Appel à communication : Actualités de la recherche sur le whistlérisme (Rouen 21-22 juin 2024)

Actualités de la recherche sur le whistlérisme
Colloque international, Musée des Beaux-Arts de Rouen, 21 – 22 juin 2024

À l’occasion de l’exposition « James Abbott McNeill Whistler : l’effet papillon », qui mettra en lumière, au musée des Beaux-Arts de Rouen, dans le cadre de la cinquième édition du festival Normandie Impressionniste, le phénomène artistique du whistlérisme, un colloque international sera co-organisé les 21 et 22 juin 2024 par l’Université de Rouen et l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne-Laboratoire HICSA.

Ce colloque ambitionne de proposer de nouveaux éclairages sur le whistlérisme, tendance artistique dont James Abbott McNeill Whistler (1834-1903) est la figure tutélaire, en revenant sur sa formation, son histoire, et son large impact sur la littérature, la poésie, la critique d’art, l’esthétique et le cinéma.

S’appropriant le langage plastique de Whistler, les élèves et suiveurs de l’artiste participent à la diffusion de son travail et de ses théories artistiques. Jusqu’aux confins de l’Europe, la production croissante de paysages nocturnes et de portraits hiératiques reprenant les codes esthétiques mis en place par l’artiste témoigne d’une vaste admiration pour le peintre américain. Par sa pérennité ainsi que son rayonnement international, le whistlérisme se révèle être un phénomène artistique majeur ; il se construit à partir du procès opposant Whistler au critique John Ruskin et offre un nouveau prisme d’exploration de l’histoire de l’art de la seconde moitié du XIXème siècle et du premier quart du XXème siècle. Cette tendance artistique a notamment la particularité d’émerger du vivant de l’artiste et d’infuser la création contemporaine internationale entre 1878, véritable point de départ du mythe de l’artiste marqué par l’éclosion de divers adjectifs tels que ‘whistlérien’, et les prémices de la Grande Guerre.

Conçu tel un état des lieux de la recherche sur le whistlérisme, son histoire, son contexte et son historiographie, ce colloque tend à présenter de nouvelles perspectives à travers une approche transdisciplinaire et transnationale. Notre objectif est de promouvoir de nouvelles orientations dans la recherche sur James Abbott McNeill Whistler. Pour ce faire, nous sollicitons des contributions émanant de diverses disciplines, notamment l’histoire de l’art, la littérature, la poétique, l’esthétique, les études cinématographiques, les visual studies.

La perspective du colloque vise plus spécifiquement l’étude des axes suivants :

-Le whistlérisme en action : cartographier l’impact de Whistler
L’admiration pour Whistler s’articule à travers la reprise des codes esthétiques mis en place par le peintre, tel que le recours à une palette restreinte de couleurs, dominée par les tons sombres, l’affirmation de la planéité de la toile, réceptacle d’un arrangement de lignes, de formes et de couleurs à des fins purement esthétiques. Ce nouveau paradigme est convoqué par les artistes afin d’expérimenter les dernières innovations picturales et de facto, de légitimer leurs pratiques en s’associant au maître américain. Toute une génération d’artistes le perçoit en effet comme un chef de file. Quels sont les enjeux du fait de se revendiquer whistlérien ? Quels sont les modes d’appropriation du whistlérisme ? À quoi sert l’exemplarité whistlérienne ? Quels sont les rapports et les ponts entre whistlérisme, impressionnisme, tonalisme, naturalisme et symbolisme ? Au-delà de l’examen de cette catégorie artistique, il s’agit aussi de s’interroger sur la question des transferts culturels et artistiques et ses différents enjeux, non seulement en Europe occidentale au sens large mais également aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Il convient par ailleurs d’étudier la réception de la poétique de l’inachèvement ainsi que sa mise en œuvre, sa matérialité technique caractérisée par un rendu esquissé, une matière picturale lisse et mince telle un « souffle sur une vitre » (O. H. Bacher, With Whistler in Venice, New York, 1909, p. 31). La révolution whistlérienne résulte aussi de la modernité des techniques picturales mises en œuvre. Ces dernières années, l’étude matérielle des œuvres de Whistler a été entreprise à l’initiative du Kelvin Centre for conservation and cultural heritage research de l’Université de Glasgow. Dans ce sillage, il s’agit de revenir sur l’histoire matérielle de la peinture de Whistler et celle de ses suiveurs.

