Lamia Balafrej : « Survivance de l’image. Notes sur les limites de l’iconoclasme en Islam »

Lamia Balafrej

Survivance de l’image

Notes sur les limites de l’iconoclasme en Islam

Histoire de l’art, numéro 77 (2015/2)

VARIA

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Visages effacés, grattés ou transformés en fleurs : ainsi se manifeste l’iconoclasme dans le monde islamique pré-moderne. Du Maroc à l’Inde, que ce soit dans des espaces profanes ou sacrés, dans le décor architectural ou dans la peinture de manuscrits, à l’ère pré-moderne, les images ne sont pas détruites mais plutôt manipulées et altérées[i]. Cet iconoclasme partiel s’illustre dès le VIIIe siècle en Jordanie et en Palestine, territoires nouvellement conquis par l’Islam, où le décor figuratif des églises byzantines est retouché[ii]. Par exemple, dans l’église de Ma‘in en Jordanie, les tesselles des mosaïques ont été déplacées et redistribuées de façon à créer des représentations végétales[iii] (fig. 1).

 

Mosaïque provenant de l’église de Ma‘in, Jordanie, vers 719-720, 60 x 90 cm, Musée Archéologique de Madaba, Jordanie, d’après Helen Evans (éd.), Byzantium and Islam, p. 119.

Fig. 1. Mosaïque provenant de l’église de Ma‘in, Jordanie, vers 719-720, 60 x 90 cm, musée archéologique de Madaba, Jordanie, d’après Helen Evans (éd.), Byzantium and Islam, p. 119.

Cette transformation cependant n’efface pas complètement le sujet initial : même si dans telle représentation d’animal, le corps a été remplacé par une surface monochrome ponctuée de fleurs, on peut encore voir la tête d’un quadrupède et ses deux pattes avant. Le subterfuge rappelle ce conseil que le théologien musulman Ibn ‘Abbas (618 ? – 687) aurait donné à un artiste, après que celui-ci lui eut demandé s’il pouvait représenter des êtres animés : « Oui, mais tu peux décapiter les animaux pour qu’ils n’aient pas l’air vivants, et tâcher qu’ils ressemblent à des fleurs[iv]. »

Notons aussi que l’iconoclasme en Islam ne touche pas seulement à des objets non islamiques. Il n’est pas rare en effet de trouver, par exemple dans des manuscrits illustrés, qu’ils soient écrits en arabe, en persan ou en turc, des peintures figuratives portant des signes ultérieurs d’altération. Dans ces peintures, les visages des personnages ont été soit effacés, soit barrés d’un trait noir au niveau du cou[v]. Conformément à la prescription d’Ibn ‘Abbas, ces altérations ont pour but de souligner l’aspect fabriqué de l’image, de neutraliser son pouvoir représentationnel et d’indiquer la différence entre la représentation anthropomorphique exécutée par l’artiste et l’être animé créé par Dieu. Ces peintures témoignent aussi de la multiplicité et de l’hétérogénéité des attitudes face à l’art figuratif en Islam, puisqu’elles illustrent, avec leurs altérations, un double mouvement d’adhésion et de suspicion envers l’image[vi].

Pour le spectateur moderne, ces pratiques iconoclastes reposent sur un paradoxe : même si l’image est altérée, elle demeure suffisamment reconnaissable pour permettre au spectateur de la reconstituer mentalement. En préservant de fait les images, cet iconoclasme se heurte à une contradiction, si ce n’est à son propre échec. Non seulement les images ne sont pas détruites, mais elles peuvent même sortir renforcées de cette épreuve. L’iconoclasme les dote en effet d’un pouvoir supplémentaire : celui d’interpeller le spectateur, de l’inviter à un engagement visuel actif et critique par lequel, ne pouvant plus se contenter de consommer passivement les images, il doit désormais interroger leur statut d’image, et même, comme dans le cas des mosaïques déformées, les compléter, et les ré-imaginer.

Le but de cet article est de proposer une explication à ce paradoxe de l’iconoclasme partiel, en interrogeant également la différence apparente entre iconoclasme d’altération et iconoclasme de destruction. Si l’iconoclasme partiel surprend le spectateur moderne, c’est aussi parce qu’il semble se situer aux antipodes de certains exemples récents d’iconoclasme, où les œuvres d’art sont entièrement détruites. Ce fut le cas récemment en Iraq lors de la destruction par l’État Islamique, en février 2015, de sites et de monuments antiques, ou bien encore en 2001 lorsque les Talibans ont dynamité des statues antiques de Buddha à Bamiyan en Afghanistan.

