Appel à communication : « Mondes animaliers dans le monde médiéval et à la Renaissance » (Amiens, 9-11 mars 2016)

Bréviaire à l'usage de Langres. Chaumont - BM - ms. 0032 - f. 006vL’auteur du IXe siècle du poème vieil anglais La Panthère s’extasie devant la multiplicité des espèces animales et la merveilleuse fécondité de la terre :

En nombre incalculable sont les multiples espèces animales qui peuplent la terre dont on ne peut ni rendre justice aux nobles qualités ni savoir combien elles sont. Ces oiseaux et ces bêtes, qui parcourent notre monde en multitude, se trouvent en aussi grande abondance que les flots – l’océan qui gronde, la houle des vagues salées – et qui entourent cette belle terre féconde.

On pourra présenter et étudier les textes médiévaux qui s’intéressent ainsi aux « espèces animales qui peuplent la terre » et qui attestent d’un début d’attention réaliste / scientifique au monde naturel : traités de chasse, de fauconnerie ou d’élevage, écrits des encyclopédistes du XIIIe siècle après la redécouverte des œuvres d’Aristote, littérature médicale. On y ajoutera les réalisations des artistes (tailleurs de pierre, verriers, miniaturistes, peintres, etc.) qui trouvèrent, eux aussi, dans la vision du monde animal une source inépuisable d’inspiration.

Il suffit, cependant, de s’arrêter un instant pour contempler les vitraux des cathédrales ou les chapiteaux des cloîtres ou des cryptes pour constater qu’animaux réels et bêtes fabuleuses se côtoient toujours : la distinction entre animaux réels et imaginaires existait-elle au Moyen Âge ? Les représentations sur les portails, sur les pinacles ou sur les miséricordes mais aussi les enluminures et initiales décoratives des manuscrits ne venaient-elles pas fournir une preuve tangible et concrète de l’existence des dragons, des sirènes et autres manticores ? Et que dire des bestiaires ou des récits de voyage pour lesquels nos critères de vraisemblance et de crédibilité n’avaient aucune valeur ? On constatera que dans les textes médiévaux, la description de l’animal prépare généralement le lecteur à dégager le sens profond (moral ou religieux) du passage ou de l’œuvre. L’animal est symbolique, il est signifiant allégorique et peut fournir les clefs nécessaires pour découvrir le sens caché des choses. Ainsi pourront le prouver des communications fondées sur des énigmes, des traités de morale, des sermons de prédicateurs, ou des Vies de Saints.

Les animaux des fables sont les masques des humains qui servent, eux aussi, à illustrer des vérités morales et religieuses. Car « la pensée médiévale est trop théocentrique, et par voie de conséquence, sa littérature est trop anthropocentrique, pour faire de l’animal son objet propre. L’animal n’apparaît dans cette littérature qu’en relation avec l’homme ou avec Dieu, au service d’un projet dont il n’est pas la fin » (Michel Zink). L’anthropomorphisme est, en effet, constant dans les romans animaliers, les débats, la poésie lyrique, les fables où les animaux discutent, par exemple, d’amour, de mariage, d’adultère mais aussi de problèmes religieux fort complexes. L’animal n’est-il pas un miroir déformant dans lequel l’homme peut contempler les défauts de son monde quotidien et aussi, pourquoi pas, ses propres vices ? Dans ces conditions, pourquoi avoir choisi des animaux comme interlocuteurs ? Qu’apporte leur présence ? La réponse est-elle une simple note de divertissement (n’oublions pas le comique développé du Roman de Renart) ou une charge parodique ? Les animaux transmettent-ils plus facilement une leçon, permettent-ils pour les auteurs médiévaux de guider plus facilement l’homme et de lui apprendre à distinguer le Bien du Mal ? N’est-ce pas clairement le cas dans les récits allégoriques qui donnent une vision manichéenne des animaux ou dans les listes d’analogies établies entre les péchés capitaux et certains animaux ? On s’intéressera aux animaux qui ont ainsi valeur figurative et exemplaire.

Peut-on alors conclure avec J. Bidard que « tant que l’homme médiéval s’est plu à reconnaître la multiplicité et la diversité de l’animal, ce dernier a pu s’adapter aux changements de la mentalité et de la sensibilité. Lorsque l’homme l’a réduit à un rôle didactique et systématique, son déclin a commencé » ?

Ainsi enluminures, miniatures, vitraux, sculptures, énigmes, traités de morale, sermons, Vies de Saints, fables, romans, récits de voyage, traités de chasse, bestiaires, etc. permettront aux participants de ce colloque de mars 2016 de rendre compte de la diversité des mondes animaliers médiévaux et des multiples questions qu’ils posent.

A titre exceptionnel, le colloque sera ouvert aux spécialistes de l’Inde et de l’Extrême-Orient : une session spéciale sera, en effet, consacrée aux littératures  de ces mondes lointains qui, à bien des égards, sont proches des écrits du Moyen Âge occidental.

Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir proposer votre sujet de communication le plus tôt possible, au plus tard le 15 juillet 2015  À Danielle Buschinger : danielle.buschinger@wanadoo.fr

 

Université de Picardie-Jules Verne – Unité de recherche TRAME (E.A. 4284) – Textes, représentations, archéologie, autorité et mémoire de l’Antiquité à la Renaissance, 9-11 mars 2016.

 

 

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