-Le whistlérisme au prisme de la critique d’art
Le terme whistlérisme est une création qui émane de la critique d’art. Sa première occurrence en France, sous la plume du graveur et critique d’art Félix Buhot, est dans un premier temps, convoquée dans un contexte humoristique pour révéler aux lecteurs l’une des inspirations majeures de la première exposition du groupe des XXXIII à la galerie Georges Petit en 1888. Ce dernier oppose le ‘pissarisme’ au ‘whistlérisme’ cette « nouvelle école d’art qui, formée dans l’ombre, se montre tout-à-coup, rangée en bataille, forte, expérimentée, armée de toutes pièces et sortie toute armée de la… palette de James McNeill Whistler. » (F. Buhot, « Le whistlérisme et le pissarisme à l’exposition des XXXIII », Le Journal des arts, 13 janvier 1888, p. 1). L’apparition de ce terme s’accompagne de nombreux qualificatifs tels que whistlérianiste, whistlérien, whistlériste qui fleurissent au sein des revues spécialisées à partir des années 1880. Paradoxalement, lors de son procès l’opposant à John Ruskin, Whistler conteste la légitimité des critiques d’art bien qu’il bénéficie de leur soutien, notamment en France. Il s’avère que la critique d’art a été partie prenante de la diffusion et de la globalisation du whistlérisme. Le whistlérisme encourage-t-il la création d’un discours nouveau dans la critique d’art ? Ce discours est-il influencé par l’image de Whistler lui-même telle qu’elle est véhiculée dans la presse ? Le whistlérisme est-il marqué par les échanges ou invectives avec des contemporains, les pamphlets, les caricatures, la publicité, ou les illustrations du Whistler dandy ?  Peut-on parler d’un mythe Whistler ? Quels liens unissent Whistler aux critiques d’art contemporains ? Peut-on parler d’une véritable alliance entre la plume et le pinceau ? Quelle réception critique est réservée aux œuvres de Whistler et à celle des whistlériens en Europe, en Angleterre et aux États-Unis ?

-Le dialogue entre les arts
L’art de Whistler résulte d’une interpénétration de références entre peinture, littérature, poésie, critique d’art, musique, décoration et architecture. L’œuvre protéiforme de Whistler, à la fois peintre, graveur, aquarelliste, décorateur et scénographe n’a cessé de construire des ponts entre les arts et les médiums, et entre les pays (États-Unis, Angleterre, France). Par exemple, la Peacock Room, réalisée pour le mécène Frederick Leyland en 1877, se place dans la lignée de l’idéal wagnérien de la Gesamtkunstwerk, l’œuvre d’art totale. Quels sont les enjeux artistiques et philosophiques du projet d’œuvre d’art totale à laquelle la Peacock room est généralement associée ? Au cours des années 1870, Whistler se fait le chantre d’une peinture innovante privilégiant l’harmonie des couleurs au détriment du sujet. De cette période naissent les Nocturnes et les Symphonies qui déroutent le public par leur caractère esquissé dont l’inachèvement pictural est revendiqué. Entre autonomie de l’art, paradigme musical ou analogie avec les poétiques baudelairienne ou mallarméenne, l’œuvre de Whistler permet d’aborder le croisement des arts dans toute sa complexité. Pourquoi, dans la seconde moitié du XIXème siècle, les catégories se confrontent-t-elles aux autres ? Quels sont les enjeux de cette quête d’intégration d’une ou de plusieurs altérités ? Par quels moyens s’effectuent ces dialogues dans les œuvres de Whistler et celles de ses suiveurs ? Quelles synergies unissent Whistler à ses contemporains artistes, écrivains, philosophes ou musiciens ? Ces pistes permettront de déterminer une prosopographie des sociabilités et des cercles artistiques et littéraires fréquentés par l’artiste. Il s’agira également d’identifier une production littéraire qui répond à l’art de Whistler.