Comment interpréter l’aspect partiel de l’iconoclasme pré-moderne ? Peut-on en déduire, en une sorte de téléologie rétrospective, que l’iconoclasme de l’État Islamique ou des Talibans serait plus radical, ou même plus efficace ? Loin s’en faut. En considérant ces actes iconoclastes comme des actes de communication au rythme temporel complexe, cet article entend suggérer que dans un cas comme dans l’autre, l’iconoclasme ne peut se passer d’images, surtout lorsqu’il est politique, c’est-à-dire destiné à être diffusé auprès d’une communauté particulière. Alors que l’iconoclaste pré-moderne doit conserver les objets altérés pour perpétuer la mémoire de son geste, les iconoclastes modernes utilisent photographies et vidéos lesquelles, tout en documentant leurs actes, constituent de nouvelles images. La différence entre iconoclasme d’altération et iconoclasme de destruction ne tient donc pas tant à des raisons idéologiques ou culturelles qu’à des considérations phatiques[vii]. Plus précisément, nous voudrions montrer que ces stratégies iconoclastes sont informées par le temps de la communication, par la distance temporelle qui sépare l’acte iconoclaste de sa réception par le spectateur. À l’époque pré-moderne où la transmission de l’information est pleine d’incertitudes, c’est l’objet lui-même qui est chargé de transporter le message iconoclaste à travers le temps. À l’époque moderne de la communication synchrone, ce message peut être relayé instantanément par des photos et des vidéos qui remplacent alors l’objet original.

Iconoclasme pré-moderne : le mihrab du mausolée d’Idris II à Fès

Commençons d’abord par examiner attentivement un exemple d’iconoclasme pré-moderne (par « pré-moderne », nous entendons simplement la période historique qui précède l’avènement de l’industrialisation occidentale). L’exemple en question date de la fin du XVIIe ou du début du XVIIIe siècle et se situe à Fès. Il s’agit du décor architectural d’un des monuments les plus vénérés du Maroc, le mausolée d’Idris II (r. 793-828), un des fondateurs des Idrissides (789-926), première dynastie musulmane du Maroc. La construction de ce monument a commencé au XVe siècle avec la découverte miraculeuse de la dépouille du souverain, devenu depuis le saint patron de la ville de Fès[viii]. Plusieurs phases de reconstruction, réparation et agrandissement se sont ensuite succédé au gré des changements dynastiques[ix].

Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, XVIe-XVIIIe siècles © cliché de l’auteur.

Fig. 2. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, XVIe-XVIIIe siècles, cliché de l’auteur.

La partie qui nous intéresse se trouve à l’intérieur du mausolée, plus précisément dans le mihrab, la niche concave qui indique la direction de la Mecque (fig. 2). Comme dans tout espace de culte musulman, le mihrab est le point focal du lieu. À ce titre, il fait l’objet d’une attention décorative particulière, d’autant plus remarquable ici qu’elle se distingue par sa provenance internationale. Alors que l’intérieur du mausolée est recouvert de zellige – une technique de mosaïque locale, le mihrab est tapissé de carreaux de céramique importés. Ces carreaux proviennent de différentes parties de la Méditerranée (fig. 3). On y reconnaît notamment des carreaux bleu et blanc de Delft (Hollande) et des carreaux polychromes d’Iznik (Turquie). Il est probable que ces carreaux aient été ajoutés soit au début du XVIIe siècle lors de la redécoration du monument par le sultan saadien Zaydan (r. 1603-27)[x], soit au début du XVIIIe siècle lorsque le sultan alaouite Isma‘il (r. 1672-1727) fit agrandir le mausolée[xi].

Le décor du mihrab forme une sorte de grille, où les carreaux suivent un arrangement à la fois vertical et horizontal. L’ensemble peut d’abord se lire comme une succession de neuf registres verticaux. Encadré par du zellige vert, chaque registre se présente comme une arche en ogive où se superposent des groupes de deux ou quatre carreaux. Autour du panneau central, huit panneaux verticaux ont été répartis symétriquement. Un dixième panneau a été divisé en deux demi-panneaux, chacun disposé à une extrémité du mihrab. Le décor mime ainsi une arcade circulaire composée de dix arches.

Fig. 3. Intérieur du mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, cliché de l’auteur.

Fig. 3. Intérieur du mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, cliché de l’auteur.

D’un autre côté, le mihrab peut aussi se lire comme une alternance de bandes horizontales, montrant des carreaux tantôt polychromes tantôt bleu et blanc. Cette alternance est interrompue à certains endroits, comme dans la partie inférieure de la zone centrale, où des carreaux de manufacture plus récente et sans doute post-industrielle ont pu être ajoutés ultérieurement, peut-être pour remplacer des carreaux endommagés.

Les carreaux polychromes où dominent de fortes tonalités de rouge, vert et turquoise sont des pièces ottomanes de la fin du XVIe siècle produites à Iznik en Anatolie. On y voit des motifs végétaux typiques du vocabulaire visuel ottoman. Par exemple, dans les deux registres verticaux flanquant le panneau central, on peut distinguer, du haut vers le bas, des tiges de fleurs émergeant en spirale d’une rosette centrale, une large demi-palmette rouge tapissée de fleurs, des bouquets de hyacinthes et d’œillets ainsi que des spirales de pivoines, de demi-palmettes et de feuilles exécutées dans le style saz[xii].

