Appel à communication : L’art du portrait politique aux Etats-Unis et en France (ca. 1776-1814).

L’Art du portrait politique aux États-Unis et en France durant les périodes révolutionnaire et fédérale, circa 1776-1814
National Portrait Gallery, Washington, D.C., 25-26 septembre 2014
Appel à communication

En août 1814, les troupes britanniques sous les ordres du général Robert Ross pillèrent Washington D.C. et brûlèrent le Capitole ainsi que de splendides portraits officiels de Louis XVI et Marie-Antoinette, cadeaux offerts environ trente ans plus tôt par la monarchie française au Congrès américain. Le bicentenaire proche de cet évènement va donner aux spécialistes français et américains une rare occasion de se rencontrer et de partager leur expertise concernant des aspects de l’art du portrait en date de la fin du dix-huitième au début du dix-neuvième siècle.
Les fondements de cette conférence sont que lors de la période entre la Guerre d’indépendance et la Guerre de 1812, les États-Unis maintinrent une alliance politique compliquée avec la France, et qui eut un impact sur les modèles de représentation culturelle et de consommation des deux côtés de l’Atlantique. La transition entre des formes de gouvernements monarchique et républicaine fut accompagnée d’une transformation au niveau des portraits, les citoyens en devenant, à la suite des aristocrates, leurs commanditaires, sujets et spectateurs. Les portraits de chefs d’États, de représentants américains et français, ou de leurs familles, révèle souvent une cohabitation difficile des formes aristocratiques traditionnelles et des nouvelles valeurs républicaines.
La première moitié de la conférence, intitulée « Dialect[ic]s of Diplomacy », s’intéressera aux portraits individuels (et paires de portraits) suggérant des personnes investies d’un statut élevé, d’un pouvoir extraordinaire, d’une force martiale ou de responsabilités diplomatiques au nom de la nation; la seconde moitié de la conférence, « Representative Bodies », s’intéressera à des portraits de groupes suggérant un engagement partagé envers la gouvernance collective, l’harmonie familiale ou la représentation équitable au sein de la nation. Quelle était l’efficacité des portraits officiels pour promouvoir l’autorité d’un monarque héréditaire, et des portraits de groupes pour promouvoir l’autorité d’une assemblée élue? Dans quelle mesure est-ce que les artistes américains font référence ou adaptent les peintures et gravures des artistes français, et vice versa? Quels arrangements formels et répertoires symboliques furent inventés pour investir les politiciens, les marchands et les travailleurs des idéaux du « patriotisme » et du « républicanisme »?
Ces bases de recherche ont pour but de contester ou complexifier les affirmations continues comme quoi les États-Unis étaient restés culturellement dépendants de la Grande-Bretagne au cours de cette période, et que ses portraits reflètent une sorte de « synthèse anglo-américaine ». Tandis que les britanniques inondaient l’Amérique du Nord de peintures de la famille royale et de gravures de célébrités, dans l’espoir général que ceux-ci encourageraient une fidélité envers la Couronne et un goût pour les marchandises anglaises, les français déployaient eux des images de souverains, de ministres et de généraux, plus précisément pour sceller des accords diplomatiques, pour célébrer des victoires militaires et pour s’attirer l’affection du public. En effet, les productions françaises étaient si attirantes que des artistes américaines s’en inspirèrent librement pour commémorer les premiers présidents des États-Unis.

Programme: il y aura six sessions, durant approximativement chacune deux heures et comprenant trois à quatre participants.

Première partie: Dialect[ic]s of Diplomacy

1. Portraits officiels aux États-Unis et en France. Président: Olivier Bonfait, Professeur d’histoire de l’art moderne, Université de Bourgogne, olivier.bonfait@inha.fr
Cette session s’intéressera à la fabrication, l’iconographie et la fonction de portraits officiels ou de cérémonie spécifiques, datant de la fin du dix-huitième siècle jusqu’au début du dix-neuvième, en Amérique et en France. La question est de savoir si l’on peut dire que le genre a perdu sa charge baroque pour fournir une « métaphore du corps » efficace et renforcer le pouvoir absolu d’un souverain, la domination, la faveur ou la concorde, et d’avoir embrassé une application des Lumières en signe de vertu, de dynamisme, d’héroïsme ou même de constitutionnalisme. Les spécialistes ont longtemps soutenu que les révolutions américaine et française avaient constitué une coupure politique décisive avec les gouvernements royal ou colonial du passé, et que cela peut se voir dans les nouvelles modes du portrait, dans la transition allant du George III in Robes of State (1760) de Allan Ramsay au George Washington at the Battle of Princeton (1779) de Charles Willson Peale, et du Portrait de Louis XVI en costume de sacre (1780) d’Antoine-François Callet au Bonaparte franchissant le Grand Saint-Bernard (1800) de Jacques-Louis David. Ces traditions pré et post révolutionnaires sont-elles aussi polarisées qu’elles le semblent ou possèdent-elles une part de continuité formelle et conceptuelle ?

