Colloque international : « Corps et pouvoir : le corps dans l’art politique des temps modernes » (Toulouse, Hôtel d’Assézat, 6-8 octobre 2021)

Colloque international : « Corps et pouvoir : le corps dans l’art politique des temps modernes » (Toulouse, Hôtel d’Assézat, 6-8 octobre 2021)

À la Renaissance, il devint fréquent de voir des corps, masculins comme féminins, transformés et exploités de manière stratégique au travers des œuvres. Réels ou mythiques, âgés ou juvéniles, souvent porteurs d’un imaginaire complexe, ils étaient conçus et perçus tels des métaphores et régulièrement utilisés en instruments de propagande. La figuration du corps avait en effet, à l’époque moderne, une place fondamentale dans le processus d’exaltation et de légitimation des élites. Dans le cadre de ce colloque, toute commande exposant un ou des corps, destinée à célébrer une forme de pouvoir politique, pourra être prise en compte.

Ce colloque tend à se dégager de l’exclusive figure du prince car, bien que centrale, elle n’est pas l’unique concernée. Les dirigeants s’appuyaient sur l’idéalisation de leur propre personne afin de renforcer leur prééminence. Cependant, si leurs corps furent mis en scène et glorifiés au sein de leurs portraits – comme un élément essentiel pour rassurer ou impressionner – ils pouvaient également être juxtaposés à d’autres. Les corps de ces figures secondaires, ennemies ou alliées, pouvaient venir intensifier le message véhiculé, en étant intégrés à leurs représentations ou en dehors. Ainsi, tous les corps pourront être évoqués : ceux des élites comme ceux auxiliaires, destinés à soutenir d’un point de vue sémantique l’idée de puissance.

Des éléments rendant ce pouvoir concret, visible et palpable, seront également interrogés. Des objets d’apparat couvraient les corps pour les transcender tandis qu’en réponse, des corps couvraient à leur tour les objets, le tout articulant un discours substantiel qu’il convient de déchiffrer. Ces mêmes corps peuplaient l’espace des palais et autres lieux où s’exerçait l’autorité. Au sein de décors pérennes comme éphémères, ils rythmaient les façades à travers les ordres anthropomorphes, peuplaient les niches, ornaient les portiques des entrées triomphales, habitaient les fontaines, escaliers, cheminées, etc. Là encore, chacune de ces expressions doit engendrer une réflexion relative à son contexte de création et d’exposition, ainsi qu’à ses intentions.

Le programme s’articule  autour de la relation inhérente entre le corps et la polysémie des termes « pouvoir » et « puissance », désignant aussi bien les aptitudes que la force ou l’autorité. Montrer un corps, c’est un moyen efficace de subjuguer et de convaincre. La posture, la gestuelle, la musculature qui lui sont attribuées, la sensualité, la grâce, l’élégance qui s’en dégagent, contribuent à traduire des idées. Le corps est à la fois subordonné et estimé par et pour le pouvoir et, tel un effet de miroir, c’est aussi par son pouvoir esthétique, émotionnel et symbolique qu’il honore et valorise les puissants.
Si longtemps la référence biblique servit de prétexte à l’exhibition de ces corps, la réappropriation de la culture antique leur fit quitter les sphères privées et sacrées pour gagner l’espace public. Cet essor témoigne d’une compréhension généralisée de la force herméneutique, de la portée expressive et persuasive du corps dont la puissance évocatrice se développe au regard du rapport étroit entre impression physique et aspect psychologique. Ces compositions pleines de vitalité, d’affects et de dynamisme ont conféré, à partir de sujets ambivalents et parfois violents, une force émotionnelle et sensorielle indispensable au processus de séduction politique. Il s’agit alors d’apprécier la place des sens – optiques et haptiques – dans l’iconographie politique, tant formellement que sémiotiquement.

En somme, l’ambition de ces deux journées est d’explorer des problématiques liées au corps porteur d’un discours politique, en mobilisant des œuvres créées depuis la Renaissance jusqu’à l’aube du XIXe siècle. En rassemblant jeunes chercheurs et chercheurs confirmés, français et étrangers, cet événement permettra de confronter des méthodologies (approches formelles, iconographiques, esthétiques…) en réunissant des cas d’études divers discutant de ces corps imposants, héroïques, séduisants, inquiétants ou repoussants, dont l’anatomie fut plus ou moins dévoilée pour incarner, entre autres, la figure du vainqueur invincible comme celle, par opposition, de la victime vulnérable.