Il est possible que ces carreaux, qui sont les seuls exemples connus de céramique d’Iznik conservée à ce jour au Maroc, soient liés au sultan saadien ‘Abd al-Malik (r. 1576-1578) ou bien à son frère et successeur Ahmad al-Mansur (r. 1578-1603), tous deux connus pour avoir été très proches des Ottomans. Avant de devenir sultans, ils passèrent plusieurs années auprès des Ottomans pour échapper à l’autorité de leur frère ‘Abdallah al-Ghalib (r. 1557-1574). Ils participèrent aussi à la bataille de Lépante en octobre 1571 au côté des Ottomans, et c’est avec l’aide de troupes ottomanes que ‘Abd al-Malik put finalement retourner au Maroc en 1576 et conquérir le trône. Comme le rappellent Nadia Erzini et Stephen Vernoit, son règne et celui de son frère Ahmad al-Mansur introduisirent l’influence ottomane au Maroc, notamment dans les rituels de la cour. Des sources mentionnent aussi l’utilisation de céramique ottomane et autres objets turcs dans le palais Badi‘ d’Ahmad al-Mansur à Marrakech[xiii].

Les carreaux bleu et blanc ont été fabriqués à Delft en Hollande et datent des XVIIe et XVIIIe siècles. Aucune source n’a survécu sur leur provenance. Si l’usage de carreaux de Delft est moins rare au Maroc que celui de la céramique d’Iznik, il demeure très peu documenté. Il semblerait même que les rares exemples mentionnés dans les sources aient été détruits lors de travaux de rénovation. C’est le cas des carreaux de Delft mentionnés par Georges Marçais dans son Manuel d’art musulman et qui devaient orner la fontaine du mausolée d’al-Jazuli construit à Marrakech au XVIe siècle[xiv]. Les carreaux du mihrab de Fès ont pu être directement apportés au Maroc par des marchands hollandais, dont la présence est signalée dès le XVIe siècle[xv], ou d’Espagne ou du Portugal, où ce type de carreaux apparaît fréquemment dans l’architecture. Notons aussi l’utilisation de carreaux de Delft dans l’architecture ottomane baroque du XVIIIe siècle à Istanbul, une résonance qui, si elle s’avérait intentionnelle, ajouterait à l’aspect turquisant du mihrab de Fès[xvi].

Au centre du mihrab, les carreaux de Delft donnent à voir des compositions végétales – des branches, des bouquets ou des vases de fleurs dessinés en bleu sur fond blanc, avec parfois des touches de couleurs comme dans certains vases de fleurs[xvii]. Les images se diversifient à mesure qu’on s’éloigne du centre. Dans le troisième panneau sur la droite en partant du milieu, un carreau laisse deviner un paysage rural. Autour de l’arbre qui domine la composition, on peut voir quelques maisons se profiler sur la ligne d’horizon.

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Fig. 4. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, carreau de Delft, cliché de l’auteur.

Plus surprenants encore sont les carreaux qui présentent, au milieu de paysages champêtres ou marins, des figures humaines. Contrairement aux carreaux à motifs végétaux et floraux qui occupent le centre du mihrab, les carreaux à décor figuratif sont plus difficiles d’accès. Placés à la périphérie, certains d’entre eux ont également pu être insérés à l’envers. Ainsi du carreau renversé, situé tout en bas du panneau central du mihrab (fig. 4). On peut y voir, au premier plan, un personnage penché en avant, manches retroussées, qui semble occupé à une tâche agricole. Un pont relie la scène à l’arrière-plan, où se détachent un moulin et peut-être une église[xviii].

Dans les registres latéraux, les scènes figuratives sont encore plus nombreuses. Ainsi, dans l’avant-dernier panneau vertical en partant de l’extrémité droite, on peut voir deux paysages marins, comme le suggère la présence de bateaux à mâts[xix] (fig. 5). On remarque aussi que certains éléments de l’image ont été grattés. Il semblerait qu’il s’agisse là de visages humains, peut-être de visages de pêcheurs. Le même phénomène se reproduit dans un carreau du panneau adjacent, sur le bord extérieur du mihrab. Un personnage debout au centre de l’image a également été mutilé.

Fig. 5. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, carreau de Delft, cliché de l’auteur.

Fig. 5. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, carreau de Delft, cliché de l’auteur.

Fig. 6. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, carreau de Delft, cliché de l’auteur.

Fig. 6. Mihrab du mausolée d’Idris II, Fès, Maroc, carreau de Delft, cliché de l’auteur.