2. La copie du portrait, peinte et imprimée. Président: Xavier Salmon, Conservateur général des musées de France, Château de Fontainebleau, xavier.salmon@chateaudefontainebleau.fr
Cette session expliquera comment les copies peintes et imprimées des portraits officiels étaient produites, vendues et consommées. En France, à Versailles, le Cabinet des tableaux du roi préparait des répliques devant être envoyées à l’empereur d’Autriche, au roi de Suède et au Congrès américain; en même temps, de nombreux artistes académiques fournissaient des copies depuis leurs propres ateliers. Des images des familles royales étaient aussi disséminées en Europe et en Amérique du Nord par l’intermédiaire de reproductions de gravures de haute qualité; Pierre-Eugène de Simitière a laissé un assez bon catalogue de gravures (dont le Louis Le Grand, 1710, de Pierre-Imbert Drevet) achetées en Amérique lors de la période révolutionnaire. En prolongation aux analyses de P. Staiti et M. Lovell sur l’impact des gravures britanniques sur la composition des portraits américains coloniaux des années 1790, cette section évaluera l’impact des gravures françaises sur les compositions des portraits américains des années 1790, dont le George Washington (1796) de Gilbert Stuart, qui servit à son tour de modèle pour les lithographies de Thomas Jefferson et James Madison (1805, 1810).

3. Le portrait en tant que présent diplomatique. Président: Brandon Brame Fortune, Chief Curator, National Portrait Gallery, Washington, D.C., FortuneB@si.edu
Cette session s’intéressera à la tradition de l’échange de cadeaux officiels entre chefs d’États, de ministres plénipotentiaires et de diplomates. Les portraits à grande échelle étaient les manifestations les plus visibles de cette coutume: dans une lettre de juin 1779, le Congrès des États-Unis demanda à Louis XVI des portraits de lui-même et de son épouse pour leur chambre du conseil, une requête qui fut exaucée après la signature d’articles de paix en 1783, avec l’envoi à Philadelphie de copies d’atelier du Louis XVI d’Antoine-François Callet du Marie-Antoinette d’Élisabeth Vigée Le Brun; dans son compte-rendu du mois de juillet 1779, Charles Willson Peale a saisi l’achèvement d’une réplique du George Washington at the Battle of Princeton pour l’ambassadeur français Conrad Alexandre Gérard, qui le remit au roi de France lors de son retour à Versailles en 1780. Il y eut aussi des présents de petite taille: Louis XVI rendit hommage aux efforts des diplomates américains en décernant des tabatières ornées de portraits et de diamants ainsi que des boetes à portrait (médaillons à portraits encerclés de diamants) à Silas Deane, Arthur Lee, John Laurens et Benjamin Franklin entre 1778 et 1785, et des gravures encadrées à George Washington et Thomas Jefferson vers 1790-91.

Seconde partie : Representative Bodies

4. « Le républicanisme » et le portrait du politicien. Président: Philippe Bordes, Professeur d’histoire de l’art moderne, Université de Lyon 2-LARHRA, philippe.bordes@univ-lyon2.fr
Cette session s’intéressera aux formats de portraits, à l’iconographie et aux styles les plus appropriés pour communiquer les idéaux des insurgés et des républicains. Aux États-Unis, l’expérimentation avec les nouvelles et les anciennes conceptions avait de l’influence. Les compositions à plusieurs personnages Congress Voting for Independence (commencée après 1784) de Robert Edge Pine et Edward Savage et Signing of the Declaration of Independence (commencée en 1787) de John Trumbull, tentent de représenter la souveraineté nationale incarnée dans un groupe collectif d’hommes. Les initiatives étaient plus diverses mais moins concluantes en France à cause de la rapide succession de régimes: à partir de 1789, les graveurs et les peintres furent libres de tout représenter, depuis Louis XVI acceptant la Constitution en 1790 jusqu’à son procès devant la Convention Nationale pour actes de trahison en 1792; le républicanisme dur qui prévalut en 1793-1794 rejeta les portraits officiels qu’il considérait être l’appropriation de la volonté du peuple; à partir de 1796 des artistes contraints d’évoquer les exploits militaires de Bonaparte leur donnèrent une forte résonnance politique.

