Conférence : « L’objet comme sujet : la nature morte et les limites de l’humanité  » par Etienne Jollet (Paris, 3 décembre 2014)

SEBASTIEN STOSKOPFF, Nature morte aux verresL’on se propose de revenir sur quelques aspects fondamentaux de la relation instituée par la présentation d’objets qu’on a appelée, bien tardivement d’ailleurs, « nature morte ». Il s’agit tout d’abord de la constitution d’un « sujet » au sens de «  thème », ce qui légitime la représentation : il faudra revenir aux origines du phénomène (les xenia antiques), en mettant l’accent sur la question du lieu de cette présentation. Le deuxième aspect est la manière dont la constitution de l’objet en tant que chose oblige à penser les limites de sa fonctionnalité, mais aussi de ce par quoi il peut être appréhendé par la pensée (c’est le seul sens d’ « objet » jusqu’à la fin du XVIIIe siècle). Enfin, la valorisation de l’objet, le constituant comme sujet individué, a pour corrélat la menace qui pèse sur le spectateur toujours présent in absentia : c’est alors l’épreuve pour l’homme des limites de son humanité, faisant de l’œuvre un «cas de conscience», au double sens psychique et moral.

Etienne Jollet est professeur d’histoire de l’art moderne à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne. Ses recherches correspondent à trois grands questionnements : les rapports entre le voir et le savoir, l’histoire de l’art comme discipline, le lien entre le voir et le pouvoir. Dans la première direction, il a étudié le rapport entre la peinture de genre et la diffusion du newtonisme en France au XVIIIe siècle (Figures de la pesanteur. Fragonard, Newton et les hasards de l’escarpolette, Nîmes, Jacqueline Chambon, 1998), la notion de lieu dans la nature morte en Occident (La Nature morte et la place des choses. L’objet et son lieu dans l’art occidental, Paris, Hazan, 2007). La deuxième orientation correspond aux travaux de méthodologie et d’historiographie de l’histoire de l’art, dont témoignent l’édition de l’oeuvre critique de La Font de Saint-Yenne (Paris, ENSBA, 2001) et celle, en français, du Portrait de groupe hollandais d’Alois Riegl (2007). Le troisième axe est illustré par des recherches sur le portrait du roi (notamment dans Jean et François Clouet, Paris, 1997) et sur la notion de monument, dont relève le colloque édité avec C. Massu, Les Images du monument. De la Renaissance à nos jours, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 2010) et l’ouvrage en préparation, provisoirement intitulé Au fondement du pouvoir. Le monument royal et le sol de Henri IV à la Révolution.

 

Conférence dispensée dans le cadre du  séminaire Arts & sociétés.

3 décembre 2014,  17h-19h
Centre d’histoire de Sciences Po

Salle du Traité
56 rue Jacob
75006 Paris

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