Sur le côté gauche du mihrab, au moins cinq autres carreaux de Delft contiennent des figures humaines. Ils sont placés tout en bas des trois derniers panneaux et présentent des compositions similaires (fig. 6). Des paysages marins ou urbains sont esquissés sur une fine ligne d’horizon et servent d’arrière-plan à un ou plusieurs personnages, dont les visages ont été systématiquement effacés. Deux de ces panneaux, placés à l’envers, se distinguent aussi par la présence de baleines ou de dauphins, et ne sont pas sans rappeler une iconographie typique de cette faïence hollandaise où l’on voit des cupidons montés sur des dauphins[xx].

Pour l’œil moderne, la décoration du mihrab a de quoi surprendre. Elle porte un coup au topos du clash des civilisations dont se repaissent aussi bien l’islamophobie que les fondamentalistes musulmans. Bien loin des attitudes purificatrices, le mihrab manifeste un processus d’appropriation culturelle, par lequel des éléments décoratifs importés, y compris de terres non-musulmanes, sont fondus en un tout cohérent. L’identité musulmane du mausolée s’affirme visuellement par un certain cosmopolitisme méditerranéen[xxi].

L’aspect le plus surprenant réside peut-être dans la présence altérée d’images figuratives, d’autant que nous nous situons là dans un espace religieux. Trois stratégies contribuent à mettre à distance la figure – tout en la conservant : les carreaux à décor figuratif sont cantonnés dans les zones périphériques du mihrab ; certains sont aussi placés à l’envers ; et dans la plupart des cas, les visages ont été oblitérés. Cette présence-absence de la représentation figurative contredit, d’un même mouvement, deux poncifs : l’interdiction de la figure dans l’art sacré musulman et une conception de la pratique iconoclaste comme destruction des images.

Ces altérations soulignent aussi la différence qui caractérise toute représentation, c’est-à-dire l’écart irréductible qui existe entre le signe visuel et son signifié. Pour utiliser le concept clé de Jacques Derrida, ces altérations indiquent la différance propre à toute signification, le fait que l’image ne capture jamais complètement le sens mais ne fait que le différer[xxii]. Ce faisant, les altérations déplacent le contenu de la représentation dans l’imagination du spectateur. Ce déplacement est autant spatial que temporel. Si l’image est transférée de l’espace de la représentation à celui de l’imagination, elle a besoin, pour se reformer, du temps de l’expérience esthétique.

Iconoclasme et temporalité de la communication

Pour revenir à la question posée dans notre introduction, si le but est de dénoncer le simulacre, pourquoi conserver l’image, pourquoi prendre le risque de renforcer le pouvoir de la représentation ? Qu’est-ce qui explique cette différence entre un iconoclasme pré-moderne qui conserve les objets et un iconoclasme moderne qui les anéantit ? Pour Finbarr Barry Flood, l’iconoclasme radical des Talibans doit se comprendre non pas comme « une réponse atemporelle à la figuration mais comme un engagement calculé avec un discours culturellement spécifique des images dans un moment historique donné[xxiii] ». L’idée selon laquelle les Talibans suivraient une prescription théologique qui appartiendrait à une culture islamique atemporelle est en effet largement contredite par les nombreux exemples d’iconoclasme pré-moderne où les objets sont déformés plutôt que détruits. Quant au discours qui informerait l’iconoclasme moderne, il s’agirait, selon Flood, du fétichisme occidental de l’œuvre d’art. Le choix de la destruction s’expliquerait par la volonté de s’opposer au souci moderne de protection et de conservation des objets.

Expressément adressée au public occidental, la destruction par les Talibans des Buddhas de Bamiyan aurait été plus précisément conçue comme une réponse à l’inquiétude manifestée par les institutions muséales occidentales à l’arrivée des Talibans en Afghanistan. Philippe de Montebello, alors directeur du Metropolitan Museum of Art à New York, avait en effet proposé aux Talibans de récupérer les idoles afin de les placer dans le contexte du musée d’art, où elles seraient « des objets culturels, des œuvres d’art, plutôt que des images religieuses[xxiv] ». La destruction des Buddhas serait en somme une réaction non pas « à la vénération littérale d’idoles religieuses mais à leur vénération comme icones culturelles[xxv] », comme « fétiches de la modernité occidentale[xxvi] ». On pourrait soutenir un argument similaire au sujet de l’État Islamique et de sa destruction récente d’œuvres d’art antiques dans les musées d’Iraq. Là encore, ces événements tirent leur pouvoir affectif et leur impact médiatique de leur opposition radicale au culte moderne de l’œuvre d’art.

Cette interprétation trouve cependant sa limite dans ce qu’elle omet d’interroger le discours anti-fétichiste des Talibans et autres iconoclastes. Si ces derniers réagissent en effet au fétichisme culturel occidental, échappent-ils pour autant à la logique du fétiche ? Ne risque-t-on pas de justifier leurs actes, ou tout du moins de réitérer leur argument anti-fétichiste, si on ne prend pas la peine d’interroger leur propre fétichisme de l’image ?

