Journée d’étude doctorale : « Critique et historiographie de l’architecture » (Université de Rennes 2)

080605104112-le-corbusier-e-lesprit-nouveauCritique et historiographie de l’architecture

En 1948, l’Association internationale des critiques d’art réunie en congrès déclarait que l’un de ses objectifs était de rassembler une documentation cohérente et systématique sur la critique d’art, afin de constituer le matériau, présent et futur, d’un important chantier à venir : l’écriture de l’histoire de l’art contemporain. De même, l’histoire de l’architecture contemporaine a souvent fait appel aux écrits critiques et aux écrits des critiques pour constituer la matière première dont elle tire ensuite des récits. Notamment, la publication imprimée, les revues d’architecture, ont été pour les historiens des XIXe et XXe siècles une des sources les plus exploitées. Mettre en lumière les constructions historiques, théoriques ou doctrinales qui président à l’élaboration des discours critiques, mais aussi enquêter sur les acteurs ainsi que sur les formes matérielles de ces vecteurs de diffusion permet aux chercheurs d’être davantage conscients des limites de ces sources de l’histoire contemporaine, tant utilisées, souvent faciles d’accès mais difficiles à manipuler. Au-delà de cet objectif méthodologique, l’étude de la critique, de ses espaces de production (revues, édition, collections) et de ses formes matérielles et esthétiques (forme graphique, photographie), auxquelles sera consacrée cette nouvelle journée d’études doctorales, ouvre plusieurs questions.

Depuis les années 1990, la critique d’architecture – notamment, ses frontières avec l’histoire de l’architecture – a fait l’objet de questionnements toujours plus nombreux parmi les architectes et critiques d’architecture ou, plus récemment, parmi les chercheurs. Aussi, cette journée d’études privilégiera deux axes de recherche : les relations entre critique et histoire, et l’étude de l’imprimé, saisi dans ses composantes matérielles et esthétiques en même temps que dans ses contenus théoriques, historiques et doctrinaux.

Le premier axe ouvre sur la thématique, plus vaste, de l’histoire de l’histoire de l’architecture, au-delà de la période contemporaine. En 1986, Manfredo Tafuri affirmait de manière polémique qu’ « il n’y a pas de critique, seulement de l’histoire» : une telle séparation est plus difficile à tracer dans la réalité des pratiques de l’histoire et celles de la critique, des pratiques de l’historien et celles des critiques, notamment quant à l’histoire de l’architecture du temps présent. Les historiens ont commencé d’aborder ces relations fort disputées de multiples manières. En 1999, un numéro de la revue Zodiac débattait l’actualité des rapports entre critique et histoire et l’avenir possible de ces relations après la fin de la critique « opératoire » (au sens de Manfredo Tafuri). C’est principalement la figure de l’historien engagé, notamment en faveur du Mouvement moderne, qui a fait l’objet d’une attention particulière de l’historiographie récente, qui a traqué les effets de l’engagement critique sur l’écriture de l’histoire, multipliant les « biographies intellectuelles » de protagonistes comme Sigfried Giedion, Nikolaus Pevsner, Henry-Russell Hitchcock ou encore Reyner Banham. Adoptant une autre perspective, on peut s’interroger à l’inverse sur le rôle des historiens – et pas seulement ceux du modernisme architectural – dans l’élaboration des discours critiques.

Le second axe de cette journée d’études porte sur les vecteurs de diffusion de la critique,  imprimés ou, plus récemment, électroniques. Depuis les années 1980, l’intérêt grandissant pour la publication architecturale a encouragé le renouvellement des objets et des pratiques de l’histoire de l’architecture et contribué à l’histoire de la culture visuelle des architectes, comme l’avait suggéré dès 1975 Carlo Olmo dans son ouvrage sur l’Esprit Nouveau. Ces chantiers de recherche ont entre autres permis d’enrichir les regards portés par les historiens sur la profession d’architecte, sur l’objet matériel et esthétique que constituent les revues ou les livres, sur le rôle, enfin, de l’image dans la circulation des modèles. Or, il est notable que c’est également sur l’histoire des doctrines et des théories architecturales que les recherches sur la publication ont pu apporter de nouveaux éclairages : elles ont permis de dépasser une histoire de la publication qui, en procédant à la seule analyse de ses contenus doctrinaux, se limiterait à une histoire des « débats architecturaux » véhiculés par l’imprimé. Elles ont également montré que la forme des textes, la politique de l’illustration, l’alliance, le cas échéant, avec la photographie, pouvaient influer sur les significations des textes.

Cette journée d’étude s’attachera à cette dimension de la recherche sur la publication, et souhaite également accueillir des contributions sur le rôle des représentations graphiques et notamment de la photographie. Il s’agira, in fine, de s’interroger sur la façon dont une histoire de la critique pourrait tirer profit de l’histoire de ces imprimés et de leurs formes esthétiques et matérielles.

Hélène Jannière

Université Rennes 2

Ecole doctorale ALL (Arts, Lettres, Langues)

Equipe d’accueil Histoire et Critique des Arts (EA 1279)

Les doctorants souhaitant présenter leurs travaux lors de cette journée peuvent envoyer une proposition de communication (environ 300 mots) le 21 décembre 2013 au plus tard, accompagnée de quelques lignes de CV à

helene.janniere@univ-rennes2.fr

avec copie à

Anne-Marie Châtelet, École Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg (chatelet.schmid@wanadoo.fr) et

Jean-Baptiste Minnaert, Université François-Rabelais, Tours (jean-baptiste.minnaert@univ-tours.fr )

 

 

 


 

 

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