À l’instar des autres disciplines affiliées au champ des sciences humaines et sociales, l’histoire de l’art, n’est pas exempte d’idées reçues car elle n’est pas imperméable à la société dont elle fait partie. Elle possède par ailleurs ses propres prismes idéologiques qui, parfois, constituent un frein à l’exploration de certains sujets. Bien que le rôle du chercheur soit précisément de savoir se situer par rapport aux phénomènes qu’il étudie, à la juste distance qui lui permet de l’analyser, il ne peut être objectif. Son rôle est précisément de ne jamais prendre pour acquis ce que les idées et analyses que ses prédécesseurs lui ont transmis ni ce que ses contemporains en disent, et savoir remettre en question ce qu’il croit savoir de son sujet.
Le discours de certaines institutions muséales et culturelles, des critiques, mais aussi des ouvrages ou travaux de recherche de référence au sein de l’histoire de l’art, entérinent certaines idées qui, parce qu’elles ne sont pas argumentées, ne sont que des opinions. Or, elles nuisent à l’étude des courants, des artistes comme du milieu de l’art et créent des récits tronqués, qui aboutissent à une histoire de l’art aux pages manquantes.
Afin de repenser ces récits et de proposer des analyses novatrices, beaucoup de doctorants s’attachent aujourd’hui à concevoir leurs objets d’étude en adoptant une posture interdisciplinaire, dans le but de s’approprier de nouveaux angles d’approche et d’élargir les perspectives de leur domaine de recherche. Parmi les travaux actuels portant sur l’histoire de l’art des XXe et XXIe siècles, certains tendent à apporter de nouveaux éléments de réponse, à construire de nouvelles formes de récits, en interrogeant d’autres domaines des sciences humaines et sociales tels que l’économie, le droit, la sociologie, l’histoire et les sciences politiques.
Cette interdisciplinarité, prônée par les différentes instances de la recherche universitaire, s’avère pourtant fort complexe à mettre en pratique du fait du degré de maitrise du sujet et de connaissance que cela exige, de l’absence d’outils méthodologiques et en particulier le manque d’offres de formation pour les doctorants. L’interdisciplinarité est donc une ambition souvent périlleuse : une audace jugée trop grande peut être sanctionnée par ces mêmes instances qui incite pourtant à cette démarche.
Ces différents problèmes s’illustrent particulièrement dans l’histoire de l’art du XXe et XXIe siècles. Parce que le XXe siècle a été traversé par de grands courants idéologiques, que l’art y a été engagé politiquement, par le biais des artistes, des critiques ou des institutions et parce que l’art du XXIe siècle, l’art d’aujourd’hui, n’échappe pas aux mutations sociétales ni aux questionnements qui en découlent. L’absence de recul temporel ne doit pas empêcher la tentative de compréhension de l’histoire de l’art contemporain, car dans le champ de la recherche, la prise de risque est une nécessité intellectuelle.
L’enjeu de cette journée d’études est donc d’inviter les doctorants et docteurs en histoire de l’art à faire une proposition articulant leur sujet avec des questionnements portant sur leur pratique de la recherche, incluant des problématiques relatives à l’interdisciplinarité et aux contraintes d’ordre idéologique, théorique ou encore méthodologique rencontrées dans leurs travaux.
Les travaux devront porter sur une période comprise entre les années trente et aujourd’hui. La sélection des interventions privilégiera une représentation équilibrée des différentes périodes de cette chronologie. Les travaux d’analyse comparée entre deux périodes sont également les bienvenus.
Cette journée d’étude se propose d’explorer (sans pour autant s’y limiter) les pistes suivantes :
L’histoire de l’art et ses prismes idéologiques
- Genèse et enjeux contemporains des récits identitaires en l’histoire de l’art
- Nationalités, origines et genres : les discours orientés de l’histoire de l’art sur les artistes et leur possible déconstruction
- Engagement et désengagement des institutions de l’art : l’empreinte idéologique des politiques culturelles dans le champ de l’histoire de l’art
- La compétition internationale au sein des institutions muséales : enjeux politiques, enjeux artistiques
L’art et l’argent : enjeux idéologiques d’hier et d’aujourd’hui
- Galeristes, collectionneurs et mécènes : « héros » d’hier, « infréquentables » d’aujourd’hui ?
- Art contemporain et spéculation : raccourcis, idéologie et réalité
Travaux de recherche et enjeux méthodologiques :
- Formations interdisciplinaires et enseignements méthodologiques en histoire de l’art : quelles perspectives aujourd’hui ?
- L’injonction du recul historique : les difficultés de traiter de l’art actuel en l’histoire de l’art
- Quels obstacles lorsque l’on choisit des sujets de recherche dans des domaines peu traités ? Histoire de la mode, du tatouage, du graffiti pour citer quelques exemples.
Les propositions de communication (une page maximum), peuvent être écrites en français ou en anglais et sont à adresser avant le 15 janvier 2017 à : absolument.contemporain@gmail.com
Une publication des interventions est envisagée.