Par ailleurs, cette analyse se focalise essentiellement sur le discours des iconoclastes. Non seulement cette approche court-elle le risque de répéter ce discours, mais en privilégiant le discours sur l’objet, elle affirme aussi la primauté du premier sur ce dernier, nourrissant ainsi, dans un geste quasi-iconoclaste, une mésestime des images et de leur pouvoir de résistance. Car la question qui subsiste, au-delà des intentions des iconoclastes, est la suivante : les iconoclastes peuvent-ils vraiment se passer d’images ? Dans le cas de l’iconoclasme pré-moderne, la réponse est évidente, puisque l’icône est conservée. Qu’en est-il cependant de l’iconoclasme de destruction ?

À la question de la différence entre iconoclasme d’altération et iconoclasme de destruction, cet article voudrait proposer une interprétation pratique et matérialiste, plutôt que discursive ou culturelle. Il ne s’agit pas pour nous de déceler un changement d’intention ou de croyance, ni d’étudier les motivations théologiques ou politiques de ces pratiques, ni même d’interroger les discours de l’image qu’elles pourraient refléter ou véhiculer. Au lieu d’une histoire du message iconoclaste, nous voudrions suggérer une histoire de sa fonction phatique, par laquelle on étudierait non pas les significations du geste iconoclaste mais la façon dont les conditions pratiques et technologiques de sa transmission ont affecté ses formes[xxvii].

Comme l’a souligné Dario Gamboni, tout acte iconoclaste « doit être considéré comme un moyen de communication en soi, même si le matériel qui est utilisé est ou était lui-même un instrument d’expression ou de communication[xxviii] », en particulier, ajouterions-nous, lorsque l’acte iconoclaste se produit dans un espace public comme la mosquée ou le musée. Là, le geste iconoclaste a pour tâche de communiquer sur la destruction de la communication visuelle. Cette communication contradictoire pose à l’iconoclaste un défi pratique particulier, qui a trait à la temporalité de cette communication. Comment concilier le temps de la destruction et le temps de la circulation du message, surtout si, entre temps, l’objet a disparu ? Comment le geste iconoclaste s’accommode-t-il de cet intervalle temporel qui sépare inéluctablement le moment où l’iconoclaste entame la transformation ou la destruction de l’objet et la réception de ce moment par le spectateur ?

Si on revient au mihrab du mausolée d’Idris II à Fès, où les représentations figuratives sont transformées par les trois opérations de marginalisation, inversion et altération décrites plus haut, il apparaît que ces opérations ont pour fonction à la fois d’accuser et d’anticiper le délai qui informe la communication pré-moderne. S’il veut avoir accès à l’histoire de cet iconoclasme, le spectateur doit prendre le temps d’examiner les carreaux altérés. Il doit se rapprocher du mihrab, regarder attentivement, parcourir patiemment chaque registre du décor. Une fois les signes d’altération repérés, il peut commencer à imaginer comment chacun de ces carreaux a été transformé. Pour ce faire, il doit repérer les images périphériques, retourner mentalement les carreaux renversés, ré-imaginer les visages des corps mutilés. L’exercice peut sembler fastidieux ; cette temporisation cependant est essentielle à la transmission du geste iconoclaste. Sans cette temporisation que l’objet impose à l’expérience du spectateur, sans cette durée de l’analyse que le spectateur doit éprouver avant de pouvoir remonter le temps et reconstituer l’histoire de la transformation, la mémoire de l’acte iconoclaste aurait tout simplement disparu.

Fig. 7. Capture d’écran d’une vidéo diffusée par l’Etat Islamique sur internet et accessible sur youtube, https://www.youtube.com/watch?v=JEYX_CbwAD8 (en accès libre le mardi 28 avril 2015).

Fig. 7. Capture d’écran d’une vidéo diffusée par l’Etat Islamique sur internet et accessible sur youtube (en accès libre le mardi 28 avril 2015).

Par un renversement symétrique, la destruction moderne des icônes est permise par la suppression de ce délai. L’annulation de l’espace temporel qui sépare l’acte de sa transmission est réalisée d’abord par sa mise en représentation sous forme de spectacle, puis par l’usage de moyens modernes de communication visuelle. Comme on peut le voir sur les vidéos diffusées par l’État Islamique, la destruction des sculptures antiques se présente comme un spectacle (fig. 7). Un public entoure la scène, scrutant attentivement la performance des iconoclastes. De plus, les spectateurs ne se contentent pas de regarder passivement. Munis de leurs téléphones et autres appareils électroniques, ils prennent des photos et enregistrent des vidéos. Images et films sont aussitôt publiés sur le web. Ces technologies visuelles modernes, comme l’a montré David Harvey, permettent de comprimer l’espace et le temps qui séparent l’événement de sa représentation[xxix]. Du fait de leur reproductibilité, elles permettent aussi de diffuser ces événements à une large échelle, aussi bien dans l’espace que dans le temps.

