Journée d’études : « La commande en Val de Loire autour de 1500 » (Tours, musée des Beaux-Arts, 3 juin 2025)
Journée d’étude organisée par Marion Boudon-Machuel, INHA, Pascale Charron, CESR, et Elsa Gomez, Musée des Beaux-Arts de Tours
Programme
9h15 – Introduction
Présidence de séance : Elsa Gomez, musée des Beaux-Arts de Tours
9h30 – Caroline Vrand, musée du Louvre. Un cycle de la Passion inédit et de nouveaux éléments sur l’enluminure à Tours autour du Maître du Boccace de Munich
Le musée du Louvre a acquis en février 2024 un ensemble de quinze enluminures extraites d’un livre d’heures exécuté à Tours à la fin du XVe siècle. Exceptionnel par son iconographie de la Passion inhabituellement riche, l’ensemble l’est aussi par la finesse d’exécution de ses enluminures. La présente communication permettra de préciser son contexte de production et de mettre au jour les différents éléments qui convergent en faveur d’une attribution à une suiveur de Jean Fouquet, qui pourrait être le Maître du Boccace de Munich. Si ce cycle n’a pas encore livré tous ses secrets, il vient ouvrir de nouvelles perspectives pour la connaissance de l’art de l’enluminure tourangelle du dernier tiers du XVe siècle.9h50
9h50 – Elliot Adam, INHA. Une esthétique curiale ? Le goût de la grisaille incarnée dans l’enluminure du Val de Loire (1460-1520)
Au nombre des tendances picturales qui parcourent l’enluminure du manuscrit en Val de Loire autour de 1500 figure un intérêt croissant pour la réduction de la couleur. L’un des aspects de ce phénomène est la pratique de la grisaille incarnée, manière d’œuvrer « de blanc et de noir » dont l’interprétation parisienne des « livres blancs » avait connu les faveurs des officiers de Charles VII. Dans les années 1460 et 1520, plusieurs peintres actifs entre Bourges et Tours adaptent à leur tour cette manière dans l’enluminure de riches manuscrits et livres d’heures destinés aux gens de la cour et du gouvernement, mais aussi désormais à des personnalités de la maison royale telles que Charles de France, Charles VIII, Anne de Bretagne ou Claude de France. En revenant sur les acteurs et les témoins conservés de ce phénomène, cette communication proposera d’apprécier le choix de ce parti chromatique comme l’expression d’une esthétique curiale, durablement inscrite dans l’héritage artistique de la cour de France.
Pause
10h40 – Pascale Charron, Université de Tours/CESR. Exalter son lignage : l’exemple de la commande de Guy XV de Laval et de Catherine d’Alençon à la cathédrale de Tours
Fruit de la prestigieuse commande de Guy XV de Laval et de son épouse Catherine d’Alençon à la fin du XVe siècle, la rose occidentale de la cathédrale de Tours et ses huit lancettes sont les seuls vitraux de la fin du Moyen Âge à demeurer en place au sein de l’édifice, les autres verrières ayant pour la plupart disparu ou étant remployées sur les façades ouest et nord et dans le triforium de la nef. L’ensemble vitré, qui magnifie le frontispice de la Saint-Gatien, développe un programme iconographique mêlant l’évocation des fins dernières à l’exaltation du lignage de la famille des Laval-Montmorency, la plus puissante alors à l’ouest du royaume. L’étude conduit à replacer cette œuvre, jusqu’ici peu étudiée, au cœur de l’ensemble des vitraux du XVe siècle de la cathédrale afin de mieux en comprendre l’importance et de proposer une réflexion sur les raisons familiales et politiques ayant conduit à sa création.
11h – Remi Jimenes – Université de Tours/CESR et Raphaël Cappellen – Université Paris Cité/CERILAC. Jean Brèche et Charles Chiffin : les réseaux de deux hommes du livre tourangeaux
Nous nous proposons de documenter à nouveaux frais la production de deux Tourangeaux actifs dans les années 1540 : un avocat, Jean Brèche, et un orfèvre, Charles Chiffin. Le premier, homme central dans la vie intellectuelle tourangelle, fut également un auteur prolifique, et le second un intéressant graveur de caractères. En passant de l’un à l’autre, nous serons amenés à explorer leurs liens et leurs réseaux communs, entre Tours et Paris.
