Appel à contribution : « La gestualité du rituel mise en image », Images Re-vues (n°16)

Appel à contribution pour le numéro 16 d’Images Re-vues :
La gestualité du rituel mise en image

 

Figures gestuelles et rituelles feront l’objet du prochain numéro d’Images Re-vues. Le rituel est une séquence d’actes symboliques et codifiés. Par son étymologie (du latin ritus), il renvoie notamment au culte religieux, ainsi qu’à toute pratique fixée par une tradition, qui demeure respectée afin de rendre le rituel efficace. Le rituel a également une dimension spatio-temporelle précise : il se déroule à un certain endroit et à un certain moment, et il se caractérise par la répétition (sans signifier pour autant que tout comportement répétitif consiste en un rituel). La force des rites et des rituels réside dans la création de liens entre les membres du corps social, avec les puissances divines et avec tout autre type d’association permettant souvent le maintien de l’ordre social. Ils se trouvent au cœur des sociétés par le biais d’actions qui créent du sens, qui suscitent des émotions collectives, qui aident à interpréter le monde. Ainsi, un vaste champ de rituels se décline du sacré au profane, comme la prière, le sacrifice, le deuil, la supplication, mais aussi des rituels dans les domaines du sport, du travail, de la séduction, voire même quelques cas de rituels laïcs, comme l’enterrement de vie de célibataire, l’investiture d’un nouveau dirigeant politique etc. Même si certains rituels s’écartent ou disparaissent, de nouveaux rites se développent, plus adaptés aux nouveaux besoins de certaines sociétés (par exemple le rite d’anniversaire qui se répand aujourd’hui à la place des fêtes des saints). Dans tous les cas, il s’agit de rites qui sont caractérisés par un ensemble d’actes solennels d’ordre verbal et gestuel.

L’association des paroles avec des gestes est très courante lors des pratiques rituelles, tandis que les gestes sans paroles semblent être plutôt une exception. Il suffit de prononcer la formule rituelle afin que l’acte soit constitué et accompli. Pourtant, le rôle du geste dans la performativité du rituel semble moins évident. Le geste, souvent considéré comme un « adjectif qualificatif du rituel », se donne d’abord à voir, même si son intention peut être pratique. Si faire un geste est un moyen non-verbal, efficace, pour communiquer, en exprimant une pensée, une émotion, une volonté, un signe, la manière de décrire et de dévoiler l’intention de cet acte naturel ne va pas de soi. Les difficultés de collecter, catégoriser et classer, voire même de représenter cette réalité gestuelle, qui échappe à la description verbale, mettent en lumière la richesse et la complexité de ses fines variations ; on ne peut ni les imiter, ni les fixer sans faire de choix. Malgré les tentatives de définitions et de taxinomies proposées (geste vs attitude, geste de la vie vs geste du culte etc.), le geste reste un inépuisable réservoir de métaphores et a quelque chose d’insaisissable. Par définition, il incorpore le mouvement et de ce fait empêche l’établissement de catégories étanches. Définir ce qu’est un geste dans l’art n’est pas anodin, puisque nous sommes souvent face à de l’iconique. Tenter de rétablir les gestes d’un acte dont on n’est pas le témoin direct pourrait paraître périlleux. Même pour les anthropologues de terrain, les gestes ne sont pas transparents ; ils sont toutefois obligés de les fixer schématiquement et de les décrire dans une langue qui n’est pas la leur.

L’objectif de ce numéro est d’aborder la polysémie des gestes à partir les images en étudiant, dans un premier temps, les représentations gestuelles des rites, ainsi que des activités ritualisées et les contraintes qui se présentent pour les analyser. Les images sont-elles capables de rendre compte des séquences gestuelles dans les rituels ? Les gestes eux-mêmes ne sont-ils pas, dans certains rituels, des images ? Ne servent-ils pas, dans d’autres cas, à tracer des images ? Il sera également question des acteurs impliqués et des différenciations de gestes selon l’identité de la personne figurée. Dans un deuxième temps, il parait intéressant de réfléchir sur la contextualisation de gestes, comme par exemple l’espace dans lequel ils se produisent ou les liens entre l’objet rituel et les images qu’il porte. Mais aussi de porter son regard sur les rapports entre rituel et traditions et la manière dont la gestualité s’invente et s’adapte aux variations rituelles. Enfin, poser la question de la performativité de la gestualité : comment un geste active et participe au processus rituel et par quels moyens le geste devient instrument du rituel afin de le rendre efficace. Les images représentent-elles ou participent-elles de cette performativité du geste ? Il pourra aussi être question de l’interaction entre paroles, gestes et images, puisque pour reprendre l’expression de Diderot, « le geste est quelquefois aussi sublime que le mot ».

Au croisement de gestes et de rituels (des gestes rituels et des rituels de gestes), cet appel à contributions s’adresse aux anthropologues, archéologues, historiens de l’art, historiens et autres chercheurs développant une réflexion sur ces différents axes de recherches (gestes, rituels, images), toutes périodes confondues, de l’Antiquité au contemporain. Les propositions d’articles (de 10 000 à 12 000 signes espaces compris) seront adressées avant le 15 septembre 2017 à l’adresse suivante : vasso_zachari@yahoo.gr. L’acceptation d’une proposition d’article ne dispense pas de la soumission définitive de l’article au comité de rédaction. Les articles définitifs (au maximum 55 000 signes environ espaces compris), accompagnés d’un résumé (en français et en anglais), de 5 mots-clés (en français et en anglais) et d’une biographie de l’auteur seront à envoyer avant le 31 décembre 2017.

Bibliographie indicative de référence :

C. Amey, Mémoire archaïque de l’art contemporain. Littéralité et rituel, Paris, l’Harmattan, 2003.
G. Bartholeyns & F. Joulian (éd.), Le Corps instrument, Techniques & Culture n° 62, 2014.
J. Bremmer & H. Roodenburg, A cultural History of Gesture, Ithaca – New York, Cornell University Press,1992.
A. Chastel, Le geste dans l’art, Paris, Liana Levi, 2008.
J. Gallard, La beauté du geste, Paris, Les impressions nouvelles, 1986.
E.H. Gombrich, « Le geste et l’expression rituels dans l’art », in J.S. Huxley (éd.), Le comportement rituel chez l’homme et l’animal, Paris, Gallimard, 1971, p. 225-237.
E.H. Gombrich, La préférence pour le primitif : épisodes d’une histoire du goût et de l’art en Occident, Paris, Phaidon, 2004.
J.-C. Schmitt (éd.), Gestures, History and Anthropology vol. 1, 1984.
J.-C. Schmitt, La raison des gestes dans l’Occident médiéval, Paris, Gallimard, 1990.
J.K. Werts (éd.), Visualizing Rituals. Critical Analysis of Art and Ritual Practice, Newcastle-upon-Tyne, Cambridge Scholars, 2006.

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