Dans le contraste entre altération et destruction, ce sont donc deux temporalités de la communication qui s’opposent : le temps incertain, ralenti de la communication pré-moderne et le temps précipité, accéléré de la communication moderne. Il apparaît que la différence entre iconoclasme d’altération et iconoclasme de destruction pourrait être informée non seulement par des considérations idéologiques mais aussi par les moyens de communication utilisés, et par la façon dont ces moyens construisent le temps de la réception. La déformation des objets anticipe et produit un temps de la communication plus lent, alors que la destruction est informée par la possibilité d’être instantanément vue, enregistrée et diffusée.

Survivance du fétiche

Dans les deux cas, l’iconoclasme reste tributaire de l’image. Dans l’iconoclasme d’altération, c’est l’objet à détruire qui se fait le relais du message. Dans l’iconoclasme de destruction, le message est véhiculé par la création de nouvelles images, qui capturent le moment de la destruction. Ironiquement, alors que les statues antiques ont été détruites par l’État Islamique sous prétexte qu’elles pourraient tromper le spectateur sur leur qualité d’image et devenir des idoles, ce message est transmis par des moyens visuels qui rendent transparent le médium de la représentation et ainsi obscurcissent leur statut d’image. Les images diffusées par l’État Islamique risquent donc de tomber dans le piège qu’elles dénoncent : elles risquent de devenir des fétiches, c’est-à-dire, pour reprendre la définition de Bruno Latour, des objets transformés en « écrans sur lesquels on projette, par erreur, nos fantasmes, notre labeur, nos espoirs et nos passions[xxx] ».

Le fétiche, en quelque sorte, n’est jamais complètement détruit : et c’est là le paradoxe ultime de l’iconoclasme, qu’il soit pré-moderne ou moderne, qu’il altère ou détruise. Comme le souligne Latour, l’iconoclasme repose sur une injonction contradictoire : « D’un côté, l’obligation de respecter le deuxième commandement [sur l’interdiction des idoles] ; mais de l’autre, la nécessité, également contraignante, de matérialiser, de visualiser, de rendre sensible, cette vérité dont on vient de s’interdire toute représentation. D’un côté un cri : ‘À bas toutes les représentations’ ! ; de l’autre un cri ‘Donnez-nous des représentations’[xxxi] ! »

De fait, que ce soit dans des mosquées ou dans des musées, que les iconoclastes détruisent ou altèrent des idoles religieuses ou des icônes culturelles, l’iconoclasme politique produit en même temps qu’il défait la destruction des images. Comme il doit à la fois détruire et montrer, il ne peut se produire que s’il se re-rematérialise, soit en conservant l’objet altéré soit en créant de nouvelles images : dans tous les cas, l’iconoclaste ne fait que passer d’une image à l’autre, sans jamais réussir à court-circuiter la médiation des images.

Cette impasse s’illustre dans nombre d’images produites en terres d’Islam depuis le XIIIe siècle, notamment dans les peintures de manuscrits qui illustrent des scènes de destruction d’idoles. Ainsi de l’épisode où Abraham détruit les idoles des Sabéens ou encore l’épisode où Ali ibn Abi Talib, cousin du prophète Muhammad, brise l’idole de Hubal après que le Prophète et lui-même ont découvert la statue dans le sanctuaire de la Kaaba[xxxii]. Ces peintures non seulement contredisent l’idée communément reçue de l’interdiction de la représentation figurée en terres d’Islam, y compris de la représentation du Prophète Muhammad, mais elles incarnent aussi le paradoxe de l’iconoclasme comme pratique matérialiste. Pour montrer l’iconoclasme, elles doivent représenter les idoles, et donc suspendre le geste iconoclaste. Même si les statues ont été détruites, les peintures remontent le temps et recréent les idoles. Comme le mihrab du mausolée d’Idris II ou les vidéos de l’État Islamique, elles montrent l’impossibilité de dénouer la relation inextricable qui lie la destruction des idoles et la qualité représentationnelle de cet événement, l’acte de détruire et l’acte de peindre, la hache de l’iconoclaste et le pinceau du peintre, finissant ainsi de brouiller la limite entre destruction et création.

Ancienne élève de l’ENS Paris et docteur de l’université Aix-Marseille I, Lamia Balafrej enseigne l’histoire des arts de l’Islam et du Moyen Âge à Wellesley College.

