Depuis longtemps, les créations de personnes atteintes de troubles psychiques suscitent aussi bien l’intérêt des artistes et des historiens de l’art que de psychiatres renommés, tel Walter Morgenthaler (1882–1965) qui travaillait à la clinique de la Waldau, près de Berne. Dès la première moitié du XXe siècle, des collections spécialisées seront constituées, comme celle du médecin psychiatre et historien de l’art de Heidelberg Hans Prinzhorn (1886–1933), que Harald Szeemann exposa pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale à la Kunsthalle de Berne, en 1963. Citons également la Collection de l’Art Brut, initiée par Jean Dubuffet, qui, à la suite d’une donation, sera transférée à Lausanne en 1975 – l’année où fut créée la Fondation Adolf Wölfli au Musée des beaux-arts de Berne. Elle ouvrira ses portes au public en 1976.
En 1970, l’Institut suisse pour l’étude de l’art (SIK-ISEA) publiait la monographie et le catalogue raisonné de l’œuvre de Louis Soutter rédigé par Michel Thévoz, quatrième de la série des «Catalogues raisonnés d’artistes suisses». Plus récemment, divers projets de recherches, d’expositions et de publications ont donné un nouvel élan à l’étude de l’art des patients d’établissements psychiatriques. En 2013, pour la première fois, un catalogue raisonné d’une artiste suisse associée à l’art brut, Aloïse Corbaz, a été réalisé – en collaboration avec la Fondation Aloïse – et publié en ligne. Par ailleurs, des œuvres jusqu’à présent peu ou pas connues de malades mentaux suisses, datant de la deuxième moitié du XIXe siècle jusqu’à nos jours, ont été documentées dans le cadre d’un projet de la Haute école des arts de Zurich (ZHdK). Enfin, en 2014, une réévaluation complète des œuvres tardives de Max Gubler, que ce dernier avait dessinées ou peintes lors d’internements dans des cliniques psychiatriques, et qui, il y a peu, était encore sous scellés, a fourni une nouvelle contribution à la compréhension du processus créatif chez les personnes atteintes de troubles mentaux.
Le symposium prévu doit permettre de discuter des résultats des initiatives de recherche les plus récentes et, en même temps, soulever des questions fondamentales sur le plan herméneutique, méthodologique et éthique. Celles-ci pourront notamment concerner les domaines suivants :
– La terminologie comme processus épistémologique : que signifie l’utilisation de termes tels que «art brut», «art des fous», «art naïf », «art outsider», etc…?
– Problèmes de délimitation : sens et problématique des limites entre l’art des personnes dotées d’une bonne santé mentale et celui des personnes atteintes de troubles psychiques ou des handicapés mentaux, des marginaux, etc.
– Problèmes méthodiques : portée herméneutique des approches biographique, sociologique, psychologique et médicale
– Perspectives interdisciplinaires : acquisition de connaissances au moyen de comparaisons avec des œuvres littéraires ou d’autres disciplines
– Exemples de cas illustrant l’histoire de la réception des œuvres concernées
– Recherches historiographiques sur les ouvrages d’histoire de l’art traitant de l’œuvre de malades mentaux
– Problèmes éthiques : la protection de la personnalité est-elle compatible avec l’intérêt du public pour les créations artistiques de personnes souffrant de troubles psychiques ?
– Approches méthodiques et techniques visant à résoudre le dilemme entre la protection de la personnalité et la reconnaissance publique de l’œuvre de malades mentaux
Temps prévu pour les exposés : 30 minutes. Les frais de séjour et de déplacement (billets de 2e classe/economy) seront pris en charge par les organisateurs, moyennant présentation des pièces justificatives.
Nous vous prions d’envoyer un exposé du contenu de la conférence (max. 1 page) en français, en allemand ou en anglais ainsi qu’une notice biographique jusqu’au 31 mars 2016 à Regula Krähenbühl (regula.kraehenbuehl@sik-isea.ch).
Organisation: Dr. Roger Fayet et Regula Krähenbühl, lic. phil. (SIK-ISEA)
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