Académies, loges maçonniques, clubs et salons, société de lecture ou de débats, lycées et « musées » tel celui de Bordeaux créé en 1783, les lieux de sociabilité se multiplient aux XVIIe et XVIIIe siècles, alliant au plaisir de la convivialité et à l’art de la conversation une visée scientifique d’élaboration et de discussion des savoirs. Une abondante littérature normative n’a eu de cesse de définir les contours d’une sociabilité idéale. Plutôt qu’aux manuels de civilité ou de bienséance en eux-mêmes, on s’intéressera au fonctionnement effectif, quotidien, de ces espaces de sociabilité, aux mécanismes d’interaction qui confirment, ou parfois infirment, la validité de ces modèles. On s’intéressera à l’extension et aux limites de la sociabilité dans les sociétés hiérarchisées.
A côté des valeurs que partagent les groupes conviviaux, et des ambitions qu’ils affichent, on peut s’intéresser aux manquements, aux dérèglements, à la rupture de la convivialité. Dans quelle mesure les rituels de la convivialité assurent-ils de façon satisfaisante l’intégration de l’individu, soudent-ils la communauté et en assurent-ils le bon fonctionnement ? Comment articuler convivialité, sociabilité et savoirs ? Le manque de convivialité, ou au contraire ses excès, ne peuvent-ils menacer la cohésion du groupe ou en altérer le fonctionnement ? La normalisation du plaisir d’être ensemble encourage la transgression. Ces écarts peuvent être perçus sur le mode du dérèglement, ou prendre un tour ludique ou parodique interrogeant en retour les institutions les plus respectables. Les transgressions peuvent être source de nouveauté et de création, allant jusqu’à s’ériger à leur tour en norme dans des espaces de sociabilité bien particuliers tels les hell-fire clubs dans les Iles britanniques au XVIIIe siècle.
La dimension politique de la convivialité sera également prise en compte, telle qu’elle a pu s’exprimer à travers des clubs de sensibilité whig ou tory, ou des assocations radicales (Clubs révolutionnaires, club des Jacobins, la London Corresponding Society ou la Society for Constitutional Information). À une époque où n’existait aucun système de protection sociale, les sociétés d’entraide telles que les village clubs ou les friendly societies, ont joué un rôle important. La convivialité fait partie de la culture aristocratique (clubs, salons) comme de la culture populaire (folklore, musique, théâtre etc).
Enfin, on peut s’interroger sur les dimensions constitutives de la convivialité que sont l’accueil, l’hébergement, l’hospitalité. Roman, récits picaresques et récits de voyage fourmillent de servantes et d’aubergistes plus ou moins amènes. Au milieu des périls de la route, la voiture devient un lieu de sociabilité et de conversation pour les communautés de voyageurs réunis par l’amitié, le hasard, l’intérêt ou la nécessité. La confrontation à des modes étrangers ou inattendus de sociabilité, l’improvisation d’une convivialité en voyage, ou loin de chez soi, constituent autant de terrains d’enquête possibles.
Les approches historiques, civilisationnelles et littéraires sont toutes bienvenues. L’étude de cas sur un milieu de sociabilité précis est possible, tout comme la démarche comparative, qui peut dégager des spécificités nationales ou locales, des effets de genre ou l’influence du contexte religieux, politique, ou scientifique. On pourra s’interroger sur la dimension sociologique de la convivialité, qui parfois privilégie l’élitisme et l’entre-soi, calque les hiérarchies sociales, ou au contraire sert la mobilité et assure un certain brassage social, ce qui peut donner une valeur proprement politique, parfois démocratique, à la sociabilité.
Les approches littéraires peuvent traiter les manifestations littéraires de la convivialité (chansons, toasts…), et/ou la représentation de la sociabilité et de la convivialité dans la littérature et, plus largement, les arts : du picaresque à la conversation piece en passant par la comédie, l’opéra, l’essai périodique et bien d’autres genres, les mises en scènes artistiques et littéraires de la sociabilité et de la convivialité ne manquent pas.
Les propositions (15 lignes maximum) des jeunes chercheurs (doctorants ou tout récents docteurs) accompagnées d’un CV sont à envoyer pour le 1er décembre 2012 à chacun des trois organisateurs :
Rémy Duthille : remy.duthille@yahoo.fr
Jean Mondot : mondot.jean@wanadoo.fr
Cécile Révauger : cecile.revauger@wanadoo.fr
Les propositions seront examinées par un comité scientifique. Les communications seront publiées en ligne sous réserve de leur approbation par un comité éditorial.
Modalités pratiques :
Les frais d’hébergement ainsi que le repas du vendredi midi seront pris en charge (une nuit d’hôtel, du jeudi au vendredi, réservée par l’université de Bordeaux 3)
Les frais de transport seront dans la mesure du possible à la charge des communiquants (les doctorants peuvent les faire financer pour moitié par leur EA et pour moitié par leur Ecole Doctorale, les jeunes docteurs par leur EA). Dans les cas où cela ne serait pas possible, nous essaierons de les prendre en charge.
http://1718.fr/
Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine,
10 esplanade des Antilles
33607 Pessac
Journées co-organisées par la SEAA 17-18 et la SFEDS
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