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Notes


[i] Même s’il est difficile de documenter les cas de destruction d’images, Finbarr Barry Flood a démontré, en analysant les sources premières verbales et visuelles, que la forme la plus courante d’iconoclasme dans l’Islam médiéval consistait à altérer les images plutôt qu’à les détruire (F. B. Flood, « Between Cult and Culture: Bamiyan, Islamic Iconoclasm and the Museum », The Art Bulletin, décembre 2002, vol. 84, no 4, p. 641-659, voir en particulier p. 646).

[ii] Finbarr Barry Flood signale pas moins de soixante exemples, datant tous du VIIIe siècle. Voir id., « Christian Mosaics in Jordan and Early Islamic Palestine: A Case of Regional Iconoclasm », dans H. Evans (dir.), Byzantium and Islam: Age of Transition, New York, Metropolitan Museum of Art, 2012, p. 117-119.

[iii] Ces mosaïques sont aujourd’hui conservées au musée archéologique de Madaba en Jordanie.

[iv] Cité dans S. Naef, Y a-t-il une « question de l’image » en Islam ?, Paris, Téraèdre, 2004, p. 21.

[v] Pour des exemples, voir Flood, « Between Cult and Culture », fig. 4 et 6.

[vi] Pour d’autres cas d’images montrant une négociation entre iconophilie et iconophobie, id., « Lost Histories of a Licit Figural Art », International Journal of Middle East Studies, 2013, 45/3, p. 566-569.

[vii] Sur la notion du phatique, voir n. 28.

[viii] La plupart des sources primaires et secondaires s’accordent sur la date de 1437-1438 (voir par exemple R. Le Tourneau, Fès avant le Protectorat, Casablanca, 1949, p. 599 ; une source du XVIIIe siècle écrite par Muhammad al-Qadiri cite une inscription placée à côté de la tombe donnant la date de Rajab 841/décembre 1437-janvier 1438 (Muhammad al-Qadiri, Nashr al-Mathani: The Chronicles, Norman Cigar (trad.), Londres, Oxford University Press, 1981, en arabe p. 53-54 et trad. p. 161-62)).

[ix] Sur l’histoire du mausolée et de ses transformations successives, voir G. Salmon, « Le culte de Moulay Idris et la mosquée des chorfa à Fès », Archives marocaines, 1905, 3, en particulier p. 413-422 ou encore R. Le Tourneau, Fès avant le Protectorat, Casablanca, 1949, p. 599-604.

[x] Salmon, « Le culte de Moulay Idris », p. 416.

[xi] Ibid., p. 418-420.

[xii] Ces carreaux sont typiques de la production d’Iznik de la fin du XVIe siècle. On peut notamment leur comparer de nombreux carreaux conservés au musée du Louvre (numéros d’inventaire OA 3939/2-268, OA 3919/2-297, OA 3919/2-247d, OA 7455, OA 3919/2-247b, OA 3919/2-287, OA 3919/2-277 ou encore OA 3919/2-271). On peut aussi se reporter à ce carreau conservé au Metropolitan Museum of Art à New York, daté de la fin du XVIe siècle (numéro d’inventaire 1971.235.2, publié dans M. Ekhtiar (éd.), Masterpieces from the Department of Islamic Art in the Metropolitan Museum of Art, New York, Metropolitan Museum of Art, 2011, p. 309). Pour plus d’exemples, voir W. Denny, Iznik: the Artistry of Ottoman Ceramics, Londres, New York, Thames and Hudson, 2004 et id., Gardens of Paradise: Sixteenth Century Turkish Ceramic Tile Decoration, Istanbul, Ertug & Kocabiyik, 1998.

[xiii] Pour un rappel de ces sources et des exemples, voir N. Erzini et S. Vernoit, « The Marble Spolia from the Badi‘ Palace in Marrakesh », dans V. Porter et M. Rosser-Owen (éd.), Metalwork and Material Culture in the Islamic World: Art, Craft and Text: Essays presented to James W. Allan, Londres, New York, I.B. Tauris & Co, 2012, p. 317-336, en particulier p. 326.

[xiv] G. Marçais, Manuel d’art musulman, 2 vol., Paris, 1926, vol. 2, p. 748.

[xv] Erzini et Vernoit, « The Marble Spolia », p. 321.

[xvi] H. Theunissen, « Dutch Tiles in 18th-Century Ottoman Baroque-Rococo Interiors: Hünkâr Sofası and Hünkâr Hamamı », Sanat Tarihi Dergisi, octobre 2009, 18/2, p. 71-135 et id., « Dutch Tiles in 18th-Century Ottoman Baroque-Rococo Interiors: the Sabil-Kuttab of Sultan Mustafa III in Cairo », Electronic Journal of Oriental Studies, 2006, 9/3, p. 1-283.

[xvii] Pour des exemples comparables, datés du XVIIIe siècle, on peut se reporter aux carreaux in situ de la maison Carshalton à Surrey en Angleterre publiés dans A. Graves, Tiles and Tilework of Europe, Londres, Victoria and Albert publications, 2002, p. 71.