Présidence de séance : Marion Boudon-Machuel, INHA
14h15 – Samuel Riou, Service de l’archéologie du département d’Indre-et-Loire et Isabelle Girard, Archives départementales d’Indre-et-Loire. L’ostentation cachée d’un notable oublié : nouvelles données archéologiques et documentaires sur la façade de l’Hôtel Goüin, construite vers 1510-15
Vraisemblable première construction de la Renaissance à Tours, la façade de l’hôtel Goüin, composée de trois avant-corps ouverts en loggias, n’a aucun précédent en France, ni en Italie. En 2013, la fouille archéologique de la cour de l’hôtel a été l’occasion de mettre au jour plusieurs bâtiments datés des alentours de 1500. Leur agencement dans la parcelle révèle que la façade Renaissance a été ajoutée à l’arrière d’un hôtel plus ancien et qu’elle n’était visible que depuis une cour intérieure. Elle ne s’offrait donc qu’aux hôtes de son propriétaire, comme une intime ostentation. Une patiente recherche parmi les milliers d’actes notariés conservés des années 1490 à 1550 permet aujourd’hui de confirmer que cette innovation architecturale provient d’un des plus grands serviteurs du roi.
14h45 – Jean Beuvier, Université de Tours/CESR et Colin Debuiche, Université de Tours/CESR, Imiter ou « Contrefayre » : les mécanismes de la commande monumentale en Touraine à la Renaissance
Après 1525 et le départ du roi en Île-de-France, la production artistique en Touraine a longtemps été synonyme dans l’historiographie de relâchement après le dynamisme des années 1500. En dépit de sa nouvelle situation, la région est restée une zone d’innovations et d’ambition créatrices, comme en témoignent la chapelle Saint-Sébastien de Saumur (1549) ou le manoir-ferme de la Courtinière (v. 1560-1580). Ces réalisations attestent la réception des nouveaux décors royaux, mais aussi la constitution d’un langage honorifique spécifique. Outre les questions de transferts artistiques et de rapports entre centre et périphéries, cette communication scrutera la complexité des mécanismes de la commande à travers la mise au jour d’un phénomène de compilations de « références à », comprenant des créations locales. Ces mécanismes se décèlent dans l’analyse des œuvres, ainsi que dans les documents d’archives par l’intermédiaire d’une série d’expressions récurrentes : « comme à la maison de monsieur », « de la sorte et façon que » et « pareil et semblable à », etc. En 1567, dans son Premier tome, Philibert De l’Orme assimile cette pratique d’imitation dans le contexte royal à une « contrefaçon » sociale, rapprochant le comportement de commanditaires « suiveurs » à un manque de mesure et de convenance. Cette relecture de la commande invite donc à enrichir le regard porté sur l’architecture savante qui, outre le recours aux grands modèles, se nourrit aussi d’une culture visuelle locale, suivant un principe de cumulation honorifique.
15h15 – David Rivaud, Université de Tours/CESR. Enjeux de la commande artistique des familles tourangelles au XVIe siècle : où la trouver, où la chercher ? L’exemple de Jacques de Beaune.
En dehors de quelques grands chantiers, de la diffusion des nouveaux courants artistiques ou des attributions d’œuvres majeures, la commande artistique tourangelle a bien du mal à être analysée. La production est cependant importante et témoigne d’une activité bien connue. Il convient donc d’avoir recours à des enquêtes documentaires complémentaires pour pouvoir en estimer les particularités sinon même son ambition. Cette communication proposera quelques pistes de recherches autour de Jacques de Beaune, et partant de là, s’attachera à dresser les contours de la commande d’un des principaux personnages de Touraine et du royaume au début du XVIe siècle.
16h30 – Visite de l’exposition : Renaissance d’une œuvre . La “Vierge à l’Enfant” de Michel Colombe (Musée des Beaux-Arts de Tours)
Informations pratiques
Sur inscription. Entrée gratuite dans la limite des places disponibles.
Contact : marie.laure.masquiller@univ-tours.fr
Centre d’études supérieures de la Renaissance.
59, rue Néricault-Destouches BP 12050 37020 Tours Cedex 1.
Tél. 02 47 36 77 61 | cesr.univ-tours.fr | cesr.cnrs.fr
Source : CESR
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