Expositions écoféministes : contenus, formes, évolutions, histoires
(English version below)
Journée d’études organisée le vendredi 21 mars 2025 à l’Université Grenoble Alpes.
Comité d’organisation : Pascale Saarbach (Enseignante-chercheuse en Histoire de l’art contemporain, LARHRA, Université Grenoble Alpes), Fabienne Dumont (Professeure d’histoire de l’art contemporain, ECLLA, Université Jean Monnet-Saint-Étienne)
À l’heure où les préoccupations écologiques sont au cœur de tous les débats, l’important regain d’intérêt que connaît aujourd’hui le mouvement écoféministe en Occident a permis de mettre en lumière l’influence que ce courant de pensées et d’actions a pu avoir dans divers champs des sciences humaines et plus particulièrement dans l’art contemporain. Ces dernières années, la multiplication d’expositions sur le sujet témoigne d’une volonté de mettre au jour un courant encore méconnu dans l’histoire de l’art et d’envisager les productions écoféministes contemporaines à l’aune des artistes pionnières qui ont interrogé, à partir des années 1970, les liens communs entre la domination des femmes et celle de la nature.
Vivement critiqué et longtemps marginalisé, l’art écoféministe s’est développé sous des formes très diverses, depuis les pratiques spirituelles et ritualisées du féminisme culturel, jusqu’aux actions militantes et performances engagées d’artistes femmes luttant pour la sauvegarde de l’environnement. Tandis que les expositions récentes tentent de rendre compte de cette pluralité, le flou définitionnel qui entoure ces pratiques semble poser un certain nombre de difficultés quant à la constitution d’un corpus ou la proposition d’une classification convaincante. Si les expositions, comme le souligne l’historien de l’art Paul O’Neill, demeurent les « principaux moyens par lesquels l’art contemporain est aujourd’hui médiatisé, expérimenté, historicisé[1] », il convient de s’interroger sur le travail de sélection et d’exclusion qui s’opère dans la présentation d’un courant aussi éclectique, dont très peu d’artistes ont en réalité revendiqué l’appartenance.
En 2020, la curatrice Monika Fabijanska organisait à la galerie Thomas Erben de New York l’exposition Ecofeminism(s) qui dressait une première généalogie artistique entre les œuvres historiques et celles du XXIe siècle, non sans reproduire les écueils de l’écoféminisme orthodoxe des années 1970 – 1980 et sa tendance à ignorer les femmes de couleur et les artistes « du Sud ». Trois ans plus tard, une exposition d’envergure présentée au Barbican Center de Londres intitulée Re/sisters: A Lens on Gender and Ecology (2023) proposait cette fois-ci une lecture intersectionnelle et inclusive dont l’organisation thématique permettait de rendre compte des multiples approches de l’art écoféministe. On observe également l’apparition de collaborations entre commissaires et conseillers/conseillères scientifiques ou théoricien-ne-s écoféministes (Réclamer la terre, Palais de Tokyo, 2022). Alors que les événements culturels consacrés à l’art écoféminisme deviennent désormais des manifestations d’envergure présentées dans de grandes institutions – comme en témoigne l’exposition Life on Earth: Ecofeminist Art Since 1979 récemment présentée par The Brick à Los Angeles (15 septembre 2024 au 21 décembre 2024) –, cette journée d’étude propose de réunir tout à la fois des chercheurs/chercheuses et des commissaires d’exposition, afin d’ouvrir des pistes de réflexion qui concernent autant les pratiques curatoriales que l’histoire des expositions écoféministes et son impact sur l’historiographie de l’art.
Dans le champ de l’histoire des expositions d’artistes femmes, le manque de visibilité des pionnières écoféministes s’est trouvé intimement lié au débat qui a opposé au sein même du mouvement féministe, les tenants des théories constructivistes et anti-essentialistes au féminisme culturel et spirituel qui associe les femmes à la nature. Au cœur de cette polarisation, la critique d’art et curatrice Lucy Lippard a joué un rôle important, soutenant par ses écrits les artistes écoféministes et réalisant quelques premières expositions abordant ces questions. À la lumière de ces débats, il est possible d’interroger plus précisément la pratique curatoriale féministe et la figure du commissaire dont le travail implique un engagement et un positionnement politique et social. Au regard de l’histoire de l’art écoféministe, il sera intéressant d’étudier également les mécanismes et les obstacles qui ont participé à l’invisibilisation des artistes écoféministes au sein des institutions. Les communications pourront ainsi aborder les expositions contemporaines et historiques, la théorie critique qui influence la production, et l’impact des expositions sur l’historiographie de l’art écoféministe. D’autres approches pourront s’attacher aux parcours des commissaires d’expositions, aux lieux précis de réception des expositions, aux choix des œuvres exposées, aux généalogies retrouvées, aux inscriptions plus larges en lien aux sexualités multiples, aux autres espèces, aux populations autochtones, etc.
Modalités de soumission
Les propositions d’intervention seront à adresser avant le 1er décembre 2024 aux deux adresses suivantes :
fabienne.dumont@univ-st-etienne.fr
pascale.saarbach@univ-grenoble-alpes.fr
Elles comporteront un titre, un résumé de 1500 signes maximum et une courte biographie.
Les communications, d’une durée de 20 min, se feront en français ou en anglais.
