En ces temps de dématérialisation, à l’heure du tout virtuel, il semblerait que nous assistions à un retour des objets du passé. Des mots, des modes et des usages culturels confirment le phénomène : vintage, reboot, remake, remastering, vinyle, polaroïd, rétro, néo, customisation, sépia… Récemment, un magazine féminin consacrait l’un de ses articles à l’art oublié du diorama. En 2011, le journaliste et théoricien anglais Simon Reynolds signait déjà un ouvrage intitulé Rétromania montrant comment la culture musicale contemporaine se tournait désormais essentiellement vers le passé…
Face à cette constellation de phénomènes, et pour son premier colloque international, le GIRCAM (Groupe Interdisciplinaire de Recherche sur les Cultures et les Arts en Mouvement) souhaite interroger la place que les objets du passé occupent dans les cultures contemporaines, les mouvements de résurgence et de retour qu’ils entraînent, mais aussi la capacité de réinvention et de subversion dont ils sont porteurs. Autrement dit, nous ne voulons pas séparer les objets de leurs usages et nous serons attentifs à privilégier les contributions qui insèrent ces objets du passé dans des dynamiques où se croisent à la fois dimension nostalgique et regard tourné vers le futur.
Par objet, nous n’entendons pas seulement circonscrire des choses à la matérialité avérée, qu’il serait ensuite facile d’opposer à la virtualité ou l’immatérialité du monde numérique. Notre conception de l’objet est plus étendue, car elle articule les différentes fonctions que Bruno Latour (2007) accorde aux objets peuplant notre quotidien, à savoir la dimension d’outil et d’écran, mais aussi la fonction d’échange et de médiation. En ce sens, bien que le jeu Pac-Man n’ait pas une réalité matérielle tangible, il n’en constitue pas moins un objet du passé, représentant une certaine idée du monde social et suscitant un certain type d’appropriation. En outre, revenir à ces fétiches comme le Ampelmann berlinois pourrait s’avérer non seulement une opportune ressource marketing mais également l’exploration d’autres potentialités d’un objet. « Revenir à » n’est pas nécessairement « retourner à » (Žižek, 2010). Il ne s’agit pas de confondre l’instauration ou la restauration de liens avec les objets avec une lecture New Age de l’animisme. Les objets débordent de multiples façons cette seule assignation catégorielle. Nous proposons donc d’explorer la diversité de ces liens et des objets qui en sont les supports, voire même les moteurs ou les acteurs.
Face à ces propositions de réflexion est conviée toute personne qui travaille sur un objet culturel ou artistique quel qu’il soit et quel que soit son champ disciplinaire. Il importe que les communications ou les interventions partent d’un objet précis pour mieux interroger ses usages et les mouvements qu’il a pu accomplir. La focalisation sur des objets précis se justifie par le fait que nous souhaitons donner au colloque (et à la publication qui suivra) l’aspect d’un cabinet de curiosités ou d’un inventaire poétique, sans préjuger à l’avance des regroupements théoriques ou axiologiques qu’il conviendra d’opérer. Dans cet esprit, les propositions de performances artistiques ou de communication sous une forme non traditionnelle sont également les bienvenues.
Pratiquement, les propositions présenteront explicitement l’objet choisi, la pratique étudiée et la perspective théorique proposée. Les abstracts compteront maximum 2500 signes et seront accompagnés d’une bio-bibliographie de 500 signes maximum. Si c’est une présentation non traditionnelle qui est choisie, on expliquera la forme qu’elle adoptera. Les propositions artistiques doivent présenter clairement le déroulement de la performance et sa durée.
Calendrier prévisionnel
10 avril 2016 : date limite pour la soumission des propositions aux adresses suivantes : Sebastien.Fevry@uclouvain.be et Sarah.Sepulchre@uclouvain.be. Les propositions (comprenant le résumé, la bio-bibliographie et les coordonnées complètes de l’auteur) seront configurées sous format PDF. Un accusé de réception sera envoyé.
1er juillet 2016 : notification des acceptations
8-9 décembre 2016 : colloque à Louvain-la-Neuve et/ou à Mons (Belgique)
31 janvier 2017 : soumission des articles pour publication
30 avril 2017 : notification des acceptations et retour pour modifications éventuelles
1er septembre 2017 : envoi des articles définitifs
Décembre 2017 : publication
Comité scientifique
Jan Baetens (KU Leuven)
Mariève Bertrand (Université catholique de Louvain)
Joëlle Desterbecq (Université catholique de Louvain)
Sébastien Fevry (Université catholique de Louvain)
Pascal Gin (Carleton University)
Axel Gryspeerdt (Université catholique de Louvain)
Séverine Lagneau (Université catholique de Louvain)
Marc Lits (Université catholique de Louvain)
Elodie A. Roy
Sarah Sepulchre (Université catholique de Louvain)
Magali Sizorn (Université de Rouen)
Marie Vanoost (Université catholique de Louvain)
Bibliographie indicative
Bolter, Jay David, et Richard Grusin. Remediation. Understanding New Media. Cambridge MA-Londres : The MIT Press, 1999.
De Certeau, Michel. L’invention du quotidien. Paris : Gallimard, 1990 (1980).
Latour, Bruno. « Une sociologie sans objet ? Remarques sur l’interobjectivité ».Objets et Mémoires. Ed. Octave Debary et Laurier Turgeon. Paris-Québec : Fondation Maison des sciences de l’homme/Les Presses de l’Université Laval, 2007. 37-57.
Reynolds, Simon. Rétromania, Comment la culture pop recycle son passé pour s’inventer un futur. Marseille : Le Mot et le Reste, 2012.
Turkle, Sherry (eds.). Evocative Objects. Things We Think With. Cambridge MA: The MIT Press, 2007.
Žižek, Slavoj. Living in the End Times. Londres : Verso, 2010.
Page du GIRCAM : https://www.comu.be/comu/services/gircam/
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