Journée d’étude : L’artisanat dans le bassin méditerranéen à l’époque antique

Journée d’étude
Mobilités professionnelles
L’artisanat dans le bassin méditerranéen à l’époque antique
Vendredi 22 mars 2019
Université de Bourgogne, Amphithéâtre Eicher,

9h15-9h30 Accueil
9h30-9h45 Arianna Esposito et Perrine Kossmann
(Université de Bourgogne-Franche-Comté, UMR 6298 ARTEHIS)
Introduction

9h45-10h25 Sibylle Emerit (CNRS HiSoMA UMR 5189)
Mobilités professionnelles des musiciens dans l’Égypte pharaonique.
Les problèmes de la documentation

Lorsque l’on veut évoquer les mobilités professionnelles des musiciens dans l’Égypte ancienne, le premier exemple convoqué par les chercheurs est la célèbre représentation d’une tribu, composée de 37 individus, venant du Levant, sur l’une des parois de la tombe de Khnoumhotep (II) à Beni Hassan, datée du Moyen Empire (vers 2033-1710 av. J.-C.). Parmi eux, un homme, précédé d’un âne, joue d’une lyre qu’il porte verticalement. Cette image invite à penser que cet instrument de musique a été importé en Égypte à cette époque et qu’il serait originaire du Proche-Orient. La manière dont l’objet est arrivé est des plus explicites : il a été introduit sur le territoire égyptien par une population étrangère parmi laquelle se trouve au moins un musicien, ce qui implique la diffusion d’un nouveau savoir-faire musical, et sans doute technique, dans la Vallée du Nil. Nombre de chercheurs s’appuient sur la documentation iconographique de l’Égypte ancienne et, dans une moindre mesure, sur les sources textuelles et archéologiques pour tenter de tracer les routes empruntées par les instruments de musique et écrire leur histoire.
L’objet de cette communication est de montrer que dans le domaine de la musique antique les transferts culturels sont en réalité plus difficiles à pister que pour d’autres types d’objets. Le déplacement des musiciens de métier à l’intérieur de l’Égypte étant très peu attesté, ce sont surtout les apports extérieurs qui retiendront mon attention.
Après une présentation des sources iconographiques et textuelles qui témoignent de la présence de musiciens étrangers en Égypte dès le Moyen Empire, je m’intéresserai aux vestiges des instruments de musique pour voir si les techniques de fabrication et le contexte archéologique (lorsqu’il est connu) sont susceptibles d’apporter des renseignements sur la circulation des musiciens, la transmission des savoir-faire et sur les phénomènes d’intégration.
10h35-11h15 Sylvain Perrot (UMR 7044 Archimède, Strasbourg)
La mobilité des artistes et artisans de la musique dans le monde grec : trois cas d’étude
Si le monde des musiciens grecs est bien connu, celui des fabricants d’instruments (luthiers pour les cordophones – cithare et lyre – et facteurs pour les aérophones – auloi ou salpinx) a livré beaucoup moins de sources. Nous savons néanmoins qu’il s’agissait d’un artisanat spécialisé, car il existait une terminologie spécifique pour désigner ces activités (aulopoios, lyropoios, salpingopoios), certains artisanats étant extrêmement ciblés (l’aulotrupes était chargé de la perce des trous d’aulos ou le chordopoios fabriquait les cordes). L’état des vestiges archéologiques ne permet que difficilement d’identifier des ateliers, même si nous en avons quelques traces à Délos et à Athènes.
Quant à leur mobilité, nous n’avons guère de témoignages sur la circulation des artisans sinon par le détour des instruments qui voyagent. Il est indéniable en effet qu’il y a eu des transferts de matériaux et de techniques, la question étant de savoir s’il y a eu aussi des transferts de personnes accompagnant les différentes diasporas grecques. On peut également inverser la perspective en interrogeant la mobilité des artistes qui se déplacent pour acquérir des instruments. Le manque de sources m’oblige à aborder cette problématique selon trois cas d’études, inscrits dans trois moments différents de l’histoire grecque, car toute généralisation en la matière paraît abusive. Le parcours sera donc chronologique.
Le premier cas d’étude est celui de l’épave de Giglio (vers 590), un navire qui venait de Grèce et a sombré au large des côtes étrusques, dans le contexte plus général de l’installation des Grecs autour de la Méditerranée. On y a en effet retrouvé des auloi achevés, mais aussi des tuyaux inachevés, ce qui pose la question de la présence à bord d’un aulopoios, à moins qu’il ne faille interpréter ce phénomène en termes d’échange de matériaux et de techniques. Le second cas d’étude est celui des relations entre musiciens et ateliers à l’époque classique, pour voir à quelles échelles, locales ou régionales, se faisaient les circulations de musiciens en vue d’obtenir des instruments, parfois très coûteux. Enfin, j’envisagerai dans un troisième temps la présence d’auloi de facture grecque dans le monde hellénistique, en particulier aux marges (Égypte/Soudan et Bactriane). Il s’agira ici d’étudier plus particulièrement la diffusion de cet artisanat spécialisé, qui se caractérise par un degré croissant de technicité.
11h25-11h40 Pause
11h40-12h20 Nicolas Delferrière (Université de Bourgogne-Franche-Comté, UMR 6298 ARTEHIS)
Contacts et mobilité des artisans du décor en Gaule de l’Est : quels vestiges ?
En raison de la nature même de leur travail, les artisans gallo-romains du décor sont nécessairement mobiles. Ils doivent, en effet, se déplacer dans les différents lieux à orner. Les découvertes de peintures murales, de mosaïques, de stucs et de placages en marbre sont des vestiges directs de leur travail, mais d’autres éléments permettent d’appréhender ce dernier : documents épigraphiques, juridiques et iconographiques doivent ainsi être également convoqués. Le décor est un tout dans sa conception et sa réalisation. Les artisans des différentes spécialités (mosaïstes, stucateurs et peintres) ont donc des contacts privilégiés et savent travailler en étroite collaboration pour la réalisation du décor du sol au plafond, à l’échelle d’un chantier. Plusieurs découvertes archéologiques permettent également de constater le déplacement d’ateliers à l’intérieur d’une même cité gallo-romaine. Ce sont tous ces aspects que nous aborderons dans cette communication.
12h30-13h45 Pause déjeuner

