1914 : War and the Avant-Gardes
A l’occasion de ce colloque interdisciplinaire, on interrogera les relations complexes entre les arts visuels, au sens le plus large, et l’histoire, dans un moment où la crise de la conscience européenne se cristallise en catastrophe radicale. En s’en tenant strictement à une tranche temporelle précise, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1914, il s’agira de penser la situation intellectuelle et pratique de la création visuelle pendant les six premiers mois « ordinaires » de l’année, et de comprendre aussi précisément que possible la nature des prises de conscience provoquées par l’événement de la guerre ainsi que par les premiers combats. Les œuvres et les objets, les orientations du goût et du marché, les discours critiques et théoriques seront explorés pour faire l’anatomie de ce qui s’est fracassé, dans les représentations occidentales, entre janvier et décembre 1914.
Provenant du vocabulaire militaire, la métaphore de l’« avant-garde » traverse le monde des arts avec une intensité particulière, en Europe et aux États-Unis, au début de l’année 1914. Partout, les arts contemporains se pensent et s’affirment sur le mode du conflit et de la rupture, de l’arasement du passé proche et de la conquête autoritaire d’un avenir à connotations utopiques. Cette pensée combattante est sensible aussi bien dans les beaux-arts que dans d’autres formes d’expression visuelle, de la photographie et du cinéma aux arts décoratifs et industriels et à toutes les technologies de l’image. Les pratiques sont concernées autant que dans les discours théoriques et critiques. Dans ce contexte, des phénomènes de fragmentation interne, entre groupes, tendances, inspirations mêmes, coexistent avec une visée universaliste, animée par un rêve d’abolition des frontières entre les arts et, plus radicalement, entre les visions du monde. La quête de croisements et d’interactions entre les langages de la philosophie, de la musique, de la danse, des arts visuels, de la littérature débouche sur le désir d’entremêler les temps et les lieux, les traditions culturelles et religieuses, et d’abolir les hiérarchies entre les formes d’expression. Autour des notions de « primitif », de « populaire », d’« enfantin », mais aussi de « technologique », de « rationnel », de « scientifique », un horizon psychologique et anthropologique commun paraît à portée de mains, pour mettre fin aux fractures entre les nations, voire entre les individus. Les rivalités n’en perdurent pas moins ; les consciences nationales continuent de s’aiguiser dans les champs de l’« avant-garde », pour s’assurer le magistère de l’avenir. Kandinsky, Russe vivant en Allemagne et exposant à l’occasion en France, fait de l’abstraction la grammaire intuitive d’une langue de « l’humanité » ; mais, tout en rendant hommage à Matisse ou à Delaunay, il dénonce aussi la « sensualité » de la tradition française. Au mois d’août 1914, la violence concrète immédiate s’empare des destins individuels et les réoriente brutalement : étranger et ennemi, Kandinsky doit quitter l’Allemagne en hâte pour échapper à l’internement ; ses amis allemands du Cavalier Bleu rejoignent le front où August Macke est tué quelques semaines plus tard. A Paris, Guillaume Apollinaire, qui se préparait à faire une conférence à Berlin au mois de janvier 1915, se fait le porte-parole d’un patriotisme virulent et s’engage volontairement. Installé à Londres depuis 1910, le jeune Henri Gaudier-Brzeska passe de l’antimilitarisme à une poétique de la violence moderniste, dans les cercles proches d’Ezra Pound, avant de mourir dans les tranchées, lui aussi, en 1915. Rares sont ceux qui, comme Romain Rolland, Pierre-Jean Jouve, Maurice Loutreuil ou, plus brièvement, André Masson, choisissent l’exil en Suisse ou en Italie, terrains neutres, pour maintenir un discours pacifiste. A l’occasion de ce colloque interdisciplinaire, on interrogera les relations complexes entre les arts visuels, au sens le plus large, et l’histoire, dans un moment où la crise de la conscience européenne se cristallise en catastrophe radicale. En s’en tenant strictement à une tranche temporelle précise, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1914, il s’agira de penser la situation intellectuelle et pratique de la création visuelle pendant les six premiers mois « ordinaires » de l’année, et de comprendre aussi précisément que possible la nature des prises de conscience provoquées par l’événement de la guerre ainsi que par les premiers combats. Les œuvres et les objets, les orientations du goût et du marché, les discours critiques et théoriques seront explorés pour faire l’anatomie de ce qui s’est fracassé, dans les représentations occidentales, entre janvier et décembre 1914. Conditions de soumission Le colloque est organisé conjointement par le Centre allemand d’histoire de l’art / Deutsches Forum für Kunstgeschichte, l’université de Paris Ouest Nanterre La Défense et l’Institut universitaire de France. Il se tiendra à Paris les 5 et 6 décembre 2013, à l’Institut national d’histoire de l’art et au Centre allemand d’histoire de l’art. Les communications orales, d’une durée de 25 minutes, seront en anglais ou en français. Elles porteront sur les cultures visuelles au sens le plus large, en Europe, dans le strict respect du cadre chronologique de l’année 1914. Un titre provisoire et un résumé en anglais ou en français, d’une longueur maximale de 300 mots, ainsi qu’un curriculum vitae succinct doivent être adressés à
Marine Branland colloque[point]arts1914[at]hotmail[point]fr
par voie électronique, sous forme d’un document unique avant le 15 février 2013.
Comité scientifique et d’organisation Annette Becker (Institut universitaire de France, université Paris Ouest Nanterre La Défense) Andreas Beyer (Deutsches Forum für Kunstgeschichte) Itzhak Goldberg (université Jean Monnet – Saint-Etienne) Godehard Janzing (Deutsches Forum für Kunstgeschichte) Rémi Labrusse (université Paris Ouest Nanterre La Défense)
Source : http://calenda.org/231415
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