Dans le cadre de sa résidence INHALab, l’association « Athamas – Art et Antipsychiatrie » propose de mars à juin 2019 un séminaire interrogeant les pratiques artistiques expérimentales de la deuxième moitié du XXe siècle à nos jours, et les théories de l’antipsychiatrie qui apparaissent et se développent au cours des années 1950 à 1970.
▂
Séance du 8 avril 2019
« Contre-cultures et psychiatrie radicale en Angleterre : autour de Kingsley Hall et Mary Barnes »
En 1965, Ronald D. Laing et ses collègues de la Philadelphia Association ouvrent Kingsley Hall. Installé dans un quartier de Londres jusqu’en 1970, ce lieu devient l’expérience pratique des thèses de l’antipsychiatrie. Au sein de cette nouvelle communauté thérapeutique, la hiérarchie entre patients et soignants est abolie, chacun est libre de ses mouvements et dispose de son temps comme il l’entend. Kingsley Hall redonne à l’asile son sens de refuge : la schizophrénie est un « voyage » qu’il s’agit d’accompagner. Mary Barnes, infirmière, schizophrène, fut sa première résidente. Elle incarne ce voyage et sa dimension extrême à l’issue duquel elle est devenue peintre.
Pour cette séance, nous aurons l’immense privilège d’écouter le docteur Joseph Berke, acteur central de cette histoire. Installé en 1965, à Londres, il travaille en étroite collaboration avec Ronald D. Laing et les antipsychiatres anglais, devient membre de la Philadelphia Association, organise en 1967 le congrès international « Dialectics of Liberation » (Londres, 15-30 juillet 1967) et œuvre à l’ouverture de l’Antiuniversity de Londres (1968). Il intègre Kingsley Hall, de 1965 à 1970, et accompagne Mary Barnes tout au long de son « voyage » de cinq années.
Adrian Chapman présentera Fire, organe éphémère fortement associé à Kingsley Hall. Magazine édité par Joseph Berke, il illustre les liens puissants qui unirent antipsychiatrie et contre-cultures dans une commune résistance esthétique à la conformité.
Interventions
■ « Antipsychiatrie, Kingsley Hall, Mary Barnes, et après » par Joseph Berke (psychanalyste et psychothérapeute)
Installé à Londres dès 1965, arrivant des États-Unis, Joseph Berke travaille en étroite collaboration avec Ronald D. Laing et les antipsychiatres anglais. Il devient membre de la Philadelphia Association qui les regroupe, et co-organise en 1967 le congrès international « Dialectics of Liberation » (Londres, 15-30 juillet 1967) auquel sont invités des penseurs majeurs de l’époque (Herbert Marcuse, Gregory Bateson, etc.) mais aussi des artistes et des poètes. En 1968, il participe à l’ouverture de l’Antiuniversity de Londres. De 1965 à 1970, il vit et travaille à Kingsley Hall et accompagne Mary Barnes tout au long de son « voyage » de cinq années. En 1971, il co-écrit avec elle un ouvrage qui relate cette expérience : Mary Barnes, un voyage à travers la folie (traduit en français en 1973).
Joseph Berke reviendra sur ces différentes expériences à l’appui de nombreux documents d’archives sur l’antipsychiatrie.
■« Un “succulent événement d’art-poésie” : le magazine Fire (1967-1970), le réseau autour de R. D. Laing et Kingsley Hall » par Adrian Chapman (professeur associé, université d’État de Floride à Londres et université Notre-Dame – États-Unis à Londres)
En partant de l’intérêt récent de la recherche pour les revues underground des années 1960 au Royaume-Uni et pour le réseau qui s’est développé autour de R. D. Laing (1927-1989), Adrian Chapman centrera sa communication sur le magazine éphémère Fire (1967-1970). Celui-ci fut étroitement lié à Kingsley Hall (1967-1970), la communauté expérimentale établie par R. D. Laing, psychiatre et figure majeure de la contre-culture. Fire a été décrit parRichard Neville, éditeur d’Oz (1967-73) et auteur de Play Power (1970), comme un « un succulent événement d’art-poésie ». Le magazine, auquel contribuèrent Laing, Gary Snyder et Lawrence Ferlinghetti, entre autres, fut édité par le docteur Joseph Berke. Américain mais installé à Londres, celui-ci développa des contacts au sein du réseau autour de Laing et de l’underground américain. Fire peut être considéré à la fois comme un magazine underground, un (« petit ») magazine littéraire et, plus que tout, comme l’organe de diffusion d’un asile radical, Kinglsey Hall. Cette publication a peut-être permis à Kingsley Hall de rayonner au-delà de ses murs ; elle révèle sans aucun doute l’étendue du réseau de Laing, et en particulier sa nature transatlantique. Difficile – impossible, en réalité – à définir de façon stricte, Fire est représentatif de la tendance des textes laingiens, qui prônent l’authenticité et la liberté, à subvertir les délimitations génériques autant que disciplinaires. Et en réunissant culture, politique et psychiatrie, le magazine révèle une caractéristique centrale de la psychiatrie contre-culturelle laingienne : la résistance esthétique à la conformité.
Séance en anglais
▂
Informations pratiques
8 avril 2019 – 15h-17h
Galerie Colbert, salle Giorgio Vasari
Institut national d’histoire de l’art
6, rue des Petits-Champs ou 2, rue Vivienne
75002 Paris
Entrée libre
📎 En savoir plus : http://bit.ly/inha_agenda_080419
📎 Voir le programme complet : http://bit.ly/inha_inhalab19_athamas
Leave a Reply
You must be logged in to post a comment.