Appel à communication : « Autour d’Albert Dubout. La représentation de la France des années 1920 aux années 1950 »

Le colloque intitulé « Autour d’Albert Dubout : la représentation de la France des années 1920 aux années 1950 » aura lieu à Poitiers les 8 et 9 octobre 2014. Il a été envisagé dans une opitique pluridisciplinaire visant à réunir historiens de la caricature et du dessin de presse, spécialistes d’histoire politique, littéraire, d’histoire des représentations et des médias. Son objectif est de faire le point sur l’activité d’un artiste international dont la production fut prolifique, de l’entre-deux-guerres aux années 1950, dans des domaines aussi variés que la caricature, le dessin de presse, l’illustration, l’affiche, le cinéma ou le dessin animé. Il s’agira notamment d’apprécier la vision qu’Albert Dubout a su donner de la France de son temps et l’influence qui a pu être la sienne sur les dessinateurs du XXe siècle. Trois axes principaux ont ainsi été dégagés : la caricature comme support de la réalité, la France et son image fantasmée, l’oeuvre de Dubout comme forme d’expression populaire.

La publication de l’oeuvre intégrale d’Albert Dubout a récemment mis en évidence l’importance majeure du caricaturiste. De nombreuses expositions lui ont été consacrées, tant à l’étranger qu’en France, en particulier à la Bibliothèque nationale de France et à Saint-Just-le-Martel dans le cadre du Festival international de la caricature et du dessin de presse et d’humour. Né à Marseille en 1905 (et décédé en 1976), Albert Dubout fut d’abord un artiste du Midi, comme en atteste le musée qui lui est consacré à Palavas-les-Flots. Monté très tôt à Paris, ce dessinateur à l’activité prolifique peut cependant être considéré comme l’un des artistes les plus emblématiques de la France de l’entre-deux guerres et des décennies 1940 et 1950. Observateur timide, mais aussi perspicace et caustique, Dubout a laissé une oeuvre d’une grande richesse, qui concerne non seulement la caricature et le dessin de presse, mais aussi l’illustration d’ouvrages, la publicité, l’affiche de cinéma et le décor de théâtre. Il réalisa également deux dessins animés.

Par la diversité des thèmes abordés et des points de vue, son œuvre qui privilégie autant, sinon plus, la caricature de moeurs que la caricature politique, présente un intérêt manifeste pour les historiens, historiens de l’art et historiens des représentations. Ce colloque portera précisément sur une période féconde dans la production de l’artiste qui fit paraître ses premiers dessins en 1923, dans un contexte particulièrement riche en événements heureux ou dramatiques.

Axes thématiques

Pour aborder ce sujet dans une perspective pluridisciplinaire, trois axes principaux ont été retenus :

  • La caricature comme support de la réalité ?

C’est Albert Dubout analyste de son temps et de la société française qui retiendra tout d’abord notre attention. Le caricaturiste s’est en effet préoccupé des grandes questions internationales. À travers ses dessins, il s’interroge ainsi sur l’exposition coloniale de Vincennes en 1931 ou sur l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir en Allemagne en 1933. L’évocation récurrente des campagnes électorales et des séances parlementaires témoigne également de son intérêt pour la vie politique nationale et montre sa sensibilité au fonctionnement de la démocratie. Il se fait ainsi chroniqueur du Front populaire et de la société des loisirs dans les années 1930. Mais il s’intéresse également aux inégalités et injustices sociales, opposant fréquemment dans ses dessins la riche bourgeoisie et l’aristocratie décadente à l’humanité souffrante.

Il conviendra donc d’analyser, à travers son œuvre, la représentation graphique de l’histoire politique et sociale de la France et du monde contemporain. Le regard ambivalent qu’il porte, avec d’autres caricaturistes, sur le pouvoir, a contribué à fixer, derrière le rire, un certain nombre de stéréotypes sur les trois républiques sous lesquelles il a exercé son activité. Durant la Seconde Guerre mondiale, il s’intéresse par ailleurs à la vie quotidienne de la population française, croquant tant les souffrances liées aux conditions de l’occupation que les manifestations de liesse exprimées au moment de la Libération et de la victoire (« Le jour V », La Bataille, 15 juin 1945).