Ces axes ne sont ni exhaustifs ni exclusifs, chaque proposition sera examinée avec attention. Le comité scientifique sera sensible à la dimension interdisciplinaire des propositions ainsi qu’à celles qui inscrivent Whistler dans un contexte pan-européen, et/ou international. Les communications donneront lieu à la publication d’actes du colloque.

Les communications en français et en anglais sont les bienvenues et devront respecter le format de 20 minutes. Les propositions de communication, d’une page maximum avec un titre prévisionnel, seront accompagnées d’une brève biographie mentionnant le nom de l’intervenant et son affiliation. Les propositions seront à envoyer par email sous format Word aux adresses suivantes : Anne-Florence Gillard-Estrada af.gillardestrada@gmail.com et Laura Valette valette.laura@gmail.com

Le colloque se tiendra au musée des Beaux-Arts de Rouen les 21 et 22 juin 2024.

Nous encourageons les candidatures d’étudiants dont les recherches se concentrent sur Whistler. Un financement pourra être envisagé pour les doctorants.
Le programme de la conférence proposera également des activités auxiliaires, dont une réception au musée afin de visiter l’exposition.

Calendrier :
Date limite de soumission des propositions : 31 janvier 2024.
Date de réponse du comité scientifique aux propositions : 29 février 2024.

Comité d’organisation :
Anne-Florence Gillard-Estrada, PhD, Professeur, Université de Rouen Normandie, ERIAC
Laura Valette, PhD, docteur en histoire de l’art
Pierre Wat, PhD, Professeur, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Directeur de l’HiCSA

Comité scientifique :
Anne-Pascale Bruneau-Rumsey, Maître de conférences, Université Paris Nanterre, CREA
Florence Calame-Levert, conservatrice, Musée des Beaux-Arts de Rouen
Frédéric Cousinié, Professeur, Université de Rouen Normandie, GRHis
Catherine Delyfer, Professeur, Université Toulouse Jean Jaurès, CAS
Frances Fowle, Professeur, Conservateur en chef, National Galleries of Scotland
Anne-Florence Gillard-Estrada, Professeur, Université de Rouen Normandie, ERIAC
Sarah Gould, Maître de conférences, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, HiCSA
Claire Maingon, Maître de conférences, Université Rouen Normandie, GRHis
Patricia de Montfort, Senior Lecturer, University of Glasgow
Thierry Roger, Maître de conférences, Université Rouen Normandie, CÉRÉdI
Laura Valette, chercheuse, docteur en histoire de l’art, HiCSA
Pierre Wat, Professeur, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Directeur de l’HiCSA
Claire Willsdon, Professeur, University of Glasgow

Ce colloque bénéficie du soutien du Musée des Beaux-Arts de Rouen, de l’Institut Adam Mickiewicz et des centres de recherche HiCSA (Centre de Recherche Histoire culturelle et sociale de l’art-EA 4100) de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, des centres ERIAC (Équipe de Recherche Interdisciplinaire sur les Aires Culturelles-UR 4705), CÉRÉdI (Centre d’Études et de Recherche Éditer/Interpréter-UR 3229) et GRHis (Groupe de Recherche d’Histoire-UR 3831) de l’Université de Rouen Normandie, ainsi que du CREA (Centre de Recherches Anglophones-UR 370) de l’Université Paris Nanterre.

