Colloque international : « Le Phototexte engagé. Du militantisme aux luttes de visibilité » (31 mai-1er juin 2018, MSH Paris Nord)
Magali Nachtergael, Charlotte Foucher Zarmanian et Marie-Anne Paveau.
Jeudi 31 mai et vendredi 1er juin 2018, 9h – 17h30. Ouvert à tout.e.s
Auditorium, Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord, 93210 Saint-Denis.
Présentation :
L’histoire du militantisme est ponctuée de slogans, affiches, tracts, pamphlets, interventions urbaines ou physiques, occupations, séquestrations, grèves, manifestations. Toutes ces démonstrations – au sens de visibilité et de rhétorique – ont leur force, leur langage, leur culture et leur histoire visuelle.
La mémoire des luttes et du militantisme passe par l’archive bien sûr, mais aussi par une reconfiguration créative articulant le texte et l’image, relevant de l’artivisme autant que de la rhétorique politique. Texte et photographie, s’ils ont œuvré de pair à faire passer des messages politiques, documentent aussi dans une autre temporalité les moments d’engagement parfois sous la forme d’un livre, d’un journal intime, d’une publication sur le web quand ils ne font pas office de rappel dans la rue. Au début du 20e siècle, le photomontage a été plébiscité par les artistes comme outil d’affichage politique et de dénonciation. Il s’est imposé dans le contexte des luttes de classe, des guerres, de la censure et en particulier pour contrer le discours fasciste. Le couple texte-image a ainsi inauguré une nouvelle didactique de la lutte, pour éclairer, expliquer, montrer et convaincre face aux aberrations des politiques sociales et culturelles. Il est également devenu, dans la seconde moitié du 20e siècle, un médium de prédilection au service des luttes féministes et LGBTQIA+, de la conquête des droits civiques africains-américains et des mouvements antiracistes, permettant une meilleure visibilité dans l’espace public et social.
Mais que devient, à l’heure des médias numériques, cette agentivité de l’image dans l’espace social telle que le 20e siècle l’a connue (« poids des mots, chocs des photos ») ? Les modalités d’apparition du discours militant par l’image évoluent avec les réseaux sociaux, amenant aussi à interroger des urgences contemporaines liées non plus seulement à des groupes mais également plus largement à des écologies discursives et visuelles.
Ce colloque pluridisciplinaire entend dresser un panorama de cent ans de luttes par la photographie et le texte, depuis le photomontage militant jusqu’aux stratégies de visibilité sur les réseaux sociaux. Jeunes chercheur.e.s et chercheur.e.s confirmé.e.s présenteront des travaux inédits sur des aspects peu étudiés du couple texte et image, que ce soit en histoire de l’art, en littérature ou en analyse du discours.
Deux conférencier.e.s ont été invité.e.s pour poser les enjeux de la politique de l’image et du texte et introduire un nouveau regard, culturel et politique, sur l’approche de la photolittérature en France. Andy Stafford (Leeds) dressera le premier jour du colloque un panorama historique de l’engagement phototextuel. Le lendemain, Shawn Michelle Smith (Chicago) présentera à partir de l’œuvre de l’artiste afrodescendante Lorna Simpson les enjeux de race et de visibilité dans le contexte américain.
Conférenciers :
Shawn Michelle SMITH est professeure en études visuelles et critiques à la School of the Art Institute of Chicago. Elle a publié six ouvrages majeurs sur l’histoire et la théorie de la photographie aux États-Unis, sur le genre et la race dans la culture visuelle. Ses ouvrages les plus récents sont : Photography and the Optical Unconscious (2017), codirigé avec Sharon Sliwinski, At the Edge of Sight: Photography and the Unseen (2013), lauréat du prix Lawrence W. Levine Award en 2014 (Organization of American Historians) récompensant le meilleur livre en histoire culturelle américaine. Elle a également publié deux ouvrages majeurs : Photography on the Color Line: W. E. B. Du Bois, Race, and Visual Culture, Durham, Duke University Press, 2004 et American Archives: Gender, Race, and Class in Visual Culture Princeton, Princeton, Princeton University Press, 1999.
Andy STAFFORD est théoricien de la critique et spécialiste de l’œuvre de Roland Barthes. Il a publié un livre de référence sur le phototexte français des années 1990 (Photo-texts. Contemporary French Writing of the Photographic Image, Liverpool, Liverpool University Press, 2010), ainsi que des articles sur Raymond Depardon, André Bazin, et Leïla Sebbar et Marc Garanger. Ses recherches portent aussi sur la forme brève, surtout la nouvelle, le conte, la poésie. Il a coédité des volumes sur l’essai français, sur la revue, et sur les études visuelles. Il est membre du comité de rédaction de la collection Francophone Postcolonial Studies et enseigne à l’université de Leeds au Royaume-Uni.