5. « Le patriotisme » et le portrait de famille. Président: Amy Freund, Associate Professor of the History of Art, Texas Christian University, a.freund@tcu.edu
Cette session examinera comment la cellule familiale fut représentée aux États-Unis et en France durant la période de transition de la monarchie à la république (et, dans le cas de la France, de la République à l’Empire). Les sujets possibles de discussions comprennent: la notion des « dirigeants et de leurs familles » sur des représentations telles que Marie-Antoinette et ses enfants (1787) d’Élisabeth Vigée Le Brun et George and Martha Washington, their Grandchildren and Black Servant (1789-96) d’Edward Savage; la question de l’allégeance familiale à la nation, comme sur Robert Goldsborough and Family (1789) de Charles Willson Peale, qui incorpore un buste de Washington, et sur Le Comte Pierre-Jean de Bourcet et sa famille (1791), de Charles-Paul Landon, qui incorpore des effigies de Louis XVI et Marie-Antoinette; et l’utilisation de la famille en tant que modèle de citoyenneté, et de l’État, comme sur Agriculture (1798), de François-André Vincent. Comment est-ce que le portrait de famille a été affecté par des références aux modes de peinture historique ou de genre? Comment a-t-il renforcé ou questionné les hiérarchies traditionnelles de sexe, de race et de classe? Est-ce que les portraits de famille ont fait la promotion de la participation politique et de l’unité sociale ou ont-ils valorisé la vie privée aux dépens de la sphère publique ?

6. Le « Visage » et le « Corps » de Paris, Philadelphie, New York et Washington: splendeur et misère, loisirs et travail dans la métropole moderne des débuts. Présidente: Margaretta Lovell, Professor of the History of Art, University of California, mmlovell@berkeley.edu
À la fin du dix-huitième siècle, et au début du dix-neuvième, Paris, Philadelphie, New York et Washington, D.C., étaient de grandes villes, ou en expansion rapide, accueillant des conseils législatifs nationaux, des représentations étrangères et des quantités de diplomates, d’hommes d’affaires et de touristes, mais elles étaient aussi des endroits d’une inimaginable pauvreté, lieux de crimes et de misère pour des milliers de travailleurs anonymes. Cette session tentera de « cartographier » et « d’illustrer » le paysage urbain et ses habitants, d’une manière distinguant quartiers du gouvernement et des affaires, résidences majestueuses et quartiers ouvriers. En ce qui concerne Philadelphie, les images incluent la Map of Philadelphia « Clarkson-Biddle » (1762), anonyme, et Fourth of July in Centre Square (1810-12) et Election Day in Philadelphia (1816) de John L. Krimmel; des lettres et journaux fournissent des impressions de tout, depuis les parades fêtant les victoires alliées, jusqu’aux émeutes protestant contre le non-paiement ou sous-paiement des travailleurs et des troupes.

Lieu: la conférence se déroulera à l’Auditorium Nan Tucker McEvoy du Donald W. Reynolds Center for American Art and Portraiture, au Smithsonian Institution, à Washington, D.C., les 25 et 26 septembre 2014. Les coorganisateurs de la manifestation, Todd Larkin et Brandon Brame Fortune, invitent à la participation de spécialistes américains et français d’universités, de musées ou d’archives, pouvant éclairer les motivations des commanditaires, les approches artistiques et les défis d’interprétation pour la promotion des identités politique à une époque de changements historiques. La Terra Foundation of American Art, en partenariat avec la Montana State University Foundation et la National Portrait Gallery, sont heureuses d’assister cet événement international.
Soumission: veuillez envoyer un résumé de 450 mots et un CV de 2 pages au président de la session en rapport, avant le 15 novembre 2013. Votre résumé doit comprendre le titre de l’article, articuler une question ou problème centraux et expliquer les sources et / ou les méthodes qui seront utilisées pour y répondre. Votre CV doit mentionner l’université où vous avez obtenu votre diplôme le plus élevé, vos principaux sujets de recherche et vos publications représentatives, ainsi que votre poste actuel et votre grade. Les présidents de sessions répondront à votre proposition d’ici le 15 décembre 2013. Toutes les autres demandes concernant la conférence et le programme doivent être envoyées à: Todd Larkin, School of Art—Department of Art History, 213 Haynes Hall, Montana State University, Bozeman MT 59714, (406) 994-2720, tlarkin@montana.edu.

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