Mots clefs : whistlérisme ; Whistler ; catégorie artistique ; mouvement artistique ; émulation ; imitation ; inspiration ; histoire du goût ; critique d’art, admiration ; réception critique ; référence ; citation ; international ; transnational ; transferts culturels ; portrait ; nocturne

Indications bibliographiques :
BADEA-PAUN, Gabriel, « Les portraitistes ‘whistlériens’ aux Salons de la Société nationale des Beaux-Arts, 1890-1903, Bulletin de la Société de l’Histoire de l’Art Français, 2009, pp. 300-321.
BALDRY, Alfred Lys, « James McNeill Whistler. His Art and Influence », The Studio, n°126, vol. 29, septembre 1903, pp. 236-245.
BUHOT, Félix (pseud. Pointe Sèche), « Le whistlérisme et le pissarisme à l’exposition des XXXIII », Le Journal des arts, 13 janvier 1888, p. 1.
BROCKINGTON, Grace, Internationalism and the Arts in Britain and Europe at the Fin de Siècle, Oxford, Peter Lang, 2009.
DAYAN, Peter, Art as Music, Music as Poetry, Poetry as Art, from Whistler to Stravinsky and beyond, Farnham, Ashgate, 2001.
DE KAY, Charles, « Whistler, the Head of the Impressionists », Art Review, novembre 1886, p. 1.
ENAUD-LECHIEN, Isabelle, Exposer / s’exposer : Edgar Degas et James McNeill Whistler médiateurs de leur art, Paris, Mare & Martin, 2023.
FOWLE, Frances, « The butterfly’s disciples », Art History, n°33, 2010, pp. 549-551.
From realism to symbolism: Whistler and his world, catalogue d’exposition, Wildenstein, New York, 4 mars-3 avril, 1971, Philadelphia Museum of art, 15 avril-23 mai, 1971, New York, Columbia university, 1971
MACDONALD, Margaret F. (sous la dir.), The woman in white : Joanna Hiffernan and James McNeill Whistler, Londres, Royal Academy of Arts, 23 février-23 mai 2022, Washington, National Gallery of Art, 3 juillet-10 octobre 2022, Washington, National Gallery of Art, Londres, Royal Academy of Art, 2022.
MACDONALD, Margaret F., MONTFORT, Patricia de, An American in London: Whistler and the Thames, Londres, Dulwich Picture Gallery, 16 octobre 2013-12 janvier 2014, Andover, Addison Gallery of American Art, Philips Academy, 1er février-13 avril 2014, Washington, freer Gallery of Art, Smithsonian Institution, 2 mai-17 août 2014, Londres, Philip Wilson, 2013.
MACDONALD, Margaret F., PETRI, Grischka, HAUSBERG, Meg, MEACOCK, Joanna, James McNeill Whistler: The Etchings, a catalogue raisonné, University of Glasgow, 2012, version en ligne: http://etchings.arts.gla.ac.uk.
MACDONALD, Margaret F., PETRI Grischka, James McNeill Whistler : The paintings, a catalogue raisonné, University of Glasgow, 2020, version en ligne: http://whistlerpaintings.gla.ac.uk.
MALLARMÉ, Stéphane, « Le Ten O-Clock de M. Whistler », La Revue indépendante, Paris, 1888, pp. 203-229.
MERRILL, Linda, A Pot of Paint : Aesthetics on Trial in Whistler v. Ruskin, Washington & London, Smithsonian Institution Press, 1992.
RIBEYROL, Charlotte. « Swinburne–Whistler : Correspondance(s) », Études anglaises, vol. 57, no. 1, 2004, pp. 63-78.
ROBINS, Anna G., A Fragile Modernism: Whistler and his impressionist followers, New Haven, Londres, Yale University Press, Paul Mellon Center, 2007.
The Correspondence of James McNeill Whistler, 1855-1903, edited by F. MacDonald, Patricia de Montfort, Nigel Thorp, on-line edition, University of Glasgow: http://www.whistler.arts.gla.ac.uk/correspondence
VALETTE, Laura, Le ‘whistlérisme’, 1878-1914, thèse de doctorat sous la direction de Pierre Wat, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2020.
WHISTLER, James Abbott McNeill, Whistler versus Ruskin, Art and Art Critics, Londres, Chatto & Windus, 1878.
WHISTLER, James Abbott McNeill, Mr. Whistler’s Ten O’Clock, Londres, Chatto and Windus, 1888.
WHISTLER, James Abbott McNeill, The Gentle Art of Making Enemies, Londres, W. Heinemann, 1890.

 

 

Leave a Reply