Cette journée d’études est organisée par Anna Halter et Hélène Joyeux, doctorantes en histoire de l’art, sous la direction de Philippe Dagen (Paris 1/Laboratoire HiCSA). Anna Halter et Hélène Joyeux sont membres et co-fondatrices du groupe de recherche Absolument Contemporain et co-organisatrices du séminaire « Art en cours : acteurs et pratiques de l’art d’aujourd’hui » en 2015 – 2016.
Pour plus d’information :
https://www.facebook.com/absolumentcontemporain/
http://abscont.hypotheses.org/
Workshop to be held on the 8th of June 2017
INHA (Institut national d’histoire de l’art), Paris
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“Art lasts forever and artists are geniuses!” :
Generally accepted ideas in contemporary art history, from the 30s to the present day.
Like many other disciplines related to the area of humanities and social sciences that are constructed under the strong influence of society, art history is not free from generally accepted ideas. What is more, art history bears its own ideological prisms that could limit the exploration of certain subjects. Although a researcher needs to be able to analyse phenomena through studying at an adequate research distance, total objectivity is difficult to achieve. Therefore, the focus of researchers should be on not taking for granted the ideas and analyses shared by their predecessors, and calling into question the assumptions of their contemporaries about their field of study.
The discourse of museum and cultural institutions, art criticism, as well as art history reference books or research studies, endorse some ideas that – for lack of background and argumentation – could be considered as mere opinions. This lack of argumentation sometimes leads to preconceived ideas or truncated stories, resulting in a history of art with “missing pages.”
In order to rethink these stories and to offer innovative analysis, many PhD students care about developing their research studies using an interdisciplinary methodology, with the aim of cultivating and appropriating multi-faceted approaches for their work, as well as widening the scope of their research area. Amongst the current works about art history during the 20th and 21st centuries, mention may be made of those that tend to provide new elements for answers and to create new art narratives, by raising questions about other fields of humanities and social sciences such as economics, law, social studies, history, or political sciences.
However, the interdisciplinary approach advocated by the various authorities of academic research turns out to be quite complex to implement, because of the level of skills and knowledge it requires. The absence of necessary methodological tools and the lack of training courses for doctorate students are potentially excluding young researchers from some fields of art history research. Consequently, this interdisciplinary approach could turn into a tricky endeavor: being too bold a researcher might earn disapproval from the same academic authorities that encourage boldness.
Art history of the 20th and the 21st centuries in particular illustrate these different issues. The 20th century has seen many different ideological currents where art was used by artists, art critics, but also institutions as a vehicle for political engagement. Furthermore, since contemporary art is not immune to societal changes or to the questioning resulting therefrom, attempts at understanding it shouldn’t be hindered by the lack of time perspective. Therefore, when it comes to research, risk-taking should be an intellectual requirement.
During this one-day event, we will welcome PhD students and post-PhD researchers in art history whose work on the deconstruction of generally accepted ideas about art and art history contributes to writing the “missing pages” previously mentioned. Through their academic experience, they will highlight the complexity involved when trying to implement the advocated interdisciplinary approach to their research.
Communications should focus on the historical period from the 30s to the present day. For the purpose of a thorough presentation, our choices will favor a balanced representation of the different periods in the selected chronology. Comparative analysis between these two periods and works dealing with a non-Western art history are also most welcome.
We invite participants to submit communication proposals by articulating their subject through investigations relating to their research practice. This should include, among other things, the issue of interdisciplinary research and the ideological, academic or methodological limitations experienced during doctorate studies.
The workshop will seek to explore mainly, but not exclusively, the following points:
History of art and ideological prisms
- Origin and contemporary issues of identity narratives in art history
- Nationalities, origins and genders : biased discourse of art history on artists, and its possible deconstruction
- Engagement and/or disengagement of art institutions: the ideological influence of cultural policies on art history
- International competition within cultural institutions: political challenges, artistic issues
Art and money: ideological issues of today and yesterday
- Gallery owners, art collectors and art patrons: « heroes » of the past, today’s “untouchables”?
- Contemporary art and speculation: shortcuts, ideology and reality
Research studies and methodological issues
- Interdisciplinary courses and methodological teaching in art history: prospects for the future?
- The requirement for historical perspective: the challenges of dealing with contemporary art in art history
- Obstacles encountered when choosing research subjects on fields thinly explored: the history of fashion, of tattoo art or of graffiti to cite but a few examples.
Paper proposals in French or English of no more than one page should be submitted by the 15th of January 2017 to the following e-mail address: absolument.contemporain@gmail.com
Selected proposals will be announced in mid-February.
For any methodological or practical questions you may have, feel free to contact us.
Presentations may be considered for publication.
This workshop is organized by Anna Halter and Hélène Joyeux, PhD students in art history, under the direction of Philippe Dagen (Pantheon-Sorbonne University – Paris 1/Laboratoire HiCSA). Anna Halter and Hélène Joyeux are members and co-founders of the research group Absolument Contemporain and co-organizers of the seminar « Art en cours: acteurs et pratiques de l’art d’aujourd’hui » in 2015/2016.
Contact :
https://www.facebook.com/absolumentcontemporain/
http://abscont.hypotheses.org/
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