Face au corps
Paris, musée Rodin, auditorium Léonce Bénédite, et retransmission en ligne
Sous la direction de Catherine Méneux, maîtresse de conférences HDR en histoire de l’art du XIXe siècle, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Pour « interpréter tous les aspects de la chair, il faut s’être entraîné patiemment à épeler et à lire les pages de ce beau livre », déclarait Auguste Rodin en 1911 dans ses Entretiens avec Paul Gsell. Un « beau livre » spécifique pour les sculpteurs, puisque ceux-ci étaient plus dépendants des exemples antiques et qu’à l’âge du réalisme et de la photographie, une trop grande proximité avec le modèle vivant ou l’adjonction d’une polychromie étaient susceptibles d’entacher leurs œuvres d’un illusionnisme ou d’un caractère décoratif disqualifiants.
En sculpture, s’il est omniprésent, le corps a donc posé des questions particulières qui ont été peu traitées : alors qu’il a fait l’objet de nombreux travaux en histoire, en anthropologie ou encore en sociologie, sa place centrale a paradoxalement été peu étudiée en tant que telle, en histoire de l’art. Qu’il soit appréhendé dans une optique moniste ou dualiste, le corps a pourtant porté la quête d’expressivité et de dramaturgie gestuelle de maints artistes, leur aspiration à un idéal et leur soumission à des canons, leur volonté de susciter le désir et de s’adapter à l’horizon d’attente des spectateurs. Des spectateurs dont les regards ont été déterminés par les convenances, les modèles perceptifs et les rapports de pouvoir. Certains artistes ont également soumis les corps à la déformation et à l’exagération pour esquisser des charges contestant les canons et les grands hommes ; d’autres les ont stylisés pour se conformer à la beauté de leur époque.
Au XIXe siècle, leurs approches ont fortement évolué sous la pression des découvertes scientifiques et de nouvelles taxinomies, des politiques sociales et d’une culture visuelle notamment orientée vers la capture imagée du mouvement, parallèlement à une reconfiguration des identités genrées. Plus que les autres, les sculpteurs ont donné forme à la précarité de la chair et à son éventuelle évanescence, à la volonté de la sauver de l’oubli ou, au contraire, d’incorporer sa puissance vitaliste ; ils ont figuré la singularité de chaque corps, au temps des sciences anthropométriques et de leur classification hiérarchique. Ils ont aussi travaillé avec ses fragments pour les réassembler dans des compositions inédites ou des œuvres décoratives, se confrontant alors à la question de la figure dans l’ornementation. Tels sont les quelques axes qui seront traités lors de cette journée d’études qui accueillera divers points de vue sur la fabrique des corps du milieu du XIXe siècle à l’entre-deux-guerres.
Comité scientifique et coordination
Amélie Simier, conservatrice générale du patrimoine, directrice du musée Rodin
Catherine Méneux, maîtresse de conférences HDR en histoire de l’art du XIXe siècle, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Véronique Mattiussi, cheffe du service de la Recherche au musée Rodin
Franck Joubin, documentaliste, chargé des colloques au musée Rodin
Programme
09h00
Mot d’accueil
Amélie Simier, conservatrice générale du patrimoine, directrice du musée Rodin
09h15
Introduction
Catherine Méneux, maîtresse de conférences HDR, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
09h30
« Une étreinte mystérieuse » de l’âme et du corps : Burne-Jones, Moreau et Rodin face aux Esclaves de Michel-Ange
Sébastien Mullier, enseignant agrégé de Lettres modernes, Lycée Auguste Blanqui
10h00
Absences/présences. Formes en devenir du corps à l’époque symboliste
Adriana Sotropa, maîtresse de conférences en histoire de l’art contemporain, Université Bordeaux Montaigne
10h30
Discussion et pause
11h00
Utopie régénératrice. Le corps sculpté à l’épreuve des derniers avatars du symbolisme : Adolfo Wildt (1868-1931), Gustav Vigeland (1869-1943), Henrick Christian Andersen (1872-1940)
Claire Barbillon, professeure des universités, directrice de l’École du Louvre
11h30
Sculptures de chair. Le modelage des corps dans les salles d’Edmond Desbonnet
Thierry Laugée, professeur d’histoire de l’art contemporain, Nantes Université
12h00
Discussion et pause
14h30
Figuristes ou ornemanistes : le défi de la Petite École au milieu du XIXe siècle
Maxime Paz, docteur en histoire de l’art
15h00
La rhétorique du corps blessé : les représentations du mutilé dans la sculpture de l’époque fasciste
Sara Vitacca, maîtresse de conférences en histoire de l’art contemporain, Université de Franche-Comté
15h30
Discussion et pause
16h00
Donnée scientifique ou procédé d’esthétisation des corps sculptés ? La couleur dans les Races of Mankind de Malvina Hoffman (1931-1933)
Nancy Ba, doctorante contractuelle en histoire de l’art, Sorbonne Université
17h00
Discussion
17h30
Visite de l’exposition « Corps In⸱visibles. Une enquête autour de la Robe de chambre du Balzac »
Isabelle Collet, conservatrice générale, cheffe du département scientifique et des collections du musée Rodin, co-commissaire de l’exposition
Informations pratiques
Musée Rodin
Auditorium Léonce Bénédite
21, boulevard des Invalides
75007 Paris
www.musee-rodin.fr
De 09h00 à 18h00
Entrée libre dans la limite des places disponibles
Accessible aux personnes à mobilité réduite
Ouverture de l’auditorium 15 minutes avant le début de la manifestation
Retransmission en direct sur Zoom (hors visite de l’exposition)
Inscription (obligatoire) : https://www.musee-rodin.fr/musee/agenda/face-au-corps
Contact
Visuel : Messrs. Stearn, Portrait de Samuel White, modèle pour l’Athlète américain d’Auguste Rodin (détail), 1900-1901, épreuve sur papier albuminé, 9 x 6 cm, Paris, musée Rodin, Ph.01315 © musée Rodin
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