Journée d’études : « Pourquoi enseigner le patrimoine ? »

La notion de Patrimoine est pour partie un héritage de la Révolution française. Instrument privilégié de la construction nationale, le patrimoine historique et artistique suscite dès la Constituante une réflexion fondatrice qui débouche sur la notion de « monuments historiques » et de « musées ». La Monarchie de Juillet créera par la suite l’administration patrimoniale (Inspection générale des Monuments historiques et Commission supérieure des monuments historiques) mais il faut attendre la IIIe république pour que la France se dote de moyens juridiques pour protéger les monuments (lois de 1887 et 1973) et les sites naturels, lois de 1906 et 1930..  L’acception initiale, étroitement associée aux œuvres les plus remarquables et aux « monuments-types », va perdurer jusqu’aux années 1970. L’année du Patrimoine (1980) consacre l’extension du champ patrimonial, de même que la création d’une Mission du patrimoine ethnologique.

La notion de patrimoine connaît alors un élargissement et recouvre l’ensemble du Patrimoine culturel (matériel et immatériel). Elle va permettre la prise en compte de nouveaux champs patrimoniaux jusque là ignorés tels que les patrimoines de proximité, industriel, maritime et fluvial, le patrimoine du XXe siècle, les paysages… Parallèlement à cette évolution conceptuelle,  les enjeux du patrimoine s’affirment et se diversifient : ils sont d’ordre culturel et politique mais aussi économique (tourisme, commerce, développement local), sociétal (cohésion sociale, vecteur d’identité) , environnemental (développement durable), territorial (construction, aménagement et développement des territoires).

En conséquence, l’Etat a peu à peu insufflé et favorisé une politique d’éducation au patrimoine culturel au sein des programmes scolaires. Ainsi dans le cadre de l’école élémentaire et du 2nd degrés, des enseignements aux formes et aux intitulés variés (classes Patrimoine, séjours découverte, « adopter son patrimoine », ateliers de pratique artistique, itinéraires de découverte, enseignement d’exploration, Histoire des arts…) ont été mis en place, associés aux disciplines Arts Plastiques, Histoire-Géographie-Education Civique, Musique, Français… Depuis 2010, l’incitation est devenue obligation avec l’adoption du nouveau programme « Histoire des arts » au collège, donnant lieu à une épreuve au diplôme national du Brevet.

Comment s’effectuent ces enseignements tant sur le fond (choix de l’objet patrimonial, orientation du projet pédagogique) que sur les moyens (méthodes, compétences, partenariat) ?

Au-delà de l’objectif pédagogique de sensibilisation des jeunes aux richesses culturelles qui les entourent, quels sont les enjeux (autres que culturels) de ces enseignements, à l’heure où la notion de patrimoine véhicule de nouvelles valeurs, républicaines ou laïques? En quoi l’enseignement patrimonial complète-t-il ou bien concurrence-t-il les approches disciplinaires classiques en lettres, histoire de l’art, sciences naturelles ou histoire ?

Au niveau de l’enseignement supérieur (Universités, Institut national du Patrimoine, Ecoles d’arts appliqués, Ecoles nationales supérieures d’Architecture…), l’offre de formation s’est multipliée pour couvrir la pluralité des métiers du patrimoine et répondre à l’ensemble des besoins de la chaîne patrimoniale (conserver, restaurer, réhabiliter, valoriser, produire du patrimoine). Mais la question se pose de l’adéquation des formations et des besoins. Doit-on considérer le patrimoine culturel comme un secteur d’avenir professionnel étant donné la prépondérance de sa place dans nos sociétés contemporaines où il tend notamment à s’imposer comme objet de consommation de masse ?

Comment articuler à l’échelle de la formation les besoins des collectivités locales, ceux des industries culturelles et la demande sociale de protection patrimoniale du cadre de vie ?

Depuis les années 2000, l’Etat a entrepris de se séparer d’une grande partie du patrimoine architectural dont il était propriétaire en le transférant aux collectivités ou en le mettant sur le marché de l’immobilier. Ainsi, les collectivités territoriales se sont vues confier de nouvelles compétences et responsabilités dans les divers secteurs patrimoniaux. Le patrimoine n’est donc plus  le seul apanage de l’Etat mais incombe désormais aux collectivités territoriales qui voient en lui un facteur de cohésion et de développement local. Aujourd’hui Villes, Départements, Régions mènent une politique de sensibilisation du grand public à travers un large spectre de projets éducatifs, (Services éducatifs, Villes et Pays d’Art et d’Histoire, Conseils d’Architecture d’Urbanisme et d’Environnement…). Quelles sont ces actions, quels sont les outils pédagogiques proposés, pour quels publics ? En quoi complètent-elles l’action éducative ?

