsi a pu s’affirmer une continuité entre une période archaïque et leur époque, esquivant les siècles passés sous dominance étrangère.
Dans cette construction, les artistes ont utilisé cet héritage ancestral – en peinture, en sculpture, en architecture et dans les arts appliqués – jouant de ce fait un rôle éminent. Ce faisant, ils ont donné à voir la nation devenue État, tant dans l’espace public que privé, Riga devenant la vitrine privilégiée de ce processus.
Le propos de cet ouvrage est de montrer, sur la toile de fond de l’histoire, comment les artistes se trouvèrent investis de la mission d’élaborer un art letton, dégagé des influences russe et allemande jusque-là dominantes. Comment s’établirent les liens entre le culturel et le politique et comment le politique intervint dans la vie artistique. Enfin comment l’art letton enraciné dans la tradition parvint à s’adapter aux courants européens de la période de l’entre-deux-guerres, dépassant la tension entre ancrage national et modernité internationale.
Cet ouvrage constitue également un apport à la réflexion sur les usages sociaux et politiques de l’art.
Suzanne Pourchier-Plasseraud est docteur en histoire (université de Paris 1-La Sorbonne). À la suite de nombreux voyages dans les pays baltiques et notamment en Lettonie, depuis la fin des années 1970, elle s’est intéressée aux arts visuels de ces pays. Elle est co-auteur de Capitales baltes (Autrement), Carnets baltes (Lituanica), Les Litvaks, héritage universel d’un monde juif disparu (La Découverte).
378 pages, 17,5 x 25 cm
Broché, illustrations couleurs et noir & blanc
Parution : 2013
Prix : 24,00 €
ISBN : 978-2-7535-2227-5
Voir la présentation du livre sur le site de l’éditeur.
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SOMMAIRE :
Préface de Krzysztof Pomian
À la veille du XXe siècle, un éveil culturel doublement entravé
Un « risorgimento » socio-culturel, 1905-1915
L’apparition de revendications autonomistes au sein de l’empire russe
La constitution d’un imaginaire letton, 1905-1920
Les arts au service de l’idée lettone
Le chaos de la Première guerre mondiale, 1915-1920
L’effondrement de l’empire russe et l’émergence des revendications politiques lettones
Les artistes au service de la symbolique nationale
La construction étatique, 1920-1934
Un régime parlementaire vulnérable
Une politique culturelle volontariste
Lettonisation des arts visuels
Voir la table des matières détaillée.
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