La prochaine séance du séminaire FRONTIERES DU PATRIMOINE : CIRCULATION DES SAVOIRS, DES OBJETS ET OEUVRES D’ART, soutenu par le CIERA et organisé au CRIA EHESS (UMR 8131 CNRS), dirigé par Nabila Oulebsir (CRIA-EHESS/ Université de Poitiers), Dominique Poulot (Université Paris I), Astrid Swenson (Brunel University London) et Laurier Turgeon (Université Laval, Québec), se tiendra vendredi 18 janvier 2013, de 14h à 17h, EHESS, Salle des Artistes (96 boulevard Raspail 75006, Paris).
Cette séance propose de faire le point, autour des deux interventions d’Astrid Swenson et d’Isabelle Vinson, sur le nouveau champ d’étude en développement autour des Heritage Studies, en insistant sur les enjeux de leur émergence, l’internationalisation de la notion de patrimoine, les approches méthodologiques et théoriques qu’elles suggèrent et les paradoxes qu’elles soulèvent.
Astrid SWENSON (Brunel University London)
Heritage Studies – Une nouvelle discipline ?
Pour commencer notre réflexion sur les frontières du patrimoine cette année, ma communication invite à discuter les approches méthodologiques et théoriques. Ces dernières années ont vu (surtout dans le monde anglophone) divers signes indiquant la formation d’une nouvelle discipline des Heritage Studies. La formation de cette discipline s’est fait à travers la publications de manifestes, de manuels et de journaux scientifiques, la création de nouvelles programmes de master, la fondation d’une organisation internationale et la convocation d’un premier congrès international pour les Critical Heritage Studies. Malgré ces développements institutionnels, ils restent d’importantes questions méthodologiques. Au cœur du débat se trouve la relation entre approches savantes versus pratiques administratives, entre enjeux disciplinaire versus méthodologies interdisciplinaires, ainsi que le rôle respectif des acteurs occidentaux et non-occidentaux.
Les Heritage Studies proposent de surmonter les frontières traditionnelles du patrimoine, ces développements sont intéressants pour le thème de ce séminaire. En plaçant les approches récentes dans un contexte historique et transnational, ma communication intervient dans le débat sur les mérites et la méthodologie de cette nouvelle discipline. Ma première partie inscrit la création récente d’une plateforme internationale et interdisciplinaire dans la longue durée, retraçant le développement de différentes « Internationales du patrimoine » depuis le 19e siècle, montrant les facteurs animant leur création et les étendues géographiques. Ma seconde partie examine l’objet étudié par ces internationales. La demande de voir le patrimoine comme un concept liant le personnel et le collectif, la nature et la culture, le matériel et l’immatériel n’est pas nouveau. Il semble important de comprendre dans quelle circonstances une approche générale a été préférée et quand la spécialisation pour l’étude et la conservation est favorisée. La dernière partie examine la tension entre approches disciplinaire et interdisciplinaire et suggère comment une perspective historique peut contribuer à une réflexion plus riche.
Astrid Swenson co-convenes the seminar Frontières du patrimoine (CRIA-EHESS, Paris) since Nov 2010. She is Lecturer in European History at Brunel University London and coordinator of the Brunel Heritage Research Network. After studying History, Art History and Romance Languages at the University of Mainz and Dijon, she graduated from the University of Cambridge (United Kingdom) with a Ph.D on “Conceptualising Heritage History in Nineteenth-and Early Twentieth Century France, Germany and England” and was a research fellow of the Cambridge Victorian Studies Group and Darwin College, Cambridge. Her work focuses on the role of cultural exchange in the creation of the concept of heritage since the late eighteenth century. Her boosk on The Rise of Heritage. Preserving the Past in France, Germany and England, 1789-1914 (Cambridge University Press) and (edited with Peter Mandler) From Plunder to Preservation. Britain and the Heritage of Empire, c. 1800-1940 (Oxford University Press, Proceedings of the British Academy) are forthcoming in 2013.
Isabelle VINSON (UNESCO),
L’internationalisation du patrimoine : vecteur de constitution des Heritage Studies ?
On ne peut, aujourd’hui, séparer l’étude de la notion de patrimoine et de ses évolutions des opérations conduites sur le plan international pour la préservation et la promotion des biens culturels. L’internationalisation du patrimoine par le biais des conventions internationales établies par l’UNESCO, l’agence des Nations Unies spécialisée dans la culture, a été un des vecteurs puissants de la constitution du champ des Heritage Studies. Le plus récent exemple est la littérature académique produite depuis l’adoption de la convention de 2003 sur le patrimoine immatériel (Smith L., 2009).
Si l’on entame une réflexion de nature historiographique sur la place du «patrimoine international » dans les ouvrages et les courants d’idée qui, au cours des dernières décennies, ont permis de faire émerger le champ nouveau des « Heritage Studies », deux « écoles » paraissent s’opposer. Une « école » française, aux travaux relativement anciens mais fondateurs, qui s’est attachée à cerner l’évolution de la notion de patrimoine à partir du renouvellement des catégories (Chastel A., 1994) ; Une « école » anglo-saxonne, aux travaux plus récents, qui a abordé la question de l’internationalisation du patrimoine par le biais des agents institutionnels (Kirshenblatt-Gimblett B., 1998).
Dans un premier temps, on présentera une synthèse critique de ces deux courants historiographiques, français et anglo-saxon, et des interprétations qui en émanent sur le caractère spécifique du patrimoine international. Dans un deuxième temps, on esquissera les contours d’une réflexion sur un possible dépassement de ces interprétations par l’analyse critique de l’œuvre de David Lowenthal sur l’Histoire et le Patrimoine (Lowenthal D., 1998).
Isabelle Vinson est fonctionnaire international à l’Unesco. Elle est rédactrice en Chef de la revue MUSEUM International. Ancienne élève de l’Ecole du Patrimoine (archéologie), elle a en parallèle à ses fonctions institutionnelle entamé des travaux de recherche en histoire sur les processus de patrimonialisation au plan international. Sa thèse porte sur l’Histoire intellectuelle et politique du patrimoine international.
Informations complémentaires : http://patrimoine.hypotheses.org
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