 

PROGRAMME :

mercredi 6 octobre 2021

14h30 : Introduction générale

Juliette Souperbie et Mathilda Blanquet (membres du comité d’organisation)

15h : Conférence inaugurale (en visioconférence)

Victor Stoïchita, professeur émérite : “Gardiens du corps, gardiens du visage”

 

jeudi 7 octobre 2021

8h45 : Accueil des participants

9h15 : Session : Le corps comme stratégie figurative dans les représentations des élites /

The body as a figurative strategy in the representations of elites

Présidente de séance : Juliette Souperbie (Doctorante, Université de Toulouse)

9h30 : Chloé Pluchon-Riera (Doctorante, Université de Grenoble) : “Petits corps, grandes ambitions. Enjeux politiques des portraits d’enfants dans l’Italie de la première modernité (XVe-XVIe siècles)”

10h : Yann Lignereux (Professeur, Université de Nantes) : “Voy le portrait au vif de Henri quatrième. Sur une économie modeste de la persuasion politique : les portraits gravés d’Henri IV”

10h30 : Émilie Ginestet (Doctorante, Université de Toulouse) : “Le corps inaltérable du roi, triompher du temps de Louis XIII à Louis XVI”

11h : Discussion / Pause café

11h30 : Andreas Plackinger (Maître de conférences, Université de Freiburg im Breisgau) :
“Quelques observations sur l’imaginaire du souverain-père (XVe-XVIIIe siècles)”

12h : Itay Sapir (Professeur, Université du Québec à Montréal) : “Le roi est mort, vive le roi ? : le corps royal à l’instant de son décès »

12h30 : Dominic-Alain Boariu (Chercheur Senior, Université de Fribourg) : “Louis-Philippe à l’épreuve de la photographie”

13h : Pause Déjeuner

14h30 : Session : Pouvoirs du corps dans les objets d’apparat / Body’s Power in pageantry objects

Président de séance : Frank Fehrenbach (Professeur, Hamburg Universität)

15h : Gaylord Brouhot (Docteur, Historien de l’art et de la mode) : “Quand la mode façonne la persona privée d’une Reine : le « Cabinet Doré » de Marie de Médicis”

15h30 : Simon Colombo (Doctorant, Université de Toulouse) : “Le corps-décor : fantaisies anatomiques dans les armes et armures de la Renaissance”

16h : Discussion

16h30 : Yannis Hadjinicolaou (Chercheur associé, Université de Hambourg / Warburg Haus) : “The Ruler in Action: Falconry, Training and the Body”

17h : Diane Bodart (Professeure associée à Columbia University, en détachement de l’Université de Poitiers) – en visioconférence : “Armures de lumière pour la Conquête »

 

Vendredi 8 octobre

9h15 : Session : Le pouvoir du corps : sens et émotions enflammés dans l’imaginaire politique / The Power of the Body: meaning and emotions ignited in the political imagination
Président de séance : Pascal Julien (Professeur, Université de Toulouse)

9h30 : Mathilda Blanquet (Doctorante, Université de Toulouse / Junior Fellow Hamburg Universität) : “De l’éphèbe à l’athlète : variations esthétiques dans la sculpture politique (Florence, XVIe siècle)”

10h : Mathilde Jaccard (Doctorante, Université de Genève) : “Pistoia 1479 : une Déjanire dénudée en Fortitude endeuillée”

10h30 : Juliette Souperbie (Doctorante, Université de Toulouse) : “Sublime et dévoilé, immonde et écrasé : les ambiguïtés du corps féminin dans l’iconographie bourbonnienne”

11h : Nicolas Cordon (Chercheur associé, Université Panthéon-Sorbonne) : “La politique du corps dans la Sala Regia du Vatican : interface et pouvoir de sujétion”

11h30 : Bastien Hermouet (Doctorant, Université de Toulouse) : “La draperie et le corps sacré du roi : le buste de Louis XIV par le Bernin”

 

14h : Session : Les règnes du corps dans les décors princiers / The reigns of the body in princely decorations

Présidente de séance : Émilie Roffidal (Chargée de recherche CNRS, laboratoire FRAMESPA)

14h15 : Tania Levy (Maîtresse de conférences, Université de Brest) : “Aprochant de corsage & traict de visage a la noble personne du Roy nostre sire’. Le corps du roi dans les entrées royales françaises du XVIe siècle : décors et manuscrits”

14h45 : Marie Bouichou (Masters de l’université Columbia et de Toulouse) : “Le corps dans l’apparat politique des princes et des élites. Carrosses et décors éphémères au XVIIe siècle à Rome”

15h15 : Caroline Ruiz (Doctorante, Université de Toulouse / membre de la Casa de Velázquez) : “Des corps déchus, un corps célébré : La fontaine de la Renommée de Sa Majesté Catholique à San Ildefonso (1728-1738)”

15h45 : Giulia Cicali (Post-doctorante, EPHE) : “Vers l’apothéose du corps absolu”

 

16h30 : Conclusion du colloque
(comité d’organisation / members of the steering committee)
Ouverture : Frank Fehrenbach

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