Journée d’études : « Petites mains d’artistes dans les pratiques scientifiques XIXe-XXe siècles » (Nancy, 7 décembre 2016)

Petites mains10.pptxCes journées d’études proposent d’interroger l’histoire des rapports entre arts et sciences du point de vue d’une histoire sociale attentive aux acteurs. Il s’agit de saisir quelle(s) place(s) ont occupé les artistes dans le cadre neuf de la science professionnelle à partir du XIXe siècle : celle des laboratoires, des observatoires, des musées, des universités, etc.

Sur ces terrains, l’historiographie a été profondément renouvelée par des travaux récents d’historiens de l’art tout autant que d’historiens des sciences. Se détournant de l’analyse des idées, des questions d’esthétique ou de « l’histoire de la vérité », ils se sont intéressés à celle des objets, des gestes, des sociabilités, de toute une matérialité concrète des pratiques savantes. Bruno Latour depuis les années 1980, ou plus récemment Lorraine Daston et Peter Galison, ont ainsi montré tout l’intérêt de l’étude des objets scientifiques, notamment des images, conçus comme des productions culturellement inscrites, des artéfacts. Ces apports rencontrent aujourd’hui des travaux mitoyens sur les « savoirs de la main » qui ont révélé l’existence d’échanges de savoirs hétérogènes, notamment avec le monde des artisans, ignorés des écrits théoriques, car incorporés (embodied knowledge). L’histoire pionnière des images naturalistes a permis d’éclairer les relations entre artistes et savants, et les enjeux épistémologiques de ces rencontres entre arts et sciences dans le cadre d’une « économie morale de l’objectivité » réclamant à la fois l’effacement de la « manière » de l’artiste et la reconnaissance de ses compétences spécifiques. Celle-ci se fait parfois au plus haut niveau institutionnel, par exemple avec la création de la chaire d’iconographie naturelle du Museum, en 1793.

Ces travaux, parmi de nombreux autres, invitent à réinterroger la supposée « rupture » qui aurait présidé à l’essor de la science moderne : suivant le récit classique, les méthodes scientifiques se seraient affirmées à partir de la Renaissance, reléguant les arts hors du champ scientifique, voire hors de celui du savoir. La rupture entre ces deux modes d’accès au réel aurait été consommée au XIXe siècle, avec l’affirmation d’une science expérimentale professionnalisée consacrée à sa saisie objective et, dans le même temps, la formation d’une classe d’artistes défendant un abord fondamentalement subjectif. En dépit de cette déqualification théorique des arts du point de vue des sciences, on constate pourtant, dans les lieux de science, l’existence, d’une part artistique occultée dépassant les seuls transferts de techniques – fictions dans les textes savants, rémanence des styles dans les images scientifiques etc. – mais aussi la présence de toute une population de petites mains « d’artistes » qui demeurent mal connus. C’est l’objet de cette journée d’études que de les mettre en lumière.


Journées d’études organisées par le CRULH, l’Université de Lorraine et l’Université de Lausanne.
Première journée : « Petites mains du XIXe siècle »
mercredi 7 décembre à l’Université de Lorraine.

Organisation : Aude FAUVEL (IUHMSP-CHUV/Université de Lausanne), Laurence GUIGNARD (Université de Lorraine-CRULH)

Comité scientifique : Vincent BARRAS (PR, UNIL, Histoire de la médecine), Anne CAROL (PR, Université d’Aix en Provence, Histoire de la médecine), François JARRIGE (MCF, Université de Dijon, Histoire des techniques), Francesco PANESE (PR, UNIL, Sociologie de l’art), Nathalie RICHARD (PR, Université du Maine, Histoire des sciences), Frédéric TIXIER (MCF, Université de Lorraine, Histoire de l’art)

Programme

MATINÉE : ACCUEIL 10H

10h30 : Aude Fauvel, Laurence Guignard présentation de la journée

  1. Des contours professionnels ? Présidence : Martina Schiavon

10h45 : Olivier Vayron (Histoire de l’art, Paris Sorbonne), « Après Barye. L’enseignement du « dessin des animaux » du Muséum national d’histoire naturelle sous la direction d’Emmanuel Frémiet (1824-1910) »

11h30 : Thierry Laugée (Histoire de l’art, Paris Sorbonne), « Les Excursions taxidermiques de Carl Akeley »

12h15 : DISCUSSION ET DÉJEUNER

APRÈS MIDI : 14H

  1. Hybridité art/science dans les images anthropologiques ? Présidence : Daniela Gallo

14h : Martial Guédron (Histoire de l’art, Unistra) « Les petites mains de l’anatomie en couleur dans la France du XIXe siècle »

14h45 : Sébastien Meyer (Histoire des sciences/Histoire des arts, Labex Hastec), « De l’objectivation savante à l’exercice de style. L’image anthropologique et ses praticiens au XIXe siècle »

15h30 : DISCUSSION ET PAUSE

  1. Fixer et catégoriser les espaces lointains. Présidence : Frédéric Tixier

16 : Daniele Vial (Histoire des sciences, Université Lyon 1), « Charles-Alexandre Lesueur (1778-1846), François Peron (1775-1810) et les vélins de Méduse »

16h 45 : Etienne Logie (Histoire, Université de Lorraine), « Arts et Sciences au service de l’américanisme : les représentations du nouveau monde »

17h30-18h : DISCUSSION ET CONCLUSION

Discutants : Aziza Gril Mariotte (Histoire de l’art, Université de Haute Alsace), Volny Fages (Histoire des sciences, ENS Cachan).

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Programme Petites mains en PDF

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