13h45-14h00 Reprise des travaux
14h00-14h40 Eukene Bilbao Zubiri
Processus créatifs chez les coroplathes de Métaponte :
spécificités locales et échanges régionaux à l’époque archaïque.

Grâce au dynamisme de la production destinée à la sphère cultuelle, les terres cuites votives constituent un riche champ d’investigation dans l’étude des pratiques artisanales des apoikiai de Grande Grèce et de Sicile. Cette communication propose trois axes de lecture du corpus des VIIe et VIe siècles av. J.-C. mis au jour dans les sanctuaires de Métaponte. D’abord, en l’absence de données sur les lieux de fabrication, nous proposerons des hypothèses de regroupement des séries pouvant être issues d’un même atelier. Ensuite, nous nous attarderons sur la question des spécificités métapontines dans une perspective régionale afin de comprendre les continuités et les ruptures qui définissent les rapports entre ateliers magno-sicéliotes. Enfin, nous réfléchirons au statut de ces artisans au sein de la communauté archaïque en vue d’appréhender leur contribution à la constitution des identités collectives de Métaponte.
14h50-15h30 Sophie MONTEL (Université de Franche-Comté, EA 4011 – ISTA)
La mobilité des sculpteurs dans l’Antiquité grecque
Dans l’optique de ce programme sur les mobilités professionnelles, nous interrogerons la mobilité des sculpteurs de façon globale en partant de leur formation jusqu’à l’apogée de leur carrière. Les sculpteurs partaient-ils se former dans des ateliers éloignés de chez eux ? Nous nous arrêterons également sur la mobilité liée à une commande, lorsque le sculpteur se déplace pour aller mettre la main à l’ouvrage dans une cité différente de celle dans laquelle il a l’habitude de travailler. Comment étaient envisagés les contacts entre artisans/artistes dans le cadre de ces déplacements ? Le sculpteur n’est pas le seul artisan à se déplacer, comme nous pourrons le montrer à l’appui de la documentation financière des grands chantiers du monde grec d’époque classique et hellénistique. Quelles formes de transmission des savoirs techniques et stylistiques pouvaient se faire sur ces chantiers ? En nous appuyant sur des dossiers récents (publications de la sculpture de Délos ou de Thasos en particulier) et des sources variées (épigraphiques, littéraires), mais aussi sur les analyses stylistiques ou de mises en œuvre qui constituent d’autres témoignages
15h40-15h55 Pause

15h55-16h35 Pierre-Antoine Lamy (Université de Bourgogne-Franche-Comté, UMR 6298 ARTEHIS)
Sculpteurs itinérants, sculpteurs détachés : quelques études de cas éduens
L’itinérance des artisans est un phénomène qui a concerné la Méditerranée antique et aussi la Gaule romaine. Néanmoins il est nécessaire de parvenir à le qualifier et à le quantifier : sur quelles distances, dans quelles modalités et pour quelles raisons ? Des cas de déplacements de sculpteurs ou de tailleurs de pierre d’une civitas à l’autre sont connus, comme par exemple avec les lapidarii consistentes de Divio (CIL XIII, 5475). Cependant les mentions épigraphiques sont peu nombreuses et ne répondent pas complètement aux questions précédentes. On en vient alors aux comparaisons entre objets sculptés, dans des analyses stylistiques où il est parfois difficile de distinguer déplacement de l’artisan et déplacement de l’objet. Des études de cas précises à partir de découvertes anciennes et récentes sur le territoire des Éduens apportent de nouvelles clés de lecture, ainsi qu’une méthodologie plus affinée. On voit émerger un phénomène d’itinérance sur de petites distances, correspondant au mode de fonctionnement d’ateliers, déjà implantés au plus près de leur source d’approvisionnement, ensuite près de la demande. On distingue alors les « artisans itinérants », sans rattachement clair à un atelier bien implanté, des « artisans détachés » – un concept peu usité jusqu’à présent – dont les œuvres sont découvertes dans un rayon d’une journée de marche autour de l’atelier.
16h45-17h10 Discussion

17h10-17h30 Arianna Esposito et Perrine Kossmann
(Université de Bourgogne-Franche-Comté, UMR 6298 ARTEHIS)
Conclusions

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