[xviii] Ce carreau peut être comparé à nombre d’exemples disséminés en Europe au XVIIIe siècle. Ces carreaux se caractérisent par des scènes champêtres ou pastorales inscrites dans un médaillon circulaire. On y voit souvent une plaine, occupant la moitié inférieure de l’image, avec un ou deux personnages au premier plan ainsi que des éléments d’architecture, comme une église ou un moulin. De nombreux exemples sont conservés au Victoria and Albert Museum à Londres (A. Graves, Tiles and Tilework, p. 104). Voir aussi les carreaux du musée de Philadelphie (E. Schaap (éd.), Dutch Tiles in the Philadelphia Museum of Art, Philadelphia, Philadelphia Museum of Art, 1984, p. 113).

[xix] Les paysages marins avec des représentations de bateaux de pêche sont très fréquents dans la céramique de Delft. Pour des exemples documentés voir ibid., p. 145.

[xx] Au sujet de cette iconographie, voir G. Lang (éd.), 1000 Tiles, San Francisco, Chronicle Books, 2004, p. 116-117 et E. Schaap (éd.), Dutch Tiles, p. 148-151.

[xxi] Il rappelle en cela l’usage de spolia ou remplois au Moyen Âge. Pour une définition de ce concept et des exemples appartenant à l’Europe chrétienne, à Byzance et à l’Islam, voir D. Kinney, « The Concept of Spolia », dans C. Rudolph (éd.), A Companion to Medieval Art: Romanesque and Gothic in Northern Europe, Oxford, Blackwell, 2006, p. 233-52 ainsi que B. Kiilerich, « Antiquus et modernus: Spolia in Medieval Art–Western, Byzantine and Islamic », dans A. C. Quintavalle (éd.), Medioevo: Il tempo degli antichi, Milan, Electa, 2006, p. 135-145. Cette pratique a également existé au Maroc, comme on peut le voir dans Erzini et Vernoit, « The Marble Spolia » ainsi que C. Déléry, Y. Lintz et B. Tuil (éd.), Le Maroc médiéval : un empire de l’Afrique à l’Espagne (cat. exposition : Paris, 2014-2015), Paris, musée du Louvre, 2014, p. 462-463. Pour d’autres exemples dans le monde médiéval islamique, voir aussi F. B. Flood, « An Ambiguous Aesthetic: Crusader Spolia in Ayyubid Jerusalem », dans R. Hillenbrand et S. Auld (éd.), Ayyubid Jerusalem: The Holy City in Context, 1187-1250, Londres, Altajir Trust, 2009, p. 202-215.

[xxii] J. Derrida, Marges de la philosophie, Paris, éditions de Minuit, 1972, p. 1-29.

[xxiii] Flood, « Between Cult and Culture », p. 642.

[xxiv] Cité dans ibid., p. 651.

[xxv] Ibid., p. 651.

[xxvi] Ibid., p. 654.

[xxvii] Cette notion du phatique est empruntée à la théorie de Bronislaw Malinowski et Roman Jakobson qui, au début du XXe siècle, ont défini la fonction phatique comme la fonction du langage qui vise à établir le contact entre destinateur et destinataire, à s’assurer que le circuit de la communication fonctionne. Cette fonction n’a que peu été prise en compte par les historiens de l’art dans leurs études sémiotiques de l’art. Il importe donc de souligner le travail pionnier de Jennifer L. Roberts dans son exploration de la « richesse phatique des images » dans la peinture américaine (J. L. Roberts, Transporting Visions. The Movement of Images in Early America, Berkeley, Los Angeles et Londres, University of California Press, 2014).

[xxviii] D. Gamboni, The Destruction of Art: Iconoclasm and Vandalism since the French Revolution, New Haven, Yale University Press, 1977, p. 22.

[xxix] D. Harvey, The Condition of Postmodernity: an Enquiry into the Origins of Cultural Change, Oxford, Blackwell, 1989, p. 284-307.

[xxx] B. Latour, « A few Steps towards the Anthropology of the Iconoclastic Gesture », Science in Context, 1998, 10/1, p. 65.

[xxxi] Id., « Flot et défaut des images : de l’iconoclasme à l’iconoclash », dans L. Gervereau (éd.), Dictionnaire mondial des images, Paris, Nouveau Monde, 2006, p. 201.

[xxxii] Pour un rappel des textes et illustrations de ces épisodes, voir D. Roxburgh, « Concepts of the Portrait in the Islamic Lands, ca. 1300-1600 », dans E. Cropper (éd.), Dialogues in Art History, from Mesopotamian to Modern: Readings for a New Century, Studies in the History of Art 74, Washington, D.C., New Haven et Londres, National Gallery of Art, 2009, p. 118.

 

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