Appel à communication : « Arts and Crafts aujourd’hui » (Saint-Etienne, 13-14 mars 2019)

Le mouvement Arts and Crafts se caractérise par une volonté de fusion de l’art et de l’artisanat et peut être considéré comme une source du design. Animé par des théoriciens, des artistes et des architectes, il concentre plusieurs enjeux qui pourraient trouver une nouvelle actualité dans la création contemporaine en art et en design. Le rapport à l’histoire de l’art fait non de ruptures mais de résurgences, une attitude critique portée à des utopies concrètes en lien avec l’écologie, une relation assumée à la technique et à l’artisanat, le brouillage de la frontière entre art, art décoratif et design sont autant de questionnements qui trouvent un écho particulier dans l’art et le design aujourd’hui.

Argumentaire

L’utopie d’Arts and Crafts, qui s’incarne dans des communautés d’artistes–artisans, propose une forme de modernité alternative, largement distincte du programme des avant-gardes. L’esthétique de ce mouvement ne se projette pas dans un idéal universaliste et absolu, érigé sur une rupture avec le passé, mais revendique un processus de création des formes inscrit dans une historicité. Le projet d’Arts and Crafts n’en est pas moins politique mais son utopie prend une forme très concrète dans des communautés de travail en lien avec la nature, manifestant une première préoccupation écologique. D’autre part, les Arts and Crafts opèrent une fusion de l’art, de l’artisanat et de l’ornement, qui ne se réduit pas à la tradition des arts décoratifs. Les motifs des tapisseries et les tableaux de Dante Gabriel Rossetti se confondent dans une même aspiration vers une unité décorative qui reconsidère la valeur d’usage de l’oeuvre, comme les vitraux et peintures d’Edward Burne Jones. À l’opposé d’une autonomie de l’art, ces productions induisent une circulation entre l’œuvre d’art et l’objet du quotidien. Cette démarche ornementale s’accompagne également d’une revendication d’un savoir-faire. qui prend aussi à rebrousse-poil un trait convenu de la modernité. Il s’ensuit des formes qui attirent par leur singularité en même temps qu’elles échappent à un certain nombre de critères de goût du projet moderne.

Ces quelques traits rapidement esquissés sont autant de questions et de pistes de réflexion pour appréhender les résurgences d’Arts and Crafts dans la période actuelle. Ils demanderaient à être précisés à travers les écrits de William Morris et les réalisations de ses protagonistes. Ces quelques éléments permettent néanmoins de faire l’hypothèse d’une persistance de ces questions qui trouvent aujourd’hui une résonance particulière. Depuis les années soixante-dix, de nombreux artistes ont intégré dans leurs œuvres des éléments de mobiliers et ont investi le domaine du décoratif. Ces œuvres se rapportent à une forme d’ambiguïté (entre objet et peinture notamment) et donc d’impureté qui se distingue de la réduction moderniste vers la forme autonome. L’appropriation de techniques relevant de l’artisanat dans certaines démarches, comme le textile dès les années soixante-dix et, aujourd’hui, le renouveau de la céramique pourraient être pleinement appréhendés à travers un phénomène contemporain de réminiscences des enjeux portés par Arts and Crafts. Ces questionnements se déclinent également sur le plan historiographique avec la réévaluation de démarches ou de pans de la production d’un artiste que la modernité avait plutôt minoré. L’intérêt récent pour les céramiques de Lucio Fontana illustre pleinement ce renouvellement des approches. Dans le champ du design, l’héritage contemporain d’Arts and Crafts est réel et peut être revendiqué comme dans le design hollandais depuis le début des années 2000. Les références à William Morris peuvent aussi être convoquées par les designers afin de situer leurs pratiques dans un registre critique à l’égard du système de production et de consommation contemporain. On pourra également interroger les connotations politiques et anthropologiques qui pourraient accompagner l’indexation de certaines démarches artistiques à l’artisanat, au décoratif ou convoquant un statut ambigu de l’objet à partir de l’épuisement du récit moderniste.

Cet aperçu révèle donc l’actualité de certains enjeux qui se cristallisent autour d’Arts and Crafts et que nous souhaiterions aborder au cours du colloque :

  • un rapport à l’histoire fait non pas de ruptures mais de résurgences
  • une attitude critique rapportée à des utopies concrètes
  • une relation assumée à la technique, au savoir-faire ou à l’artisanat
  • une expansion de l’œuvre vers le décoratif et le design qui tend à remettre en cause les normes de goût

 

Comité scientifique

Christophe Bardin (Professeur des Universités en Théorie de l’art, membre du CIEREC, Université Jean Monnet), Annie Claustres (Maître de conférences Habilité à diriger des recherches en histoire de l’art contemporain, membre du LARHRA, Université Lumière Lyon 2), Karim Ghaddab (Professeur de Théorie de l’art, Ecole Supérieure d’Art et Design de Saint Etienne ESADSE), Denis Laget (artiste, Professeur à l’ESADSE), Romain Mathieu (Professeur d’Histoire de l’art, ESADSE), Philippe Roux (Professeur de Théorie de l’art, ESADSE et Musée d’Art Moderne et Contemporain de Saint Etienne), Didier Semin (Professeur d’Histoire de l’art, Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris), Aurélie Voltz (Directrice du Musée d’Art Moderne et Contemporain de Saint Etienne)

 

Modalités de candidature

Les personnes intéressées sont priées de faire parvenir une proposition de communication (max. 2000 signes) accompagnée d’une brève bio-bibliographie avant le 15 janvier 2019 à l’adresse suivante : sandra.jacquier@esadse.fr

La réponse à toute proposition sera communiquée avant le 1er février.

 

Organisation

 

Le colloque se déroulera le 13 et 14 mars à l’Ecole Supérieure d’Art et Design de Saint-Etienne.

Ce colloque s’inscrit dans un programme de recherche porté par le Laboratoire d’Expérimentations des Modernités (LEM) de L’Ecole Supérieure d’Art et Design de Saint-Etienne. Il se développe avec des membres du LARHRA, de l’Université Lumière Lyon 2, du CIEREC de l’Université Jean Monnet, de l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Paris et en partenariat avec le Musée d’Art Moderne et Contemporain de Saint Etienne. Il est précédé d’un cycle de séminaires, il sera suivi d’une publication des différentes contributions aux séminaires et au colloque et d’une exposition en 2020 à la Cité du Design.

 

Source : https://www.esadse.fr/fr/actualites/?news=arts-and-crafts-aujourd-hui-1655

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