Programme :
Jeudi 31 mai :
9h – Accueil des participant.e.s, café & mot d’ouverture
9h30-10h30 : Conférence d’ouverture – Andy STAFFORD, University of Leeds
Centenaire engagé et phototexte (rétro-)spectral
10h45-12h30 : Session 1 – Photomontage et lutte des classes (présidence : Laureline Meizel, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Rosanna GANGEMI, Université Libre de Bruxelles – Paris 3 Sorbonne Nouvelle
L’art est un danger : John Heartfield ou le photomontage comme balistique
Aurélie ARENA, Université de Strasbourg
De l’emploi du texte dans les photomontages dadaïstes d’Hannah Höch : structures d’une émancipation progressive du matériau
Max BONHOMME, Université Paris Ouest Nanterre
Usages du photomontage dans la presse communiste française des années 1930 : détournements satiriques et politique de l’image « pauvre »
12h30-13h30 : Déjeuner
13h45-15h45 : Session 2 – Plaire, émouvoir, apprendre : une rhétorique politique (présidence : Frédéric Sylvanise, Université Paris 13)
Chloé CONANT OUAKED, Université de Limoges
A Seventh Man (Le 7ème homme) et A Fortunate Man (Un métier idéal). Les photo-essays de John Berger et Jean Mohr : entre enquêtes sociologiques et « albums de famille » du prolétariat
Marion GAUTREAU, Université Toulouse 2 – Jean Jaurès
Chile from within : l’engagement des photojournalistes « du dedans » en contexte dictatorial
Elsa BACHELARD, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Nothing Personal (1964) de Richard Avedon et James Baldwin : un photobook littéraire engagé et perfomatif qui s’inscrit dans le contexte du mouvement des droits civiques aux États-Unis ?
Thomas BERTAIL, Université Rennes 2
Le « phototexte », un support privilégié de la lutte pour les droits civiques et la sensibilisation à la condition africaine-américaine
15h45-16h : Pause
16h-17h : Session 3 – L’espace public, théâtre des opérations 1 – l’agentivité en question (présidence : Galia Yanoshevsky, Université Bar-Ilan, Tel Aviv)
Benoit JODOIN, Université du Québec à Montréal – EHESS Paris
We Are Not Afraid : l’agentivité dissensuelle du phototexte dans l’espace publicitaire
Louis BOULET, Université du Québec à Montréal à Montréal – Université François-Rabelais de Tours
Taryn Simon et le phototexte dans l’art d’aujourd’hui : un engagement sans agentivité ?
17h-17h30 : Discussions et clôture de la première journée
Vendredi 1er juin :
9h : Accueil et café
9h15-10h15 : Session 4 – L’espace public, théâtre des opérations 2 – discours contemporains (présidence : Chloé Conant Ouaked, Université de Limoges)
Léo MUELLE, Université Paris 13
Phototexts on the Social Web, assets for visibility and diffusion: a postdualist approach
Taous R. DAHMANI, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Racisme et luttes antiracistes : Quand les murs parlent les pancartes répondent
10h15-11h15 : Conférence plénière – Shawn M. SMITH, School of the Art Institute of Chicago
Phototextual Referral: Lorna Simpson’s 9 props
11h15-11h30 : Pause
11h30-12h30 : Session 5 – Intimité exposée, intimité engagée (présidence : Charlotte Foucher Zarmanian, CNRS)
Federica CHIOCCHETTI, University of Westminster
Un album di violenza (An Album of Violence) by Stephanie Oursler and (more than) dust by Jamie Oliveira: decades of violence
Clara BOUVERESSE, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Le journal intime et politique d’Abigail Heyman : phototexte engagé et féminisme aux États-Unis dans les années 1970
12h30-13h30 : Déjeuner
14h-15h30 : Session 6 – Violences de l’histoire : reconfigurations (présidence : Claire Parfait, Université Paris 13)
Mathilde BERTRAND, Université Bordeaux Montaigne
“A kind of visual pamphlet”: photo-montage in the UK in the 1970s and 1980s (The Hackney Flashers Collective, Peter Kennard, Peter Dunn and Loraine Leeson)
Paul EDWARDS, CNRS – Université Paris 7 Diderot
Photobook, Pamphlet and Indy-Rock Photojournalism: Three Phototexts Produced During the Civil War in Bosnia-Herzegovina
Galia YANOSHEVSKY, Université Bar-Ilan, Tel-Aviv
Circulation, critique et patrimonialisation des photographies. Le cas de figure de Beno Rothenberg
15h30-15h45 : Pause
16h-17h : Table ronde animée par les organisatrices – Visibilité et invisibilité : une tension à l’oeuvre
Marie-Laure S. LOUIS (Québec), artiste, photographe et théoricienne, Olenka CARRASCO (Venezuela), photographe et écrivaine, et Eric MARTY (France), écrivain et professeur.
17h-17h30 : Discussions et clôture du colloque
17h30 : Cocktail pour tout.e.s, Salle panoramique de la MSH Paris Nord
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