Appel à contribution, colloque “Queering the Archive – Queering the Exhibition”
13-14 mars, Tours-Bourges
Ce colloque s’inscrit dans le cadre du projet de recherche « Queering the Exhibition – Queering the Archive », porté par l’École nationale supérieure d’art de Bourges et l’École supérieure d’art et de design de TALM-Tours, en collaboration avec le laboratoire InTRu (EA 6301 – Université de Tours). Il bénéficie du soutien du Ministère de la Culture.
Date limite pour le dépôt des propositions : 26 janvier 2025
En France, l’année 2023 a marqué un tournant dans les politiques de monstration – parfois d’acquisition – de grandes institutions culturelles. La multiplication des expositions (« Habibi, les révolutions de l’amour » à l’Institut du monde arabe, « Exposé.es » au Palais de Tokyo, « Over the Rainbow » au Centre Pompidou, « Au temps du sida » au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg) a montré leur intérêt grandissant pour les œuvres et les thématiques liées aux identités non hétéronormées. Sans aucun doute, ce mouvement se développe tardivement en regard de beaucoup de pays voisins. En ce sens, il est d’autant plus significatif en matière de représentation, pour des identités et des problématiques qui ont été bien trop longtemps rendues invisibles. Au-delà de cette temporalité particulière au paysage français, ce sont aujourd’hui les effets et les manières de faire, en jeu dans cette incorporation institutionnelle, qui nous semblent devoir être scrutés avec attention.
Dès 2020, les oganisateur/rices du colloque « Arts, cultures et activismes LGBTI et queer[1] » constataient que la constitution et la conservation de mémoires, d’héritages culturels et militants, étaient devenues des enjeux centraux des luttes portées par les associations LGBTQI[2]. A ce titre, la fondation en 2017 du Collectif Archives LGBTQI+ autour de la revendication d’un centre communautaire des archives, était exemplaire. Depuis, le développement d’un réseau tel que Big Tata, rassemblant bibliothèques et centres d’archives, montre la vitalité de ce mouvement. En proposant des expériences d’autogestion collaboratives, affectives et subjectives, qui prennent leur distance avec l’expertise des lieux autorisés de production des savoirs, cet activisme revêt une charge contre-institutionnelle qui ouvre la voie à de nouvelles pratiques. Comme le formulaient les organisateur/rices de l’université d’été de la Bibliothèque Kandinsky, nous sommes invité/es à repenser les gestes, « à provoquer les usages, les mésusages, les savoirs situés, les impensées, et les nouvelles manières de faire[3] » qui accompagnent les collections en lien avec les personnes et les cultures LGBTQI+. En regard de ce mouvement, on peut s’interroger sur la capacité des institutions à prendre en charge des sujets qu’elles ont contribué à (faire) taire, sans transformation de ce qu’elles sont et de leurs pratiques.
Si la collecte et le rassemblement de documents, d’objets, témoignant des identités non hétéronormées est une étape primordiale pour lutter contre l’effacement et l’absence de transmission, peuvent-elles avoir lieu sans mettre en cause les démarches qui leur sont habituellement constitutives ? Tel que les élèves de l’Institut national du patrimoine le rappelaient dans leur appel à contribution pour la journée « Trouble dans le patrimoine ? », « les expressions culturelles minoritaires – comme celles des communautés LGBTQIA+ – s’envisagent comme des modalités de résistance à la norme, et s’expriment en dehors des institutions officielles[4] ». Dès lors, il s’avère nécessaire de réfléchir à des pratiques en mesure d’accueillir sans pour autant catégoriser et définir à l’excès, figer et institutionnaliser, des gestes et des manières d’agir autrement et souvent dissidentes. Sam Bourcier invoque par exemple, « la compétence communautaire, qui permet d’indexer avec les bons mots-clés les archives LGBTQI[5] ». On pourrait également se référer aux artistes qui s’approprient l’archive pour produire de nouveaux récits, mettant à mal les rapports d’autorité qui s’inscrivent dans l’usage du document et l’écriture de l’histoire, pointant « les omissions, les absences et ce qui a été délibérément occulté ou détruit[6] ». Au total, c’est bien l’ensemble des étapes, de la collecte jusqu’à la médiation et l’exposition des objets, qui appelle à être repensé à nouveaux frais.