  • La France et son image fantasmée : entre modernité et archaïsmes

Par l’évocation de nombreux thèmes, comme les transports (train, automobile, aviation), le sport, le Tour de France, le naturisme, Albert Dubout a cherché à cerner les contours d’une France moderne. Ses nombreuses références aux médias : à la TSF notamment, au cinéma, ou à la bande dessinée, s’inscrivent dans cette perspective. Son travail d’artiste lui-même est empreint de cette modernité. Il assimile ainsi, dans les années 1920, les valeurs diffusées par la publicité autour de la mode Art déco. Il intègre par ailleurs, dans certains de ses dessins, un cadrage et un point de vue en surplomb, hérité du cinéma.

Mais à travers son œuvre, on peut également distinguer la représentation d’une France plus « éternelle ». S’est ainsi imposé le cliché de la convivialité bon enfant autour de la partie de cartes illustrant l’affiche du film Marius de Pagnol (1950). De la mondaine des Années folles à la grosse dame, la représentation de la femme, tout comme celle de la famille, semble également répondre aux stéréotypes d’une France « franchouillarde ». Ces situations types, déformées par un certain sens du tragique très théâtral, sont par ailleurs révélatrices de la bêtise et de la comédie humaine. Elles matérialisent des fantasmes en s’appuyant sur les mythes collectifs qu’elles alimentent à leur tour. Elles trouvent ainsi un écho immédiat auprès de l’opinion. L’image devient dès lors un outil d’interprétation dont il conviendra de décoder le message. En quoi le dessin de Dubout constitue-t-il le reflet d’un imaginaire social ? Un signe d’engagement ? Voire une arme politique ?

  • L’œuvre de Dubout, une forme d’expression populaire

20070402_460xhIl s’agira, dans un dernier temps, d’appréhender l’œuvre de Dubout comme une forme d’expression éminemment populaire. Concernant la représentation de la société française et de ses moeurs, le dessinateur s’inscrit en effet dans un héritage, celui des feuilles humoristiques du début du XXe siècle, comme Le Rire. Adepte, à l’occasion, de la parodie, il a puisé ses sources dans certaines références du XIXe siècle. À cet égard, une étude de la représentation de la foule serait sans doute très riche de sens. Au-delà de sa modernité, il conviendra donc de mesurer les influences de l’artiste sur son temps. Autrement dit, c’est par l’analyse de thèmes précis traités par d’autres contemporains, mais aussi ses prédécesseurs et successeurs, qu’il sera possible de déterminer l’originalité d’Albert Dubout dans la représentation qu’il propose d’une société et d’une époque. Pour ce faire, il sera toutefois nécessaire de mettre en lumière certains aspects de son parcours : sa formation, son rapport à la presse et aux milieux artistiques, sa place et son rôle parmi les caricaturistes de son époque. L’appel à quelques témoins sera par ailleurs l’occasion de s’interroger sur sa postérité.

Soumission des propositions

Les propositions de communication (une page maximum accompagnée d’une présentation succincte de l’auteur) sont à adresser à

  • Solange Vernois (solange.vernois@univ-poitiers.fr),
  • François Dubasque (francois.dubasque@univ-poitiers.fr)
  • et Fabien Archambault (fabien.archambault@unilim.fr)

avant le 23 février 2014

Colloque organisé par les universités de Poitiers et Limoges (CRIHAM, EA 4270). Avec le soutien du Centre international de la caricature et du dessin de presse de Saint-Just-le-Martel, Poitiers 8-9 octobre 2014

Organisateurs

Fabien Archambault (université de Limoges), François Dubasque (université de Poitiers), Didier Dubout, Solange Vernois (université de Poitiers).

Comité scientifique

Anne-Claude Ambroise-Rendu, Laurent Bihl, Frédéric Chauvaud, Alain Deligne, Christian Delporte, Hélène Duccini, Annie Duprat, Jean-Claude Gardes, Jérôme Grévy, Véronique Meyer, Christian Moncelet, Bertrand Tillier

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