Appel à communication : journée d’études « Les sources macabres » (Lausanne, 14 novembre 2019)

Appel à communication : « Les sources macabres »
(Journée d’études, Université de Lausanne, 14 novembre 2019)

Eram quod es ; eris quod sum. Rappel macabre, s’il en est, de toute fin qui attend l’Homme. « J’étais ce que tu es ; tu seras ce que je suis » lui rappelle sa condition : sans cesse confronté à la mort, essayant tantôt de la dompter, de la conjurer, de l’éloigner ou au contraire de la rendre plus visible, présente aux côtés des vivants. Ces relations fluctuantes traversent les époques, mais n’en sont pas moins diverses et multiples, suivant les circonstances et les civilisations.

Dans son travail sur le passé, chaque historien·ne est confronté·e à des sources macabres, en lien avec la mort ou le deuil. D’abord réservé aux seules danses médiévales peintes, dans un contexte de fin de guerre de Cent ans, également marqué par la peste et de multiples crises frumentaires et climatiques, l’adjectif « macabre » en est ensuite venu, par extension, à désigner tout ce qui a trait au domaine funéraire ; voire ce qui est simplement sinistre. C’est dans son acception liée à la mort que la présente journée d’études se propose de l’aborder.

Les sources concernées sont aussi nombreuses que variées, qu’elles soient textuelles et/ou épigraphiques (testaments et inventaires après décès ; artes moriendi ; consignations de cérémonies funéraires ou des dépenses afférentes ; listes de défunts ou de condamnés à mort ; poèmes et pièces de théâtre ; sans oublier les avis de décès, les éloges funèbres et épitaphes) ; iconographiques (enluminures, peintures, sculptures ; urnes est et monuments funéraires ; photographies) ; musicales (chants et compositions funéraires, requiem) ; archéologiques (fouilles de cimetières et charniers). En outre et comme pour toute source, se pose la question de leur abord : comment traiter ces sources spécifiques ? Comment les analyser, au vu de contextes de créations parfois très particuliers, en situations de crise ? Quels apports les nouvelles technologies donnent-elles à leur étude ? À leur éventuelle reconstitution ?

Ces sources macabres, leur analyse et leur traitement sont donc ce que la cinquième journée d’études de l’AJCH propose à la joyeuse réflexion des jeunes chercheurs, suivant les différents axes que voici :

Axe 1 : Anticiper et préparer la mort

  • –  Dans quel(s) contexte(s) apparaissent les sources macabres ? Sont-elles, suivant les circonstances, le fruit de longs préparatifs ? Ou sont-elles créées dans l’urgence ? Et auquel cas, quels sont les changements et évolutions en temps de crise ?
  • –  Sont-elles prévues pour un personnage en vue, renommé ? Pour un simple particulier ? Pour un groupe ? Avec quelles caractéristiques respectives ?
  • –  Comment prépare-t-on la mort ? Comment prépare-t-on sa propre mort ? De ce point de vue, quelle prégnance a la préoccupation de « bien » mourir ?
  • –  En particulier, comment finance-t-on son trépas et ses obsèques à venir ? Comment en garantit-on la bonne exécution ?

Axe 2 : Annoncer et célébrer la mort

  • –  Quand et comment annonce-t-on la mort ? Quelle importance ont les mots et les gestes pour rendre publique la mort, mais aussi célébrer la vie du défunt ?
  • –  Quels sont les rapports au corps sans vie ? Que révèlent les diverses pratiques, du rituel de l’embaumement à l’inhumation ou à l’incinération, ces choix eux-mêmes étant parfois sujets à débat au sein des familles et/ou des sociétés ?
  • –  Suivant les pratiques, quels sont les rites adoptés et leur évolution ?
  • –  Quels sont le rôle et la place des pompes funèbres ?
  • –  Que nous disent ces sources des rapports à la mort : entre les rites de démonstration de la tristesse communs à plusieurs époques et cultures jusqu’aux rites balinais interdisant les larmes pour ne pas empêcher l’âme du mort de s’élever ?
  • –  Comment se déroule le deuil : quelles formes prend-il, pour quelle durée et avec quelles obligations à l’égard du défunt et suivant les contraintes sociales et religieuses ?
  • –  Enfin, autour du trépas : qui contribue à l’annonce et à la célébration des morts ? Est-ce la seule famille ? Suivant les contextes, quel est le rôle des serviteurs ? Des amis ? De la communauté urbaine ou villageoise ? Des diverses sociétés et des divers mondes auxquels le défunt a pu appartenir (politique, économique, culturel) ?