La mission du Service de l’Inventaire et du Patrimoine est d’œuvrer pour le recensement, l’étude et le porter à connaissance du patrimoine qui nous a été légué et qui a vocation à être transmis aux générations futures. Sollicité de plus en plus comme partenaire pour participer à des projets éducatifs, il est tout naturel que l’Inventaire s’investisse dans la mise en place d’une réflexion située au cœur des enjeux de sa mission. Cette journée d’étude sera donc l’occasion de réunir tous les acteurs concernés et de s’interroger ensemble sur les pédagogies mises en œuvre ainsi que sur la pertinence et les enjeux de l’enseignement du patrimoine. Quel rôle celui-ci aura-t-il à jouer dans nos sociétés – mirage ou ressource ?

Lieu : Rouen, Hôtel de Région, Hémicycle

Comité scientifique :

Claire Etienne, Conservateur général du patrimoine, chef du service Inventaire et patrimoine,  Région Haute-Normandie
Hervé Le Guern, Directeur général adjoint, pôle « International, Culture, Sport, Jeunesse et vie associative », Région Haute-Normandie
Emmanuelle Real, Chercheur au service Inventaire et patrimoine, Région Haute-Normandie, spécialité patrimoine industriel
Loïc Vadelorge, Professeur d’histoire contemporaine à l’université de Paris XII.

 

Pré-programme de la journée

9h-9h30 : Accueil des participants

9h30-9h45 : Ouverture par Mr Alain Le Vern, Président de Région

9h45-10h15 :
Introduction : Emergence et développement de la notion de patrimoine culturel et de son enseignement.

Françoise Choay, Professeur émérite des Universités, historienne de l’architecture et de l’urbanisme.
Gérard Monnier, Professeur émérite des Universités, historien de l’architecture et del’urbanisme.

10h15-11h15 :
Axe 1 : L’enseignement du patrimoine dans le cadre de l’Education Nationale : école élémentaire, second degré, CDP…

Modérateur : Claire Etienne, Conservateur général du patrimoine, chef du service Inventaire et patrimoine ( région Haute-Normandie)
Trois interventions de 20 mn :

Didier Frydman, Professeur agrégé d’histoire, IUFM de Créteil.
Didier Detalminil, Directeur du Centre Régional de Documentation Pédagogique de l’Académie de Rouen.
Gracia Dorel-Ferré, Chargée de cours à l’Université de Reims et de Paris 1.

11h15-11h30 : Pause

11h30-12h30 :
Axe 2 : L’enseignement supérieur en lien avec les métiers du patrimoine
Modérateur : Claire Etienne

A/Les universités et instituts du patrimoine : Masters universitaires « Patrimoine », Institut national d’Histoire de l’Art, Institut national du Patrimoine…

Christian Trezin, Inspecteur général des Patrimoines ( Ministère de la Culture et de la Communication).
Odette Louiset, Professeur à l’Université Mont-Saint-Aignan, ancienne directrice du Master « Patrimoine ».

B/Les écoles d’architecture

Jean-Paul Midant, Professeur à l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Paris Belleville, directeur du D.S.A. « Architecture et patrimoine ».

12h30-13h : Débat

13h-14h30 : Cocktail sur place

14h30-15h30 :
Axe 3 : L’implication des collectivités locales dans la médiation du patrimoine à destination du grand public et des scolaires (table ronde).
Modérateur : Loïc Vadelorge, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Paris XIII

Alain Le Vern, Président de la Région Haute-Normandie.
Karine Gloanec-Maurin, Présidente de la commission Culture de l’Association des régions de France, vice-présidente de la Région Centre.
Djoudé Merabet, maire d’Elbeuf sur Seine (Ville d’Art et d’Histoire, fabrique des savoirs).
Arlette Auduc, Chef du service Patrimoines et Inventaire de la Région Ile-de-France.
Dominique Georges, Responsable du service éducatif, Conservation départementale du Patrimoine, Département de l’Eure

15h30-16h : Débat

16h-17h :
Synthèse et conclusion de la journée : Bilan, enjeux et perspectives de l’enseignement du patrimoine

Loïc Vadelorge, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Paris XIII

 

Inscription jusqu’au 22 octobre 2011 auprès de Catherine Coppalle Coordonnateur culturel au service Inventaire et patrimoine, Région Haute-Normandie.

Contact : catherine.coppalle@cr-haute-normandie.fr

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