Le colloque que nous organisons entend participer à ce chantier en portant l’attention sur des pratiques alternatives liées aux collections, aux mémoires et héritages minoritaires. Il s’agit d’envisager les espaces de contestation des normes dominantes en matière de patrimonialisation, d’exposition et de récits qu’elles contribuent à imposer. Prenant en compte les diversités de genre et de sexualité, ainsi que leurs croisements avec les autres registres de discrimination, le champ de pensée queer participe pleinement de cette contestation. Nous invitons donc les contributeur/rices du colloque à explorer ce que pourrait signifier la possibilité d’un « agir queer », d’une « ouverture à ce qui dévie[7] » pour cet ensemble de pratiques qui accompagnent fonds d’archives et collections. A la suite de Jennifer Tybuczy, nous voulons « appeler à, décrire et mettre en œuvre une pratique de la mise en exposition queer[8] ». Pour ce faire, nous encourageons les propositions de contribution s’inscrivant dans tous les domaines des sciences humaines et des pratiques archivistiques, curatoriales et artistiques. Nous souhaitons ainsi favoriser une approche pluridisciplinaire et diachronique des thématiques abordées.
Plusieurs axes nous semblent importants à aborder lors de ce colloque :
– Collections alternatives, minoritaires et queer :
Quels exemples contre-institutionnels peuvent nourrir nos réflexions ? Quelles formes trouve-t-on développées par les artistes ? Quelles pratiques se déploient parmi ces exemples alternatifs ?
– Collecte, indexation et classement :
Comment repenser le cycle de vie de l’archive en dehors des cadres normatifs présents ? Quelle place pour le sensible face aux impératifs de conservation ? Comment résoudre les tensions entre historicité de l’archive et nécessité de la garder vivante et active ? Quelles sont les limites de ce qu’on peut documenter, tracer, classer ?
– Récits et histoires dissidentes ou manquantes :
La diversité des identités peut-elle continuer de défier la norme quand elle intègre des collections et récits au sein d’institutions ? Comment y négocier entre visibilité et récupération ? Quelle solution trouver quand les documents manquent ? Par exemple, est-on en mesure de faire émerger les récits des personnes assignées aux milieux défavorisés et/ou racisés ? Peut-on introduire ces données dans une relecture des collections institutionnelles ? Quelles formes d’interventions sont proposées par les artistes face à ces différentes questions ?
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Conditions de soumission :
Les propositions (titre et résumé de 3000 signes maximum), accompagnées d’une brève présentation des recherches de la ou les personnes (avec coordonnées et civilité, institution ou organisme de rattachement s’il y a lieu), doivent être envoyées à :
frederic.herbin@ensa-bourges.fr, andreas-maria.fohr@ensa-bourges.fr, fred.morin@talm.fr, sandra.delacourt@talm.fr et benoit.buquet@univ-tours.fr.
Les réponses seront données au début du mois de février. Les frais de déplacement pourront être pris en charge par les structures organisatrices afin de favoriser la participation de toute personne n’ayant pas d’attache institutionnelle.
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École nationale supérieure d’art de Bourges : http://www.ensa-bourges.fr
École supérieure d’art et de design de TALM-Tours : https://esad-talm.fr
InTRu – Université François-Rabelais de Tours : http://www.intru.univ-tours.fr
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Organisation :
Benoît Buquet (Université de Tours – InTRu)
Sandra Delacourt (École supérieure d’art et de design de TALM-Tours – HiCSA)
Frédéric Herbin (École Nationale Supérieure d’Art de Bourges – InTRu)
Andreas Maria Fohr (École Nationale Supérieure d’Art de Bourges)
Fred Morin (École supérieure d’art et de design de TALM-Tours)
Étudiant/e/s de l’École supérieure d’art et de design TALM-Tours :
Aughust Brigot, Perrine Abgrall, Frana Walter, Anouk Goubert de Cauville, Agathe Montigny, Anaé Jamati, Charlotte Hagnéré, Lou Raven, Bléo Maurel-Paurd
Étudiant/e/s de l’École nationale supérieure d’art de Bourges :
Lucie Dailly, Rivkao Ferrando y Puig, Nassim Mahious, Théoa Ott, Esther Rivet-Viale
Lieux :
École supérieure d’art et de design TALM-Tours
École Nationale Supérieure d’art de Bourges
Dates : 13-14 mars 2025
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