Journée d’études : « Jumpologies. Images du saut, de la gymnastique à l’extase » (Paris, 12 décembre 2015)

En partant de la « jumping picture gallery » réalisée par Philippe Halsman au cours des années 1950, et après avoir étudié le travail du photographe par rapport aux médias de masse aussi bien qu’à « l’usine à rêves » hollywoodienne, Jumpologies propose l’élaboration d’une sorte d’iconographie du saut dans l’histoire de l’art, de la photographie et du cinéma.
Inscrit dans la perspective d’un renouvellement du portrait, le saut réitéré par les modèles d’Halsman devait favoriser la « tombée du masque » et l’apparition d’une expression non (ou moins) maîtrisée par le sujet. Ainsi, l’exécution du mouvement est concomitante d’une perte de contrôle : dépossession ou déconditionnement psychiques, dont le visage consigne les effets. À l’image des sujets dessaisis par l’appareil photographique d’Halsman, ces rencontres donneront à voir une série de « figures libres » dans le savoir en vue de déconstruire le saut, signe de rapports au corps, au mouvement et à l’émancipation réinventés.
Entre l’envol des sujets photographiés et celui du personnage filmé, entre les corps acrobates, comiques, dansant et les corps extatiques, les formes du saut déployées engagent chaque fois des enjeux singuliers pour l’image. Elles relancent la question de l’articulation, décidément changeante, entre le corps et l’esprit. À l’autre bout du « spectre iconographique », le champion de saut à ski de La Grande Extase du sculpteur sur bois Steiner (Werner Herzog, 1973) se risque au grand saut, l’exploit sportif répondant de façon ultime à une impulsion fondamentale : entre principe de plaisir et pulsion de mort.