Les chercheurs de la Galerie Colbert ouvrent leurs portes. Ce lieu historique, qui conserve depuis sa restauration la mémoire du XIXe siècle et ses fameux « passages », héberge depuis 2001 l’INHA, la plupart des établissements d’enseignement supérieur et de recherche d’Île-de-France en histoire de l’art, ainsi que l’Institut national du patrimoine. Si la Galerie Colbert représente le cœur de la recherche, de la formation et de la coopération internationale pour l’histoire de l’art, l’archéologie et le patrimoine, elle œuvre aussi pour une large diffusion des savoirs.
Les portes ouvertes du 12 mars 2011, adressées au grand public, réuniront un ensemble de chercheurs des différentes institutions, qui partageront leurs savoir-faire au cours de cette journée. Elle montrera la manière dont les historiens de l’art, de la littérature, des arts du spectacle, de la photographie et du cinéma, mais aussi les restaurateurs et conservateurs du patrimoine, s’interrogent devant une œuvre. Elle fera connaître leurs outils d’analyse, leurs méthodes d’examen et d’interprétation. Les conférences, les tables rondes et les projections seront autant de lieux et de moments privilégiés pour venir en débattre.
Un tableau a été choisi pour fédérer les réflexions et nourrir les débats, un tableau riche en échos avec l’histoire la plus établie mais aussi la plus proche de nous : le Radeau de la Méduse de Théodore Géricault.
Tableau-événement exposé au Salon de 1819, le Radeau est exceptionnel à tous égards : par sa monumentalisation d’un fait divers, son inscription des anonymes dans les codes de la peinture d’histoire, sa manière inédite de venir au contact avec l’espace du spectateur. Montrant un épisode du naufrage de la frégate de la marine royale au large du Cap Blanc en 1817, ce morceau de bravoure s’était mêlé intempestivement de la polémique entourant le procès de son capitaine, lequel avait tourné, dans la presse libérale, au procès de la Monarchie. Intentionnellement ou non, Géricault avait donc produit une image (voire un document) qui entrait en résonance avec l’actualité, un reportage avant la lettre produisant une série de tensions entre l’événement et sa figuration, entre le fait et son imaginaire, entre la représentation du pouvoir et les pouvoirs de la représentation. C’est dire si le tableau fut capable de nourrir d’autres contextes que celui de sa création, d’autres médiums que la peinture.
Ainsi, les contributions des chercheurs et la nature des conférences, des tables rondes, des projections et des lectures animant cette journée, couvriront à la fois le champ historiographique du tableau dans son époque, les enjeux complexes de son élaboration, sa réception jusqu’à sa conservation mais aussi le champ plus contemporain de son actualité pour les arts vivants, photographiques et cinématographiques, que ce soit par voie de citations, de réappropriations ou de déplacements. Un foisonnement de méthodes et une liberté d’associations savantes qui font traverser, de l’Antiquité à l’art contemporain, une multitude d’œuvres artistiques et littéraires qui font écho au tableau de Géricault et à la thématique du désastre.
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