Statues déboulonnées, portraits déchirés ou brûlés, emblèmes grattés ou barbouillés : ces gestes iconoclastes semblent indissociables des processus révolutionnaires, des révolutions atlantiques du XVIIIe siècle aux révolutions arabes contemporaines. Que se joue-t-il derrière ces gestes apparemment dérisoires, souvent ravalés à du « vandalisme » ? Comment penser, à partir de l’iconoclasme, une histoire des relations entre des sujets et des signes de pouvoir (politique, religieux, social) ? Tel sera l’objet de ce colloque international et pluridisciplinaire, qui réunira au Petit Palais historiens, historiens de l’art, anthropologues, spécialistes d’aires culturelles et de périodes différentes, de la France à l’Afghanistan, de la Chine à l’Amérique latine, de la Russie à l’Espagne… La réflexion portera notamment sur les « pouvoirs de l’image » et du signe, sur le rapport au visible et au sensible en situation révolutionnaire et sur la puissance de transformation du social attribuée aux gestes iconoclastes. Les formes prises par cette violence symbolique, ses cibles privilégiées, ses acteurs individuels et collectifs, sa liesse ou ses silences, ses liens avec la violence physique, ses seuils de tolérance et ses compromis (entre conservation et destruction) seront interrogés. Le colloque permettra d’éclairer les intentions des iconoclastes en révolution, explicitées ou non par eux : effacer une mémoire devenue intolérable, expurger une croyance, exprimer une opinion à la face de tous, s’approprier une souveraineté devenue disponible – sans que ces interprétations soient exclusives l’une de l’autre. Ces intentions seront rapportées à la réception et aux effets – tels qu’on peut les mesurer – des gestes de destruction. Toutes ces questions seront envisagées en situation, dans des contextes et des espaces singuliers, où les cultures visuelles, les formes d’expression politique, le rapport au sacré varient profondément.
Organisation
- Institut Universitaire de France
- Université Paris-Est Créteil,
- Centre de recherches en histoire européenne comparée,
- Comité d’histoire de la Ville de Paris
- Société d’histoire de la Révolution de 1848 et des révolutions du XIXe siècle
- Institut d’histoire de la Révolution française
Comité d’organisation
- Emmanuel Fureix,
- Claire Barillé
Programme
Jeudi 13 décembre 2012, Petit-Palais, auditorium
9h30 : Accueil des participants et ouverture du colloque
9h50 : Emmanuel Fureix (Université Paris-Est Créteil), Introduction
1- Destruction, conservation et transfert de signes
Codes symboliques et imaginaires de l’iconoclasme
Présidence : Lynn Hunt (University of California, Los Angeles)
- 10h10 : Bertrand Tillier (Université de Bourgogne), La mort des statues : imaginaires archaïques et usages politiques de l’iconoclasme
- 10h30 : Yann Lignereux (Université de Nantes), Hercule sans-culotte, France, fin XVIIIe-début XIXe siècle
- 10h50 : Rolf Reichardt (Université de Giessen), « Le fameux jeu du trône ». Un imaginaire iconoclaste dans la Révolution de février 1848
11h10 : Pause
11h25 : Débat
Bricolages et syncrétismes
Présidence : Pierre Centlivres (Université de Neufchâtel)
11h55 : Thomas Serrier (Université Paris 8 / Francfort-sur-Oder), Au-delà de la chute : le Mur de Berlin cassé et concassé. Approche anthropologique
12h15 : Irène Herrmann (Université de Genève), Iconoclasme et syncrétisme en Russie post-soviétique
12h35 : Débat
12h55-14h30: Repas
2- Iconoclasme et religion en révolution
L’iconoclasme anti-religieux en situation révolutionnaire
Présidence : Pierre Serna (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne)
- 14h30 : Quentin Deluermoz (Université Paris 13), La Commune et le sacré : l’iconoclasme religieux sous la Commune (1871)
- 14h50 : François-Xavier Nérard (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne),Détruire les croyances en exhumant des reliques : l’iconoclasme bolchevique de l’après 1917
- 15h10 : François Godicheau (Université Toulouse-Le Mirail), L’iconoclasme de 1936 et les questions qu’il pose sur l’ordre social catholique en Espagne
15h30 : Débat
16h : Pause
16h15-17h45 : Table ronde – Iconoclasme et Révolution française
Animée par Annie Duprat (Université de Cergy)
Avec :
- Serge Bianchi (Université de Rennes 2),
- Philippe Bordes (Université Lyon 2),
- Lynn Hunt (University of California, Los Angeles)
- et Pierre Serna (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne)
Vendredi 14 décembre 2012, Petit-Palais, auditorium
La religion, vecteur d’un iconoclasme révolutionnaire ?
Présidence : Bertrand Tillier (Université de Bourgogne)
9h30 : Silvia Naef (Université de Genève), L’iconoclasme religieux, une arme politique ? Relectures des sources et interprétations contemporaines dans le monde arabe
9h50 : Pierre Centlivres (Université de Neufchâtel), Autour de l’iconoclasme taliban : politiques de l’image et de la représentation en Afghanistan à la fin du XXe siècle
10h10 : Omar Saghi (essayiste, Ecole Supérieure de Journalisme de Paris),Vandalisme et iconoclastie dans les révolutions arabes : une réponse à l’usage policier de la culture sous les dictatures ?
10h30 : Débat
11h : Pause
3- Iconoclasme, politisation et souveraineté
Expériences politiques dans l’espace public
Présidence : Florence Bourillon (Université Paris-Est Créteil)
- 11h15 : Guillaume Mazeau (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne)L’iconoclasme révolutionnaire : revendications populaires, résistances à la Révolution et politisation de l’espace public
- 11h35 : Clément Thibaud (Université de Nantes), L’iconoclasme républicain en Terre-Ferme (Amérique latine, années 1810)
- 11h55 : Emmanuel Fureix (Université Paris-Est Créteil), Mimesis et recharge révolutionnaire : un moment iconoclaste (1830-1831 en France)
12h15 : Débat
12h45 – 14h : déjeuner
Instrumentalisations et souverainetés concurrentes
Présidence : Rolf Reichardt (Université de Giessen)
- 14h : Antoine-Marie Graziani (Université de Corte), Violence et iconoclasme dans la Corse en Révolution (1789-1799)
- 14h20 : Paul Gradvohl (Université de Lorraine), Iconoclasme et révolution hongroise, 1956
- 14h40 : Lucien Bianco (EHESS), Iconoclasme et instrumentalisation : la révolution culturelle chinoise
15h : débat
15h30 : Pause
Iconoclasme et retour à l’ordre post-révolutionnaire
Présidence : Catherine Brice (Université Paris-Est Créteil)
- 15h45 : Vincent Robert (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne), L’iconoclasme du parti de l’ordre, ou comment effacer la Révolution de février 1848
- 16h15 : Alessio Petrizzo (Università degli Studi di Padova), Sortir de 1848. Iconoclasme et retour à l’ordre dans l’Italie des années 1850.
16h35 : débat
- 16h55 : Annie Duprat (Université de Cergy), Conclusions et discussion
Comité scientifique international
- Sylvie Aprile,
- Florence Bourillon,
- Catherine Brice,
- Pierre Centlivres,
- Olivier Christin,
- Annie Duprat,
- Emmanuel Fureix,
- Dario Gamboni,
- Lynn Hunt,
- Dominique Poulot,
- Rolf Reichardt,
- Pierre Serna,
- Timothy Tackett,
- Bertrand Tillier.
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