Une publication est envisagée.
Réponse du comité adressée vers le 10 décembre 2024.
Comité d’organisation :
Fabienne Dumont, professeure d’histoire de l’art contemporain, université Jean Monnet-Saint-Étienne, ECLLA.
Pascale Saarbach, enseignante-chercheuse en histoire de l’art contemporain, université de Grenoble Alpes, LARHRA.
Lieu :
Université Grenoble Alpes
Maison de la Création et de l’Innovation
339 avenue Centrale, 38400 St Martin d’Hères
Amphithéâtre
CALL FOR PAPERS
Ecofeminist exhibitions: contents, forms, evolutions and histories
One-day conference organized on Friday, March 21, 2025, at the University of Grenoble Alpes.
Organizing Committee: Pascale Saarbach (Lecturer in Contemporary Art History, LARHRA, Grenoble Alpes University), Fabienne Dumont (Professor of Contemporary Art History, ECLLA, Université Jean Monnet-Saint-Étienne)
At a time when ecological concerns are at the heart of every debate, the major revival of interest in the ecofeminist movement in the West has highlighted the influence that this current of thought and action has had in various fields of the human sciences, and more particularly in contemporary art. The proliferation of exhibitions on the subject in recent years reflects a desire to bring to light a movement that is still little known in the history of art, and to consider contemporary ecofeminist productions in the light of the pioneering artists who, from the 1970s onwards, questioned the common links between the domination of women and that of nature.
Strongly criticised and long marginalised, ecofeminist art has developed in a wide variety of forms, from the spiritual and ritualistic practices of cultural feminism to the militant actions and committed performances of women artists fighting to protect the environment. While recent exhibitions have attempted to reflect this plurality, the vagueness of definition surrounding these practices seems to pose a number of difficulties in terms of constituting a corpus or proposing a convincing classification. If, as art historian Paul O’Neill points out, exhibitions remain the ‘principal means by which contemporary art is mediatised, experimented with and historicised’, we need to ask ourselves about the work of selection and exclusion that goes into presenting such an eclectic movement, to which very few artists have actually claimed to belong.
In 2020, the curator Monika Fabijanska organised the exhibition Ecofeminism(s) at the Thomas Erben gallery in New York, which drew up an initial artistic genealogy between historical works and those of the 21st century, not without reproducing the pitfalls of the orthodox ecofeminism of the 1970s and 1980s and its tendency to ignore women of colour and artists from the ‘South’. Three years later, a major exhibition at London’s Barbican Centre entitled Re/sisters: A Lens on Gender and Ecology (2023) offered an intersectional and inclusive reading, with a thematic organisation that reflected the multiple approaches of ecofeminist art. We are also seeing the emergence of collaborations between curators and scientific advisors or ecofeminist theorists (Reclaiming the Earth, Palais de Tokyo, 2022). While cultural events devoted to ecofeminist art are now becoming large-scale events presented in major institutions – as shown by the exhibition Life on Earth: Ecofeminist Art Since 1979, recently presented by The Brick in Los Angeles (15 September 2024 to 21 December 2024), this study day will bring together researchers and curators to explore issues relating to curatorial practices, the history of ecofeminist exhibitions and their impact on art historiography.
In the field of the history of exhibitions by women artists, the lack of visibility of pioneering ecofeminists has been closely linked to the debate within the feminist movement itself between the proponents of constructivist and anti-essentialist theories and the cultural and spiritual feminism that associates women with nature. At the heart of this polarisation, art critic and curator Lucy Lippard played an important role, writing in support of ecofeminist artists and staging some of the first exhibitions to tackle these issues. In the light of these debates, it is possible to take a closer look at feminist curatorial practice and the figure of the curator whose work implies political and social commitment and positioning. Looking at the history of ecofeminist art, it will also be interesting to study the mechanisms and obstacles that have contributed to the invisibilisation of ecofeminist artists within institutions. Papers may thus address contemporary and historical exhibitions, the critical theory that influences production, and the impact of exhibitions on the historiography of ecofeminist art. Other approaches may focus on the careers of exhibition curators, the specific places where exhibitions are received, the choice of works exhibited, the genealogies rediscovered, and broader inscriptions relating to multiple sexualities, other species, indigenous populations, etc.
Submission procedures
Proposals must be sent before December 1st, 2024, to the following two addresses:
fabienne.dumont@univ-st-etienne.fr
pascale.saarbach@univ-grenoble-alpes.fr
They should include a title, a summary (max 1500 characters) and a short biography.
The talks should be no longer than 20 minutes and be given in French or English.
A publication is envisaged.
Successful applicants will receive a notification by December 10, 2024.
Organising committee :
Fabienne Dumont, Professor of Contemporary Art History, Université Jean Monnet-Saint-Étienne, ECLLA.
Pascale Saarbach, lecturer and researcher in the history of contemporary art, Grenoble Alpes University, LARHRA.
Location :
Grenoble Alpes University
Maison de la Création et de l’Innovation
339 avenue Centrale, 38400 St Martin d’Hères
Amphitheatre
[1] Paul O’Neill, « The Curatorial Turn : From Practice to Discourse », in Judith Rugg, and Michèle Sedgwick, Issues in Curating Contemporary Art and Performance, Bristol: Intellect Books, 2007, p.15.
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