Independent Algeria (Zurich/online, 5-6 Mar 26)

‘Algérie Indépendante : Art, architecture et idéologie dans la postcolonie

Ce colloque entend interroger de manière critique les croisements entre esthétique visuelle et idéologie politique en Algérie depuis son indépendance en 1962. Après 132 ans de colonialisme, ponctués par une guerre de libération de huit ans, l’indépendance politique de l’Algérie a été suivie d’un désir d’émancipation culturelle. En interrogeant la manière dont les arts visuels, l’architecture, l’espace urbain et d’autres formes visuelles traduisent, reflètent ou questionnent la révolution algérienne, ce workshop explore les articulations entre la visualité et l’idéologie dans le contexte postcolonial.

Comment les recherches récentes peuvent-elles interroger les formes artistiques, architecturales et visuelles à l’aune des luttes algériennes pour un avenir postcolonial ? Quelles appropriations, réinterprétations ou effacements de l’héritage colonial ont eu lieu après la guerre d’indépendance ? Dans quelle mesure les arts et l’architecture reflètent-ils les pensées politiques, les idéologies, les politiques publiques et leurs contradictions — entre aspirations à la libération nationale et autoritarisme croissant, ou entre richesse en ressources naturelles et inégalités sociales ?

Nous appréhendons dans ce contexte l’idéologie de manière heuristique comme un ensemble d’idées, de valeurs et de croyances structurant les rapports de pouvoir internes et externes de la postcolonie. Sur le plan interne, l’esthétique visuelle façonne les relations entre les acteurs de la société civile et les institutions officielles, tout comme celles entre l’individu et le collectif. Sur le plan externe, elle intervient dans les relations entre la postcolonie et divers acteurs internationaux : États, alliances politiques, ou organisations supranationales.

Nous souhaitons particulièrement explorer l’hypothèse que la nation algérienne — dans son identité culturelle comme dans ses politiques intérieure et extérieure — a nécessité la formulation d’une idéologie qui s’est exprimée visuellement sous des formes multiples. Ces expressions s’inscrivent à la fois dans l’héritage colonial des cultures visuelles et des infrastructures, et dans un contexte politique et social spécifique. La politique socialiste menée au lendemain de l’indépendance devait relever le défi d’unifier une population hétérogène autour d’un projet de nation moderne. Cette construction nationale a été traversée par des tensions multiples : revendications des minorités ethniques, présence d’une élite francophone, populations rurales, islam conservateur, mouvements féministes. L’État algérien a répondu à ces exigences en combinant des idées trotskystes d’autogestion et politiques d’arabisation, industrialisation lourde et islamisation de la culture et de l’éducation. Ces dynamiques se sont déployées dans un contexte géopolitique marqué par la Guerre froide, le Mouvement des non-alignés, ainsi que les idéologies du panara-bisme, du panafricanisme et du tiers-mondisme, dans lesquels l’Algérie a cherché à jouer un rôle de premier plan.

Nous invitons les chercheur·e·s en histoire de l’art, histoire de l’architecture, études visuelles, urbanisme, muséologie, cinéma, anthropologie, sociologie, histoire et disciplines voisines à proposer des communications d’environ 20 minutes portant sur l’histoire visuelle de l’Algérie de 1962 à nos jours.

Les propositions pourront notamment aborder les questions suivantes :
– Comment les arts et le design visuel ont-ils servi à représenter l’indépendance algérienne, et quelles conceptions de l’indépendance y ont été exprimées ?
– Quel fut le rôle des artistes de l’après-indépendance, confrontés à la nécessité (ou à l’injonction) de représenter ou de célébrer la ré-volution algérienne et la nouvelle nation ?
– Quels récits de la libération ont été élaborés visuellement, et par quels moyens esthétiques ?
– Comment les idéologies officielles ont-elles été représentées — iconographiquement, formellement ou matériellement — mais aussi contestées ou subverties par les artistes depuis 1962 ?
– Quelles furent les expressions artistiques et architecturales d’événements politiques comme le coup d’État de 1965, la révo-lution agraire, le Printemps berbère (1980), les mesures de libéralisation (années 1980), les événements d’octobre 1988, la « dé-cennie noire » ou encore le Ḥirāk (2019) ?
– Comment l’architecture et l’urbanisme de l’après-indépendance ont-ils contribué à bâtir les infrastructures de la nouvelle nation et à traduire ses idéologies ? Quel fut le rôle des architectes locaux et internationaux ?
– Quels éléments de l’héritage visuel colonial — orientalisme, architecture néo-mauresque, urbanisme haussmannien ou moder-nisme colonial — ont été intégrés, transformés ou effacés afin d’établir une culture visuelle indépendante ?
– Comment les espaces publics et les monuments commémorent-ils la libération coloniale et articulent-ils des identités nationales, panarabes ou panafricaines ?
– Quel rôle les musées jouent-ils comme lieux de formation (esthé-tique) et de construction nationale dans le contexte postcolonial ?
– Quelles politiques culturelles ont été mises en œuvre — restitution des biens culturels, fondation de musées, organisation de festivals, instrumentalisation d’artistes et de mouvements artistiques ?
– Quel rôle les arts et l’architecture ont-ils joué dans la politique étrangère de l’Algérie, ses relations dans le cadre (post)guerre froide, et dans l’élaboration d’un soft power algérien ?

Les chercheur·e·s intéressé·e·s sont invité·e·s à envoyer une proposition de communication en Anglais ou français (environ 400 mots) accompagnée d’une brève biographie à l’adresse suivante :
dominique.laleg@uzh.ch (Date limite d’envoi : 31 octobre 2025)

Les communications sélectionnées seront invitées à contribuer à une publication dans la série Perspectives on the Maghreb.

 

Source : https://arthist.net/archive/50343

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