Axe 3 : Requiescant in pace ?

  • –  Comment traite-t-on et entretient-on la mémoire des défunts ? Suivant leur rang ? Et/ou les dispositions qu’eux- mêmes ont prises ?
  • –  Comment les honore-t-on et à ce titre : dans quelle mesure font-ils partie du quotidien ?
  • –  Au contraire, dans quelles circonstances et comment supprime-t-on le souvenir de certains défunts ? Dans quelle mesure l’historien·ne parvient-il·elle, ou pas, à restituer ceux-ci ?
  • –  Quelle place occupent les personnages disparus et de fait, non considérés comme défunts, bien qu’ils le soient réellement tels (soldats, marins seulement disparus à titre officiel) ?
  • –  Quelle place occupent les défunts ? Sont-ils à l’écart de l’urbs, tels les trépassés de la Rome antique ? Sont-ils inhumés à proximité des vivants ?
  • –  Concernant les arts autour de la mort : dans quelle mesure la représente-t-on ? L’écrit-on ? La chante-t-on ?
  • –  La mort inspire-t-elle la provocation ? Le génie artistique ?
  • –  Concernant les défunts eux-mêmes : comment les représente-t-on ? À quels monuments ont-ils droit (ou pas), en particulier dans les cas de mort de masse ?
  • –  Concernant les animaux : comment traite-t-on leur mort et leur mémoire ? Leur donne-t-on une nouvelle vie ? Selon quelle hiérarchie et selon quels critères ? Comment traite-t-on de ce bestiaire animal dans d’éventuelles collections ?

Axe 4 : Les rapports à la mort et aux comportements ordaliques des pratiques physiques et sportives

  • –  Quelles sont ces pratiques qui touchent à la mort ou à un comportement associé à celle-ci ?
  • –  Comment se représentent ces pratiquants face et autour de ces pratiques ? Comment sont-ils représentés dans les sources ?
  • –  Y a-t-il une course à la dangerosité, au mortuaire, au sein de ces pratiques ?
  • –  Dans ce cadre spécifique, que dire des morts subites ?
  • –  Comment les gouvernements interviennent-ils pour les encadrer ? À différentes échelles de pouvoir, des relations de proximité avec la mort sont-elles entretenues par le biais de pratiques physiques et sportives ?

 

Cette journée d’étude, organisée par l’Association des Jeunes Chercheurs en Histoire (AJCH), est dédiée aux jeunes chercheurs et chercheuses – doctorant·e·s et docteur·e·s – en histoire, histoire du droit, histoire de l’art et archéologie, histoire du sport et étude des civilisations, travaillant sur toutes les périodes. Elle devrait faire l’objet d’une publication.

Les propositions de contributions, d’environ 3 000 signes, accompagnées d’un CV de deux pages maximum, sont à envoyer à l’adresse ajchsources2019@gmail.com, avant le 31 mai 2019.

Le résultat des sélections des propositions de contribution sera connu au début de l’été.

Organisation :

  • –  Romain Chasles (CRHIM – Université de Lausanne),
  • –  Fanny Giraudier (LARHRA – Université Lumière Lyon 2),
  • –  Marjolaine Lémeillat (CRHEC – Université Paris Est-Créteil),
  • –  Cyril Mallet (ERIAC – Université de Rouen Normandie / Justus-Liebig-Universität-Giessen),
  • –  Paul Maurice (SIRICE – Sorbonne Université / Universität des Saarlandes).

Source de l’annonce.

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